Quelle place pour l`accompagnement de fin de vie et les soins

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R E N N E S
MODULE INTERPROFESSIONNEL DE SANTÉ PUBLIQUE
– 2005 –
Quelle place pour l’accompagnement de fin de vie
et les soins palliatifs à domicile ?
Groupe n° 25
−
M. BAGHUELOU Patrick
−
Mlle LEBERCHE Adeline
−
Mme GIAKOUMAKIS Amal
−
Mlle MACE Laetitia
−
Mme GRIMON-CONSTANT Brigitte
−
Mlle PIEKARZ Céline
−
Mlle HOANG Pascale
−
Mlle VESPERINI Françoise
−
Mme JACQUEMART-BERVEAU
−
Mlle VIDAL Céline
Hélène
−
M. JACOB Stéphane
Animatrice
Mme Isabelle DONNIO
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
Sommaire
1
INSCRITE DANS UNE LOGIQUE DE DEVELOPPEMENT DES SOINS
PALLIATIFS EN MILIEU HOSPITALIER, LA PRISE EN CHARGE DES
SOINS PALLIATIFS A DOMICILE S’ILLUSTRE AUTOUR D’EXPERIENCES
SIGNIFICATIVES MAIS HETEROGENES...................................................................3
1.1
La prise en charge en soins palliatifs à domicile, bien que d’initiative
récente, est favorisée par d’importantes évolutions législatives. ...................3
1.1.1 Les soins palliatifs à domicile s’inscrivent dans la continuité du développement
des soins palliatifs ....................................................................................................3
A) Nés au Royaume-Uni, les soins palliatifs replacent l’éthique au centre de la
prise en charge du patient. ......................................................................................... 3
B) La définition de la fin de vie et des soins palliatifs fait encore débat................ 4
1.1.2 Des évolutions législatives essentielles favorisent l’émergence d’une prise en
charge à domicile. ....................................................................................................6
A) La prise en compte de la fin de vie et des soins palliatifs s’est faite
récemment.................................................................................................................. 6
B) La démarche juridique tend de plus en plus à permettre le maintien des
patients en fin de vie à domicile. ................................................................................ 7
C) Le développement des retours à domicile est rendu possible grâce à la
réglementation des dispositifs de coordination … ..................................................... 7
D) … et des mesures en faveur des familles ......................................................... 8
1.2
Les expériences actuelles de prise en charge à domicile sont
hétérogènes............................................................................................................9
1.2.1 La prise en charge à domicile se structure autour de catégories limitées
d’intervenants ...........................................................................................................9
A) L’hospitalisation à domicile et les réseaux ........................................................ 9
B) Les équipes mobiles de soins palliatifs et les unités de soins palliatifs ......... 10
1.2.2 La mise en œuvre des réseaux s’illustre autour d’expériences très
hétérogènes ...........................................................................................................10
A) Domipallia est une expérience née de la volonté des médecins généralistes.
11
B) L’observation d’autres réseaux montrent qu’il n’y a pas de modèle unique. . 12
2
CONFRONTES A DES OBSTACLES CULTURELS, STRUCTURELS ET
INSTITUTIONNELS, L’ACCOMPAGNEMENT DE FIN DE VIE ET LES SOINS
PALLIATIFS A DOMICILE CHERCHENT LEUR PLACE...................................... 14
2.1
Les obstacles à dépasser pour dynamiser cette démarche sont encore
importants. ............................................................................................................14
2.1.1 Les inégalités territoriales et le défaut de lisibilité du financement forment les
principaux obstacles structurels et institutionnels. ................................................14
A) L’inégale répartition des structures sur le territoire est l’un des constats du
Bilan ARH 2003. ....................................................................................................... 14
B) Le financement de la prise en charge des soins palliatifs semble peu lisible
voire contradictoire ................................................................................................... 15
2.1.2 Les obstacles culturels semblent toutefois les plus difficiles à dépasser..............17
A) Il existe encore des résistances fortes des professionnels à la prise en charge
en soins palliatifs. ..................................................................................................... 17
B) Pour les familles et les bénévoles, formation et information sont au cœur des
problèmes rencontrés............................................................................................... 19
2.2
Le développement de la place, encore marginale, des soins palliatifs peut
s’articuler autour de quatre axes. ......................................................................19
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
2.2.1 La prise en charge à domicile du patient en soins palliatifs peut-elle occuper
une place autre que marginale ? ........................................................................... 19
A) La dynamique du retour à domicile fait-elle vraiment l’objet d’un consensus ?
20
B) Est-il possible de dépasser les obstacles structurels et certaines rigidités
administratives ? .......................................................................................................21
2.2.2 Des propositions peuvent s’articuler autour de quatre axes majeurs................... 21
A) Assurer une meilleure formation des praticiens pour faire progresser une
culture des soins palliatifs à domicile........................................................................21
B) Evaluer les modalités de prise en charge de la fin de vie et clarifier la
législation afin de structurer l’offre. ...........................................................................22
C) Favoriser une réflexion éthique et pratique autour de la fin de vie pour assurer
une meilleure information du public et des familles. ................................................24
D) Développer les mesures d’aide à l’accompagnement de fin de vie pour les
familles. .....................................................................................................................24
CONCLUSION .......................................................................................................................25
Bibliographie ........................................................................................................................27
Liste des annexes .................................................................................................................. I
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
Remerciements
L’ensemble du groupe tient à remercier Madame Isabelle DONNIO, notre animatrice, pour
sa disponibilité et ses éclairages.
Nous remercions également l’ensemble des professionnels qui ont accepté de nous
consacrer du temps et de partager leur expérience afin d’élaborer ce rapport :
-
Dr. LEMEUT, médecin généraliste, président de DOMIPALLIA
-
Mme BELLOIR, cadre de santé de l’Equipe Mobile de Soins Palliatifs
du CHRU de Rennes
-
M. ROBIN VINAT, psychologue de l’Equipe Mobile de Soins Palliatifs
du CHRU de Rennes
-
Dr. BESSON, HAD du pays de Rennes
-
Dr. PELLETIER, responsable de l’Unité de Soins Palliatifs, Clinique
Saint – Laurent
-
Dr. VIGOUROUX et Mme LAUNAY, Unité Mobile de Soins palliatifs,
Chantepie
-
Mme LEBRUN, Infirmière Générale, centre anti-cancéreux Eugène
Marquis
-
Mme LETOURNEUR, puéricultrice, CHRU Rennes
-
Dr. DUCHENE, médecin généraliste
-
Dr. LESCANNE, coordonnateur d’EHPAD
-
M. MARTIN, infirmier libéral
-
Mme VIEL, responsable de l’association ASPANORD, Service de Soins
Infirmiers à Domicile
-
Mme LEGALL, présidente de l’association JALMALV
-
Dr. DESFOSSES, Groupe Hospitalier des Diaconesses
-
Dr. GOMAS, complexe hospitalier Sainte-Périne Chardon-Lagache
Rossini
-
Dr. LASSAUNIERE, Hôpital Hôtel Dieu
-
Dr. N’GUYEN, DIM, Hôpital Ambroise Paré
-
Dr. VIALLARD, Unité Mobile de Soins Palliatifs, CH Vannes
-
Mme PRIGENT, responsable du FASQV, URCAM
-
M. PLEYBER, responsable des réseaux, URCAM
-
M. SCHWEYER, sociologue, enseignant de l’ENSP
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
Liste des sigles utilisés
AGEBREQS
Association des généralistes bretons pour la qualité des soins
APA
Allocation personnalisée d’autonomie
ARH
Agence Régionale d’Hospitalisation
AS
Aide soignant
CHU
Centre hospitalier universitaire
CNAM
Caisse nationale d’assurance maladie
DHOS
Direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins
EMSP
Equipe mobile de soins palliatifs
ETP
Equivalent temps plein
FAQSV
Fonds d’aide à la qualité des soins de ville
FNASS
Fonds national de l’action sanitaire et sociale
GHM
Groupe homogène de malades
GHS
Groupe homogène de séjours
HAD
Hospitalisation à domicile
IDE
Infirmier diplômé d’Etat
JALMALV
Jusqu’à la vie accompagner la mort
LFSS
Loi de financement de la sécurité sociale
OMS
Organisation mondiale de la santé
RESPECTE
Réseau de soins palliatifs de l’ensemble de la côte des légendes et des
territoires environnants
SAD
Soins à domicile
SFAP
Société française d’accompagnement et de soins palliatifs
SPES
Soins palliatifs Essonne sud
SROS
Schéma régional d’organisation sanitaire
SSIAD
Service de Soins Infirmiers à Domicile
UMSP
Unité mobile de soins palliatifs
URCAM
Union régionale des caisses d’assurance maladie
USP
Unité de soins palliatifs
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
METHODOLOGIE DE TRAVAIL
Notre groupe de travail, constitué de trois élèves directeurs d’hôpital, quatre élèves
directeurs d’établissements sanitaires et sociaux, deux élèves directeurs de soins et deux
élèves inspecteurs des affaires sanitaires et sociales, a fait le choix d’étudier « la place
de la prise en charge de l’accompagnement de fin de vie et des soins palliatifs à
domicile ». Dans un premier temps, notre référent, Madame Donnio, a orienté notre
réflexion et nous a communiqué une liste de personnes qu’il était utile pour nous de
rencontrer. Nous avons par la suite élargi cette liste en fonction de l’avancée de notre
réflexion et des questions qu’il nous paraissait utile d’éclaircir.
Nos travaux se sont organisés en plusieurs phases successives :
•
Recherche documentaire
La première étape a consisté à prendre connaissance du dossier MIP confectionné par
notre encadrant. Cette première approche du sujet a été complétée par une recherche
plus large (recherches en bibliothèque et recherche sur Internet) et la constitution d’un
dossier documentaire.
•
Mise au point du planning des rencontres
Une personne référente au sein du groupe a pris contact avec l’ensemble des personnes
à rencontrer pour un entretien (voir grille de rendez-vous en annexe). 21 rendez-vous ont
ainsi pu être fixés.
•
Mise au point du questionnaire d’entretiens
Un questionnaire type a été élaboré par le groupe. Celui-ci a, par la suite, été adapté
selon la qualité des personnes interrogées (personnel médical, bénévoles, cadres
administratifs…). Les questionnaires comportaient de nombreuses questions ouvertes de
manière à ne pas restreindre le champ de la discussion de façon trop importante.
•
Entretiens
Des groupes de deux à trois personnes (représentant des filières de formation différentes)
ont été constitués pour mener les entretiens d’une durée d’une à deux heures.
La restitution de ces entretiens a été faite oralement ou par rédaction de comptes -rendus
mis à la disposition de l’ensemble du groupe.
•
Elaboration du plan du rapport MIP
Sur la base des différentes lectures et des résultats d’entretiens obtenus, nous avons
construit, de façon consensuelle, la trame du rapport à élaborer.
•
Rédaction
Le travail de rédaction a été partagé. Plusieurs groupes ont été formés, chacun travaillant
sur une partie donnée du plan. Les différents documents ont été fusionnés et un
exemplaire a été remis à chacun pour relecture.
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
Introduction
En France aujourd’hui, on estime que 70 % des décès ont lieu à l’hôpital. En
région parisienne, le chiffre atteindrait même 90 %. En cinquante ans, la logique d’une
mort à la maison, près des siens, s’est effacée au bénéfice d’une prise en charge
hospitalière de ce moment de la vie.
Les raisons en sont multiples : meilleure prise en charge des pathologies grâce au
progrès médical, éclatement du modèle de la famille élargie, changements culturels
s’accompagnant d’une exacerbation de la performance et du déni de la mort. Tout
concourt à faire de l’hôpital le dernier lieu de vie du patient mourant. Pourtant, cette
logique ne va pas toujours dans le sens du souhait du patient. Elle est, en outre, coûteuse
pour le système de santé et favorise le maintien à l’hôpital de patients pour lesquels celuici ne répond plus à une exigence curative voire palliative « lourde ». L’allongement de la
durée de vie et le développement de la prise en charge de patients polypathologiques
âgés vont exercer une pression importante sur un système comptant un nombre de lits de
soins palliatifs limités. Aussi, l’objectif de la prise en charge des soins palliatifs à domicile
se trouve à la convergence de deux tendances fortes du système de santé français
aujourd’hui : l’affirmation des droits du patient et la nécessité de maîtriser les dépenses de
santé.
Toutefois, la poursuite de cet objectif n’est pas facilitée par l’effervescence autour
de la définition même des soins palliatifs. Il est facile de retenir la définition posée par la
loi du 9 juin 1999 visant à garantir le droit à l’accès aux soins palliatifs : ils sont alors « des
soins actifs et continus pratiqués par une équipe pluridisciplinaire en institution ou à
domicile. Ils visent à soulager la douleur, à apaiser la souffrance psychique, à
sauvegarder la dignité de la personne malade et à soutenir son entourage ». La loi
reconnaît l’accès aux soins palliatifs comme un droit. Cette définition s’inspire et complète
les définitions de la SFAP ou celle plus tardive de l’OMS ou des rapports Dormont (1993),
Neuwirth (1999), Hennezel (2004). Comme l’indique Jean-Marie GOMAS 1, l’important est
sans doute de rester simple. Mais la recherche de simplicité butte parfois sur l’émergence
de nouvelles notions. Ainsi, la notion de soins de support, portée par le plan « cancer »,
fait l’objet de vifs débats.
1
Médecin de l’USP du complexe hospitalier Sainte-Périne Chardon-Lagache Rossini (Paris 16
premier rédacteur en 1988 d’un manuel de soins palliatifs en langue française.
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
ème
)
La démarche palliative, bien que née dans les années 1960 au Royaume-Uni, est
encore un sujet sensible en France. Des obstacles culturels au sein du monde hospitalier
et hospitalo-universitaire en freinent le développement. Les résistances culturelles des
familles, leurs peurs, sont au moins aussi importantes dans le développement d’une
alternative à la mort à l’hôpital.
La prise en charge à domicile en soins palliatifs pose encore nombre de
questions : modalités de prise en charge, financement des soins et des dispositifs
médicaux, coordination des intervenants professionnels, soutien psychologique du patient
et de la famille, formation et soutien des professionnels, éventualité d’un retour en milieu
hospitalier en cas d’aggravation, choix des professionnels et qualité de leurs
interventions.
La logique de prise en charge pluridisciplinaire impose des actions de coordination
et suppose un travail en réseau. Mais la notion de réseau reste vague. La prise en charge
à domicile ne doit pas être une transposition de l’hôpital au domicile. Elle doit se
concevoir comme une alternative à inventer avec chaque nouveau patient. Si l’hôpital
reste un pôle de référence et de connaissances, il est légitime de s’interroger sur la place
qu’il doit tenir dans la structuration et l’animation de tels réseaux. La prise en charge de
patients en soins palliatifs à domicile oblige à des révolutions culturelles dans le champ
des pratiques libérales. Elle oblige à une concertation qui n’est pas de coutume dans
l’exercice libéral.
Aujourd’hui, la prise en charge à domicile en soins palliatifs émerge timidement
dans un contexte particulier de débats autour de cette notion et d’une volonté affirmée de
développement des soins palliatifs en milieu hospitalier. Confrontée à des freins
structurels, institutionnels et culturels, les soins palliatifs et l’accompagnement de fin de
vie à domicile sont-ils une solution possible ou même souhaitable pour l’avenir ?
- -
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
1 INSCRITE DANS UNE LOGIQUE DE DEVELOPPEMENT DES
SOINS PALLIATIFS EN MILIEU HOSPITALIER, LA PRISE EN
CHARGE DES SOINS PALLIATIFS A DOMICILE S’ILLUSTRE
AUTOUR
D’EXPERIENCES
SIGNIFICATIVES
MAIS
HETEROGENES.
1.1
La prise en charge en soins palliatifs à domicile, bien que
d’initiative
récente,
est
favorisée
par
d’importantes
évolutions
législatives.
1.1.1 Les soins palliatifs à domicile s’inscrivent dans la continuité du
développement des soins palliatifs
A) Nés au Royaume-Uni, les soins palliatifs replacent l’éthique au centre de la prise
en charge du patient.
Les historiens et les sociologues du XX
ème
siècle ont souligné le caractère occulte
de la mort dans nos sociétés modernes : refoulée, la mort est devenue institutionnelle
(c’est l’affaire de professionnels), discrète (disparition du deuil et autres formes de
démonstration), publique quoique écartée (on ne meurt plus au sein de sa famille, mais
dans des services spécialisés). Pourtant, on assiste à l’arrivée en force du discours sur la
manière de mourir. Le coup soudain porté aux triomphes incontestables de la médecine
des cinquante dernières années a joué un rôle révélateur.
Conscients d’avoir quitté l’illusoire courbe ascensionnelle du progrès contre la
maladie et la mort, chacun est comme ramené à l’évidence de sa finitude.
Les partisans de l’euthanasie et ceux des soins palliatifs ont en commun de vouloir
fonder une éthique à l’égard des conditions du mourir. Les soins palliatifs sont nés d’un
véritable débat philosophique dans lequel les associations favorables à l’euthanasie sont
pour beaucoup. En mars 1984, à la suite du congrès international des associations pour
le droit de mourir dans la dignité, l’analyse des limites des propositions du « parti
euthanasiste », expression de Robert Zittoun, a conduit à approfondir la relation aux
mourants.
Les soignants et les médecins en particulier se trouvent pris dans un véritable
conflit des devoirs : le devoir de sauver ou le devoir de soulager, sans parvenir toutefois à
dépasser ce conflit
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
La fondatrice de la pratique des soins palliatifs est Cécily Saunders. Dans les
années 1930, sa pratique infirmière lui a permis de constater que le caractère prévenant
de l’équipe et le contrôle efficace de la douleur améliore nettement la fin de vie. Devenue
médecin en 1957, au terme de 17 ans de démarches, elle fonde le St Christopher’s
Hospice, premier établissement de soins palliatifs. Le mouvement ainsi lancé gagne la
Grande Bretagne et le monde anglo-saxon. De nombreux médecins se sont formés làbas. Au Canada, Balfort Mount a ouvert en 1975 une unité installée au Victoria Hospital
de Montréal et reliée à la célèbre université Mac Gill Royal. Aux Etats-Unis, Elisabeth
Kübler-Ross, psychiatre d’origine suisse, introduit contre les pratiques en vigueur, un
enseignement sur la mort incluant des discussions avec des grands malades à l’hôpital de
Denver puis de Chicago. Elle considère qu’il faut qu’un médecin, pour prendre en charge
la fin de vie, commence par accepter la mort de son patient.
En France le Dr Maurice Abiven, constatant à quel point la structure hospitalière
accorde peu d’intérêt au mourant, installe en 1987 à l’hôpital international universitaire de
Paris une petite unité, animée par une équipe disponible et très compétente en matière de
lutte contre la douleur : c’est la première unité de soins palliatifs. Un élan est donné au
développement des unités et des équipes mobiles de soins palliatifs par le rapport
Laroque sur lequel s’appuie la circulaire du 26 août 1986 du ministre délégué à la santé
Michèle Barzach en signifiant l’engagement officiel des pouvoirs publics à l’égard des
soins palliatifs en France. La loi du 31 juillet 1991, portant réforme hospitalière, les
introduit enfin dans les missions de l’hôpital.
B) La définition de la fin de vie et des soins palliatifs fait encore débat.
Définir les soins palliatifs et l’accompagnement de fin de vie présente quelques
difficultés dans la mesure où les définitions diffèrent selon les époques et les acteurs.
Ainsi, pour celle que l’on pourrait qualifier de pionnière en la matière, Cecily Saunders, les
soins palliatifs reposent sur « le suivi et la prise en charge de patients atteints d’une
maladie active, progressive, dont le stade est très avancé et le pronostic très limité, et
dont le traitement vise au maintien de la qualité de vie ».
Maurice Abiven, quant à lui, évoque une discipline nouvelle qu’il appelle « les
soins palliatifs terminaux » : il s’agit de prendre en charge des malades atteints d’une
maladie inéluctablement mortelle, dans un délai en général bref (moins de trois mois en
moyenne), cette maladie ne pouvant plus comporter de thérapeutique active.
Pour l’Organisation Mondiale de la Santé en 2002, les soins palliatifs sont « une
approche qui favorise la qualité de vie des patients et des proches face aux problèmes
associés à une maladie mettant en jeu le pronostic vital, au moyen de la prévention et du
soulagement de toute souffrance, par le repérage, l’évaluation rigoureuse et le traitement
de la douleur et de tous les autres problèmes physiques, psychosociaux et spirituels ».
- -
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
Dans ces définitions, soins palliatifs et fin de vie sont fortement liés. Les soins palliatifs
apparaissent également comme une prise en charge globale du patient.
La définition donnée par la société française de soins palliatifs (SFAP) peut
également être évoquée : ce sont « des soins actifs, dans une approche globale de la
personne atteinte d’une maladie grave, évolutive ou terminale. L’objectif est de soulager
les douleurs physiques ainsi que les autres symptômes, prendre en compte la souffrance
psychologique, sociale et spirituelle… ».
Il faut attendre la loi du 9 juin 1999 visant à garantir le droit à l’accès aux soins
palliatifs pour avoir une définition légale des soins palliatifs : « des soins actifs et continus
pratiqués par une équipe interdisciplinaire, en institution ou à domicile. Ils visent à
soulager la douleur, à apaiser la souffrance psychique, à sauvegarder la dignité de la
personne malade et à soutenir son entourage ». Cette définition reprend l’idée de la prise
en charge globale et de l’interdisciplinarité qui y est afférente, mais aussi celle du
traitement de la douleur. Elle fait apparaître les différents modes de prise en charge :
l’hôpital, l’institution ou le domicile. Cependant, elle ne semble pas faire le lien entre soins
palliatifs et fin de vie, permettant ainsi une acception plus large de la notion de soins
palliatifs.
Ainsi, au cours de nos différents entretiens, nous avons pu constater que les
médecins travaillant dans des unités de soins palliatifs (USP), avaient une approche
beaucoup plus générale de leur activité.
Pour les personnes travaillant à l’USP de l’Hôtel-Dieu à Paris, les soins palliatifs
devraient être déconnectés de la fin de vie et constituer une médecine globale, centrée
sur le vécu de la maladie par le patient, ses souffrances autant physiques que
psychiques, et complémentaire de la médecine dite « lésionnelle » . Les soins palliatifs
viseraient alors les patients en fin de vie mais aussi toutes les personnes souffrant de
maladies chroniques, incurables et dont les médecins se sont désintéressés mais qui ne
sont pas nécessairement en fin de vie.
Pour les personnes travaillant à l’unité de soins palliatifs de l’hôpital des
Diaconnesses, soins palliatifs et de fin de vie doivent également être distingués. Les soins
palliatifs constituant un ensemble de soins infirmiers, médicaux, de soins corporels et
relationnels, dans lesquels peut s’intégrer l’accompagnement de fin de vie. Certains
médecins refusent de catégoriser les personnes en fin de vie, les mourants, qui seraient
« relégués » dans des unités spécialisées (comme les soins palliatifs) en attendant la fin.
Enfin, pour les personnes travaillant à l’hôpital gérontologique Sainte Périne,
l’accompagnement de fin de vie est une partie seulement des soins palliatifs. Les soins
palliatifs étant un terme générique qui regroupe l’ensemble des interventions médicales,
psychologiques et d’autre nature auprès du patient.
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
Pour ces différents médecins, les soins palliatifs expriment une nouvelle
conception de la médecine, une médecine davantage tournée vers le patient, la mort,
mais qui veillerait à comprendre, aider, soulager physiquement et psychiquement la
personne qui souffre, qu’elle soit ou non en fin de vie.
Différents contenus peuvent ainsi être donnés à la notion de soins palliatifs. La
confusion qui en découle est encore alimentée par l’apparition de la notion de soins de
support, visés par la circulaire de la Direction de l’Hospitalisation et de l’Organisation des
Soins, du 22 février 2005 et relative à l’organisation des soins en cancérologie. Les soins
de support constituent selon cette circulaire « l’ensemble des soins et soutiens
nécessaires aux personne malades tout au long de la maladie conjointement aux
traitements oncologiques, ou onco-hématologiques, spécifiques lorsqu’il y en a». Les
soins de support se définissent davantage comme une coordination entre les différents
professionnels pouvant intervenir auprès d’une personne malade comme par exemple, les
psychologues, les assistantes sociales ou les diététiciens. Outre qu’ils ne visent que les
personnes atteintes de cancer, ces soins de support sont dénoncés par les médecins
avec qui nous nous sommes entretenus en ce qu’ils intègrent les soins palliatifs en
occultant la notion de fin de vie donc la mort.
Ces différentes approches traduisent les évolutions du regard de la société sur la
fin de vie. Le respect de la volonté du malade apparaît ainsi comme une question de plus
en plus centrale, qui oriente les évolutions législatives françaises actuelles. De ce fait,
l’idée du retour à domicile est de plus en plus présente dans les textes relatifs à la fin de
vie et aux soins palliatifs.
1.1.2 Des évolutions législatives essentielles favorisent l’émergence d’une prise
en charge à domicile.
A) La prise en compte de la fin de vie et des soins palliatifs s’est faite récemment.
Depuis la circulaire Laroque de 1986, l'accompagnement est reconnu comme une
partie essentielle des soins palliatifs visant à réinscrire la fin de vie dans le cadre des
relations sociales habituelles. Le rapport Delbecque de 1994 souligne les principales
composantes de la philosophie de l'accompagnement : respect de la vie privée, prise en
compte du malade et de sa famille comme un ensemble qui a besoin d'une aide pour
s'adapter à une situation angoissante et déstabilisante. La prise de conscience de la
nécessité d'accompagner le mourant et ses proches s'est faite tardivement en France.
C’est en 1980, après un début infructueux en 1972-1973 que les soins palliatifs ont connu
un véritable essor dans les services de gérontologie avec la circulaire du 26 août 1986
relative à l'organisation des soins et à l'accompagnement des malades en phase
terminale. Michèle Barzach, alors ministre déléguée chargée de la santé, s’est saisie de
ces travaux en reconnaissant officiellement et en définissant les soins palliatifs et leur
- -
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
organisation à domicile ou en institution. C’est depuis 1993, que plusieurs initiatives
réglementaires sont assorties de recommandations sur l'organisation des soins palliatifs
et sur le contrôle de la douleur, ainsi que la formation et le soutien des soignants.
Toutefois ces expériences concernent essentiellement les prises en charge en
établissements.
B) La démarche juridique tend de plus en plus à permettre le maintien des patients en
fin de vie à domicile.
La loi du 9 juin 1999 garantit le droit à l'accès aux soins palliatifs et à un
accompagnement pour toute personne malade dont l'état le requiert. En la votant, les
parlementaires français se sont conformés à l'esprit du projet de recommandation du
Conseil de l'Europe, rendu public en mai 1999, et qui vise à assurer aux malades
incurables et aux mourants le droit aux soins palliatifs. Cette loi souligne la nécessité
d’une continuité de l'acte médical, passant du curatif au palliatif. Elle met en place le
congé d'accompagnement de fin de vie.
Dans cette même dynamique le premier programme soins palliatifs 1999-2001
dispose que « toute personne dont l’état le requiert doit avoir accès aux soins palliatifs et
à un accompagnement ». Le 2nd programme soins palliatifs (2001-2005) intègre, quant
à lui, le développement de la prise en charge à domicile parmi ses objectifs principaux.
Le plan Cancer de 2004, tout en préconisant le développement d’unités
fonctionnelles de soins de support en oncologie revient sur la question de la prise en
charge à domicile en soulignant les difficultés rencontrées dans la coordination des
généralistes libéraux.
La loi N° 2005-370 dite « Léonetti » du 22 avril 2005 sur le patient en fin de vie
s’appuie sur des travaux inscrits dans la continuité des lois sur les soins palliatifs (1999)
et sur les droits des malades (2002). Elle garantit la sécurité judiciaire des médecins, en
opposant sans cesse le « laisser mourir » au « faire mourir ». Dans ses dispositions,
l’euthanasie associée à la notion de suicide assisté reste interdite. Les soins palliatifs se
présentent ainsi comme une solution d’équilibre entre demande d’euthanasie et
acharnement thérapeutique.
L’orientation de la législation en faveur de la prise en compte du désir du patient
de retourner à son domicile pour y mourir n’aurait cependant pas pu se concrétiser sans
des évolutions parallèles dans l’organisation du travail des soignants.
C) Le développement des retours à domicile est rendu possible grâce à la
réglementation des dispositifs de coordination …
L’accompagnement de la fin de vie et les soins palliatifs à domicile sont actuellement
facilités par l’émergence de la démarche de soins en réseaux, qui permet la coordination
entre l’hôpital et les intervenants du secteur libéral, ainsi qu’entre les intervenants de
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
différents autres secteurs : sanitaire, social,… Différents types de réseaux se développent
alors sur la base du volontariat des acteurs, sans financements institutionnels.
Les Ordonnances Juppé de 1996 permettent une première reconnaissance
légale des réseaux. Toutefois, les expérimentations qui en découlent sont rares du fait de
la lourdeur des démarches administratives. Ce n’est finalement qu’au début des années
2000 que la démarche « réseau » trouve un réel essor. La loi de financement de la
sécurité sociale pour 2002 met en place une nouvelle procédure de décision conjointe
entre ARH et URCAM pour le financement de nouveaux réseaux. Les critères retenus
pour leur création et leur financement sont définis dans la loi du 4 mars 2002 relative
aux droits des malades et à la qualité du système de santé et ses décrets
d’application. Les réseaux ainsi constitués peuvent bénéficier de subventions de l’Etat à
travers la dotation régionale des réseaux (DRDR). Celle-ci constitue aujourd’hui un
important support pour le développement de la prise en charge de la fin de vie et des
soins palliatifs à domicile.
Il existe toutefois d’autres démarches de coordination ne relevant pas de la DRDR.
Elles peuvent alors faire l’objet d’un financement par le Fonds d’Amélioration de la
Qualité des Soins de Ville (FAQSV). Ce fonds permet de soutenir les initiatives en
matière de coordination des professionnels de santé, d’amélioration de la qualité du
système de santé (formation…) et d’information. Les projets financés sont sélectionnés
par l’URCAM (un personnel administratif et un médecin-conseil) en fonction d’objectifs
définis au niveau national et repris au niveau régional (exemple de structure financée sur
ce fonds : DOMIPALLIA 35).
Toutefois, ces dispositions seraient sans effet sans le développement en parallèle
d’une législation favorisant l’accompagnement par et dans la famille.
D) … et des mesures en faveur des familles
Un petit nombre de mesures en faveur des familles facilitent également la prise en charge
de la fin de vie à domicile.
L’Allocation Personnalisée d’Autonomie (APA) , mise en place en 2001, permet
le maintien à domicile de personnes âgées dépendantes. Elle représente donc l’ébauche
d’une solution pour la prise en charge des personnes âgées, pour le moment, largement
délaissées par l’approche soins palliatifs.
Dans le cadre du programme pluriannuel de développement des soins palliatifs
mis en oeuvre par l’Etat en 1999, la CNAMTS a mis en place au titre de la circulaire DAR
n°5-2000 du 22 mars 2000 un dispositif, financé sur le budget du fonds national de
l’action sanitaire et sociale (FNASS). Son objectif est de permettre le maintien à
domicile avec l’aide d’une équipe mobile de soins palliatifs ou d’un réseau spécialisé en
soins palliatifs.
- -
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
Sur la base de ces réglementations, différentes structures permettant
l’accompagnement de fin de vie et les soins palliatifs à domicile ont vu le jour.
1.2
Les expériences actuelles de prise en charge à domicile sont
hétérogènes
1.2.1 La prise en charge à domicile se structure autour de catégories limitées
d’intervenants
La continuité des soins doit être assurée entre tous les types de prise en charge
afin de permettre si nécessaire une ré-hospitalisation jugée indispensable. La continuité
du dialogue entre les différents intervenants à domicile doit passer par une transmission
interdisciplinaire.
A) L’hospitalisation à domicile et les réseaux
La mission principale de l’HAD est de permettre des soins palliatifs et
l’accompagnement des personnes et de leur entourage dans le respect de leur cadre de
vie. L’HAD concerne des malades atteints de pathologies graves, aigues ou chroniques,
évolutives et/ou instables, qui en l’absence d’un tel service seraient hospitalisés en
établissement de santé. Dans le cadre de la prise en charge palliative, l’HAD constitue un
moyen de retour ou de maintien à domicile d’une personne en fin de vie. Le maintien à
domicile n’est possible qu’avec l’accord du malade et de ses proches et suppose que la
structure ait la capacité d’assurer tous les aspects du soin et de l’accompagnement requis
par l’état du patient. Ainsi, l’HAD du pays de Rennes, qui fonctionne depuis janvier 2004,
dispose de 30 places, dont les 2/3 sont occupées par des patients relevant d’une prise en
charge en soins palliatifs. Il s’agit de répondre à une demande identifiée des
cancérologues de la région. En effet, les patients relevant de soins palliatifs « embolisent
des lits » en services de cancérologie, et cette spécialité apparaît « moins noble pour
certains spécialistes ». L’équipe se compose de sept IDE, quatre AS, des vacations de
psychologue, une assistante sociale, une comptable, un médecin coordonnateur. L’équipe
travaille en étroite collaboration avec le réseau d’infirmiers libéraux de l’agglomération
rennaise.
Ce type de structure s’inscrit le plus souvent dans un réseau qui permet
d’optimiser
le
fonctionnement
du
système
de
santé
en
développant
des
complémentarités. Le réseau a pour vocation une meilleure gestion des ressources
disponibles par le biais d’une coordination des soins efficace. Il faut noter que, souvent, le
réseau n’a pas pour mission d’effectuer des soins ni de prescrire, il accompagne la
démarche de soin dans une dynamique de partenariat avec les acteurs du domicile.
L’objectif principal est une prise en charge globale du patient, qui est placé au centre du
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
dispositif. Il vise à assurer une meilleure orientation du patient, à favoriser la coordination
et la continuité des soins et à promouvoir des soins de proximité de qualité. L’URCAM de
Bretagne finance 24 réseaux de santé dont 3 en soins palliatifs, ces derniers étant
caractérisés par une forte montée en charge. Néanmoins, ils semblent n’être « qu’une
phase intermédiaire vers un fonctionnement plus collectif du système de santé ». Les
réseaux sont également présentés comme un moyen efficace de réunir et de faire
discuter des acteurs qui ne se confrontaient pas auparavant.
B) Les équipes mobiles de soins palliatifs et les unités de soins palliatifs
L’équipe mobile de soins palliatifs est une équipe interdisciplinaire qui se
déplace au lit du malade et/ou auprès des soignants. Elle exerce une activité transversale
au sein de l’établissement. Elle a un rôle de conseil et de soutien auprès des équipes
soignantes, voire de formation, mais ne pratique pas d’actes de soins. Ainsi, l’équipe
mobile de soins palliatifs du CHU de Rennes peut être appelée par l’ensemble des
services de l’hôpital, essentiellement pour des conseils sur l’organisation d’un retour à
domicile. Cette équipe intervient également auprès des familles pour les rassurer : pour
assurer le lien avec des associations de bénévoles, pour les orienter vers les aides
financières de type FNAS ou congé d’accompagnement… Il s’agit également d’un
accompagnement psychologique durant la phase de deuil. L’équipe travaille sur
l’anticipation de l’aggravation de l’état du patient afin de lui permettre de rentrer à
domicile : dans ce cadre, elle travaille en coordination avec le médecin traitant, l’HAD,
Domipallia, l’unité mobile de soins palliatifs de Chantepie et les libéraux de terrain. De
même, dans le but d’anticiper les retours à l’hôpital, un travail est réalisé avec les équipes
du SAMU et des urgences.
Parallèlement aux EMSP, il existe des unités de soins palliatifs. Cette équipe
comprend les professionnels de santé exerçant à titre libéral ou les professionnels
salariés des centres de santé. Ce dispositif permet la continuité thérapeutique et le
soutien de l’entourage du malade en fin de vie en coordination avec les éventuelles
interventions des EMSP en dehors de l’hôpital.
Le fonctionnement de ces structures tel que définit dans les textes se retrouve
rarement dans les faits, ainsi que nous avons pu l’observer. En matière de réseaux
notamment, les expérimentations menées s’avèrent être hétérogènes.
1.2.2 La mise en œuvre des réseaux s’illustre autour d’expériences très
hétérogènes
Les réseaux observés sont hétérogènes. Chacun s’illustre par des modalités
particulières de participation à la démarche de soins palliatifs à domicile. Le parti a été
pris de prendre un réseau de référence et de l’utiliser comme point de comparaison avec
- -
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
d’autres réseaux existants. Parmi ces derniers, on compte bon nombre de réseaux d’Ile
de France et de réseaux basés sur des EMSP de la région Bourgogne Franche-Comté.
A) Domipallia est une expérience née de la volonté des médecins généralistes.
L’AGEBREQS (association des généralistes bretons pour la qualité des soins) est
à l’origine du projet Domipallia. Cette initiative lancée en 2003, s’appuie d’une part sur le
souci d’assurer une formation continue en soins palliatifs et une coordination des soins
palliatifs et gérontologiques auprès d’un public de soignants libéraux. D’autre part, elle
apporte une réponse aux besoins constatés en Ille–et-Villaine en 2002 2 :55% des
médecins généralistes avaient pris en charge au moins un patient en soins palliatifs soit
environ 1432 patients. Il s’agit aussi de réinvestir le lien ville-hôpital par la « base ».
Pour des raisons de simplicité juridique, Domipallia se constitue en association.
Autour du projet, se regroupent des personnalités déjà très investies dans le domaine de
l’intervention à domicile : deux médecins généralistes, une infirmière coordinatrice de
SSIAD, deux psychologues et une infirmière libérale. Originellement pensé pour couvrir
tout le département, Domipallia ne couvre que le secteur sanitaire 5 (à l’exception donc
de Saint-Malo et Dinard qui disposent d’une EMSP).
Le financement est assuré par une contribution du FAQSV à hauteur d’un budget
prévisionnel de 368 000 € pour la première année. Ce financement renouvelable deux fois
ne peut toutefois permettre de pérenniser cette « expérience ». Si le budget peut paraître
important les versements effectués ne le sont qu’au regard des actions véritablement
accomplies et selon le plan de financement préalablement agréé.
L’objectif est de constituer un réseau dit de « seconde ligne » articulé autour de
quatre axes : une fonction d’animation et de coordination des équipes soignantes, une
fonction d’aide à la décision et de conseil, une fonction d’aide psychologique tant aux
familles et aux patients qu’aux professionnels, une fonction d’interface entre l’équipe
soignante et les autres intervenants, une fonction d’organisation et de formation. Les
praticiens référents ou « relais » sont sélectionnés sur la base d’un acte de candidature
par un comité scientifique composé de représentants de l’association et de membres de
l’EMSP du CHU. L’équipe n’intervient jamais directement mais fournit aide et soutien.
Seule la psychologue intervient auprès des patients et des familles. Cette aide est fournie
en fonction des demandes des généralistes confrontés à la prise en charge d’un patient
relevant des soins palliatifs ou à l’occasion des réunions hebdomadaires au CHU
réunissant les chefs de services, l’EMSP et les autres intervenants à domicile dont
Domipallia. L’action s’organise aussi autour de réunions : des rencontres individuelles
2
Besoin estimé à travers l’étude de faisabilité retranscrite dans la thèse de Maud Palicot « Prise en
charge à domicile des patients en soins palliatifs par le médecin généraliste ».
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
permettant aux familles d’exprimer leur désarroi, leurs peurs et leurs difficultés ; de
réunions de formation destinées aux praticiens. La philosophie de ces dernières est
l’échange d’expériences. La dimension émotionnelle de la démarche palliative, sousévaluée par les promoteurs du projet, a d’ailleurs souvent transformé ces réunions de
formation entre professionnels en véritables groupes de paroles.
Ce projet s’inspire du modèle belge structuré autour de plateformes de
concertation régionale assurant la liaison avec deux échelons locaux, Domipallia offrant
d’occuper l’échelon de rang intermédiaire.
L’expérience Domipallia reste une expérience originale qui tente de répondre aux
besoins d’un secteur géographique particulier par des outils plus ou moins adaptés. Elle
se présente plus comme un prestataire de services que comme un « véritable réseau »
D’autres réseaux, dans d’autres régions confrontés à d’autres problématiques, présentent
une approche différente.
B) L’observation d’autres réseaux montrent qu’il n’y a pas de modèle unique.
Les réseaux observés dans d’autres régions présentent des différences par
rapport à Domipallia d’une part quant à la place plus ou moins importante de
l’établissement sanitaire local dans la participation au réseau, d’autre part quant au niveau
d’intervention.
Le premier constat est que la place de l’hôpital est souvent centrale . A titre
d’exemple, le réseau Soins palliatifs Essonne Sud (SPES), un des neufs réseaux d’Ile de
France, né de l’initiative du service de soins palliatifs de l’hôpital Georges Clemenceau de
Champcueil, s’inscrit dans la continuité du travail réalisé par l’EMSP. Fin décembre 2004,
le réseau avait accompagné 220 patients autour de 146 professionnels adhérant à la
charte du réseau. Les objectifs sont plus centrés autour de la relation ville-hôpital3 :
coordination et communication entre les différents acteurs du domicile, instauration d’une
véritable coordination ville-hôpital afin d’assurer la permanence et la continuité des soins.
Dans cette démarche, l’hôpital est à la fois pôle de référence, détenteur de la
connaissance et coordinateur. Le travail sur les protocoles de prise en charge se fait sur
la base de références hospitalières.
Le modèle développé en Franche-Comté relève de la même logique. Les EMSP sont
déclinées par secteurs géographiques et apportent aide et soutien aux professionnels
confrontés à des questions de prise en charge. Le réseau, bien que très présent sur le
territoire, n’offre qu’une prestation d’accompagnement des professionnels.
3
Evaluation réalisée par le centre de bioéthique de Necker faculté de médecine Paris V René
Descartes
- -
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
Le second constat est que les degrés d’inte rvention sont très différents. A
Paris, le réseau Quiétude offre une approche intéressante qui semble à la fois s’inspirer
du modèle SPES et du modèle Domipallia. Elle intervient essentiellement en seconde
ligne, mais compte parmi ses membres des hospitaliers, des praticiens libéraux, des
associations de soutien aux familles. Elle est plus investie que Domipallia dans la
coordination des interventions. Le réseau RESPECTE (réseau de soins palliatifs de
l’ensemble de la côte des légendes et des territoires environnants) qui intervient sur
quatre cantons du Finistère, offre une véritable prestation de coordination administrative
des intervenants autour d’une équipe «ressource » pluridisciplinaire (infirmière, deux
médecins, un psychologue, une coordinatrice administrative) ainsi que des prestations
concernant des matériels non pris en charge par la sécurité sociale.
Il existe en fait peu de réseau du type de «Domipallia ». Souvent les réseaux
encore récents se prêtent difficilement à l’évaluation. Cette dernière se heurte, aussi, à
une certaine réticence des promoteurs de réseaux à fournir des informations. Il faut noter
qu’à l’exception du réseau SPES, peu d’évaluations sérieuses sont actuellement
divulguées. Finalement, certains réseaux relèvent plus de la prestation de services aux
professionnels que du réseau qui se constitue originellement autour du patient pour sa
prise en charge et la coordination des soins4. Les modèles actuels de réseaux semblent
aujourd’hui souvent éloignés des canons définis par les textes.
L’observation de ces différentes expériences a, de plus, conduit à faire le constat
d’importantes difficultés à la prise en charge à domicile tant du côté institutionnel que du
côté des familles. Des propositions quant à l’amélioration des dispositifs s’avèrent
nécessaires.
4
La circulaire DHOS / SGS du 19 février 2002 distingue deux modalités d’intervention pour les
praticiens libéraux : soit l’adhésion à un réseau existant, soit la constitution dans un cadre
conventionnel d’un réseau autour du patient avec les praticiens qu’il a choisis.
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
2 CONFRONTES
STRUCTURELS ET
A
DES
OBSTACLES
CULTURELS,
INSTITUTIONNELS, L’ACCOMPAGNEMENT
DE FIN DE VIE ET LES SOINS PALLIATIFS A DOMICILE
CHERCHENT LEUR PLACE.
La prise en charge à domicile rencontre des freins structurels, institutionnels et
culturels qu’il est impératif de surmonter dans la perspective de son développement.
2.1
Les obstacles à dépasser pour dynamiser cette démarche sont
encore importants.
2.1.1 Les inégalité s territoriales et le défaut de lisibilité du financement forme nt
les principaux obstacles structurels et institutionnels.
Ils peuvent être regroupés selon deux axes : la problématique de la répartition des
structures et la problématique du financement.
A) L’inégale répartition des structures sur le territoire est l’un des constats du Bilan
ARH 2003.
Le premier obstacle au développement de la prise en charge de la fin de vie et des
soins palliatifs à domicile réside dans une insuffisance numérique des structures de prise
en charge doublée de fortes inégalités dans la répartition territoriale.
Concernant les équipes mobiles de soins palliatifs, l’objectif quantitatif d’une
EMSP pour 200 000 habitants a été atteint. On compte 308 EMSP au 31 décembre 2003.
Cependant, certains départements en restent dépourvus. A cette inégale répartition
territoriale s’ajoute une inégalité dans la taille des équipes (évaluation sur la base du
nombre de personne pour 1000 décès). Pour certaines EMSP, le manque de personnel
les fragilise fortement et ne leur permet pas de répondre à toutes leurs missions.
Le nombre de lits identifiés ne permet pas de répondre aux objectifs nationaux
fixés en 20045. Parmi les 833 lits identifiés, seulement 9% relèvent de l’HAD. Toutefois,
les lits d’HAD sont parfois utilisés pour les soins palliatifs sans être identifiés comme tels.
Ainsi, l’HAD du pays de Rennes réalise les deux tiers de ses interventions en soins
palliatifs sans lits identifiés soins palliatifs. La problématique de l’inégale répartition sur le
5
Données extraites du bilan national ARH 2003 réalisé par la DHOS, Dr Le Divenah et Mme
Fernandez (Annexe 3).
- -
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
territoire se retrouve pour ces lits identifiés. Dans beaucoup de régions, ils n’existent pas,
ou les moyens humains qui leur sont accordés sont insuffisants.
On retrouve cette inégalité de répartition également en ce qui concerne les
réseaux : 19 réseaux pour le Pays de la Loire et seulement un pour des régions telles
que l’Aquitaine, la Bourgogne ou encore la région PACA. En 2003, 49 départements sont
totalement dépourvus de réseaux en soins palliatifs. Insuffisantes en quantité, ces
structures sont très hétérogènes sur le plan qualitatif et donc difficilement comparables et
évaluables quant à la qualité des prestations fournies.
Enfin, les unités de soins palliatifs, dans la perspective d’un développement de
la prise en charge de la fin de vie à domicile, sont nécessaires comme relais en cas de
retour à l’hôpital, mais aussi comme « zone de décompression » pour les familles.
Or, en dépit des recommandations de la circulaire DHOS du 19 février 2002,
l’offre de soins palliatifs dans les établissements reste encore inégale. En 2003, seules 18
régions ont un volet obligatoire soins palliatifs dans leur SROS car les ARH ne
considèrent pas toujours ceux-ci comme une priorité. Ceci a pour conséquence des
difficultés dans le retour à l’hôpital lorsqu’il s’avère nécessaire, et un blocage dans la
diffusion de la culture de l’accompagnement de fin de vie (du fait du rôle de formation des
EMSP qui n’est, de fait, pas rempli).
Ces disparités dans la distribution des structures de prise en charge des soins
palliatifs à travers le territoire déterminent fortement les possibilités de retour à domicile.
En effet, celui-ci est souvent proposé en fonction de l’analyse de l’environnement du
patient. La réponse aux demandes d’accompagnement de fin de vie à domicile ne pourra
donc être totalement satisfaite aussi longtemps que le maillage de l’ensemble du territoire
ne sera pas réalisé.
Or, le développement de structures de prise en charge des soins palliatifs,
notamment à domicile, rencontre des résistances résultant notamment des interrogations
qui subsistent quant au financement de ces structures.
B) Le financement de la prise en charge des soins palliatifs semble peu lisible voire
contradictoire
La prise en charge des soins palliatifs et de l’accompagnement de fin de vie à
domicile demande des ressources suffisantes pour permettre son développement. Les
pouvoirs publics ont pris en considération cet aspect essentiel. Ainsi, les soins palliatifs
connaissent une valorisation tarifaire importante dans les établissements publics de santé
grâce à un codage avantageux du PMSI. En effet, les soins palliatifs sont une exception
avec un Groupe Homogène de Malades (PMSI) qui se décompose en trois Groupes
Homogènes de Séjour (de 51 jours). Les soins palliatifs sont ainsi remboursés de
6464,80 € à 9050,71 € selon le GHS. Cette reconnaissance financière doit aussi se faire
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
au niveau de la prise en charge à domicile des patients. Or, celle-ci paraît encore
insuffisante notamment au niveau de la rémunération des professionnels de santé
libéraux.
Pour les professionnels libéraux, la rémunération semble inadaptée. Les soins
palliatifs demandent une grande disponibilité. La durée des visites est plus longue, en
moyenne de trente minutes, et peut dépasser une heure pour certains patients. La
moyenne d’un acte de médecine générale est de quatorze minutes. Le paiement à l’acte
devient inadapté quand le professionnel, notamment le médecin, doit faire deux, voire
trois visites dans la journée. De plus, certains actes demandent la présence de plusieurs
professionnels. La prise en charge à domicile intègre un temps non négligeable de travail
médico-social, d’écoute, d’accompagnement psychologique pour le patient et la famille
qui paraissent, aujourd’hui, insuffisamment reconnus. Ceci peut être un frein dans
l’engagement des professionnels libéraux. De même, une permanence des soins est
indispensable pour une prise en charge de qualité avec une présence de nuit et en fin de
semaine.
Le temps passé avec les autres professionnels pour la coordination, primordial
dans ce type de prise en charge, peut constituer un autre obstacle. Une étude indique que
92% des suivis à domicile se font avec l’intervention de plusieurs professionnels. Ce
temps de discussion et de coordination doit donc être correctement pris en compte dans
la rémunération des professionnels, ce qui n’est pas le cas actuellement.
Le décret du 3 mai 2002 relatif aux conditions d’exercice des professionnels de
santé délivrant des soins palliatifs à domicile tente donc d’apporter des réponses à ces
dysfonctionnements. Il prévoit ainsi deux types de rémunérations pour les professionnels :
soit la rémunération à l’acte avec un forfait de coordination des soins, soit une
rémunération forfaitaire qui intègre les actes de soins et le temps de coordination. De
plus, une possible majoration est prévue pour la rémunération du coordonnateur.
Cependant, la rémunération des libéraux n’est toujours pas réglée. La mise en œuvre du
décret précisant les conditions de rémunération dépend de négociations conventionnelles.
Les médecins libéraux ont ainsi obtenu un forfait de 40€ pour le travail de coordination au
lit du patient et de 80€ pour le travail de coordonnateur lors de la précédente convention.
La négociation avec les infirmiers libéraux paraît plus difficile, aucun accord n’ayant
encore été trouvé. Enfin, les médecins libéraux semblent peu enclins à bénéficier des
rémunérations forfaitaires du fait de la complexité administrative pour y prétendre.
Les structures de coordination rencontrent également des difficultés à assurer
leur financement, mais surtout à le pérenniser. Ainsi les structures financées sur le
FAQSV, inscrites dans un cadre expérimental, ont un financement non pérenne. D’une
part, la durée de vie du fonds est limitée dans le temps (jusqu'au 31/12/2007 selon la
LFSS de 2005). Les promoteurs doivent, par conséquent, chercher d’autres financements
- -
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
(Conseil général, mairie, etc.). Pour 2005, le montant théorique du FAQSV a été arrêté à
106 Millions d'euros au niveau national, dont 3,9 Millions d'euros pour la région Ile et
Vilaine : 50% relève de l’enveloppe traditionnelle et 50% de l’enveloppe fléchée destinée
notamment à l’installation des professionnels paramédicaux dans des zones déficitaires.
D’autre part, le FAQSV accorde un financement pour une durée maximale de trois ans. A
titre d’exemple, l’URCAM de Bretagne accorde un financement d’un an, éventuellement
renouvelable. Cette absence de pérennité des financements s’accompagne donc d’une
fragilité des organisations.
La Dotation Nationale de Développement des Réseaux (DNDR) est inscrite au
sein de l’objectif national de dépenses de l’assurance maladie (art. L162-43 à L162-46 du
code de sécurité sociale 125 millions € pour 2004). Elle est décomposée en dotations
régionales. La gestion régionale est facilitée par le biais du guichet unique, le comité
régional des réseaux, apportant aide et conseil dans le montage. L’octroi des fonds
dépend d’une décision conjointe des directeurs de l’ARH et de l’URCAM. Cependant, ce
financement, qui reste important, n’est ouvert qu’aux réseaux identifiés, et sera
certainement réajusté en fonction de l’évaluation du travail de terrain des réseaux fin
2005.
Or, de nombreux réseaux « informels », hors DRDR et FAQSV, participent à la
prise en charge de l’accompagnement de fin de vie à domicile. Ceux-ci connaissent de
grandes difficultés de financement.
Il est légitime, après l’examen des différents moyens de financement des soins
palliatifs à domicile de s’interroger sur leur juste orientation.
2.1.2 Les obstacles culturels semblent toutefois les plus difficiles à dépasser
Ils relèvent à la fois d’une approche psychologique particulière de la mort que l’on trouve
à la fois chez les professionnels et les familles. Du côté des libéraux, cet obstacle se
double d’une pratique professionnelle souvent inadaptée à ce type de prise en charge.
A) Il existe encore des résistances fortes des professionnels à la prise en charge en
soins palliatifs.
L’absence d’une culture de travail en coordination est l’un des obstacles
majeurs à l’investissement des libéraux dans les structures de prise en charge à domicile.
Travailler à domicile représente pour les soignants un défi quotidien. Il paraît très difficile
de travailler seul à domicile dans ce contexte : les demandes sont trop diverses et
changeantes. De plus, les soignants expriment le besoin de se retrouver avec d’autres
professionnels pour partager leur expérience et mettre en commun leurs pratiques. Or,
une véritable coordination est très hypothétique lorsque les soignants sont libéraux :
actuellement elle dépend de l’adhésion du médecin ou du soignant.
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
Outre le manque de coordination au sein de l’équipe de soins à domicile, un
manque de communication est constaté entre praticiens hospitaliers et médecins libéraux.
De façon à développer cette communication, l’URCAM fait de l’articulation ville-hôpital un
des critères majeurs de sélection des réseaux financés sur la DRDR.
Ces difficultés relatives à la coordination sont en partie le fait d’un manque de
formation, qui se retrouve à un double niveau : manque de formation au travail en réseau
et manque de formation spécifique sur les soins palliatifs. En effet, beaucoup de
professionnels qui travaillent à domicile n’en bénéficient pas. Nombre d’aides soignants
n’ont pas suivi d’enseignements théoriques et pratiques sur l’accompagnement de fin de
vie et les soins palliatifs, de même que les infirmiers. Un module soins palliatifs est
proposé à ces derniers lors de leur formation mais celui-ci est optionnel. Les médecins,
quant à eux, disposent d’une formation obligatoire ou optionnelle selon l’université dans
laquelle ils étudient.
Ces difficultés se retrouvent sur le terrain : les soignants libéraux rencontrés mettent en
avant que nombre de leurs confrères refusent de prendre en charge des patients en soins
palliatifs à domicile. L’investissement qu’il suppose n’est pas assez valorisé. De plus, les
soins de nursing peuvent être considérés comme étant insuffisamment techniques par
certains soignants. Ces considérations ne sont pas les seuls obstacles à une prise en
charge efficiente à domicile.
Les soignants sont également confrontés à la difficile appréhension de la
mort. Les professionnels doivent à la fois faire face à leurs propres angoisses de la mort
et à celles des familles. A leur travail, s’ajoute un rôle de soutien souvent difficile à
assurer. La mise en place de groupes de parole, composés d’un psychologue compétent
et d’une dizaine de soignants motivés, constituerait une solution à ce problème.
Cependant de tels groupes sont encore peu nombreux. Dès lors, il paraît difficile
d’apporter une réponse à ce type d’obstacle, quand bien même le financement de ces
interventions serait revalorisé. Les professionnels rencontrés expriment souvent ressentir
un sentiment d’échec dans les prise en charge de fins de vie à domicile pour lesquelles
plus aucun traitement curatif n’est à envisager.
Des difficultés administratives s’ajoutent aux problèmes précédemment
énoncés. En effet, les accords pour les soins, la kinésithérapie notamment, sont difficiles
à obtenir lorsque les professionnels exerçant à domicile ne travaillent pas dans le cadre
d’un réseau. De même, c’est au patient de demander les équipements nécessaires à la
prise en charge à domicile. Les professionnels ne disposent pas toujours du matériel
adéquat et de ce fait, ne peuvent intervenir à domicile.
Outre les difficultés rencontrées par les professionnels dans l’organisation et la
prise en charge d’un retour à domicile, les familles doivent, elles aussi, faire face à des
contraintes spécifiques.
- -
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
B) Pour les familles et les bénévoles, formation et information sont au cœur des
problèmes rencontrés.
Comme pour les professionnels de santé, la peur de la mort reste un obstacle
important à la prise en charge de proches à domicile. De nombreux professionnels de
santé témoignent ainsi d’un climat de tension important au sein des familles aidantes.
Certaines vont jusqu’à se désengager totalement de la prise en charge en se repliant sur
l’hôpital en cas de crise. Cette situation résulte une fois encore d’un déficit de formation et
d’information des aidants (familles ou bénévoles) entourant le malade.
Pour de nombreuses familles, accueillir son parent à domicile est
financièrement difficile. En effet, la prise en charge à domicile nécessite souvent qu’un
aidant cesse son activité professionnelle et dans un tel cas, les aides en place ne
permettent pas de pallier les pertes de revenus. En effet, le congé d’accompagnement en
fin de vie, dont il est question dans la loi du 9 juin 1999, n’est toujours pas reconnu
comme un véritable droit. Il reste subordonné à l’accord de l’employeur et n’est indemnisé
que dans la mesure où une convention collective le prévoit. La loi ne prévoit pas la
rémunération de ce congé.
Concernant la prise en charge de personnes âgées à domicile, l’APA peut compenser une
partie des charges engendrées par la cessation d’activité de l’aidant. Cependant, cette
prestation n’est pas directement versée à l’aidant mais à la personne dépendante ellemême. Le versement de cette allocation aux proches au même titre qu’à des
professionnels est, en effet, soumis à certaines conditions.
L’attribution du FNASS est limitée : elle ne concerne dans les faits que la garde à
domicile. L’instruction des dossiers est très longue. Bien souvent, le patient décède avant
la fin de l’instruction.
L’ensemble des freins recensés pose la question de l’avenir du dispositif
d’accompagnement de fin de vie et de soins palliatifs à domicile. Il apparaît donc
nécessaire de relancer le débat autour de la pérennisation et de l’amélioration des
dispositifs en place, mais également autour du bien fondé d’un retour à domicile « à tout
prix ».
2.2
Le développement de la place, encore marginale, des soins
palliatifs peut s’articuler autour de quatre axes.
2.2.1 La prise en charge à domicile du patient en soins palliatifs peut-elle occuper
une place autre que marginale ?
La prise en charge à domicile interroge tout le système de santé français.
Aujourd’hui, on note une volonté d’améliorer et de développer les soins palliatifs et
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
l’accompagnement de fin de vie à domicile. Les efforts financiers consentis autour du
développement des réseaux sont le signe d’une volonté gouvernementale clairement
affichée d’assurer une alternative à l’hospitalisation.
A) La dynamique du retour à domicile fait-elle vraiment l’objet d’un consensus ?
Chaque département devrait compter au moins un réseau de soins palliatifs en
2005. (Circulaire DHOS du 19 février 2002). La mise en place du plan cancer vient
renforcer ces orientations à l’horizon 2007. Même si le système français est encore très
hospitalo-centré, on note une diminution des résistances au retour à domicile de la part
des équipes hospitalières. Des initiatives comme celle du CHU de Grenoble où un « guide
conseil du retour à domicile d’un patient hospitalisé » a été conçu, illustre cette évolution.
De la même façon, les familles et les patients expriment plus fréquemment le
souhait de bénéficier de soins à domicile. Ceci se traduit notamment par le
développement de structures de soins ambulatoires et d’HAD. L’accompagnement de fin
de vie à domicile semble s’inscrire dans cette évolution. La dynamique parait bien
engagée.
Pourtant au cours des entretiens avec les différents acteurs, de nombreux
obstacles culturels, financiers, économiques et structurels sont mis en évidence .
Les limites du domicile sont multiples et souvent associées.
L’épuisement familial, l’angoisse liée à l’impuissance face aux symptômes de
l’agonie, le souhait d’épargner aux proches la souffrance sont autant d’éléments qui
expliquent la relative fréquence des ré-hospitalisations dans les jours,voire les heures
précédant la mort. De solides convictions, une volonté à toute épreuve, une disponibilité
de tous les instants sont les conditions nécessaires à la démarche de l’accompagnement
de fin de vie à domicile pour l’ensemble des partenaires. Il est aussi utile qu’une véritable
culture du soins palliatifs s’affirme à l’hôpital au même titre que les autres disciplines tout
en lui conservant son identité : être une façon d’approcher le patient plus qu’une
spécialité.
Les choix réalisés pour le développement des soins palliatifs peuvent apparaître à
bien des égards contradictoires. Dans la volonté de promouvoir cette démarche tant à
l’hôpital qu’au domicile, des budgets considérables sont alloués à des structures sans
véritable suivi d’activités et évaluation de résultats. Dans le même temps, les efforts
financiers en faveur de la prise en charge des soins palliatifs en milieu hospitalier dans le
cadre de la T2A et le développement des USP invitent les établissements sanitaires à se
recentrer sur une prise en charge hospitalière et non en réseau. Dans cette perspective, il
est légitime de se demander si la démarche des soins palliatifs à domicile peut échapper
à une approche hospitalo-centrée. Les praticiens libéraux pris dans une logique de
rémunération à l’acte et insuffisamment rétribués pour la participation à une prise en
- -
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
charge palliative à domicile ont des positions variables selon leur disponibilité et les
situations rencontrées.
B) Est-il possible de dépasser les obstacles structurels et certaines rigidités
administratives ?
Les limites structurelles sont importantes. La multiplicité des acteurs et des
niveaux décisionnels rend l’organisation et la coordination des ressources difficiles. Il ne
peut y avoir coordination des ressources qu’aux endroits où elles existent. Les régions
dont le maillage territorial en praticiens libéraux reste faible seront toujours confrontées à
des difficultés. Les réseaux de soins palliatifs à domicile sont encore jeunes. L’évaluation
des actions mises en œuvre est souvent inachevée.
Les établissements publics sanitaires et sociaux sont souvent un point central pour
l’organisation des soins. Il leur appartient, peut-être, dans une logique d’ouverture sur le
territoire de santé d’assurer la mission de coordination des réseaux au sein de structures
souples comme des associations ou des groupements de coopération sanitaire.
Une organisation des réseaux entres eux semble, en effet, nécessaire si l’on veut éviter la
superposition de dispositifs et les problèmes d’identification des missions de chacun.
Indépendamment de la volonté des pouvoirs publics et de l’évolution socioculturelle en cours, une réflexion approfondie et continue en termes de propositions paraît
nécessaire à la pérennisation du mouvement structurel enclenché.
2.2.2 Des propositions peuvent s’articuler autour de quatre axes majeurs
A la lumière des entretiens, les propositions d’action et d’organisation doivent faire
l’objet d’une réelle prise en compte de principes de base communs à tous :
•
une permanence de l’écoute tout au long de l’accompagnement de fin de vie et
au-delà pour les familles et les aidants ;
•
le respect des besoins exprimés du patient et des aidants ;
•
être au plus près et répondre au plus vite aux professionnels, aux patients et leur
famille dans un souci d’ajustement permanent et d’opérationnalité ;
•
une flexibilité à trouver dans l’organisation de l’offre d’accompagnement et au sein
des structures même, afin de répondre au mieux, aux besoins exprimés et à leur
évolution dans le temps.
A) Assurer une meilleure formation des praticiens pour faire progresser une culture
des soins palliatifs à domicile.
Les propositions visent à rompre les freins culturels qui existent dans la pratique
de médecine de ville et assurer une meilleure communication entre les soignants. La
solitude des soignants confrontés à des fins de vie qu’ils ne savent pas accompagner
pourrait trouver là un début de réponse.
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
Il importe d’inclure dans la formation initiale des personnels médicaux et
paramédicaux des enseignements spécifiques concernant les soins palliatifs et
l’accompagnement de fin de vie. Des efforts supplémentaires doivent être réalisés auprès
des facultés et des écoles de formation pour assurer ces enseignements et faciliter des
stages cliniques dans des lieux propices à l’encadrement des stagiaires (tutorat des
stagiaires et des jeunes professionnels). Il faut former les formateurs. Les directeurs de
soins infirmiers et les cadres de santé doivent être sensibilisés aux difficultés que peuvent
rencontrer les futurs professionnels et mettre en place des moyens pédagogiques.
Cette formation initiale ne peut se concevoir sans le développement d’une formation
continue adaptée aux différents partenaires et en cherchant à associer le plus souvent
possible les bénévoles à une formation de qualité. Dans cette perspective, une
labellisation des organismes de formation en soins palliatifs serait une avancée
significative.
Le rôle d’impulsion de l’ARH, dans le développement d’un volet soins palliatifs intégré au
SROS est primordial. En effet, en incitant les établissements de santé à réinvestir le
champ des soins palliatifs, le rôle de formation des EMSP et USP sera renforcé.
L’expérimentation de formations techniques et psychologiques
doit être
préconisée. Le développement corrélatif de la recherche dans le domaine des soins
palliatifs est intimement lié à ces progrès dans le domaine de la formation et de la prise en
charge des patients. Les USP sont à ce titre des lieux essentiels pour favoriser cette
démarche de recherche pluridisciplinaire, à la fois clinique, éthique et des pratiques
professionnelles.
Le nouvel outil qu’est la VAE (validation des acquis de l’expérience) offre aussi un levier
important pour la reconnaissance et la promotion des équipes intervenant à domicile. Les
auxiliaires de vie notamment pourraient par ce mécanisme bénéficier d’une valorisation
de leur expérience spécifique et obtenir le statut d’aide-soignant. Une telle ouverture
favorise l’interpénétration des secteurs sanitaires et sociaux et une fidélisation des
personnels sur les soins palliatifs.
B) Evaluer les modalités de prise en charge de la fin de vie et clarifier la législation
afin de structurer l’offre.
Le mouvement de prise en charge des soins palliatifs à domicile est encore
d’initiative récente. La politique mise en œuvre vise plus à susciter l’émergence de
structures quel qu’en soit le type sans véritable suivi ni orientations précises. Pourtant, il
importe, dès aujourd’hui, de réfléchir à la mise en place d’une évaluation des
expériences conduites et la définition d’indicateurs quantitatifs et qualitatifs pour
apprécier leur pertinence et construire suivant les territoires des modalités de prise en
charge adaptées aux réalités locales. Cette évaluation doit dégager des indicateurs
- -
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
chiffrés autorisant notamment une comparaison des coûts de pris en charge à pondérer
par des particularités locales en santé publique : qualité du maillage territorial en
praticiens libéraux, place et poids des CHU et des hôpitaux locaux, prévalence des
pathologies et caractéristiques de la population. Sa fonction est d’assurer à terme une
juste réallocation des moyens financiers et de guider les institutions dans la définition
d’une politique nationale déclinée territorialement (ARH, URCAM) mais envisagée
globalement.
L’élargissement des compétences des ARH à l’ensemble des questions de santé, en les
transformant en agence régionale de santé, apparaît dans cette perspective une
nécessité.
La question de la cotation des actes des intervenants en soins palliatifs à
domicile est aussi cruciale. Il est nécessaire d’une part d’élargir le nombre d’actes cotés
pour assurer une correspondance avec la réalité des soins dispensés et d’autre part
d’obtenir une réévaluation des actes existants dans ce cadre particulier des soins
palliatifs. Elle devra notamment prendre en compte la dimension d’accompagnement
psychologique que réalise chacun des intervenants au chevet du patient. Il faut également
rompre la limite dite « des trois actes » pour les infirmières et couvrir, par
conventionnement avec la UNCAM, les interventions d’un psychologue libéral.
Ces propositions appellent des modifications législatives et réglementaires. La loi
Léonetti du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie impose quant à
elle une mise en cohérence du code de déontologie médicale avec ses dispositions et des
précisions apportées par voie décrétale.
Le succès des réseaux en soins palliatifs repose sur une communication étroite
avec les hôpitaux locaux. Ces derniers peuvent tenir une place centrale dans la prise en
charge des soins palliatifs en direction des personnes âgées. A cette fin, l’ouverture de lits
identifiés, voire d’USP peut être encouragée. La proximité préserve en effet les liens
familiaux et sociaux ; le médecin généraliste garde son rôle de référent.
La constitution d’un système d’information ouvert à l’ensemble des
intervenants en soins palliatifs est souhaitable. L’échange d’informations au travers d’un
dossier médical personnalisé, actuellement en construction, est un point fort. Mais le
système d’information peut encore être un outil de coordination des actions en assurant
une liaison entre la ville, l’hôpital et le réseau. Il pourrait notamment permettre d’anticiper
tant les sorties de patient que les éventuels retours en milieu hospitalier, à l’image des
expériences de coordination en SSR comme en Rhône-Alpes. C’est aussi permettre une
juste orientation des patients en fin de vie à leur arrivée aux urgences. La création d’un lit
d’urgence en soins palliatifs s’inscrit dans cette logique d’une prise en charge rapide et
adaptée du patient rendue possible grâce à une gestion informatisée. L’éventualité d’un
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
stockage des directives anticipées reconnues par la loi dite Léonetti sur de tel système
d’information, bien que possible, reste à discuter.
C) Favoriser une réflexion éthique et pratique autour de la fin de vie pour assurer une
meilleure information du public et des familles.
Il s’agit avant tout de susciter le débat autour d’une éthique des soins à domicile
et d’assurer une diffusion de ces idées dans la société civile. L’organisation « d’Etats
généraux » de la fin de vie peut-être le préalable d’une large campagne de diffusion et de
communication à l’instar de ce qui a été réalisé dans le cadre de la lutte contre le cancer.
Une journée nationale de l’accompagnement serait un moment fort pour sensibiliser le
grand public. La création récente d’un numéro AZUR, centre d’information et d’écoute,
répond à ce même souci d’information des familles.
Le ministère de la santé au travers de son site Internet pourrait mettre en place un portail
soins palliatifs et accompagnement recensant les ressources documentaires existantes et
les structurant. Cet outil permettrait d’assurer un accès égal à l’information sur l’ensemble
du territoire. Enfin, il est essentiel que les campagnes de sensibilisation s’appuient sur
une large diffusion de plaquettes d’information dans les lieux publics comme les mairies,
via les professionnels de santé (cabinet médical, pharmacie), ainsi que les établissements
d’enseignements secondaires et supérieurs.
Il importe également que l’information diffusée aux familles n’oriente pas
nécessairement celles-ci vers une prise en charge à domicile, mais leur permette de
mesurer clairement les enjeux de celle-ci en terme de contraintes au quotidien : pression
psychologique, adaptation et équipement du domicile, visites régulières des soignants…
D) Développer les mesures d’aide à l’accompagnement de fin de vie pour les familles.
Face aux difficultés financières rencontrées par les aidants souhaitant interrompre
leur activité pour accompagner une fin de vie, il apparaît d’une part essentiel que le
congé d’accompagnement soit indemnisé, voire rémunéré. Ceci implique qu’il soit
reconnu comme un droit à part entière, à la fois pour le malade et la famille. D’autre part,
l’accès au matériel médical doit être facilité pour les prises en charge hors HAD. En effet
celui-ci représente une charge importante pour les familles qui doivent équiper un
domicile. Les réseaux pourraient avoir un rôle à jouer dans ce domaine : ils pourraient par
exemple mettre en place des bourses à l’équipement permettant l’acquisition de
matériel d’occasion à moindre coût.
Parallèlement, l’aspect social de la prise en charge doit être renforcé. L’action
des travailleurs sociaux qui interviennent dans les équipes doit être facilitée afin de
réduire le temps d’instruction des dossiers notamment. Dans cette optique, un travail de
coordination avec les URCAM, CNAM, CPAM, conseils généraux, CCAS… doit être
développé.
- -
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
CONCLUSION
Interroger les soins palliatifs et l’accompagnement de fin de vie, ce n’est pas simplement
s’interroger sur le type de prise en charge, la structuration de l’offre et de la demande.
C’est aussi s’interroger sur la question de l’humanité, du sens de la vie. C’est prendre en
compte la souffrance humaine dans ses trois dimensions physique, psychique et sociale.
Un développement récent, des expériences de prise en charge novatrices, une volonté du
législateur, un positionnement des usagers sont autant d’éléments en faveur d’une
pérennisation et d’un essor des dispositifs existant pour la prise en charge des fins de vie
en institution et à domicile. Pour autant les freins culturels sont réels tant au niveau de la
société dans son ensemble que des professionnels et des familles. Si les soins de
support viennent à remplacer les soins palliatifs, la mort ne risque-t-elle pas de s’éloigner
encore de la conscience collective ? Si des compétences professionnelles spécifiques
sont
indispensables,
la
démarche
d’accompagnement
de
fin
de
vie
repose
essentiellement sur des convictions et un engagement individuel fort. L’accompagnement
à domicile de la fin de la vie n’est ni la seule réponse ni forcément la meilleure. Ce projet
ne peut se construire sans la prise en compte des souhaits du patient. Le système ne
saura répondre à la demande changeante du patient que si une coordination efficiente
entre les diverses solutions alternatives existent.
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
Bibliographie
Textes juridiques
• Loi du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie
http://www.legifrance.gouv.fr/imagesJOE/2005/0423/joe_20050423_0095_0001.pdf
• Loi n° 99-471 du 8 juin 1999 visant à garantir le droit d’accès aux soins palliatifs
• Code de la santé publique
Article 36
Modification des réseaux de santé : L.1111-1 à L.1111-9 / L.1110-9 à L. 1110-11 /
L. 6114-2
• Décret no 2002-793 du 3 mai 2002 relatif aux conditions d'exercice des professionnels
de santé délivrant des soins palliatifs à domicile pris pour l'application de l'article L. 162-110 du code de la sécurité sociale.
• Code déontologique médical Article 36 et 37.
• Arrêté portant détermination de la dotation nationale de développement des réseaux –
Ministère de la santé
http://www.urcamif.assurance-maladie.fr/reseauxFilieres/arrete_250204.pdf
• Circulaire DHOS/O 2/DGS/SD 5 D n° 2002-98 du 19 février 2002 relative à
l'organisation des soins palliatifs et de l'accompagnement, en application de la loi n° 99477 du 9 juin 1999, visant à garantir le droit à l'accès aux soins palliatifs
• Circulaire DH/FH n° 2000-390 du 11 juillet 2000 relative aux orientations et axes de
formation prioritaires, à caractère pluriannuel, concernant l'ensemble des fonctionnaires
hospitaliers des établissements publics de santé.
• Circulaire Assurance maladie relative à la procédure de prise en charge pour le
maintien à domicile facilité -2003
• Programme national de soins palliatifs 2002-2005 Ministère de la santé
Rapports, recommandations et notes
• Rapport au ministre de la santé (Marie de Hennezel) – Mission fin de vie et
accompagnement – Octobre 2003.
• Rapport d’information « les soins palliatifs et l’accompagnement » N° 207 (98-99)Sénat – commission des affaires sociales -Lucien Neuwirth
• Rapport de la SFAP – Etat des lieux national des structures de soins palliatifs en –
novembre 2003.
• Guide de bonnes pratiques d’une démarche palliative en établissements
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
http://www.sante.gouv.fr/htm/dossiers/palliatif/guide_demarche.pdf
• Accompagnement des personnes en fin de vie et de leurs proches, conférence de
consensus texte de recommandations ANAES / SFAP– HAS janvier 2004
• Manuel d’accréditation, accréditation des établissements de santé, deuxième
procédure d’accréditation septembre 2004 – HAS 2004
• Complément au manuel d’accréditation – HAD – HAS 2003
http://www.has-sante.fr/anaes/Publications.nsf/nPDFFile/AT_LILF5M3CTA/$File/HAD_complement_manuel.pdf
• Evaluation des réseaux - ANAES
http://www.urcam.org/publications/docs/ANAES_eva_reseaux_2004.pdf
• Les soins palliatifs note de synthèse – service des affaires européennes Sénat octobre
1998
• Les droit des malades en fin de vie : étude de législation comparée – services des
études juridiques Sénat N° 139 novembre 2004.
http://www.senat.fr/lc/lc139/lc139.html
• Politique en soins palliatifs de fin de vie au Québec – ministère de la santé et des
services sociaux.
ftp.msss.gouv.qc.ca/publications/ acrobat/f/documentation/2004/04-828-02W.pdf
Monographies et manuels
• Manuel de soins palliatifs – Marie-Louise Lamau – Dunod 1996
• Le malade en fin de vie et le médecin généraliste, guide thérapeutique pour le cancer
et le sida – Jean-Marie Gomas – Pharmacia &Upjohn 1998
• la prise en charge à domicile des patients en soins palliatifs par le médecin généraliste
– Thèse en vue du diplôme d’Etat de docteur en médecine - Maud Palicot - Université de
Rennes 1 Faculté de médecine - 2000
• L’accompagnement de la fin de vie du domicile à l’hôpital – centre national d’expertise
hospitalière N° 50 / 51 décembre 2003
• Recueillir la parole de l’usager dans le cadre es soins de fin de vie délivrés au domicile
– Simon Corchuan - mémoire filière IASS 2003
• La fin de vie - gérontologie et société, cahiers de la fondation nationale de gérontologie
N° 90, septembre 1999
Articles
• Euthanasie Encyclopedia universalis
• L’organisation des soins palliatifs à domicile - Jean- Marie Gomas - la revue du
praticien N° 431 1998
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
• La communication vidéo et les soins palliatifs à domicile – Franco de Conno, Cinzia
Martini – European journal of palliative care 4(5) 1997
• Le service HAD gériatrique de Marseille –Dr Lounès Adjemout – Revue hospitalière de
France N° 3 mai-juin 2000
• Evaluation à distance d’une formation sur les soins palliatifs à domicile en Auvergne –
Dinnematin, Lagabrielle, Malaval – la revue du praticien médecine générale Tome 10, N°
358, novembre 1996
• Un outil francophone d’évaluation des soins palliatifs à domicile : adaptation du
Support Team Assessment Schedule (STAS) – Lagabrielle et alii – Santé publique 2001,
volume 13, N° 3 P 263 – 276
• Soins palliatifs : mort à domicile – Mascret, Coumau – Impact médecin N° 64, 23
janvier 2004
• Intervention B. KOUCHNER –– Colloque le développement des soins palliatifs : bilan
et perspectives Paris 22 février 2002.
Sites internet
• Catalogue et Index des Sites Médicaux Francophones
http://www.chu-rouen.fr/ssf/ther/soinsauxmourants.html
• Site de l’association du C.R.I.S asbl
http://users.skynet.be/cris.asbl/
• Site du centre de ressources national François-Xavier Bagnoud
http://www.cdrnfxb.org/content/view/148/
• Site de la société française d’accompagnement et de soins palliatifs
http://www.sfap.org/index.php
• Site sur l’Aide à la mise en réseau des soins palliatifs coordonnés à domicile
http://www.santebretagne.com/Etudes/Synthese/Synthese_55.html
• Politique en soins palliatifs de fin de vie
http://catalogue.iugm.qc.ca/Document.htm&numrec=031044224922600
• Aide à la mise en réseau des soins palliatifs coordonnées à domicile
http://www.santebretagne.com/Etudes/Pdf/Synthese_55.pdf
• Soins palliatifs pluridisciplinaires chez un enfant ou un adolescent en fin de vie
http://www.univrouen.fr/servlet/com.univ.utils.LectureFichierJoint?CODE=1096556157472&LANGUE=0
• La nuit les soins palliatifs
http://www.cdrnfxb.org/content/view/38/
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
Liste des annexes
Annexe 1 Tableau des entretiens
Annexe 2 Questionnaire
Annexe 3 Eléments extraits d’une présentation du Dr. Le Divenah –DHOS, ministère de la
santé sur les soins palliatifs en France
Annexe 4 Loi du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie
Annexe 5 Loi n° 99-471 du 8 juin 1999 visant à garantir le droit d’accès aux soins palliatifs
Annexe 6 Comparaison d’éléments chiffrés des réseaux
Annexe 7 Eléments d’une présentation du Dr. N’Guyen – CHU Ambroise Paré –
Concernant le codage de l’activité de soins palliatifs.
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
ANNEXE 1
TABLEAU DES ENTRETIENS
Nom
Fonction
Structure
date
durée de
l'entretien
M. Robin Vinat
psychologue
EMSP
Rennes
CHRU 09/05/2005
1h
Mme Belloir
cadre de santé
EMSP
Rennes
CHRU 10/05/2005
2h
Mme Lebrun
infirmière
générale
Centre
Anti 11/05/2005 à 13h
Cancéreux
Eugène Marquis
Mme Prigent
responsable
FAQSV
Dr Besson
directrice
HAD pays
Rennes
de 13/05/2005 à 10h
45 min
Mme Letourneur
puéricultrice
CHRU
Rennes
de 13/05/2005 à 10h
1h
M. Martin
infirmier libéral
Domipallia
Dr N'Guyen
DIM
CHU
Paré
Dr Gomas
médecin
Hôpital Rossini
13/05/2005
1h30
Dr Desfosses
médecin
Diaconesses
13/05/2005
1h30
Dr Lassaunière
médecin
Hôtel Dieu
16/05/2005
1h30
M. Pleyber
responsable
réseaux
URCAM
16/05/2005 à 11h
1h
Dr Lescanne
coordonnateur
EHPAD
Domipallia
16/05/05 à 11h
1h
Mme Viel
directrice
SSIAD
ASPANORD
16/05/2005 à 14h
1h
Mme Legall
présidente
Association
JALMAV
17/05/2005 à 14h
40 min
Dr Duchêne
médecin
généraliste
Domipallia
17/05/2005 à 12h
1h
Dr Pelletier
pneumologue
Clinique
responsable USP Laurent
Dr Vigouroux
Mme Launay
Médecin
Infirmière
coordinatrice
M. Viallard
médecin
du URCAM
12/05/2005 à 14h
13/05/2005 à 14h30
Ambroise 13/05/2005
UMSP
Chantepie
Saint 17/05/2005 à 18h
18/05/2005 à 14h30
intervention le 19/05/05
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
1h
1h
1h30
50 min
ANNEXE 2
QUESTIONNAIRE MIP
1. Définition
- Quelle définition donneriez-vous de l’accompagnement de fin de vie ?
- Quelle place à celui-ci dans votre pratique ?
- Quelle distinction faites vous avec les soins palliatifs ?
2. Organisation
- Comment s’organise la prise en charge ?
- Existe-t-il des critères de sélection pour une adéquation entre offre et
demande ?
- Avec qui travaillez-vous ?
- Quelles sont vos relations avec les partenaires de ville, avec les membres
du réseau ?
- Qui vous sollicite ? (familles, centre hospitalier : infirmières, médecins)
- Quel lien faites-vous avec la prise en charge à domicile ?
- Quels sont les moyens matériels, humains ?
- Quelle population prenez-vous en charge (âge, pathologie, temps
d’accompagnement estimé, secteur géographique : ville ou campagne,
existence ou non d’aidants)
- Pouvez-vous nous faire part d’une prise en charge type ?
3. Evaluation du ressenti de la prise en charge
- Quelles sont vos relations avec les patients et leur famille ?
- Comment perçoivent-ils votre intervention ?
- Qu’apporte la prise en charge de la fin de vie à domicile au patient ? à
l’équipe ?
4. Evaluation de la valeur ajoutée de la prise en charge
- Existe-t-il une valeur ajoutée à ce type de prise en charge ?
- Valeur ajoutée au niveau psychologique ?
- Valeur ajoutée au niveau éthique ?
- Valeur ajoutée au niveau économique ? Celle-ci est-elle économiquement
intéressante pour le patient et sa famille ? pour la société en général ?
- Valeur ajoutée au niveau sociétal ?
5. Difficultés rencontrées et pistes d’amélioration
- Quelles sont les difficultés auxquelles vous avez été confronté ? (Ex :
difficultés de coordination avec les autres professionnels, relations avec les
familles, manque de formation …)
- Quelles sont les limites de cette prise en charge ?
- Quelles propositions feriez-vous afin d’améliorer les dispositifs actuels ?
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
ANNEXE 3
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
ANNEXE 4
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
ANNEXE 5
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
ANNEXE 6
Comparaison d’éléments chiffrés des réseaux : mise en perspective des difficultés
d’évaluation de l’activité
Les outils de mesure de l’activité ne permettent pas d’assurer une comparaison de
l’activité des réseaux. Certains évoquent le terme d’inclusion comme les hôpitaux parlent
d’admission. D’autres, dits de seconde ligne, n’apportent qu’une prestation de conseil et
d’assistance.
Les chiffres extraits de l’étude menée sur le réseau SPES et les chiffres communiqués
par Domipallia permettent de réaliser l’écart existant entre les différents réseaux.
SPES évoque ainsi 295 signalements depuis sa création en janvier 2003. 220 patients ont
été pris en charge. Sur les 189 patients sortis du réseau, fin décembre 2004, 148 sont
décédés dont 46 % environ à leur domicile. 146 professionnels avaient signé la charte du
réseau. 17 protocoles ont été réalisés afin de prendre en charge le patient de façon
continue dans le domaine des soins. 9 sessions de formation en moyenne par an ont été
organisées réunissant 42 participants en moyenne. Au total, sur les deux années
d’activité, 508 participants libéraux ont participé à ces séances de formation sur les 763
présents.
La formation est le seul véritable point commun avec Domipallia. Depuis sa création soit
Avril 2004, Domipallia a organisé 17 réunions de formation réunissant 135 participants :
19 % sont des omnipraticiens, 51 % des infirmières et 28 % des pharmaciens, des aides
soignants, des directeurs d’établissement, des médecins territoriaux. Deux journées de
formation ont été organisées réunissant 65 participants au total. Domipallia assure aussi
des réunions de coordination, à la demande : 16 ont été réalisées depuis sa création
émanant pour la plupart de médecins généralistes. Ce type de réunion n’est pas encore
systématique.
Les chiffres montrent la difficulté à comparer l’activité des réseaux, qui chacun ont choisi,
sur un territoire différent, des orientations particulières pour leurs actions. Au-delà de
l’aspect quantitatif qu’il faut évidemment rapporté à la démographie médicale et aux
problèmes particuliers de santé publique que connaissent certaines régions de la France,
il est encore plus difficile d’évaluer l’aspect qualitatif du travail réalisé. Ainsi, la mesure de
l’impact des journées de formation sur la pratique libérale est difficile à apprécier.
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
ANNEXE 7
Recommandations officielles
• Des soins palliatifs : dès lors que leur définition est
respectée (loi n° 99-477 du 9 juin 1999), le DP doit toujours être
codé Z51.5, à l’exclusion de tout autre code. En
particulier, la possibilité d’enregistrer la maladie motivant
les soins palliatifs comme DP n’est plus admise, y
compris lors d’un séjour s’achevant par le décès du
patient
• Exemples :
– séjour de soins palliatifs pour cancer utérin en phase terminale :
DP Z51.5, DR C54.– ;
– séjours de soins palliatifs pour SIDA avec cachexie :
DP Z51.5, DR B22.2.
• DP=Diag. Principal
DR=Diag. Relié
Valorisation
• 1 GHM : 23Z02Z
Soins palliatifs avec ou sans acte
• 3 GHS :
– Soins palliatifs, avec ou sans acte 6 464,80
– Soins palliatifs, avec ou sans acte, dans une
unité de soins palliatifs 9 050,71
– Soins palliatifs, avec ou sans acte, dans un lit
dédié de soins palliatifs 8 404,23
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
En pratique
• Noter dans le dossier médical que l’état du
patient nécessite des soins palliatifs avec
les critères « officiels ».
• Demander aux médecins « codeurs » de
noter en DP=Z51.5 et en DR=Pathologie
initiale
• Recoder systématiquement si l’équipe
mobile de soins palliatifs est intervenue
auprès du patient (noter dans le dossier)
ENSP – Module interprofessionnel de santé publique – 2005
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