MESURES 833 - MARS 2011 - www.mesures.com 53
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olutions
à la FEM thermique et à l’inductance du
matériau utilisé.
Le coefficient de température (CT) qualifie la
variation de résistance en fonction de la tem-
pérature. Il s’exprime en ppm/K (parties par
million/Kelvin) et se détermine grâce à
l’équation : CT = [R(T) - R(T0)]/
[R(T0) × (TTO)]. Le plus souvent, on retient
une valeur de -20 °C ou de +25 °C comme
température de référence T0. En appliquant
l’équation au cuivre, on obtient un CT de
4 000 ppm/K, ce qui signifie qu’une variation
de température de 10 K engendre une dé-
rive de résistance de 4 %. On comprend
donc pourquoi il est impossible d’utiliser
un shunt à base de cuivre si l’on veut ef-
fectuer des mesures précises.
Reste à prévoir l’évacuation des calories.
La conductivité thermique d’un alliage à
faible résistivité est très inférieure à celle
d’autres métaux comme le cuivre ou
l’aluminium. De plus, la plupart des
shunts modernes utilisent de fines
feuilles de ces alliages, ce qui fait qu’il est
impossible d’utiliser l’alliage comme dis-
sipateur de chaleur. Pour évacuer les ca-
lories, la feuille d’alliage doit être liée à
un substrat présentant de bonnes qualités
de conduction thermique (cuivre ou alu-
minium, le plus souvent) grâce à une
couche d’adhésif spécial. Cette solution
procure un très bon transfert thermique
de l’alliage vers le substrat, puis vers le cir-
cuit imprimé via les joints de soudure. Ces
modèles de shunts disposent d’une très
faible résistance thermique interne Rth, de
l’ordre de 10 à 30 K/W. En conséquence, ils
peuvent être utilisés à pleine puissance
même à des températures très élevées car la
température maximale de l’alliage résistif
reste basse, ce qui améliore considérable-
ment la stabilité dans le temps et la variation
de valeur résistive.
L’effet dit de “force électromotrice ther-
mique” (FEM thermique)
se produit lorsque deux
matériaux conducteurs
différents sont mis en
contact. Il dépend de la
adaptés thermoélectriquement au “monde
du cuivre”, rendant ainsi ces effets totalement
négligeables. A titre d’exemple : avec ces al-
liages, un shunt de 0,3 MΩ traversé par un
courant de 300 A ne conserve qu’une tension
de moins d’1 µV (correspondant à courant
de 3 mA) une fois le courant coupé.
On notera également que ces alliages de pré-
cision présentent, de par l’homogénéité de
leur structure cristalline et grâce à un traite-
ment thermique spécial, une grande stabilité
dans le temps. Insensibles à la corrosion, ils
atteignent des valeurs de stabilité thermody-
namique de l’ordre du ppm par an, ce qui
est tout à fait suffisant pour une utilisation
embarquée à bord d’un véhicule.
Une faible inductance
Avec la croissance des courants issus de tech-
nologies à découpage, l’inductance du cap-
teur de courant devient un facteur prépon-
dérant pour la qualité du contrôle ou de la
mesure. Pour réduire au maximum l’induc-
tance parasite, on s’efforcera de choisir des
alliages résistifs diamagnétiques (un maté-
riau diamagnétique est un matériau qui est
repoussé par un champ magnétique au lieu
d’être attiré). Quoi qu’il en soit, le couple
shunt/pistes de mesure constitue une struc-
ture en antenne. Celle-ci capte les variations
électromagnétiques générées par les flux de
courant et autres champs magnétiques ex-
ternes, et les transforme en tension interfé-
rentielle induite. Il est donc très important
de minimiser autant que possible l’aire
température à la jonction de ces matériaux.
Il peut agir comme une source d’erreur non
négligeable dans des mesures de courant par
shunt à faible résistance, lorsque la mesure
doit se faire sur de très faibles tensions.
Choisir un substrat adapté
Le constantan, alliage résistif bien connu des
universitaires et composé à 55 % de cuivre et
à 45 % de nickel, est encore très souvent uti-
lisé pour réaliser des résistances bobinées ou
des shunts sur plan. Doté d’un bon coeffi-
cient thermique, il souffre néanmoins d’une
FEM thermique relative au cuivre extrême-
ment forte (environ 40 µV/K). Cela signifie
qu’un shunt composé de constantan et de
cuivre générera une tension parasite de
400 µV s’il est soumis à une dérive de tem-
pérature de seulement 10K, ce qui corres-
pond à une erreur de mesure de 10 % (dans
l’hypothèse de la mesure d’un courant de 4 A
avec un shunt de 1 MΩ). La situation est en-
core pire si l’on prend en compte l’effet
Peltier qui, sous l’influence d’un courant
continu, peut créer une différence de tempé-
rature de plus de 20 K (dans des cas extrêmes,
cela va jusqu’au dessoudage d’un des côtés
du shunt). On observe alors une charge de
courant apparente même avec un flux de
courant constant, causé par l’apparition
d’une différence de température et son effet
sur la FEM thermique. Si le courant est coupé,
on mesure encore une charge de courant qui
diminue à mesure que le shunt refroidit. A la
différence du constantan, les alliages résistifs
de précision comme le Manganin®,
l’Isaohm® ou le Zeranin® sont parfaitement
Une connexion à 4 fils revient à relier l’appareil de mesure directement sur l’alliage résistif du shunt.
Cette méthode diminue le coefficient de température (CT) du shunt, c’est-à-dire l’influence
de la température sur la résistivité du shunt. Dans le cas des shunts 2 fils, la courbe permet
de comprendre pourquoi la pratique (pourtant courante) d’indiquer uniquement le CT du matériau
résistif ne suffit pas et doit s’accompagner d’une phase de tests.
Variation de la résistance globale en fonction de la température
et de la technique de connexion (4 fils ou 2 fils)
délimitée par le shunt et ses
pistes de mesure sur le circuit
imprimé. La méthode de
conception idéale est celle où
les deux pistes qui relient le
shunt à l’amplificateur sont
parallèles et proches l’une de
l’autre (voire superposées
dans le cas de circuits multi-
couches). Avec une concep-
tion maladroite, l’effet d’an-
tenne est susceptible de
surpasser plusieurs fois l’in-
ductance initiale du shunt.
Avec un shunt à très faible va-
leur ohmique, il n’est plus
possible de négliger l’in-
fluence des pistes de conne-
xion du circuit imprimé sur la
valeur résistive globale du
composant. Une piste de cir-
cuit imprimé d’une dimension
de 4 mm × 0,2 mm × 35 µm
représente à elle seule une ré-
sistance de 10 MΩ. Une valeur
proche de la résistivité nominale du shunt,
ce qui implique que cette simple piste de
cuivre insérée dans le circuit de mesure suf-
firait à fausser la mesure de 100 %. Et même
si cette résistance supplémentaire peut être
éliminée par calibration, elle peut sévèrement
détériorer le coefficient de température glo-
bal du shunt. Dans l’idéal, la mesure de ten-
sion doit donc être effectuée via deux termi-
naisons additionnelles connectées
directement sur le matériau résistif. On parle
alors de connexion à 4 fils, par opposition à
une connexion classique à 2 fils.
Quoi qu’il en soit, la connexion directe des
alliages résistifs sur du cuivre se révèle sou-
vent difficile en raison des fortes disparités
dans les résistances de contact et donc du
mauvais “mouillage” (terme relatif à la sou-
dabilité) du matériau résistif. C’est pourquoi
les shunts les plus récents sont réalisés par
découpe de bandes cuivre-Manganin®-
cuivre soudées par faisceaux d’électrons. La
résistance de contact est ici proche de zéro
car les terminaisons sont obtenues en faisant
dépasser le cuivre brut, ce qui fait que la
résistance globale est très proche de la valeur
du shunt 4 fils. Pour relier son électronique
de mesure, l’utilisateur pourra alors utiliser
une des nombreuses techniques connues et
éprouvées de connexion cuivre sur cuivre.
Dr Ulrich Hetzler,
directeur R&D chez Isabellenhütte,
Philippe Devarieux,
responsable des ventes chez Technicome.com
et Frédéric Parisot
L’alliage résistif de précision Manganin®, composé à 86 % de cuivre, à 12 % de manganèse et à
2 % de nickel, a été mis au point en 1889 par la société Isabellenhütte. La faible résistivité
de cet alliage (43 μΩ par cm) a servi de base à la technologie de mesure de précision par
résistance depuis cette époque et jusqu’à aujourd’hui. Les autres alliages Isaohm® et Zeranin®
développés plus récemment ont parachevé la gamme avec des résistivités respectives
de 132 μΩ/cm et 29 μΩ/cm dans toutes les directions. Ces trois alliages répondent parfaitement
aux contraintes physiques rencontrées dans l’industrie et ont été utilisés avec succès depuis
de nombreuses années par les fabricants de résistances de précision.
Le graphique montre l’influence de la température sur la résistivité de l’alliage Manganin®. Rappelons que
le coefficient de température (CT) s’exprime en ppm/K (parties par million/Kelvin) et se définit comme suit :
CT = [R(T) – R(T0)] / [R(T0) x (TT0)]. La valeur de -20 °C ou +25 °C est la plus souvent retenue comme
température de référence T0. Si la fonction R = f (T) est courbe, comme ici dans le cas du Manganin®, il est
alors indispensable de spécifier aussi la température haute considérée pour la valeur de CT, par exemple
CT (20 - 60). Certains shunts à couche épaisse avec des CT de plusieurs centaines de ppm/K sont également
fréquemment utilisés. La courbe rouge montre qu’avec un CT de seulement 200 ppm/K, un écart
de température de seulement 50 K suffit pour quitter la limite des 1 %. Une mesure de courant précise est
impossible avec ce type de composant, et plus encore si l’on considère que pour nombre de composants
CMS, la résistance thermique est de l’ordre de 100 K/W. Ainsi, une puissance de 1 W augmentera
la température de 100 K, et donc changera la valeur résistive de 2 % ! Cette situation est encore bien plus
dégradée dans le cas où, par mesure d’économie, la résistance est réalisée par une piste de cuivre
directement sur le circuit imprimé. Le CT du cuivre étant de 4 000 ppm/K (ou 0,4 %/K), une variation
de température de 10 K produit déjà une dérive de résistance de 4 % !
Coefficients de température du cuivre et de l’alliage Manganin®
➜
L’utilisation de pistes de mesure droites
et parallèles (en noir sur le schéma) minimise
les tensions induites par les champs magnétiques
(croix bleues). La méthode de conception idéale
est celle où les deux pistes qui relient le shunt
à l’amplificateur sont les plus proches possibles
(voire superposées dans le cas de circuits
multicouches). Avec une conception maladroite
(lignes rouges), l’effet d’antenne est susceptible
de surpasser nettement la valeur d’inductance
initiale du shunt (valeur directement utile
à la mesure du courant).
Eviter l’effet d’antenne
4 fils 2 fils, 2% Cu
Température, en degré Celcius
Déviation, en %
1,00
0,75
0,50
0,25
0,00
- 0,50
- 0,25
- 0,75
- 1,00
- 40 - 20 0 20 40 60 80 100 120 140
Manganin®
200 ppm/k
Cu, 4 000 ppm/k
Température, en degré Celcius
Déviation, en %
1,00
0,75
0,50
0,25
0,00
- 0,50
- 0,25
- 0,75
- 1,00
- 40 - 20 0 20 40 60 80 100 120 140 160 180