Les canaux de transmission de la politique monétaire en France

Analyses Économiques
DP N° 47 – Sept. 2004
Les canaux de transmission de la politique monétaire en France1
1. Ce document a été élaboré sous la responsabilité de la Direction de la Prévision et de l’analyse économique et ne reflète pas nécessairement la posi-
tion du Ministère de l’Économie, des Finances et de l’Industrie.
La littérature économique et financière s’attache davantage à étudier le niveau des taux directeurs
décidé par les banques centrales qu’à la manière dont l'économie réelle réagit aux variations des taux
d'intérêt. Pourtant, pour que la politique monétaire joue son rôle, il est souhaitable que les canaux de
transmission entre la sphère monétaire et l'économie réelle soient efficaces. Les travaux académiques
ainsi qu'un certain nombre de faits stylisés sugrent une importante hétérogénéité en la matière au
parmi les pays industrialisés. En particulier, il apparaît clairement que l'économie de la zone euro est
moins sensible aux variations des taux directeurs que celle des États-Unis. Au sein de la zone euro, la
France se situe plutôt parmi les économies où la politique monétaire a l’impact le plus faible.
La relative faiblesse des canaux de transmission de la politique monétaire en France peut s'expliquer
essentiellement par la structure particulière du bilan des agents. Les ménages et les entreprises françai-
ses sont plutôt moins endettés que leurs homologues de la zone euro, et lorsqu'ils sont endettés, ils le
sont souvent à taux fixes. De plus, une partie importante de l'épargne des ménages et des ressources
des banques est composée de produits réglementés dont la rémunération ne suit pas sytématiquement
les variations de taux directeurs. En outre, les études économétriques laissent penser que les banques
françaises ne répercutent que partiellement les variations des taux directeurs dans la fixation des taux
des crédits.
Des spécificités réglementaires pourraient être à l'origine de cette situation. En particulier, les coûts
élevés et le manque d’efficacité des garanties expliqueraient le faible développement du crédit hypothé-
caire. La non-rémunération des dépôts ainsi que le poids important des produits d'épargne réglementée
dans le bilan des banques ne les inciterait pas à répercuter étroitement les variations de taux sur les cré-
dits. Il est également probable qu’une plus forte concurrence dans le secteur bancaire pourrait amélio-
rer la transmission de la politique monétaire à l’économie réelle.
2
Les canaux de transmission de la politique monétaire
désignent les mécanismes par lesquels une variation
des taux directeurs a un impact sur le comportement
des agents économiques et sur la croissance. Ces
canaux sont multiples et peuvent inclure, outre l'effet
direct des taux d'intérêt sur les conditions d'endette-
ment, le taux de change, le coût des capitaux propres,
le patrimoine financier et immobilier des agents privés
et la qualité de la structure de leur bilan.
1. Une transmission relativement faible de
la politique monétaire en France
1.1 Des indices d’un moindre impact de la poli-
tique monétaire en France
La question de l'ampleur exacte des effets comparés
des politiques monétaires dans les différents pays est
encore largement débattue. Il est clair que ces effets
sont plus forts aux États-Unis que dans la zone euro.
Il existe également de fortes présomptions pour con-
sidérer que l’économie française est plutôt moins réac-
tive aux taux d’intérêt que la moyenne de la zone euro.
Les travaux académiques sur cette question se divisent
en deux catégories : les modèles macro-économétri-
ques, qui font intervenir des équations de comporte-
ment des différents agents économiques (modèles
multinationaux, modèles des banques centrales) et les
analyses économétriques directes fondées unique-
ment sur les liens statistiques entre les taux d’intérêt et
les variables réelles (modèles vectoriels auto-régressifs
ou VAR).
Les modèles macro-économétriques estiment en
moyenne qu'une baisse de 100 points de base du taux
directeur de la BCE augmente le PIB de la France
d'environ 0,3 point au bout de deux ans, contre 0,45
pour lensemble de la zone euro (cf. tableau1). Le
résultat est certes fragile, et seule l’étude de Els et alii
établit une comparaison directe entre l’effet en France
et l’effet en zone euro2.
Les modèles économétriques directs ne fournissent
pas de résultats probants, les intervalles de confiance
restant trop larges pour permettre d'établir des com-
paraisons précises. De plus, la création récente de
l'Union Monétaire Européenne constitue un change-
ment de régime qui rend délicates les estimations de ce
type de modèle sur longue période.
Par ailleurs, l'effet de la politique monétaire serait plus
marqué aux États-Unis que dans la zone euro. Ainsi,
selon le modèle FRB/US de la Fed, l'effet cumulé au
bout de 2 ans d'une baisse de 100 points de base sur
l'activité serait de 1,2 points de PIB aux États-Unis
(contre 0,7 points en Europe selon le modèle AWM
de la BCE).
Tableau 1 : résultats des modèles macroécono-
miques pour la France
1.2 La faiblesse de la réaction de la consomma-
tion des ménages aux conditions monétaires
Lorsque les études distinguent davantage les canaux
de transmission (voir annexe), elles mettent en évi-
dence des différences significatives entre les États-
Unis et la zone euro3. L'influence de la politique
monétaire aux États-Unis passerait principalement
par son impact sur la consommation des ménages :
trois ans après une intervention monétaire, près de
60% de l'ajustement du PIB sur la période s'explique-
rait aux États-Unis par l'évolution de la consomma-
tion. En Europe, c’est l'investissement qui
constituerait le principal facteur de réaction de l'éco-
nomie à une intervention de politique monétaire. De
plus, on constate une importante hétérogénéité au
sein même de la zone euro.
Plusieurs faits stylisés peuvent être avancés pour expli-
quer ces différences :
• Aux États-Unis, la politique monétaire agirait
davantage sur la consommation des ménages du
2. Cette étude est probablement la plus fine, dans la mesure où elle
s'appuie sur les modèles des banques centrales qui rendent le mieux
compte des particularités nationales des mécanismes de transmis-
sion de la politique monétaire.
Baisse de 100 points de base
des taux directeurs
pendant 2 ans
Effet maximal
en points de PIB
France Zone Euro
Els et aliia (2001)
a. Els, P. van, Locarno, A., Morgan, J., et Villetelle, J.-P., (2001)
«Monetary Policy Transmission in the Euro Area: What Do
Aggregate and National Structural Models Tell Us?», ECB Working
Paper No 94.
0,20 (2 ans) 0,38 (2 ans)
McAdam et Morganb (2001)
b. Mc Adam, P., and Morgan J., (2001), «The Monetary Mechanism
At the Euro-Area Level: Issues and Result Using Structural
Macroeconomic Models», ECB Working Paper No 93.
0,29 (2 ans) 0,31 (2 ans)
BRIc (1995)
c. Banque des Règlements Internationaux, (1995), «Financial
Structure and the monetary policy transmission mechanism».
0,36 (2 ans)
Baghli et aliid (2003)
d. Baghli, M., Bruhnes-Lesage, V., De Bandt, O., Fraisse, O., et
Villetelle, J-P., (2003), «Le Modèle de Prévision Mascotte pour
l'Économie Française: Principales propriétés et Résultats de
Variantes», Bulletin de la Banque de France, 118:63-86, Octobre
2003.
0,24 (3 ans)
AWM (BCE) 0,7 (2 ans)
Mésange (DP)e
e. Document de Travail de la DP (2002): «Présentation du modèle
MESANGE»
0,5 (2 ans)
3. Angeloni, I, Kashyap, A, Mojon, B et Terlizzese, D «The output
composition puzzle», NBER working paper 9985, Septembre 2003.
3
fait d'un marché du crédit plus efficace (fort déve-
loppement du marché hypothécaire, des crédits à la
consommation, des crédits renégociables) et des
effets richesse liés aux évolutions boursières et
immobilières.
En Europe, la politique monétaire agirait davan-
tage sur l'investissement en raison de l'importance
du canal du crédit. Ceci s'explique par un moindre
recours des entreprises au financement direct sur
les marchés financiers. Les ménages quant à eux
s'endettent principalement à taux fixe et ne rené-
gocient guère leurs emprunts, ce qui explique la
relative faiblesse du canal du taux d'intérêt, qui ne
joue qu'à la marge sur les nouveaux crédits, alors
que le stock des encours et les flux d'intérêt restent
inchangés.
Le canal du crédit exercerait une influence déter-
minante en Italie et en Allemagne, mais la politique
monétaire agirait en revanche essentiellement via le
canal traditionnel des taux d'intérêt en Espagne et
en Finlande où le canal du crédit serait quasiment
absent4.
Le canal classique du taux d'intérêt agirait diffé-
remment entre les pays de la zone euro. La part des
taux fixes dans l'endettement des ménages est en
effet très hétérogène entre des pays comme les
Portugal où l'ensemble des crédits hypothécaires
sont à taux variable, et des pays comme les Pays-
Bas où 85% des crédits sont à taux fixe
Le cas de la France est moins clair : Angeloni et
alii5 font état de résultats divergents. Les modèles
macroéconomiques tendent à montrer que l’éco-
nomie française est moins réactive que la moyenne
de la zone euro. Les modèles VAR montrent plutôt
le contraire, mais ne permettent pas réellement de
conclure compte-tenu des larges intervalles de
confiance entourant les estimations.
1.3 Le cas de la France : un endettement plus
faible et de préférence à taux fixe
Les ménages et les entreprises françaises sont plutôt
moins endettés que la moyenne de la zone euro, et le
sont préférentiellement à taux fixe. Ainsi, l'endette-
ment brut des ménages français n'est que de 33% du
PIB, contre 36% en Espagne et 52% en Allemagne,
tandis que l'endettement des entreprises françaises est
de l'ordre de 55% du PIB, contre 59% en Allemagne
et 81% en Espagne.
L'exemple des crédits immobiliers, qui représentent
60% de l'endettement des ménages français est parti-
culièrement révélateur. Les Français s'endettent prin-
cipalement à taux fixe difficilement révisable,
contrairement aux ménages américains, britanniques
ou espagnols qui privilégient les taux variables ou aisé-
ment renégociables. Par conséquent, le stock des cré-
dits existants des ménages français de même que les
flux d’intérêt sur ces crédits sont insensibles à la poli-
tique monétaire, qui n’agit que par le biais de l’attrac-
tivité des nouveaux crédits.
Tableau 2 : l'endettement immobilier
en Europe en 2002
Source : Banque Centrale Européenne, European Mortgage
Federation, Eurostat.
En ce qui concerne les crédits à la consommation qui
sont des crédits à taux courts et donc relativement
sensibles aux effets des politiques monétaires, les
ménages français y ont moins recours que ceux
d'autres pays de la zone euro. Les encours représen-
taient 8% du PIB en 2001 en France, contre 10,8% en
Allemagne, 14,3% au Royaume-Uni, 9,6% en Espa-
gne.
1.4 Une répercussion partielle des variations de
taux par les banques
les études disponibles suggèrent également que les
banques françaises ne répercutent que partiellement
les baisses des taux directeurs sur leur offre de crédit,
ce qui a pour effet de limiter l'impact des politiques
monétaires sur l'activité économique. Une étude de la
Banque des Règlements Internationaux6 s'est inté-
ressé aux ajustements des taux pratiqués par les ban-
ques pour des crédits à court-terme aux entreprises à
la suite d'une modification des taux directeurs. En
Allemagne, un trimestre après la modification du taux
directeur, seul un tiers de cette révision a été répercu-
tée sur le taux de crédit, mais l'ajustement se poursuit
4. Ceci pourrait s'expliquer par un environnement réglementaire pro-
tégeant les banques et réduisant le caractère procyclique du crédit
bancaire (en particulier en Finlande avec la présence d'un important
réseau de banques mutualistes).
5. Angeloni, I, Kashyap A., Mojon, B., Terlizzese, D. «Monetary
policy transmission in the euro area: where do we stand?», ECB
Working paper No 114 (2001).
Part de l’endettement
immobilier
dans le PIB (%)
Part des crédits
immobiliers
à taux variable (%)
Pays-Bas 88 15
Royaume-Uni 62 72
Allemagne 51 72
Portugal 50 70
Espagne 38 75
Finlande 32 97
France 19 20
Italie 11 56
6. BRI, Working paper N° 27, «The response of short-term bank len-
ding rates to policy rates: a cross-country perspective» by Claudio
E.V. Borio and Wilhelm Fritz, May 1995.
4
sur une longue période et atteint 75% de la révision au
bout d’un an. Dans d’autres pays comme le Royaume-
Uni ou les Pays-Bas, l’ajustement est rapide et total.
En France, les banques répercuteraient immédiate-
ment la moitié de la variation du taux directeur (au
bout d'un mois) mais l’ajustement s’arrêterait là et
n’irait pas au delà les trimestres suivants.
Tableau 3 : réaction des taux de crédit bancaire
à une variation du taux de la Banque Centrale
Source : BRI (1995). Note de lecture : Réaction à une augmentation de
100 points de base des taux directeurs. Les taux de crédit s'appliquent à
des prêts à court terme, en général des prêts pour découvert à des
clients entreprises.
1.5 Une explication possible à certains écarts de
conjoncture
Cette situation explique en partie les écarts de con-
joncture de ces dernières années. En particulier :
Aux États-Unis, d'après une étude récente de la
Mortgage Bankers Association, les ménages
auraient refinancé7 1200 Mds de dollars en 2001,
abaissant leur coût du crédit moyen de 120 points
de base. Ce refinancement aurait alors conduit à
une hausse du revenu disponible brut de 0,2% sim-
plement par baisse des charges d'intérêt. Le refi-
nancement «cash out» serait beaucoup plus
important : selon Freddie Mac, les ménages
auraient augmenté leur dette de 140 Mds de dollars
en 2001, ce qui correspond à l'équivalent de 2% du
revenu disponible brut annuel.
La vigueur de l'économie espagnole, qui croît à un
rythme supérieur à celui de la zone euro depuis
huit ans, pourrait s'expliquer en grande partie par
la consommation et l'investissement en construc-
tion. En Espagne, la part élevée des crédits à taux
variables (qui représentaient plus des trois quarts
des crédits au secteur privé en 2002) a assuré une
transmission rapide des baisses des taux longs aux
financements des investissements en construction,
que ce soit des ménages ou des entreprises.
2. Une grande partie de ces singularités est
d'origine réglementaire
2.1 En France, la réglementation explique en
partie cette situation
Le relativement faible développement des crédits
hypothécaires à taux variable ou renégociable peut
s'expliquer par des particularités du cadre
réglementaire :
Les renégociations de crédits immobiliers sont cer-
tainement limitées par le montant des frais facturés
en cas de remboursement anticipé. Contrairement
au Royaume-Uni, aux États-Unis8 ou à l'Espagne,
où les crédits renégociables sans frais sont la
norme, les banques françaises peuvent exiger
jusqu'à 3% du capital restant dû en cas de rem-
boursement anticipé.
Selon une étude de l'OCDE9, le faible développement
du crédit hypothécaire en France résulterait également
d'un manque d'efficacité des garanties hypothécaires
qui n'inciterait pas les établissements de crédit à déve-
lopper cette forme d'endettement :
Les frais de prise et de mainlevée sont importants
et rendent le coût de l'hypothèque souvent supé-
rieur à celui de la caution. De plus, les voies d'exé-
cution de l'hypothèque judiciaire sont plus longues
et moins efficaces qu'au Royaume-Uni et en Espa-
gne. En particulier, les coûts et les délais de saisie
apparaissent élevés en France (7 000€ et entre 15
et 25 mois pour un bien d'une valeur de 100 000€,
contre seulement 4 000€ et 8 à 12 mois au
Royaume-Uni selon l'European Mortgage Federa-
tion10).
2.2 Les produits «rigides» occupent une place
importante dans les bilans des agents
Selon une étude du FMI11, les produits d'épargne
réglementée atténueraient significativement la trans-
mission des variations des taux directeurs aux taux des
crédits bancaires. En effet, ces placements peuvent
être considérés comme «rigides», dans la mesure où
leurs taux de rémunération ne dépendent pas des con-
ditions monétaires courante : les taux des Livrets A et
Après
1 mois
Après
1 trimestre
Après
2 trimestres
Après
1 année
France 51 53 55 58
Allemagne 0 36 53 74
Pays-bas 71 95 102 103
Belgique 63 95 93 93
Espagne 0 100 104 105
Italie 19 72 97 106
Royaume-Uni 100 100 100 100
États-Unis 70 77 83 85
7. Aux États-Unis, la prévalence des crédits renégociables sans frais
permet aux ménages de profiter des baisses de taux en diminuant
leurs mensualités.
8. Aux États-Unis, des incitations réglementaires ont favorisé le déve-
loppement des crédits renégociables sans frais, tandis que la situa-
tion au Royaume-Uni semble être le résultat de biais régle-
mentaires.
9. «Housing markets, wealth and the business cycle in OECD coun-
tries» Working Paper 2004-17, Juin 2004.
10. European Mortgage Federation (2002) «Efficiency of Mortgage
Collateral in the European Union».
11. «Public intervention in financial markets: obstacles to monetary
transmission», FMI, Juin 2004, à paraître.
5
des PEL/CEL sont fixés de manière réglementaire, et
ne suivent pas intégralement ni immédiatement les
mouvements des taux de marché. Depuis le 1er août
2004 cependant, le taux du livret A est déterminé à
partir d’une formule prenant en compte le taux Euri-
bor 3 mois et l’inflation, ce qui réduit fortement les
rigidités de l’épargne réglementée. Par ailleurs, la non-
remunération des dépôts à vue constitue aussi une
source de rigidité par rapport à la politique monétaire.
Les ressources rigides constituent l'équivalent de 49%
des crédits à la clientèle non-financière des banques
françaises. Lors d'une baisse des taux directeurs, le
coût des ressources des banques devrait diminuer, leur
permettant de baisser les taux des crédits à la clientèle,
mais les ressources rigides contrarient ce mécanisme :
La «rente» que constituent pour les banques les
dépôts à vue non-rémunérés (25% des crédits à la
clientèle), diminue avec les baisses de taux.
Le coût relatif des CODEVI et des PEL/CEL
(23% des crédits à la clientèle) augmente, ce qui
pèse sur la marge des banques.
Les banques sont incitées à ne répercuter que par-
tiellement les baisses de taux pour maintenir leur
marge.
A l'inverse, les banques britanniques ont des ressour-
ces composées pour l'essentiel d'engagements à court-
terme rémunérés à taux variable.
Ces produits rigides représentent également 24% du
patrimoine financier des ménages soit 727Mds
d'euros. Ils amortissent les variations des conditions
de rémunération de l'épargne, et créent des effets
d'aubaine qui jouent à l'encontre de la politique moné-
taire en perturbant les arbitrages entre épargne et con-
sommation.
2.3 Davantage de concurrence dans le secteur
bancaire pourrait améliorer la transmission
de la politique monétaire
De manière générale, la concurrence entre établisse-
ments financiers doit contribuer à un ajustement
important et rapide des taux de marché aux variations
des taux directeurs. Sur ce point, il est difficile
aujourd’hui d’apporter une conclusion claire sur la
situation de la France.
Parmi les points qui plaideraient pour l’existence
d’une concurrence satisfaisante, on peut citer les
suivants :
Au niveau national, aucun réseau bancaire ne
dépasse 15% de part de marché sur les crédits à la
clientèle12.
Pour ce qui concerne la concentration, la France se
situe dans une position intermédiaire en terme
d'indice de Herfindhal-Hirschman13 (IHH), avec
un IHH de 0,1 contre 0,04 au Royaume-Uni, 0,06
en Espagne et plus de 0,15 aux Pays-Bas, en Belgi-
que et en Suède14.
Cependant, d’autres indices laissent penser que la con-
currence dans le secteur bancaire français pourrait être
intensifiée :
Au niveau local, la concentration apparaît beau-
coup plus forte qu’au niveau national ; dans la
majeure partie des départements, deux établisse-
ments15 représentent conjointement plus de 50%
des crédits à la clientèle16.
Le nombre de guichets est beaucoup plus élevé
que chez nos voisins : la France dispose de 0,67
guichet pour 1000 habitants17, contre seulement
0,24 au Royaume-Uni et 0,49 pour l'Union Euro-
péenne. Ce niveau est stable depuis 1990 en dépit
du mouvement de concentration bancaire initié en
1996.
Comme chez beaucoup de nos voisins (selon le
World Retail Banking Report 200418), l’existence
de subventions croisées entre services peut empê-
cher des acteurs spécialisés de proposer des servi-
ces à prix plus bas. Elle permet aux banques de
proposer des «paquets» de services les autorisant à
améliorer leurs marges au détriment de la lisibilité
de la tarification service par service. Le statu-quo
sur la non-facturation des chèques et la non-rému-
nération des comptes courants y concourt sans
doute.
Frédéric CHERBONNIER
Xavier PAYET
Directeur de la Publication : Jean-Luc TAVERNIER
Rédacteur en chef : Philippe GUDIN DE VALLERIN
Mise en page : Maryse DOS SANTOS
(01.53.18.56.69)
12. À l’exception de l’entité regroupant les réseaux du Crédit Agricole
et du Crédit Lyonnais qui représente plus de 25% des crédits.
13. Il mesure la concentration en additionnant les carrés des parts de
marché de toutes les entreprises du secteur. Plus il est élevé, plus le
secteur est concentré. On considère ici l'indice calculé sur les cré-
dits à la clientèle non-bancaire en 1999.
14. Pour autant, le nombre équivalent de banques (au sens de réseaux
bancaires) par million d'habitants est seulement de 0,2 en France,
ce qui la place en queue de peloton européen
15. Au sens d’une filiale d’un groupe, d’une caisse régionale ou d’une
banque indépendante.
16. Selon le Rapport Annuel 2003 des établissements de Crédit et des
Entreprises d’Investissement.
17. En tenant compte des guichets de la Poste.
18. Cap-Gemini-Ernst&Young, ING, European Financial Management
and Marketing Association «World Retail Banking Report 2004».
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