vérité qu’il est assuré qu’elle possède. Kant part du principe de Hume présenté dans le Traîté de
la nature humaine, selon lequel les théories, formées des observations, présentent «un besoin de
l’esprit humain 10». Cependant, l’auteur de la Critique de la raison pure, pousse la réflexion jusqu’à
prétendre que la connaissance est la conséquence de l’impression active que l’entendement – soit
la capacité de l’esprit humain de produire des jugements – fait de la nature. Il soutient donc que
«l’entendement ne puise pas ses lois dans la nature mais les lui prescrit. 11»
Ainsi, Kant coupe le noeud gordien en renversant le processus de la connaissance, causant
une véritable «révolution copernicienne 12», car, désormais, l’esprit imprègne la nature, et non le
contraire. Par conséquent, nos conceptions du monde sont, au préalable, une expression de la confi-
guration de l’organisation de nos pensées. Toutefois, Kant avance que, bien que l’entendement hu-
main joue une part importante dans l’appréhension de la connaissance, la science constitue le seul
outil à la disposition de l’homme lui permettant de rejoindre la vérité. Évidemment, cela n’implique
pas l’infaillibilité de la science, ou qu’un tel but soit accessible, mais Kant identifie la science comme
le seul vecteur de la connaissance vraie.
Le philosophe autrichien, Karl Popper, reprend le flambeau et, en cherchant les critères de
démarcation scientifique, identifie un problème dans la logique de l’induction des empiristes (nommé
le «problème de Hume»), soit : comment la généralisation d’observations particulières permet-elle
la légitimité d’une loi générale ? En réponse, Popper propose un rationalisme critique, où la valeur
d’une théorie repose sur la réfutabilité, plutôt que l’induction. La réfutabilité, c’est-à-dire le rejet
d’une théorie par sa non-conformité avec le réel, permet à Popper de reconnaître que «l’entendement
prescrit ses lois à la nature, mais la nature peut résister 13.» Donc, Popper n’impose pas sur le réel
l’entendement de l’esprit comme le fait Kant, mais il préfère admettre le rejet d’une conjecture par
son antagonisme avec les faits. Ainsi, il soutient que les scientifiques ne voient pas un échec dans la
réfutation d’une théorie, mais plutôt un pas vers la vérité, parce que la connaissance de la fausseté
10 HUME, David. Enquête sur l’entendement humain, Livre de poche, 1999.
11 KANT, Emmanuel. Prolégomènes à toute métaphysique future, § 36, AK IV, p. 362, t. II, p. 97
12 JARRONSSON, Bruno. Invitation à la philosophie des sciences, Éditions du Seuil, 1991, p.162.
13 Ibid., p.165.
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