Chapitre 1
Introduction
Nous commen¸cons par faire deux rappels apparemment sans lien : l’objectif de ce cours est de
d´emontrer un th´eor`eme g´en´eral qui contiendra ces deux r´esultats comme cas particuliers.
1.1 Matrices sym´etriques
Th´eor`eme 1.1.1. Soit Mune matrice sym´etrique r´eelle : il existe une matrice orthogonale Utelle que
U1MU soit diagonale.
Preuve : Consid´erons l’espace F=Cnmuni de sa structure hermitienne canonique et soit Tl’en-
domorphisme de Fdont la matrice dans la base canonique est M. Montrons que
X, Y F, < T (X), Y >=< X, T (Y)>,
c’est- `a dire, comme nous le d´efinirons plus tard, que Test auto-adjoint ou sym´etrique. On prouve
cette ´egalit´e cette ´egalit´e en l’´ecrivant matriciellement : si l’on confond Xavec le vecteur colonne de
ses coordonn´ees dans la base canonique alors
< T (X), Y >=tXtMY =tXtMY =< X, T (Y)>
car la matrice Mest r´eelle. Soit alors λune valeur propre de Mou , ce qui revient au mˆeme, de T
et X0Cnun vecteur propre associ´e. En faisant X=Y=X0dans l’´egalit´e pr´ec´edente, il vient que
λ=λ, c’est-`a-dire que λest r´eel. On restreint alors l’op´erateur T`a l’espace r´eel E=Rn. Le th´eor`eme
´equivaut `a dire que Eest somme directe orthogonale de ses sous-espaces propres. On proc`ede par
r´ecurrence sur n, la dimension de E. la propri´et´e est ´evidente pour n= 1 : supposons la vraie au rang
n1. On se place alors dans Ede dimension net l’on consid`ere un endomorphisme sym´etrique Tde E
muni de son produit scalaire canonique. Par ce qu’on a vu au d´ebut de la preuve Tadmet une valeur
propre r´eelle λet on note H= Ker(TλI).
Lemme 1.1.1. H, l’orthogonal de Hdans Eest Tstable.
Preuve : Soit XHet YH: alors < T (X), Y >=< X, T (Y)>=λ < X, Y >= 0. Il suffit
alors d’appliquer l’hypoth`ese de r´ecurrence `a T|Hpour conclure la preuve du th´eor`eme.
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1.2 Valeurs propres du Laplacien en dimension 1.
Nous utilisons la terminologie ”‘Laplacien”’ car nous g´en´eraliserons plus tard le r´esultat ici ´enonc´e.
Mais il est bien ´evident qu’en dimension 1 le Laplacien est tout simplement la d´eriv´ee seconde. Pr´ecisons
ce que nous entendons par valeur propre d’un tel op´erateur diff´erentiel : ce sont les nombres complexes
λtels qu’il existe une fonction ude classe C2sur [0,1] v´erifiant u(0) = u(1) = 0, u00 =λu. Appelons E
l’espace des fonctions de classe C2sur [0,1] nulles en 0,1. On munit Edu produit hermitien
< u, v >=Z1
0
u(t)v(t)dt
et on observe que, en d´esignant par Tl’op´erateur u7→ u00 (qui n’est pas un endomorphime de E),
u, v E, < T (u), v >=R1
0u0(t)v0(t)dt. Cette identit´e a pour cons´equence imm´ediate que les valeurs
propres de Tsont r´eelles n´egatives. Mais, si λest valeur propre de T, les vecteurs propres associ´es
doivent ˆetre solutions de l’´equation diff´erentielle y00 =λy et donc doivent ˆetre de la forme u(t) =
acos λt +bsin λt. Comme udoit appartenir `a Eon doit avoir de plus a= 0, b sin λ= 0.
Si sin λ6= 0 il est clair que seule la fonction u= 0 convient. Dans le cas contraire, c’est-`a-dire si
λ=n2π2pour un nN, n > 0, alors λest valeur propre et le sous-espace propre associ´e est la droite
vectorielle engendr´ee par un:t7→ sin t.
Observons que (un) est une base orthogonale de L2[0,1]. C’est en effet clairement un syst`eme
orthogonal et si vest orthogonal `a toutes les und´esignons par wla fonction impaire d´efinie sur [1,1]
et qui vaut vsur [0,1]. Alors R1
1w(t) sin(t)dt =R1
1w(t) cos(t)dt = 0,ce qui prouve que wet
donc vsont nulles car les coefficients de Fourier de wsont tous nuls.
1.3 Synth`ese
Quel est le lien entre les deux parties pr´ec´edentes ? Il y est question dans les deux cas de valeurs
propres mais l’op´erateur Tn’est pas un endomorphisme. Les choses s’´eclairent si l’on consid`ere ”‘l’in-
verse”’ de Td´efini sur l’espace des fonctions continues sur [0,1] par S(f) = l’unique fontion ude E
telle que u00 =f. le lecteur v´erifiera sans peine que cette fonction est bien d´efinie : elle a mˆeme une
´ecriture explicite :
u(x) = S(f)(x) = W(f)(x)W(f)(1)x
o`u
W(f)(x) = Zx
0
(Zy
0
f(t)dt)dy.
On peut clairement prolonger Sen un endomorphisme de F=L2[0,1] et l’´etude pr´ec´edente montre
que ses valeurs propres, n´egatives, forment une suite convergeant vers 0. C’est de plus un op´erateur
sym´etrique : en effet posons V(f)(x) = Rx
0f(t)dt (c’est l’op´erateur de Volterra sur lequel nous aurons
l’occasion de revenir). En tous cas W=V2et par int´egration par parties,
< S(u), v >=< V (u), V (v)>W(u)(1)W(v)(1)
et la sym´etrie en d´ecoule. De plus Fest somme directe hilbertienne des sous-espaces propres de S:
l’analogie est maintenant patente et nous verrons dans la suite de ce cours un th´eor`eme g´en´eral conte-
nant ces deux r´esultats comme cas particuliers. Le dernier chapitre nous permettra mˆeme de faire le
lien directement avec le Laplacien ; on le consid`erera en effet comme un op´erateur non born´e auquel on
pourra cependant appliqu´e le formalisme des op´erateurs autoadjoints que l’on aura d´evelopp´e.
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1.4 Exercices
Exercice 1.1 Diagonaliser la matrice A=
1 2 2
2 1 2
2 2 1
Exercice 1.2 Soit Mune matrice r´eelle sym´etrique telle que M3=I. Montrer que M=I.
Exercice 1.3 Soit Mune matrice r´eelle sym´etrique et Tl’endomorphisme de Rndont Mest
la matrice dans la base canonique. D´eterminer en fonction des valeurs propres de Mles quantit´es
inf{hT(X), Xi;||X|| = 1}, et sup{hT(X), Xi;||X|| = 1}.
Exercice 1.4 On appelle matrice de Hilbert d’ordre nla matrice carr´ee (n+ 1) ×(n+ 1) Hn
dont le coefficient sur la ligne iet la colonne jest 1
i+j1.
1. Soit P(X) = a0+a1X+··· +anXnun ´el´ement de Rn[X].
(a) Calculer Z1
0
P2(t)dt en fonction des ak.
(b) En d´eduire que Hnest sym´etrique et positive.
2. (a) En appliquant la formule de Cauchy `a une fonction et `a un contour convenables, montrer
que
Z1
1
P2(t)dt =iZπ
0
P2(eit)eitdt·
(b) En d´eduire que pour toute valeur propre λde Hnil existe un ´el´ement Pλde Rn[X] tel que
λ=iRπ
0P2
λ(eit)eitdt.
(c) Montrer que σ(Hn)[0, π].
Exercice 1.5 Une matrice sym´etrique r´eelle Mest dite positive si σ(M)[0,+[.
1. Montrer que si Mest une matrice sym´etrique positive il existe une matrice Nsym´etrique positive
telle que N2=M.
2. Soit maintenant Aune matrice quelconque. Montrer que tAA et AtAsont sym´etriques positives.
3. (a) Si Aest inversible montrer qu’il existe une matrice sym´etrique positive Set une matrice
orthogonale U(ie telle que tUU =I) telles que A=US.
(b) En utilisant la densit´e de GLn(R) dans Mn(R) prolonger cette d´ecomposition `a toute matrice
A.
Exercice 1.6 Soit Aune matrice sym´etrique r´eelle. Pour tout λσ(A) on pose Eλ= ker(AλI).
On a donc
A=M
λσ(A)
λidEλ·
Soit Rσ(A)l’alg`ebre des applications de σ(A) dans R.´
Etant donn´ee fRσ(A)on d´efinit
f(A) = M
λσ(A)
f(λ)idEλ·
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Montrer f7→ f(A) est un homomorphisme d’alg`ebre entre Rσ(A)et Mn(R).
Exercice 1.7 Soit Aune matrice r´eelle sym´etrique telle que σ(A)]0,+[.
1. Montrer que l’int´egrale Z+
0
etAdt converge.
2. Calculer cette int´egrale.
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