24 avril 2013 Page 1
Synthèse
Equipements IRM : une exception française de plus en plus alarmante
« Le parc des appareils d’IRM devra être développé pour que la substitution au scanner
puisse être effective dans les indications spécifiques » (Rapport de l’ASN : la sûreté
nucléaire et la radioprotection en France en 2012).
« La limitation du nombre des installations IRM entraîne des délais de réalisation
d’examens et parfois des dérives dans la hiérarchie des approches : « on ne peut avoir
l’IRM nécessaire, en attendant, faisons un scanner » (Rapport de l’Académie de
Médecine du 8 avril 2013 sur les stratégies médicales).
« Les indications de l’imagerie en coupe ont progressé (IRM et scanner), c’est une des
tendances fortes qui apparaissent dans le Guide du Bon Usage des examens d’imagerie »
(Pr Jean-Noël Talbot Société Française de Médecine Nucléaire).
« L’accès pour tous à des soins de qualité est une priorité. C’est la qualité de la prise en
charge initiale qui fera que l’avenir de chaque patient pourra être modifié » (Discours du
Président de la République, François Hollande, sur la lutte contre le cancer, 4 décembre
2012).
« Vous avez raison d’insister sur l’imagerie, qu’elle soit dans le domaine du diagnostic,
du suivi des malades ou de la radiologie interventionnelle, l’imagerie a énormément
progressé. Le Plan Cancer II avait peu de mesures dédiées… Si ce n’est les délais d’accès
à l’IRM et le déploiement du nombre d’IRM dans le territoire. C’est effectivement un
enjeu majeur et nous devrons bien intégrer toutes les questions d’imagerie dans le Plan
Cancer III… peut-être qu’il y a cinq ans, nous ne nous rendions pas compte de l’atout que
pouvait représenter ces techniques pour le patient » (Déclaration d’Agnès Buzyn,
Présidente de l’INCA, le 20 février 2013 au Café Nile).
La concordance de ces déclarations ne fait manifestement pas « bouger les lignes ». Depuis
plus de 10 ans, malgré les alertes sans cesse répétées des professionnels de l’imagerie,
soutenus régulièrement par des agences nationales telles que l’Autorité de Sûreté Nucléaire
(ASN) qui veille à la radioprotection des patients en France, l’accès à l’IRM, examen non
ionisant, est toujours aussi difficile et inégal.
24 avril 2013 Page 2
En 2013, il faut attendre 30,5 jours en moyenne dans notre pays pour obtenir une IRM
lombaire à réaliser « en urgence » (cf. encadré ci-après). C’est le résultat de l’étude annuelle
menée depuis 10 ans par Cemka-Eval1 pour Imagerie Santé Avenir2.
Une méthodologie éprouvée identique depuis 2003
Un patient disposant d'une ordonnance pour une IRM lombaire à réaliser "en urgence" dans le
cadre d’une recherche d’extension d’un cancer prend un rendez-vous pour la réalisation de cet
examen. Les demandes de rendez-vous pour la réalisation des examens (fictifs) sont
formulées par téléphone en suivant strictement le guide d’entretien suivant rédigé à cet effet :
« La fille du patient explique que son père a été opéré d'un cancer du colon il y a 3 mois et
qu'il présente une douleur lombaire apparue il y a peu. Il a vu son médecin cancérologue il y a
quelques jours qui a beaucoup insisté pour qu'il réalise une IRM lombaire rapidement. Étant
venue se reposer quelques temps chez elle, son père doit bénéficier de cet examen durant ce
séjour. Elle cherche donc le lieu de réalisation le plus proche possible du lieu de ce séjour.
Cette enquête sur les délais est réalisée systématiquement depuis 2003 sur l’ensemble des
services ou cabinets de radiologie disposant d’une IRM.
Quand une structure disposait de plusieurs appareils, elle n’a été contactée qu’une seule fois.
Les rendez-vous obtenus ont été systématiquement annulés à la fin de l’entretien.
Rappelons que le délai d’accès aux examens recommandés pour l’orientation diagnostique et
thérapeutique des patients en cancérologie est un critère de qualité de l’offre de soins. Il figure
depuis plusieurs années dans le Plan Cancer.
Après une très légère baisse en 2012, les délais sont de nouveau à la hausse en 2013 et
s’expliquent notamment par un taux très faible de nouvelles installations : seulement 28
nouvelles installations en un an (+4,5 % soit deux fois moins qu’en 2011) alors que les
besoins ne cessent d’augmenter.
Comme on le voit dans le nouveau Guide du Bon Usage des Examens d’Imagerie récemment
publié par la Société Française de Radiologie et la Société Française de Médecine Nucléaire,
les indications de l’IRM progressent pourtant fortement en radiologie diagnostique comme en
radiologie thérapeutique. L’imagerie, dont l’IRM, est en effet au cœur du parcours de soins du
patient, du diagnostic à la mise en œuvre d’un traitement et à son suivi en passant par le bilan
d’extension des tumeurs.
A l’augmentation et au vieillissement de la population s’ajoutent la forte progression des
indications de l’IRM et le souhait répété des autorités compétentes de diminuer l’exposition
médicale aux rayons ionisants, dans un souci permanent de radioprotection.
30 jours, voire un peu plus, c’est le délai d’attente moyen en dessous duquel, depuis
plusieurs années, il semble impossible de descendre avec les politiques nationales mises
en œuvre.
1 Société de conseil en économie médicale
2 Association Loi 1901 créée en 1999, Imagerie Santé Avenir réunit des professionnels de l’imagerie médicale,
responsables d’une industrie de santé et acteurs de l’offre de soins. Ils nent au sein d’ISA, une réflexion
conjointe, tel un « observatoire » sur l’imagerie médicale française
24 avril 2013 Page 3
30 jours pourtant, c’est deux fois plus que les objectifs fixés par le Plan Cancer 2009-
2013 qui souhaitait pour 2010, un temps d’attente moyen de 15 jours et de 10 jours dans
les régions à risque oncologique élevé.
Installations d’IRM – un effort toujours limité et très insuffisant
50 % d’installations en moins en 2011 et 2012
1
+25 % +12 % +7 %
France métropolitaine, hors IRM
recherche, militaire et vétérinaire
+10 % +7 % +9 %
Régions 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013
Nombre
d’équipemen
ts IRM
installés
France
281 352 393 419 463 495 543 592 618 646
Evolution
(nombre
d’IRM)
+51 +71 +41 +26 +44 +32 +48 +49 +26 +28
+10 % +4,4%
2004 51
2005 71
2006 41
2007 26
2008 44
2009 32
2010 48
2011 49
2012 26
2013 28
0
10
20
30
40
50
60
70
80
2002 2004 2006 2008 2010 2012 2014
Plan Cancer 1
Plan Cancer 2
Evolution annuelle
du nombre d’IRM
installées
+4,5%
Au-delà du délai d’attente, le taux d’équipement en IRM se situe au niveau national à 10,1
appareils IRM par million d’habitants. L’objectif du Plan Cancer 2009-2013 était de 12 IRM
par million d’habitants dans les 10 régions ayant la mortalité par cancer la plus importante.
Taux d’équipement et délais d’attente : des inégalités régionales
toujours aussi criantes
Une France coupée en deux
Les variations vont en effet du simple au double.
Certaines gions se caractérisent à la fois par les délais d’attente les plus élevés et les taux
d’équipement les plus faibles par million d’habitants : les Pays de la Loire même s’ils ont
légèrement progressé, la Basse-Normandie, ont les taux d’équipement parmi les plus bas et les
délais d’attente parmi les plus élevés (45,4 jours et 49,7 jours), soit presque 50 jours !
A l’inverse, le Nord-Pas de Calais et la Champagne-Ardenne dont les taux d’équipement sont
nettement supérieurs à la moyenne nationale (13,6 et 12 IRM par million d’habitants) ont des
délais d’attente respectifs de 21,5 jours et de 26,6 jours, soit environ 2 fois moins.
24 avril 2013 Page 4
Le délai moyen pondéré par la taille de la population dans les 5 régions les moins bien
équipées est de 43,3 jours alors qu’il est de 23,8 jours dans les régions les mieux
équipées. Ces résultats illustrent clairement le lien existant entre les deux critères : délai
d’attente et taux d’équipement.
Analyse statistique de la relation entre le délai et le taux d’équipement
Le calcul des coefficients de corrélation (Coefficient de Pearson) nous indique qu’il existe
une liaison linéaire entre les deux variables quantitatives que sont le délai d’attente et le taux
d’équipements. Ainsi, l’augmentation du nombre d’équipements par million d’habitants
entraine la diminution du délai d’obtention d’un rendez-vous d’IRM (liaison linéaire
négative). L’analyse de ces coefficients indique que cette relation est statistiquement
significative en 2013, comme elle l’était en 2012 et 2011.
En 2013, ce coefficient est de -0,70 (p=0,002).
Relation entre le nombre d'IRM par million d'habitants et le délai moyen observé au niveau régional
24 avril 2013 Page 5
Délais moyens dattente (jours) pour les rendez -vous dIRM obtenus et estimés en 2013
Une fois de plus, on voit se dessiner une France clairement coupée en deux : l’une faite de
gions dynamiques (Ile de France, Nord-Pas de Calais, Champagne-Ardenne, Rhône-Alpes
et tout récemment Bretagne, Aquitaine), anticipant les besoins de santé de la population et une
France de gions attentistes laissant s’installer, voire s’aggraver, un sous-équipement
caractérisé et des délais d’attente inacceptables (Auvergne, Picardie, Alsace, Basse-
Normandie, Bourgogne).
1 / 10 100%