Article en cours de rédaction. Soumission prévue pour La Revue gériatrique. AVC et Horton : caractéristiques de l’imagerie F Ketz1, A Monti1,2,4, A Velentza1, A Breining1,4, A. Léger3, H Lepetitcorps1,2,4, E Pautas1,2,4 Court séjour gériatrique, Hôpital Charles Foix, GH Pitié-Salpêtrière-Ch. Foix - APHP, Ivry-sur-Seine, France UFR Médecine P. et M. Curie, Université Paris 6 3 Unité des urgences neurovasculaires, CHU Pitié-Salpêtrière – APHP, Paris, France 4 DHU FAST 1 2 1) Introduction La maladie de Horton (MH) est une artérite qui atteint les vaisseaux de gros et moyen calibre, en particulier les branches de la crosse de l’aorte. Les artères de gros calibres sont considérées comme des artères élastiques et les artères de moyen de calibre comme des artères musculaires. Les artères intra cérébrales sont des artères musculaires qui se caractérisent par leur faible calibre, la présence limitée de limitante élastique externe (LEI) et l’absence de vasa vasorum au niveau de l’intima. Au cours de la MH, on observe une rigidification des arètes par atteinte de la media (infiltrat inflammatoire et destruction des cellules musculaires lisses et de l’intima (destuctionde la LEI remplacée par du tissu fibreux) (1) La MH est la vascularite la plus fréquente après 50 ans (2). Son incidence augmente progressivement avec l’âge et est supérieure à 20/ 100 00 chez les patients âgés de plus 70 ans (3,4). Elle atteint préférentiellement les femmes avec un sex-ratio de 2 à 3 pour 1. Il existe un gradient Nord-Sud avec une atteinte plus importante en Europe et en Amérique du Nord. Il semblerait qu’il y ait une variation saisonnière avec un pic en fin de printemps - début d’été. Il semble exister une prédisposition génétique (HLA-DRB104) (5) Des critères diagnostiques de la maladie de Horton ont été développés par l’American College of Rheumatology en 1990. Cependant ces critères ont été définis pour diagnostiquer une MH pour un patient dont le le diagnostic de vascularite a déjà été posé. Par ailleurs la symptomatologie est souvent frustre chez le patient âgé (article O St Jean Revue gériatrie). Le diagnostic doit être évoqué devant l’association d’une altération de l’état général et d’un syndrome inflammatoire biologique. La biopsie d’artère temporale (BAT) est l’examen diagnostique de référence. Ce vaisseau souvent atteint est aussi le plus accessible. Une biopsie négative n’exclue pas le diagnostic. La MH peut se compliquer d’accident vasculaire cérébral (AVC) dans 2,7 à 7,4% des cas (6,7). Il s’agit principalement d’accidents ischémiques. Le diagnostic différentiel entre AVC sur athérosclérose et AVC secondaire au Horton est parfois difficile à établir. Nous exposons le cas d’une patiente ayant présenté un AVC ischémique concomitant du diagnostic de MH et discuterons les données de l’imagerie cérébrale. 2) Résultat Nous présentons le cas d’une patiente âgée de 90 ans est hospitalisée dans un service de gériatrie parisien pour exploration d’une altération de l’état général. Ses principaux antécédents sont : une HTA, une insuffisance rénale chronique modérée et une tendinites des 2 épaules. Son traitement est composé de Tenordate 1cp le soir, Raslez 300mg 1 le matin et Movicol si besoin. L’interrogatoire ne retrouve ni céphalée, ni claudication de la mâchoire, ni hyperesthésie du cuir chevelu. Il n’existe pas non plus de myalgie ni d’arthalgie. Le pouls temporal est aboli à gauche et difficile à percevoir à droite. L’examen clinique est sans particularité en dehors d’une masse du quadrant supéroexterne du sein droit. Il n’existe ni douleur osseuse ni gammapathie. La biologie montre un syndrome inflammatoire biologique avec une élévation de la CRP à 51 mg/l, une thrombocytémie entre 535000 et 683000/mm3, une fibrinogène à 6 g/l. On trouve également une anémie microcytaire à 8,4 g/l avec une carence en folate et une carence martiale d’allure fonctionnelle (CST 9%, ferritine 341 μg/L). Il existe une hyponatrémie à 126 mmol/l liée à un SIADH, d’évolution rapidement favorable après restriction hydrique, ainsi qu’une hypoalbuminémie à 31 g/L. L’insuffisance rénale est modérée (créatinine 93 μmol/l, clairance par MDRD 49 ml/min). Le reste du ionogramme sanguin est normal, ainsi que le bilan hépatocellulaire. Le scanner thoraco-abdomino-pelvien injecté ne trouve pas de masse, ni de foyer infectieux profond. Une biopsie de la masse mammaire montre une mastose fibreuse sans signe de malignité. Les endoscopies digestives sont normales, en dehors d’un fundus d’allure trophique et de deux tâches rouges infracentimétriques rectales non hémorragiques. Finalement en l’absence d’autre point d’appel clinique, une biopsie d’artère temporale est réalisée à droite (prélèvement de 13mm de long). L’examen anatomopathologique retrouve une fibrose circonférentielle de l’intima entrainant une réduction de 90% de la lumière artérielle. La limitante élastique interne est fragmentée. Il existe un infiltrat inflammatoire abondant de la paroi artérielle prédominant au niveau de la partie interne de la média. Cet infiltrat est constitué de lymphocytes, de plasmocytes et de macrophages souvent au contact de la limitante élastique interne, et comporte des cellules géantes multinuclées. L’adventice est un peu fibreux. Au total, les lésions histologiques sont en faveur d’une artérite de Horton. Le jour de la réalisation de la biopsie d’artère temporale, la patiente toujours hospitalisée présente de façon brutale un déficit de l’hémicorps gauche associé à une dysarthrie et une discrète paralysie faciale gauche. Elle est transférée en Unité de Soin Intensif NeuroVasculaire où elle bénéficie d’une IRM cérébrale qui retrouve un accident ischémique récent du territoire sylvien superficiel droit et choroïdien antérieur droit, une maladie des petites vaisseaux cérébraux (leucopathie, lacune profonde) et athérome intracrânien très marquée, de nombreuses microhémorragies superficielles et qui conclue à un AVC carotidien droit plutôt en faveur d’une origine athéromateuse. Une thrombolyse par Actilyse 34mg IV est administrée à la patiente 2 heures après le début des symptômes. La patiente présente une réaggravation des symptômes le lendemain avec une imagerie cérébrale montrant l’apparition de nombreux petits embols et petites lacunes en territoire insulaire gauche, pariétale droit et occipital (<1cm, sans effet de masse) en faveur d’un phénomène pro-thrombotique d’une artérite de Horton, d’une néoplasie ou d’un phénomène cardio-embolique sur fibrillation atriale. Le bilan étiologique ne met pas en évidence d’autre cause (ESA nombreuses mais absence d’ACFA objectivée, athérome carotidien <50%, bilan lipidique et glycémique normal). Après introduction d’une corticothérapie à 1mg/kg, on observe une négativation de la CRP. Finalement la patiente ne récupérera pas de son déficit et décèdera quelques semaines plus tard. 3) Discussion Le taux d’AVC chez les patients atteints de Horton varie entre 2,7 et 7,4% selon les études (6,7). Selon l’étude de Neda Amiri, le hazard ratio de faire un AVC chez les patients atteints de Horton, ajusté sur l’ensemble des co-variables, est de 2,04 [IC95% 1,43 ; 2,93]. Ce risque est majoré la première année qui suit le diagnostic de Horton à 3,20 [IC95% 1,43 ; 2,93]. (8). Selon l’étude rétrospective de Unizoni, l’hospitalisation pour AVC est plus fréquente chez les patients atteint de Horton que les patients indemnes (24.9% vs 19.8%, p<0,001) (9). Selon l’étude de cohorte prospective de Gunar Tomasson, la survenue d’un AVC chez un patient atteint de Horton est de 7,97 pour 1000 personnes-années, versus 6,28 pour 1000 personnes-années chez les patients non atteints, avec un hazard ratio à 1,27 [IC95% 1,05 ; 1,53] (10). Dans l’étude de cohorte rétrospective de J G Ray, le hazard ratio de faire un AVC chez les patients atteints de Horton, ajusté sur l’ensemble des co-variables, est non-significatif mais tend à montrer un sur-risque dans cette population : HR 2,1 [IC95% 0,9 ; 4,6], sous réserve d’une analyse faite en sous-groupe (11). Il semble qu’il existe des facteurs de risque de développer un AVC lié au Horton qui sont : le sexe masculin, une perte visuelle, l’intoxication tabagique, l’hypertension artérielle, un taux de globules rouges élevé (12,13), bien que dans son étude Thiery Zenone ne retrouve pas de différence significative concernant les caractéristiques épidémiologiques, cliniques ou biologiques entre les 2 populations (14). Les AVC peuvent être dus à une artérite des artères carotides et vertébrales ou bien à une vascularite des vaisseaux intracraniens. L’implication du système vertébro-basilaire est plus fréquente dans la maladie de Horton. 40 à 60% des AVC dans la maladie de Horton surviennent dans ce territoire, contrairement à l’athérosclérose où seulement 15 à 20% des AVC se développent dans ce territoire (15). Le ratio AVC carotidien vs AVC vertébro-basilaire est de 3/2 chez les patients atteints de Horton, alors qu’il est de 5/1 en population générale (13). Lors des autopsies, une atteinte des artères vertébrales est plus fréquemment retrouvée qu’une atteinte des carotides (16). Lors du passage de la dure-mère, l’atteinte des artères intra cérébrales cesse environ à environ 5mm du point d’entrée, probablement expliquée par la faible proportion de tissu élastique de la media et de l’adventice ainsi que l’absence de vasa vasorum de ces vaisseaux (5). Le principal mécanisme d’atteinte des artères cérébrales est l’occlusion via la sténose. Le principal mécanique d’AVC compliquant une artérite de Horton est un bas-débit du au ralentissement du flux en regard des lésions d’artérite ou une occlusion secondaire à l’hyperplasie intimale. Parfois il existe des thrombus compliquant la sténose, pouvant emboliser (17). Les AVC liés à la maladie de Horton surviennent typiquement en période d’activité de la maladie, entre le début des symptômes de Horton et le mois suivant l’introduction de la corticothérapie (18). Étant donné la fréquence des AVC dans la population gériatrique, il est parfois difficile de faire la différence entre une origine artéritique ou athérosclérotique (15). En effet les comorbidités cardiovasculaires sont fréquentes dans cette clase d’âge (12). Il a probablement une majoration du risque cardiovasculaire lié à l’inflammation circulante (12,14). Malgré la positivité de la BAT, il est important d’éliminer les causes fréquentes d’AVC lors du bilan étiologique avec notament l’exploration des vaisseaux intra et extracraniens (15). Il n’existe pas de signe pathognomonique à l’imagerie cérébrale permettant d’affirmer l’origine artérique d’un AVC, mais il existe des signes évocateurs. L’ARM ou une angiographie conventionnelle des vaisseaux supra-aortiques peu montrer des segments étroits, des sténoses et/ou des occlusions évocateurs de vascularite (15). Des atteintes multi-lacunaires ont également été décrites (15,19). Plusieurs auteurs décrivent également la présence du signe du halo à l’échodoppler des troncs supra-aortiques dans leur portion extra-cérébrale (20,21). 4) Conclusion L’AVC est une complication rare de la maladie de Horton. Il existe des éléments à l’imagerie permettant d’orienter le diagnostic en faveur d’une origine inflammatoire. Cependant il reste difficile d’établir avec certitude l’origine inflammatoire d’un accident vasculaire cérébral. Tout AVC ou accident ischémique transitoire associé à un syndrome inflammatoire biologique chez un patient âgé doit faire évoquer une maladie de Horton. 5) Bibliographie 1. Salvarani C, Giannini C, Miller DV, Hunder G. Giant cell arteritis: Involvement of intracranial arteries. Arthritis Rheum. 15 déc 2006;55(6):985‑9. Disponible sur: http://doi.wiley.com/10.1002/art.22359 2. Devauchelle-Pensec V, Jousse S, Destombe C, Saraux A. Epidemiology, imaging, and treatment of giant cell arteritis. Joint Bone Spine. mai 2008;75(3):267‑72. 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