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1- L'effet du discours fondateur du Caire
Quand on sait que les déclarations, actes et discours du président des Etats-Unis sont préalablement étudiés, analysés et scénarisés,
compte tenu de leurs conséquences géopolitiques, économiques et militaires réelles, on comprend mieux les raisons qui ont poussé
l'administration américaine à insister pour que le discours du Caire soit donné à Al-Azhar.
Il faut bien savoir qu'au début, Moubarak voulait que le discours soit donné à au parlement égyptien, mais les Etats unis ont refusé et
insisté pour que ce soit dans la prestigieuse mosquée.
En plein c?ur d'Al-Azhar, haut lieu du savoir de l'histoire musulmane, citant régulièrement le Coran comme dans un prêche du
vendredi, devant toutes les télévisions du monde arabe, un homme prononce un discours devant une assemblée de dignitaires
musulmans égyptiens. Cet homme n'est pas un imam, mais le président Obama. Quelques morceaux choisis : «Les relations entre
l'islam et l'Occident ont été marquées par des siècles de coopération et de coexistence, mais aussi par des conflits et des guerres de
religion. Plus récemment, ces tensions ont été nourries par le colonialisme, qui a privé de droits et d'opportunités bien des
musulmans (?) Aussi longtemps que nos relations seront définies par nos différences, nous renforcerons ceux qui sèment la haine
plutôt que la paix et ceux qui promeuvent le conflit plutôt que cette coopération susceptible de nous aider tous à instaurer la justice
et la prospérité. Ce cercle du soupçon et de la méfiance doit s'achever.»
Tirant un trait sur ce passé colonial, il va même jusqu'à faire siennes des paroles coraniques qui sont sacrées pour tout musulman, ce
que n'avait jamais fait avant aucun chef occidental.
«Je suis venu ici à la recherche d'un nouveau départ entre nous et les musulmans du monde, un nouveau départ fondé sur l'intérêt
partagé et le respect mutuel. Comme il est dit dans le Saint Coran : ??Soyez conscients de Dieu et dites toujours la vérité''. Je
m'attacherai ici à dire la vérité. En tant qu'étudiant en histoire, j'ai appris la dette de la civilisation envers l'islam. C'est en effet
l'islam qui a porté la lumière de la connaissance pendant des siècles et rendu possibles la Renaissance et les Lumières en Europe.»
Obama souligne aussi l'apport des musulmans à son pays, les États-Unis : «Et depuis notre création, les musulmans américains ont
beaucoup apporté aux États-Unis. Ils ont combattu dans nos guerres, servi dans nos gouvernements, se sont battus pour les droits
civiques, ont monté des affaires, enseigné dans nos universités, excellé dans les enceintes sportives».
Après avoir valorisé l'islam et le rôle du musulman considérant qu'il fallait le respecter comme acteur à part entière du monde,
Barack Obama se pose même en avocat de l'islam dans le monde entier. «Le partenariat entre l'Amérique et l'islam doit se fonder sur
ce qu'est l'islam, et non sur ce qu'il n'est pas. Et je considère qu'il relève en partie de ma responsabilité, en tant que président des
États-Unis, de combattre tous les stéréotypes négatifs associés à l'islam, où qu'ils apparaissent. En outre, en Amérique, la liberté est
indissociable de la liberté de culte. C'est pourquoi le gouvernement américain a recouru aux tribunaux pour défendre le droit des
femmes et des filles à porter le hijab et pour punir ceux qui voudraient les en empêcher. De même est-il important que les pays
occidentaux s'abstiennent d'empêcher les citoyens musulmans de pratiquer leur religion comme ils l'entendent ? par exemple en
décidant arbitrairement quel vêtement une femme musulmane doit porter. Nous ne pouvons pas déguiser l'hostilité à l'égard d'une
religion derrière le prétexte de la défense des libertés». (On soulignera ici l'allusion à peine masquée à la France).
Plus que de la realpolitik ou de pragmatisme, dont ils sont coutumiers, comme leur rapprochement récent avec l'Iran, ou du soft
power, comme les centaines de films financés pour discréditer le communisme, les Etats-Unis vont plus loin.
Ils ont compris que cet ancien type de procédé communicatif de plus en plus visible et «grossier » est contre-productif en terme
d'image, pour les pays «financeurs» face à des jeunes musulmans de plus en plus instruits et connectés au réseaux d'information.
Au lieu d'essayer d'influencer l'autre avec ses valeurs, en montrant qu'elles sont meilleures et qu'il faut les suivre, on se rapproche
fortement des valeurs de l'autre en signifiant qu'on les partage totalement. On va même plus loin en signifiant qu'on n'en est le
défenseur !
Les Etats Unis ne disent plus «suivez l'American way of life parce qu'il est le meilleur» mais, plutôt, «nous vous respectons et nous
respectons votre histoire, votre culture et votre religion.»
Au-delà de ce discours du 4 juin 2009, ce genre avancé de «soft power» ou de «guerre des c?urs» a été décliné partout en Europe via
des opérations puissantes de communication inscrites dans la durée.
2- L'offensive des diplomates américains
Dans le même temps, les diplomates américains ont entamé une véritable campagne de séduction ciblant les jeunes musulmans des
quartiers en Europe, allant même jusqu'à partager régulièrement chez certains l'îftar de rupture du jeûne pendant le ramadan.
3- L'«origine musulmane» d'Obama
Par ailleurs, le message selon lequel les musulmans américains font partie de l'élite américaine a été parfaitement été reçu par les
jeunes musulmans européens.
Aux Etats-Unis, l'image largement médiatisée de la conseillère voilée du président Obama, Rumana Ahmed, a tellement été partagée
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