Adultes aux soins intensifs
Les politiques de visite actuelles des unités de soins intensifs découlent de pratiques adoptées dans
les années 1960, au moment de l’apparition des premiers milieux de soins intensifs (Cullen, Titler,
et Drahozal, 1999). De strictes restrictions de visite étaient le résultat d’inquiétudes et d’un
manque d'information quant aux effets des visites sur les patients et leurs familles. Plusieurs
articles publiés au cours des années 1980 et au début des années 1990 encourageaient des
politiques de visite plus libres ou moins restrictives pour les adultes gravement malades.
Néanmoins, tandis que les enquêtes menées au cours des années 1980 et 1990 faisaient état d’une
grande diversité de politiques de visite dans les milieux de soins intensifs pour adultes, la plupart
étaient restrictive du point de vue de la fréquence, de la durée et du nombre de visites, en plus de
l'âge des visiteurs autorisés (Cullen et al. 1999).
Depuis plus d'une décennie, les données révèlent clairement que les patients et les membres de
leur famille souhaitaient des politiques de visite plus libres. D’ailleurs, c’est l’une de leurs
premières priorités (DeJong & Beatty, 2000). En outre, nombre d’infirmières reconnaissaient que
les visites libres sont salutaires pour les patients et leurs familles, car elles diminuent l’angoisse
(Simon, Phillips, Badalamenti, Ohlert, et Krumberger, 1997). Par ailleurs, des études ont montré
que les visites libres augmentent le niveau de satisfaction des patients et de leurs familles
(Gavaghan et Carroll, 2002). En 2004-2005, un groupe de travail mis sur pied par l'American
College of Critical Care Medicine a élaboré des lignes directrices portant sur les soins intensifs
centrés sur le patient et sa famille. Entre autres recommandations, les lignes directrices appelaient
aux « visites libres » et à la présence de la famille lors de manœuvres de réanimation (Davidson,
2007).
La recherche indique clairement que le fait de séparer les patients des personnes qui les
connaissent le mieux, au moment où ils sont le plus vulnérable, augmente le risque d’erreur
médicale, de préjudice émotionnel, d’incohérences de soins et de prestation de soins inutiles
coûteux (Cacioppo et Hawkley, 2003 ; Clark, 2003). La recherche révèle également que pour de
nombreux patients âgés, une hospitalisation pour maladie grave ou critique est associée à une
réduction de la fonction cognitive (Ehlenbach, 2010). Les familles et les autres « partenaires de
soins » sont beaucoup plus conscients de tout changement dans la fonction cognitive du patient
que le personnel hospitalier, de sorte qu’ils sont une ressource précieuse en cas d'hospitalisation.
En dépit de ces données probantes et d’un plaidoyer en faveur de l’assouplissement des politiques
de visite, le changement s’opère lentement dans le domaine des soins intensifs dispensés aux
adultes. En 2010, une enquête auprès de plus de 200 unités de soins intensifs du Royaume-Uni a
révélé que des politiques et des pratiques de visite restrictives étaient toujours en place dans 165
unités, soit chez 80 % des répondants (Hunter, Goddard, Rothwell, Ketharaju, & Cooper, 2010).
Toujours en 2010, l’American Association of Critical-Care Nurses (AACN) a senti le besoin
d'émettre un Avis de pratique indiquant que les membres de la famille de tout patient subissant
des manœuvres de réanimation ou une intervention invasive devraient avoir le choix d’être aux
côtés de leur proche (American Association of Critical-Care Nurses, 2010). Un an plus tard, un
autre Avis de pratique de l’AACN revendiquait l’élimination de touts restriction de visite pour les
« partenaires de soins » des patients adultes aux soins intensifs (American Association of Critical-
Care Nurses, 2011). A cette époque, AACN estimait que 70 % des politiques en vigueur dans les
unités de soins intensifs en milieu hospitalier imposaient des restrictions aux visites de la famille.