
 Ştiinţe socio-umane  71 
demande aide à l’ange Gabriel qui, pendant un 
rêve, parle à Mohammed lui sollicitant 
d’épouser la petite fille d’Abou Bekr, Aïcha. 
Troublé par cette exigence de l’ange, 
Mohammed rend visite à son ami et lui raconte 
son rêve. Abou Bekr est effrayé par ce 
message, mais, en même temps, il se sent fier 
que sa fille ait été choisie comme épouse par le 
messager de Dieu. Dans 
Loin de Médine
, Assia 
Djebar souligne ce moment d’une grande 
importance, à savoir l’entrée d’Aïcha dans 
l’histoire de l’Islam : 
 
  Ainsi la petite rousse entre dans la 
chronique de La Mecque. Ses poupées dans la 
main, légère, plus légère encore de l’amour 
palpitant de son père, de sa mère. Elle, leur 
dernière, la plus belle, la plus vive. 
Et elle est née musulmane dans la maison de 
son père, devenue le seul havre pour Celui qui, 
privé soudain de l’oncle protecteur ainsi que de 
l’épouse maternelle également décédée, est 
davantage persécuté par les Mecquois, ses 
compatriotes.
1
 
 
À l’âge de six ans, Aïcha devient la fiancée 
du Prophète, mais l’acte du mariage va se 
consommer quand la petite fille atteint ses 
quatorze ans. Quand même, dès l’âge de huit 
ans, Aïcha, sur un ton d’autorité, parle avec ses 
poupées de son destin : « Quand mon mari, 
Muhammad, sera le roi, leur confie-t-elle à mi-
voix, mois aussi, je serai reine. La reine 
d’Arabie. »2 
Mohammed eut neuf épouses, mais Aïcha 
est restée sa préférée, sa bien-aimée pour 
l’éternité, car elle était très intelligente, 
extrêmement belle et, le plus important, la 
seule vierge au moment du mariage avec 
Mohammed.  
Consciente de ses « pouvoirs », Aïcha 
s’impose dès le début parmi toutes les autres 
épouses du Prophète. Réfléchissant à ce 
personnage djebarien qui se fonde sur une 
personne réelle, mais aussi sur des éléments 
imaginaires, Geneviève Chauvel la considère 
comme « femme jusqu’au bout des ongles, elle 
domine les autres par son intelligence, sa 
mémoire sans faille et son esprit de répartie, 
plus redoutable qu’une lame. »3 
1 Assia Djebar, 
Loin de Médine
, Éditions Albin Michel, Paris, 
1991, p. 266. 
2 Geneviève Chauvel, 
Aïcha, la bien-aimée du Prophète
, 
Éditions Télémaque, Paris, 2007, p. 65.  
3 
Idem
, p. 294. 
Quand même, Aïcha avait un point faible 
dans son caractère : elle était jalouse où, 
comme le déclare elle-même : « J’en suis 
malade de jalousie ».4 Son âge, à côté de sa 
jalousie, la font « mijoter quelques pièges ».5 
Voilà ce que Beïda Chikhi déclare à propos 
du caractère d’Aïcha : 
  
  Diffamation, jalousie, enjeux de pouvoir, 
tout se mêle autour de la figure de Aïcha. "La 
préférée", "la préservée", bénéficie de 
privilèges divins et occupe une place qui ne 
peut, par tradition, lui revenir … Aïcha détient 
de surcroît un certain sens caché, mystique, 
des dits prophétiques ; elle le transmet dans 
l’enveloppe secrète de ses récits.
6
 
 
Mais d’où vient cette jalousie et qu’est-ce 
que l’a déclenchée ? C’est la polygamie de 
Mohammed qui la dérange et qui devient pour 
Aïcha, « la blessure la plus vive ».7 La douleur 
provoquée par les autres mariages du Prophète 
est de plus en plus insupportable car, 
jusqu’alors, Aïcha était sur le premier plan dans 
la vie de ses proches, elle était la préférée de 
son époux, de ses parents. La « concurrence » 
ne lui plaît pas et lorsqu’elle dort toute seule 
dans son lit, elle se sent une « femme 
momentanément oubliée ». 8 
La jalousie d’Aïcha, mentionnée aussi par les 
chroniques anciennes, est évoquée par Assia 
Djebar dans des fragments qui focalisent sur la 
douleur ressentie par la jeune épouse et le 
combat donné dans son cœur entre ce qu’elle 
ressent pour le Prophète et les sentiments de 
son époux pour autres femmes. Assia Djebar 
remarque cette blessure qui « mord » à cause 
des autres mariages du Prophète et raconte : 
 
  En relatant plusieurs de ces unions, les 
chroniqueurs notent invariablement l’acrimonie 
jalouse de Aïcha : tel trait acerbe sur telle 
mariée, qu’elle décoche même devant le 
Messager. Parfois, la présence de Aïcha est 
signalée en voyeuse furtive : cachée ou non 
cachée, elle vient vérifier elle-même la beauté 
et les charmes de la nouvelle épouse. […] La 
jalousie mord, au cours des mariages qui 
4 
Idem
, p. 201. 
5 
Idem
, p. 231.  
6 Beïda Chikhi, 
Assia Djebar, histoires et fantaisies
, Paris, 
Éditions PUPS, 2007, p. 98. 
7 Assia Djebar, 
Loin de Médine
, Paris, Éditions Albin Michel, 
1991, p. 280.  
8 
Idem
, p. 279.