Sujet : Un metteur en scène a déclaré : « Pour moi, c`est le texte qui

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Sujet : Un metteur en scène a déclaré : « Pour moi, c’est le texte qui fonde le théâtre ». Vous
discuterez ce propos en vous servant de votre culture personnelle, des textes du corpus sur le
personnage caché et sur vos éventuelles recherches.
Introduction : 3 paragraphes, indiqués par un ALINEA.
Accroche : Phrase d’Artaud dans le Théâtre et son double : « le théâtre occidental n’est
qu’un théâtre de la parole ». Rappeler la spécificité du genre théâtral : un texte avant tout, mais aussi une
représentation, un dramaturge et un metteur en scène. Hiérarchie ? Qu’est-ce qui prime ?
Sujet : exposer la phrase du metteur en scène, intégralement et reformuler la pensée
globale dans vos propres termes : le théâtre est avant tout une affaire littéraire, une affaire de mots plus
qu’un spectacle, une représentation concrète, vivante et animée. Paradoxe : c’est un metteur en scène qui dit
cela.
Problématique : la formuler et l’expliquer : accorde-t-on, au théâtre, plus d’importance au
texte d’un auteur qu’à la mise en scène ? Le texte est-il considéré comme plus important que sa
représentation, que l’action jouée dans un décor, par des comédiens qui donnent vie à ce texte ? Annonce du
plan : I. Le théâtre, c’est d’abord un texte (thèse, justification du propos du metteur en scène). II. Mais la
mise en scène va en révéler d’autres aspects et a donc son importance aussi. III. L’intérêt de ce genre
littéraire ne réside-t-il pas finalement dans une alliance entre des mots écrits et leur jeu sur scène par des
comédiens ? Le théâtre implique un spectacle total dans lequel chaque élément a autant d’importance
(dépassement de l’opposition suggérée par le sujet)
I.
Le théâtre est une affaire de mots.
Annoncer l’idée de la partie dans une phrase, marquée par un GRAND alinéa et la développer de
sorte à introduire également les 3 sous-parties développées : importance accordée au texte d’une pièce de
théâtre. Quand on parle d’une œuvre théâtrale, c’est toujours au texte que l’on fait référence, à son auteur
plus qu’à son metteur en scène.
1.
Tout d’abord, le texte semble le plus important car c’est par celui-ci que se noue l’intrigue,
que sont présentés les personnages, que leur psychologie est développée, que la signification et le sens de
l’œuvre sont donnés.
Exemple : choisissez une pièce que vous connaissez bien, en entier, pour montrer comment le texte
permet de nouer l’intrigue et de présenter les personnages : Tartuffe : densité de la scène d’exposition qui
permet, par la critique de Mme Pernelle, de mettre en évidence les deux clans provoqués par l’arrivée de
Tartuffe. Retard dans l’arrivée de celui-ci qui autorise un suspens réjouissant et une connaissance du
personnage avant de le voir vraiment en acte. Ruy Blas : mise en évidence rapide du conflit ressenti par le
personnage principal : opposition entre son statut social et son désir amoureux. Citez le texte si vous avez
des phrases en mémoire, c’est toujours apprécié. Sinon, servez-vous du corpus, il est là pour ça.
2.
De plus, l’importance accordée au texte se justifie par le travail acharné du dramaturge : il
cisèle son texte, choisit ses mots, travaille ses brouillons pour exprimer ses idées au plus près de la vérité de
son personnage : travail du langage, des vers, effort pour rendre les rimes significatives et non pas seulement
esthétiques et musicales, travail du style et recours aux figures de rhétorique pour coller au mieux aux élans
et aux sentiments du personnage.
Exemple : là encore, citez quelques vers ou phrases des textes du corpus pour montrer leur musicalité,
leurs effets : Britannicus, dans le corpus, était parfait pour ça : structure des alexandrins, rimes, images
choisies, types de phrase employés pour souligner le sentiments des personnages.
3. De même, historiquement, on accordait plus d’importance au texte parce qu’il convenait de
raconter plus que de montrer : règle de la bienséance. La représentation consistait davantage en une
déclamation du texte pour le faire entendre qu’en une représentation des actes racontés ou vécus par les
personnages. Refus de jouer de manière réaliste, notamment les scènes de mort.
Exemple : vous connaissez sûrement le récit de Théramène à la fin de Phèdre, sinon, le voici : le
confident d’Hippolyte raconte à Thésée la mort de son fils dans une hypotypose fabuleuse : figure de style
qui consiste à mettre sous les yeux de son auditeur la scène racontée.
THÉRAMÈNE
À peine nous sortions des portes de Trézène,
Il était sur son char ; ses gardes affligés
Imitaient son silence, autour de lui rangés ;
Il suivait tout pensif le chemin de Mycènes ;
Sa main sur les chevaux laissait flotter les rênes ;
Ses superbes coursiers qu’on voyait autrefois
Pleins d’une ardeur si noble obéir à sa voix,
L’œil morne maintenant, et la tête baissée,
Semblaient se conformer à sa triste pensée.
Un effroyable cri, sorti du fond des flots,
Des airs en ce moment a troublé le repos ;
Et du sein de la terre une voix formidable
Répond en gémissant à ce cri redoutable.
Jusqu’au fond de nos cœurs notre sang s’est glacé ;
Des coursiers attentifs le crin s’est hérissé.
Cependant sur le dos de la plaine liquide,
S’élève à gros bouillons une montagne humide ;
L’onde approche, se brise, et vomit à nos yeux,
Parmi des flots d’écume, un monstre furieux.
Son front large est armé de cornes menaçantes ;
Tout son corps est couvert d’écailles jaunissantes,
Indomptable taureau, dragon impétueux,
Sa croupe se recourbe en replis tortueux ;
Ses longs mugissements font trembler le rivage.
Le ciel avec horreur voit ce monstre sauvage ;
La terre s’en émeut, l’air en est infecté ;
Le flot qui l’apporta recule épouvanté.
Tout fuit ; et sans s’armer d’un courage inutile,
Dans le temple voisin chacun cherche un asile.
Hippolyte lui seul, digne fils d’un héros,
Arrête ses coursiers, saisit ses javelots,
Pousse au monstre, et d’un dard lancé d’une main
sûre,
Il lui fait dans le flanc une large blessure.
De rage et de douleur le monstre bondissant
Vient aux pieds des chevaux tomber en mugissant,
Se roule, et leur présente une gueule enflammée
Qui les couvre de feu, de sang et de fumée.
La frayeur les emporte ; et, sourds à cette fois,
Ils ne connaissent plus ni le frein ni la voix ;
En efforts impuissants leur maître se consume ;
Ils rougissent le mors d’une sanglante écume.
On dit qu’on a vu même, en ce désordre affreux,
Un dieu qui d’aiguillons pressait leur flanc
poudreux.
À travers les rochers la peur les précipite ;
L’essieu crie et se rompt : l’intrépide Hippolyte
Voit voler en éclats tout son char fracassé ;
Dans les rênes lui-même il tombe embarrassé.
Excusez ma douleur : cette image cruelle
Sera pour moi de pleurs une source éternelle.
J’ai vu, seigneur, j’ai vu votre malheureux fils
Traîné par les chevaux que sa main a nourris.
Il veut les rappeler, et sa voix les effraie ;
Ils courent : tout son corps n’est bientôt qu’une
plaie.
De nos cris douloureux la plaine retentit.
Leur fougue impétueuse enfin se ralentit :
Ils s’arrêtent non loin de ces tombeaux antiques
Où des rois ses aïeux sont les froides reliques.
J’y cours en soupirant, et sa garde me suit :
De son généreux sang la trace nous conduit ;
Les rochers en sont teints ; les ronces dégouttantes
Portent de ses cheveux les dépouilles sanglantes.
J’arrive, je l’appelle ; et me tendant la main,
Il ouvre un œil mourant qu’il referme soudain :
« Le ciel, dit-il, m’arrache une innocente vie.
« Prends soin après ma mort de la triste Aricie.
« Cher ami, si mon père un jour désabusé
« Plaint le malheur d’un fils faussement accusé,
« Pour apaiser mon sang et mon ombre plaintive,
« Dis-lui qu’avec douceur il traite sa captive ;
« Qu’il lui rende... » À ce mot, ce héros expiré
N’a laissé dans mes bras qu’un corps défiguré :
Triste objet où des dieux triomphe la colère,
Et que méconnaîtrait l’œil même de son père.
4. Enfin, un texte théâtral n’est pas toujours destiné à la représentation : c’est l’écriture qui
importe plus que le spectacle de sa représentation. Certaines pièces n’ont jamais été représentées sur
scène, soit parce que l’auteur ne le souhaite pas soit parce que la pièce est trop compliquée à
représenter (trop de personnages, pièce trop longue)
Exemple : Musset écrit des pièces pour les publier dans une revue puis les publie dans un recueil
intitulé Un Spectacle dans un fauteuil : pièces destinées à la lecture seule. Cromwell d’Hugo n’a
jamais été mise en scène : longueur affolante du texte !
Conclusion/Transition : Le texte est primordial au théâtre. C’est la porte d’entrée dans une
pièce, c’est le résultat d’un travail d’écriture souvent intense. Si le texte donne à entendre le sens de la
pièce et permet de comprendre l’intrigue et les personnages qui la construisent, la mise en scène fait
partie intégrante du genre théâtral, c’est même ce qui lui confère sa si grande spécificité.
II.
Le théâtre est un spectacle. (on nuance ce qui a été dit en I, mais
ATTENTION, on ne le contredit JAMAIS : là, on ne va pas dire que le texte est superflu. On va
préciser que la mise en scène a AUSSI son importance et son rôle à jouer)
1. Premièrement, les jeux de scène imaginés par le dramaturge dans ses didascalies, créés
par le metteur en scène et interprétés par le comédien sont également importants. Certains types de
théâtre sont d’ailleurs essentiellement fondés sur eux et se passent du texte. Le théâtre est un art vivant
et visuel.
Exemple : La Commedia dell’arte : grande part d’improvisation et de mime, comique de geste dans la
comédie, recours à des effets spectaculaires dans certaines tragédies : deus ex machina (ancêtre des
effets spéciaux… !!). Plus précis : le jeu avec le fauteuil chez Beaumarchais, le jeu avec la table chez
Molière. Vous pouvez aussi parler de certains comédiens qui jouent entre les répliques : Christian
Hecq et citer la phrase de Barthes qui dit que « la théâtralité, c’est le théâtre moins le texte » : jeu,
mimiques, langage du corps. Phrase d’Artaud qui dit aussi que le langage des mots n’est pas
forcément le meilleur. Rebondissement avec Anouilh qui dit que de toutes façons, les spectateurs
n’entendent « qu’une phrase sur deux ». Citez des exemples de mises en scène dans lesquelles les
comédiens jouaient autre chose que le texte, ou en plus du texte.
2. Ensuite, la représentation a acquis une importance grandissante au fil des siècles :
d’abord les dramaturges prévoient de plus en plus la représentation de leur pièce et intègrent des
didascalies de plus en plus longues (jusqu’à devenir parfois plus longues que le texte lui-même).
Exemple : théâtre de l’absurde : Beckett et Ionesco.
Par ailleurs, si jusqu’au début du 19ème siècle les dramaturges mettaient sn scène leurs propres pièces,
au tournant du siècle, vers 1880, la fonction du metteur en scène apparaît. Il se distingue alors
complètement de l’auteur et devient le 2ème créateur de l’œuvre.
Exemple : travail de Mnouchkine par exemple, qui ajoute au texte sa culture, sa passion pour créer un
spectacle.
3. Enfin, dans certaines formes de théâtre, la mise en scène se passe du texte. La
représentation et le jeu prennent le pas sur les mots.
Exemple : le travail de la compagnie Royal Deluxe,
les mimes, les marionnettes, le théâtre indien ou balinais qui mêle danse et chant, le mélodrame aussi
au 19ème qui préférait le spectacle visuel au texte pour plaire à toute une catégorie de population qui
jusque là ne fréquentait pas les théâtres.
Transition : si selon les spectacles, les auteurs, le théâtre accorde plus d’importance au texte
ou à sa représentation, il ne faut pas oublier que c’est l’alliance des deux qui fait la spécificité du genre
théâtral et que l’un doit être pensé avec l’autre.
III. Le théâtre repose sur une alliance subtile entre texte et représentation. Le
théâtre est un spectacle total dans lequel chaque élément, textuel et littéraire ou visuel et concret a
autant d’importance. (si vous n’avez pas le temps pour une 3ème partie, essayez de dépasser
l’opposition en conclusion. Développez-là un peu plus du coup).
1.
Le texte et sa représentation sont deux moyens de conduire au même but : créer un
spectacle qui touche et marque le spectateur. C’est l’alliance du texte et de sa mise en scène qui va
créer pleinement le sens de l’œuvre.
Exemple : Tartuffe : dans la scène de la table, le jeu d’Elmire et sa toux sont aussi importants que les
phrases qu’elle dit à Orgon pour le faire sortir de sa léthargie. Les mots contredisent l’attitude qu’elle a
tenue jusque-là (ce qui surprend Tartuffe d’ailleurs) et provoque le rire, lequel est intensifié par son
jeu.
2.
La mise en scène permet également de souligner le sens du texte : jeu des lumières, du
décor, de la scénographie qui viennent consolider la compréhension des mots.
3.
La mise en scène peut aussi modifier le sens du texte. Une mise en scène est une
interprétation, un parti-pris : Vitez : « Une mise en scène n’est jamais neutre. Toujours, il s’agit d’un
choix. »
Exemple : Lagarce, dans sa mise en scène de La Cantatrice Chauve, interprète les jeux avec les mots
et leur avalanche comme une montée de jouissance. Les comédiens miment, tout en parlant et en
déballant leur litanie de mots, une relation charnelle et le sens de la pièce s’en trouve approfondi,
développé, augmenté. Certains metteurs en scène choisissent également de moderniser la pièce : décor,
costume : cette réactualisation donne un autre écho au texte.
Conclusion :
Reprise de ce qui a été développé et réponse à la problématique : le théâtre se fonde bien
avant tout sur le texte, primordial et premier. Mais sa spécificité réside dans le passage de cette affaire
de mots à une affaire de jeu. Par ailleurs, la mise en scène acquiert au fil des siècles une importance
grandissante. C’est donc l’alliance entre le texte support et les jeux qu’il provoque sur scène qui font
la grandeur et la richesse de ce genre littéraire. Il est donc difficile d’opposer les deux.
Ouverture : ouverture possible sur l’opéra qui par le chant, allie texte, parole et dimension
physique : le texte est entendu et le chant décuple les émotions, sensations.
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