Jean-Sébastien Bach (1685–1750) Le Clavier bien tempéré, premier livre Jean-Sébastien Bach appartenait à une famille de musiciens depuis plusieurs générations. Ses fils perpétuèrent la tradition, et les bases d'un nouveau style de musique qui allait fleurir pendant la derniere moitié du XVIIIème siècle. JeanSébastien Bach lui-même incarne la fin d'une époque musicale, celle où le baroque atteint son apogée dans une magnifique synthèse de I'esprit inventif italien de la mélodie, des formes rythmiques de la danse française, et de la maîtrise allemande du contrepoint. Né à Eisenach en 1685, Bach fut élevé principalement par son frère aîné après la mort prématurée de ses parents. A l'âge de dix-huit ans il décide de faire carrière dans la musique. D'abord en tant que musicien à la cour de Weimar avant de devenir organiste à Arnstadt. Quatre ans plus tard, il s'installe à Mulhouse comme organiste également et l'année suivante il est nommé organiste et musicien de chambre auprès du Duc Wilhem Ernst de Weimar. Après avoir négocié son départ non sans difficulté, il est appelé comme Kapellmeister au service du Prince Léopold d'Anhalt-Cöthen qu'il ne quittera qu'en 1723 pour Leipzig où il devient cantor à l'école St Thomas, et ainsi responsable de musique dans les cinq principales églises de la ville. Bach restera à Leipzig jusqu'à sa mort en 1750. En tant qu'artisan et obligé de respecter les termes de son contrat, Bach composa des musiques répondant aux critères des différents postes qu'il occupa. Il était naturel, étant donné son travail en tant qu'organiste et expert en construction d'orgues, qu'il compose des pièces pour cet instrument. À Cöthen, où les tendances piétistes de la cour rendaient la musique d'église superflue, il produisit beaucoup de musique instrumentale pour l'orchestre de la cour et ses musiciens. À Leipzig il commença par composer une série de cantates pour le calendrier de l'église, s'intéressant par la suite à de la musique instrumentale pour le Collège de Musique à l'université, et à la collection et l'agencement de ses compositions personnelles. Tout au long de sa vie, il continua à composer pour le clavecin et le clavicorde des oeuvres dont une partie lui servit de support pédagogique dans sa famille et pour ses autres étudiants. Le recueil de Préludes et Fugues dans tous les tons, majeurs et mineurs connu sous le titre Le Clavier bien tempéré ou encore Les qurante-huit du fait de leur nombre, explore toutes les possiblités offertes par l'utilisation de différents tons. L'expérimentation de méthodes différentes pour l'accord des claviers pendants la deuxième moitié du XVIIème siècle avait résulté en des systèmes différents qui néanmoins permettaient l'utilisation des tons les plus éloignés. Des compositeurs plus anciens tels que Johann Caspar, Ferdinand Fischer, Pachelbel, Pepusch et Mattheson avaient déjà utilisé certaines méthodes d'accord à tempérament égal dans des recueils de pièces musicales dans un nombre varié de tons. Alors que la nature précise du système d'accord utilisé par Bach n'est pas connue d'une manière certaine, son accord bien tempéré a rendu possible l'utilisation de tous les tons. Quoique dans son système de tempéraments égaux certains tons étaient probablement plus égaux que d'autres, un effet que l'on a perdu dans les techniques d'accord démocratiques contemporaines où tous les intervalles sur le clavier sont égaux, même s'ils sont mathématiquement imprécis. Alors que le deuxième livre de Préludes et Fugues fut assemblé à Leipzig, pour la plupart entre 1738 et 1742, la première série fut créée par Bach à la fin de son séjour à Cöthen et date de 1722. Elle inclut des oeuvres plus anciennes dans une compilation qui fut finalement utilisée comme le présume son long titre: Collection de Préludes et Fugues dans tous les tons et demi-tons, pour l'utilisation et la pratique des jeunes musiciens qui veulent apprendre, ainsi que de ceux qui sont déjà expérimentés dans ce domaine d'études. Différentes copies de ce livre circulèrent, qui fut revu et corrigé par Bach à plusieurs reprises, mais la version finale fut délivrée, semble-t-il, en 1740, alors que Bach travaillait déjà sur sa seconde série de 24 préludes et fugues. Le premier livre contient des préludes tirés du Klavierbüchlein dédié à Wilhelm Friedemann Bach, son fils aîné de sa première femme né en 1710. Alors que la forme et les sentiments des préludes varient, les fugues sont soumises aux règles plus strictes du contrepoint où un sujet est énoncé, suivi de réponses en imitation d'une seconde, puis d'une troisième et une quatrième voix qui reprennent ce sujet. La réponse peut s'accompagner d'un contre-sujet, un thème secondaire qui s'accorde avec le sujet mais qui a ses caractéristiques propres. Des passages supplémentaires apparaissent intercalés entre d'autres occurences du sujet dans des tons différents de ceux des autres voix ou parties. D'autres techniques utilisées incluent la strette, où l'entrée de certaines voix et le sujet principal se chevauchent. D'autres sujets complémentaires peuvent être amenés, de nouveau introduits par l'imitation d'une voix par une autre, et peuvent être combinés aves le sujet principal. Le sujet principal lui-même peut apparaître sous forme inversée, renversée ou augmentée avec des notes plus longues, ou diminuée avec des valeurs de notes plus courtes et plus rapides. Le vrai art, c'est de dissimuler l'art, et Bach y parvient, comme toujours, à travers sa musique qui ne se soumet jamais aux exigences de la technique. Les Préludes et Fugues furent composés pour des instruments à clavier non spécifiés. Certains suggèrent les sonorités plus douces du clavicorde, d'autres le son plus fort du clavecin, et certains suggèrent même les notes plus soutenues de l'orgue. CD 1 Le premier Prélude en ut majeur est l'un des plus connus, en grande partie, il faut le reconnaître, parce qu'il a été repris par Charles Gounod qui lui a ajouté une mélodie et a intitulé cette nouvelle version Méditation, dont ont été rajouté les paroles de l' Ave Maria. Une fugue à quatre voix lui succède dont le sujet est énoncé par l'alto, auquel répond le soprano, suivi du ténor et de la basse. Le Prélude en ut mineur se caractérise par un mouvement agité de double-croches qui mènent à une cadence finale. Dans la fugue à trois voix les voix apparaissent avec l'alto en premier, suivi du soprano puis de la basse. Le Prélude en ut dièse majeur alterne entre le registre aigu et le registre grave, avec un contenu dérivé des origines les plus simples et qui mène à une séance de syncopes finale, alors que la main droite joue des notes à contre-temps contre le rythme réglé de la main gauche. Il y a une fugue à trois voix, dont le sujet est introduit par le soprano, auquel répond l'alto, suivi de la basse et développé assez longuement. Le Prélude en ut dièse mineur, en 6/4, permet à la main gauche de faire écho à la main droite dans les premières mesures. Cela mène à une fugue alla breve, avec son sujet constitué de quatre notes solennelles énoncées par la basse à laquelle répondent les autres voix successivement en ordre ascendant. Dans celle-ci la gamme complète des notes basses du clavier est explorée et la technique de la pédale, l'élaboration de thèmes superposés à une note soutenue par la pédale dans une voix s'établit vers la fin de la fugue. Le Prélude en ré majeur respecte le style d'une toccata, le rythme continu des double-croches de la main droite culminant en une cadence brève et plus rapide et des accords finaux impressionnants. La fugue à quatre voix a un sujet aux rythmes variés, énoncé par la basse et à laquelle répondent d'autres voix dans l'ordre ascendant. Lui succède un Prélude en ré mineur constitué d'un rythme soutenu de double-croches en triolets à la main droite et d'une fugue à trois voix qui répondent au sujet en ordre descendant. Le Prélude en mi bémol majeur est énoncé par une toccata suivie par son imitation en contrepoint d'une double fugue, un sujet bref introduit par le ténor, auquel la basse répond immédiatement, puis le soprano et l'alto successivement. Le second sujet de fugue, qui se superpose à une version du premier, a des notes plus courtes. Ce prélude long et élaboré est suivi d'une fugue à trois voix où les voix en ordre descendant répondent au sujet du soprano. Le style recitatif du Prélude en mi bémol mineur, un ton avec six bémols, mène à une fugue à trois voix en ré dièse mineur, avec six dièses et un changement enharmonique qui ne font aucune différence pratique clans le choix des notes à frapper par le musicien. La voix du milieu annonce le sujet, à laquelle répond la voix du haut avant de se mêler à celle du bas, dans un mouvement qui comprend des inversions du sujet ainsi que des augmentations pour réapparaître plus tard en mouvement ralenti. Le Prélude en mi majeur en 12/8 est accentué par des rythmes triples, alors que la fugue à trois voix avec son sujet énoncé par la voix du milieu à laquelle répondent la voix du haut et ensuite la voix du bas, se caractérise par une cassure idiosyncratique du rythme du sujet qui est reproduite à chaque nouvelle apparition. Le Prélude en mi mineur mène à un final rapide avec la main droite et la main gauche qui fonctionnent souvent en parallèle. Une fugue à deux voix y succède, un bon exemple de ce qui peut être obtenu en utilisant une forme de fugue plus simple, avec un sujet qui se prête à un traitement chromatique. La onzième pièce de la série comprend un Prélude en fa majeur en 12/8 principalement dans un style de toccata avec des notes rapides et un rythme constant. La fugue à trois voix, dont le sujet est de nouveau annoncé par la voix du milieu, à laquelle répondent la voix du haut puis celle du bas, a une structure particulièrement simple. Le Prélude en fa mineur constitue une introduction majestueuse à une fugue à quatre voix, dont le sujet chromatique apparaît tout d'abord dans la voix de ténor, suivie de l'alto, de la basse et finalement par le soprano avec une fleuraison de contre-sujets d'une complexité contrapuntique. Le traitement mélodique du Prélude n°13 en fa dièse majeur est particulièrement intéressant, quelque soit le peu d'enthousiasme qu'un étudiant peut avoir à affronter un ton à six dièses. Le ton apporte plus de complexité dans la fugue à trois voix. On répond au sujet avec des voix en ordre descendant, puisque les fugues apportent inévitablement des modulations, tandis que le sujet revient dans des tons différents. Le Prélude en fa dièse mineur apporte un peu de soulagement au musicien avec en général une forme à deux voix dans laquelle une des voix imite l'autre à la manière d'une invention à deux parties. La fugue à quatre voix, en 6/4, a un sujet relativement étendu, énoncé tout d'abord par le ténor, suivi par l'alto, la basse et finalement par le soprano. CD 2 Le Prélude en sol majeur est d'une relative simplicité, un mouvement à deux voix, avec une fugue à trois voix, au sujet de laquelle répondent des voix en ordre descendant. Le Prélude en sol mineur, s'ouvre avec un trille prolongé de la main droite, tandis que le mouvement se déplace en avant conduisant à une fin qui ressemble à une cadence. Il y a une fugue à quatre voix, le sujet apparaissant dans cette ordre: l'alto, le soprano, la basse et le ténor. Le Prélude n°17 en la bémol majeur fait grand cas de sa figure d'ouverture à laquelle la main gauche et le sujet répondent dans un dialogue continu. Il y a une fugue à quatre voix, les voix apparaissant cette fois dans l'ordre suivant: ténor, basse, soprano, alto avec un contre-sujet caractéristique. Ceci est suivi par un Prélude en sol dièse mineur, utilisant l'identité au clavier de sol dièse et la bémol. Le Prélude à trois voix est suivi par une fugue à quatre voix avec un sujet entrant dans l'ordre: ténor, alto, soprano, et basse. Le Prélude en la majeur est marqué par la réapparition de sa figure d'ouverture à la manière d'une fugue avec deux autres sujets ajoutés et traités en conséquence. Il conduit à “une fugue à trois voix dont la mesure est en 9/8, les voix entrant en ordre descendant. Un agréable Prélude en la mineur est couplé avec une fugue à quatre voix et un sujet prolongé. Celui-ci apparaît d'abord avec l'alto, suivi par le soprano, la basse et le ténor, ce qui donne un mouvement d'une certaine longueur et laissant ainsi une place pour les notes soutenues requises par l'usage de la pédale de tonique et qui semble appeler l'usage d'un clavecin à pédale où d'un orgue muni d'un banc de pédales afin de permettre au musicien de tenir une note plus basse, pendant que les doigts d'une main de taille normale sont occupés ailleurs sur le clavier. Le Prélude en si bémol majeur permet à la main droite d'offrir un accompagnement délicat à la main gauche et comprend des passages ressemblant à des cadences. Il conduit à une fugue à trois voix avec un long sujet traité par des voix en ordre descendant, dès sa première apparition. Le Prélude n° 22 en si bémol mineur est typiquement baroque dans sa forme et sa texture, un vrai prélude avec une fugue alla breve à cinq voix entrant en ordre descendant et suggérant les notes soutenues de l'orgue. Le Prélude en si majeur propose trois parties; il est couplé avec une fugue à quatre voix, les voix entrant dans l'ordre avec le ténor, puis l'alto, ensuite le soprano et enfin la basse, amenant un sujet marqué par un trille sur sa pénultième note, bien que les limites de la main empêchent parfois sa réapparition dans certains contextes où le sujet est présenté. Le livre se termine avec le Prélude et Fugue en si mineur, le Prélude utilisant un contrepoint fugal initial sur une basse mouvante. La dernière fugue marqué Largo et à quatre voix qui entrent dans l'ordre alto, ténor, basse et soprano, a un thème chromatique étendu utilisant chacune des douze notes de la gamme chromatique. Cela fournit une conclusion solide à ce premier volume d'une très remarquable collection. C'est l'Ancien Testament du musicien par rapport au nouveau monde proposé par Beethoven où on remarque une progression dans l'utilisation du style contrapuntique à travers l'évolution de ses 32 sonates. Keith Anderson Traduction: Philip Saffery Toi Te Reo Services