HPT Formation scientifique UAA19 AUTEURS : Brigitte Janssens, Pascale Sartiaux Fiche d’expérience 13 La protection du fer contre la corrosion Cette expérience peut être réalisée par les élèves moyennant le respect de certaines précautions (voir le point 6. Sécurité) : dans ce cas, les points 2, 3, 4 et 7 leur sont destinés. 1. Objectifs de l’expérience Par cette expérience, les élèves découvrent quelques systèmes de protection électrochimique contre la corrosion du fer. 2. Description générale La corrosion du fer, si on n’y prend garde, peut mener à des catastrophes (pensons au naufrage de l’Erika en 1999, entrainant une marée noire au niveau des côtes bretonnes). Cette corrosion est un fléau industriel. On estime en effet que 20 % de la production mondiale d'acier (mélange de fer et de carbone, contenant moins de 2 % de carbone) sont perdus chaque année sous forme de rouille. Comment protéger les structures en fer contre leur corrosion ? Sur base d’essais de protection du fer par contact direct de ce dernier avec quelques métaux, on va montrer qu’il peut être protégé de la corrosion par le principe de l’anode sacrificielle. 3. Matériel et produits - 1 plaque chauffante ou un micro-onde 1 erlenmeyer de 500 mL 2 boites de Pétri ou 2 béchers de 250 mL 4 clous en fer décapés Rubans de cuivre, zinc, magnésium Eau déminéralisée Feuilles de gélatine alimentaire ou agar-agar ou gélose Solution d’hexacyanoferrate (III) de potassium (K3Fe(CN)6) 0,1 M Phénolphtaléine en solution 0,1 %1 1 La phénolphtaléine est classée mutagène, cancérigène 1B pour une concentration supérieure à 1%. La concentration utilisée dans la solution indicatrice acidobasique est inférieure à cette limite mais il n’en est évidemment pas de même lors de la préparation de cette solution indicatrice acido-basique. 1 Document1 4. Procédure 1) Dans le bécher, préparer environ 100 mL de gélatine en suivant les instructions du fabricant. Utiliser de l’eau déminéralisée.2 2) Ajouter à la gélatine environ 5 gouttes d’hexacyanoferrate de potassium 0,1 M et 3 gouttes de phénolphtaléine à 0,1 %. Bien mélanger. Laisser tiédir. 3) Entourer le 1er clou en fer d’un tortillon de cuivre en veillant à assurer un contact intime entre le clou et le tortillon. 4) Procéder de même pour les 2 autres clous, l’un avec le tortillon de zinc, l’autre avec le tortillon de magnésium. 5) Déposer chaque clou avec son tortillon dans une boite de Pétri. 6) Dans la 2e boite de Pétri, déposer le clou seul. Elle servira de témoin. 7) Verser la solution de gélatine dans chaque boite de Pétri jusqu’à recouvrir entièrement les clous. 8) Observer à intervalles réguliers pendant le reste du cours et après une nuit. 5. Notes pour le professeur Dans la boite de Pétri contenant le clou sans tortillon, on observe que les parties extrêmes du clou (pointe et tête) sont entourées d'une zone rose alors que la partie centrale est entourée d'une zone bleue. La coloration rose aux extrémités indique la formation d'ions hydroxyde OH− qui réagissent avec la phénolphtaléine. La coloration bleue qui apparaît dans la zone centrale indique la formation d'ions ferreux Fe2+ qui réagissent avec les ions hexacyanoferrate III. Le fer métallique a dont été oxydé en ions ferreux Fe2+. Le clou agit comme une micropile : l’oxydation du fer et la réduction du dioxygène ont lieu simultanément mais dans des zones différentes. On identifie le site anodique (l’oxydation du fer qui libère des électrons) en bleu et le site cathodique (la réduction du dioxygène qui consomme des électrons) en rose. Les électrons produits dans la zone d’oxydation du fer sont consommés dans la zone de réduction du dioxygène car ils se déplacent à l’intérieur du clou. Les zones anodiques et cathodiques constituent les électrodes de la pile dont l'électrolyte est la gélatine ; le circuit extérieur est le clou lui-même. La micro pile ainsi formée est en court-circuit puisque anode et cathode sont deux parties du même clou. Dans la boite de Pétri contenant le clou avec le tortillon en zinc, le clou est entouré d’une coloration rose seulement (pas de coloration bleue) – voir ci-contre à droite. La coloration rose autour du clou indique à nouveau la formation d'ions hydroxyde OH− qui réagissent avec la phénolphtaléine. Quand on retourne la boite de Pétri, la coloration blanche à l’extrémité du clou (voir ci-dessous) montre que le zinc métallique Zn s’est oxydé en ions Zn2+ et l’absence de coloration bleue montre que le fer Fe n’a pas été oxydé. Le contact du zinc a protégé le fer de l’oxydation. C'est donc le zinc métallique qui est oxydé en ion zinc Zn2+, et non plus le fer. Dans la boite de Pétri contenant le clou avec le tortillon en magnésium, on observe les mêmes colorations que celles du clou avec le tortillon en zinc. 2 Si on utilise de la gélose ou de l’Agar-Agar, on place 100 mL d’eau déminéralisée dans l’erlenmeyer, on y ajoute environ 2-3 g de poudre de gélose. On chauffe 1 minute au four à micro-ondes à puissance maximale. 2 Document1 Dans la boite de Pétri contenant le clou avec le tortillon en cuivre, le clou présente une coloration bleue au centre et une coloration rose aux extrémités identiques à celles du clou en fer seul dans l’expérience précédente. Le cuivre ne protège pas le fer de l’oxydation : en effet, la coloration bleue montre que c’est le fer qui a été oxydé. Remarque : Pour éviter la diffusion trop rapide des ions, et pouvoir localiser les réactions chimiques mises en évidence par les deux indicateurs colorés, on gélifie la solution. En conclusion, seul le clou entouré de ruban de cuivre subit une oxydation ; les deux autres clous restent intacts. Comment expliquer ces résultats ? Le fer est attaqué lorsqu’il est associé à un métal moins réducteur que lui comme le cuivre ; par contre, il est protégé par le zinc et le magnésium qui sont des métaux plus réducteurs. Un métal donné est plus réducteur qu’un autre lorsqu’il a plus tendance à libérer des électrons. Par conséquent, lorsque deux métaux sont en contact, le métal le plus réducteur subira une oxydation. Au vu du classement des couples oxydant/réducteur Fe2+/Fe et Zn2+/Zn, ce sera le zinc (plus réducteur que le fer) qui subira une oxydation : Zn(s) → Zn2+(aq) + 2 e- Pouvoir oxydant croissant ↑ Forme oxydée Forme réduite Cu2+ Cu Fe3+ Fe2+ Fe2+ Fe Zn2+ Zn Mg2+ Mg ↓ Pouvoir réducteur croissant Ces ions Zn2+ vont ensuite réagir avec des cations présents dans leur environnement pour former des produits de corrosion denses et peu solubles tels que ZnCO 3 ou Zn(OH)2. Ainsi, les clous en fer ne seront oxydés que s’ils sont plus réducteurs que le métal qui l’entoure. Inversement, les clous en fer ne seront pas oxydés s’ils sont moins réducteurs que le métal qui l’entoure. C’est le principe de protection du fer contre la corrosion par anode sacrificielle. Dans le cas de la mise en contact d’une structure métallique (le fer) avec un métal plus oxydable (plus réducteur) que le fer, ce qui est le cas du zinc, le zinc va « se sacrifier » : il s’oxyde préférentiellement par rapport au fer. On peut également protéger le fer en le recouvrant par une couche de métal plus réducteur. Ce principe est utilisé dans l’opération de galvanoplastie, notamment pour fabriquer de l’acier galvanisé (l’acier étant un alliage constitué principalement de fer et de carbone) où l’acier est recouvert par exemple d’une couche de zinc. D’autres métaux que le zinc peuvent être utilisés pour protéger le fer de la corrosion : - une couche d’étain Sn déposée à l’intérieur des boites de conserve (étamage du fer) ; - une couche de chrome Cr (acier chromé) ; - une couche d’or (dorure), d’argent (argenture), de nickel (nickelage) pour la protection et l’effet décoratif. 3 Document1 Alternative : la version « rapide » Il existe une autre alternative à cette expérience. Celle-ci a l’avantage d’être rapide, néanmoins, l’oxydation du fer est provoquée par l’Eau de Javel, ce qui complique les explications du phénomène. Matériel : - 1 boite de Pétri 3 clous en fer décapés Rubans de cuivre, zinc, magnésium Eau de Javel Procédure : 1) Entourer le 1er clou d’un tortillon de cuivre en veillant à assurer un contact intime entre le clou et le tortillon. 2) Procéder de même pour les 2 autres clous, l’un avec le tortillon de zinc, l’autre avec le tortillon de magnésium. 3) Placer les 3 clous dans la boite de Pétri, en veillant à ce qu’ils ne soient pas en contact. 4) Recouvrir les clous de la solution d’eau de Javel. Observations : 6. Prolongement On boulonne à la coque d’acier des navires des blocs de magnésium métallique. Expliquer le rôle. 7. Sécurité La réalisation d’expériences en particulier en chimie suppose le respect d’un certain nombre de règles permettant à chacun, élèves et professeur, de vivre ces séances de laboratoire dans les meilleures conditions de sécurité. Pour chaque local où se déroulent de telles expériences, existe un règlement de laboratoire, approuvé par le Conseiller en Prévention. Il sera signé par le chef d’établissement, le professeur, l’élève et ses parents/responsables. Chaque élève a une bonne connaissance de ce document. 4 Document1 Analyse de risques Phases Points-clés Sources de danger Nature du risque Les déplacements des élèves Organisation de la classe Avant La phénolphtaléine est cancérigène. (Professeur) Préparation des solutions Pendant (Professeur et élèves) L’hexacyanoferrate(III) de potassium (rouge prusse) est un produit toxique. Mesures de prévention préconisées Afin de limiter les déplacements, installer des postes de travail avec tout le matériel nécessaire pour le groupe. Utiliser une solution commerciale. Pour manipuler ce produit, porter un tablier de laboratoire, des lunettes de protection et des gants de protection. L’eau de Javel est un produit corrosif et dangereux pour l’environnement : il provoque des brûlures de la peau et des lésions oculaires graves ; il peut être corrosif pour les métaux et dégage un gaz toxique au contact d’un acide. Pour manipuler ce produit, porter un tablier de laboratoire, des lunettes de protection et des gants de protection. / / Après (Professeur et élèves) / Informations sur les réactifs - L’hypochlorite de sodium (eau de Javel) NaClOaq est un produit corrosif et dangereux pour l’environnement : il provoque des brûlures de la peau et des lésions oculaires graves ; il peut être corrosif pour les métaux et dégage un gaz toxique au contact d’un acide ; il est très toxique pour les organismes aquatiques, entrainant des effets néfastes à long terme. - L’hexacyanoferrate(III) de potassium (rouge prusse) est un produit toxique : il provoque une irritation cutanée, une sévère irritation des yeux et peut irriter les voies respiratoires. - La phénophtaléine est un produit inflammable (la phase liquide et les vapeurs sont très inflammables) et toxique en cas d’ingestion, par contact cutané et par inhalation. 8. Développement attendu principalement visé Réaliser une recherche documentaire pour expliquer une technique utilisée pour protéger les métaux de la corrosion (T2). À partir de documents, l’élève explique comment il est possible de déposer une fine couche d’un métal sur un autre métal pour le protéger de la corrosion (par exemple : la dorure, l’argenture, le zingage, l’étamage). 5 Document1 9. Bibliographie - BOURGEOIS, S., et al., La corrosion, pourquoi et comment l’éviter ?, Didactique spéciale en sciences naturelles, UCL, 2005, https://www.uclouvain.be/cps/ucl/doc/emediasciences/documents/Corrosion.pdf, page consultée le 11 février 2016 - di SCALA, N., Elaboration, protection et corrosion des métaux, http://rmdiscala.free.fr/physique/documents/Epreuve1_TermS%20specialite_Elaboration%20pro tection%20et%20corrosion%20des%20metaux.pdf, page consultée le 12 février 2016 - HAUTIER , P., TOUBEAU, J., Fiche d’expériences pour le 3e degré, 52e Congrès des Sciences, Liège 2014 - LINDREC, LEROUX, TANAVELLE, Quelques expériences sur la corrosion du fer, http://www.enfa.fr/physique-chimie/wp-content/uploads/2009/10/corrosionfer_enseignant.pdf, page consultée le 12 février 2016 - Blog réalisé par un élève français en terminale qui expose notamment une expérience consacrée à la protection du fer contre la corrosion : http://tpe-mythe-bionique.emonsite.com/pages/experiences/page.html, page consultée le 12 février 2016 6 Document1