La Mégère apprivoisée

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DOSSIER PÉDAGOGIQUE ÉTABLI PAR LE TNB SAISON 2014 I 2015
SHAKESPEARE
MÉLANIE
LERAY
La Mégère apprivoisée
WILLIAM
CRÉATION
William Shakespeare
Delphine Lemonnier-Texier
ADAPTATION & MISE EN SCÈNE Mélanie Leray
DRAMATURGIE Delphine Lemonnier-Texier
SCÉNOGRAPHIE David Bersanetti
LUMIÈRES Christian Dubet
VIDÉO Cyrille Leclercq, David Bersanetti
COSTUMES Laure Mahéo
SON Jérôme Leray
ASSISTANTS À LA MISE EN SCÈNE Magalie Caillet-Gajan, Vincent Voisin
DE
TRADUCTION
AVEC
Peter Bonke BAPTISTA
Ludmilla Dabo LA VEUVE
Laetitia Dosch CATHERINE
David Jeanne-Comello HORTENSIO
Clara Ponsot BIANCA
Yuval Rozman LUCIEN
Jean-Benoît Ugeux GRUMIO
Vincent Winterhalter PETRUCCIO
Jean-François Wolff GREMIO
PRODUCTION DÉLÉGUÉE
Théâtre National de Bretagne/Rennes
COPRODUCTION
Association 2052 – Théâtre de la Ville-Paris –
MC2 : Grenoble – Théâtre de Saint Quentin en Yvelines/
scène nationale – Maison de la Culture de Bourges –
Maison de la Culture d’Amiens.
La compagnie Association 2052 est soutenue par la région Bretagne,
la DRAC Bretagne, la ville de Rennes et le conseil général d’Ille-et-Vilaine.
La traduction de Delphine Lemonnier-Texier
est publiée aux Éditions de l’Arche.
DURÉE
2h15
2
SOMMAIRE
Le Grand Jeu I Colette Godard
p. 4
Note d’adaptation I D. Lemonnier-Texier
p. 5
Notes de mise en scène I M. Leray
p. 7
PISTES PÉDAGOGIQUES
À la découverte de la pièce
p.10
Analyse de la mise en scène
p.12
CORPUS POUR UNE ÉTUDE EN CLASSE
I. Une femme à dompter, quelques conseils p. 15
II. Femme adorée, femme abhorrée
p. 18
III. La Révolte des femmes
p. 22
ANNEXES
William Shakespeare
p. 25
La Place de la femme dans la société
p. 26
Définition de la mise en abyme
p. 28
Le Monologue de Catherine dans l’acte V
p. 29
Le Théâtre élisabéthain
p. 30
© B. Enguerrand
L’ÉQUIPE ARTISTIQUE
Mélanie Leray…
p. 32
Rencontre I Tournée I Facebook
Bibliographie I Séance audio description
p. 35
Presse
p. 36
3
LE GRAND JEU
Qui donc est cette « mégère » ? Une femme qui sait ce qu’elle veut,
et pourquoi. Capable d’entrer dans le jeu des hommes,
et d’y trouver sa place.
© Ch. Berthelot
Au titre français qui d’emblée donne Catherine perdante puisque d’emblée apprivoisée, Mélanie Leray
préfère le titre anglais The Taming of the Shrew. Soit,
Comment dompter l’insoumise ? Manière de laisser la
place au combat. Mais en quoi Catherine apparaîtelle comme une insupportable rebelle, une mégère
tout juste bonne à faire fuir les hommes? Simplement,
elle a ses idées, ses points de vue sur le monde qui
l’entoure, sur ce qu’il est et pourrait être. En somme,
une femme avec une conception politique de la vie.
Cela dit, il ne s’agit en aucune manière d’un manifeste féministe.
Mélanie Leray va plus loin. Dans le rapport de force
qui oppose Petruccio et Catherine se niche une attirance complice que l’on pourrait qualifier d’amour. Et
surtout, ce combat offre à la femme la possibilité
d’étudier le comportement masculin, ses tactiques et
ses effets sur elle. En amenant Petruccio à se dévoiler, elle mène le jeu. Non pour prendre sa revanche,
ni d’ailleurs sa place, ni pour dominer. Juste pour
comprendre, être à égalité, avec tout le risque que
cela comporte.
D’ailleurs, dès le prologue, il ne s’agit plus d’un groupe
d’ivrognes et de comédiens embarqués dans le tourbillon du jeu avec le vrai et le faux, mais, dans un
pays en guerre, du discours de la première des reines
d’Angleterre. La toute première dans notre monde
occidental à assumer la fonction d’un homme de
pouvoir.
« Je suis venue parmi vous ici ce jour non pas pour ma
distraction et mon plaisir, mais parce que je suis résolue à vivre et à mourir à vos côtés, au milieu et au plus
fort de la bataille, et pour offrir à mon Dieu et à mon
peuple mon honneur et mon sang même si je dois mordre la poussière. Je sais que mon corps est faible, c’est
celui d’une faible femme, mais j’ai le cœur et l’estomac
d’un roi, et d’un roi d’Angleterre. »
La Mégère apprivoisée est une des comédies de Shakespeare qui est rarement jouée en France. Il est vrai
qu’au départ, chacun prenant la place d’un autre et
réciproquement, il s’agit principalement de variations multiples sur les « jeux de rôle », peu compatibles avec notre esprit cartésien.
Mais pour Mélanie Leray, le problème n’est pas là.
Comme dans Contractions de Mike Bartlett (créé au
TNB en 2012, puis programmé au Théâtre des Abbesses
en 2013), s’il est question de rôle, c’est celui de la
femme, aujourd’hui, dans notre société occidentale.
C’est donc aujourd’hui que Catherine, l’insoumise
qui rebute les hommes, rencontre Petruccio, le coureur de dot. Trouvant enfin un partenaire à sa taille,
elle accepte de l’épouser. Il est vrai que son père
refuse de laisser sa sœur cadette Bianca – pour qui
se bousculent les prétendants prêts à tous les déguisements afin de l’approcher – se marier avant elle, et
ira jusqu’à la faire prisonnière.
Shakespeare place son intrigue en Italie chez de
riches et puissants aristocrates. Mélanie Leray rafraîchit l’esprit en transformant la taverne du prologue
en salle de projection, puis en passant l’intrigue
dans les halls de palace et les salles de jeu, où attendent machines à sous et tables de poker. Dans notre
monde, chez des gens sans noblesse aucune, sans
scrupule aucun. Pour eux, l’argent se gagne, se prend
ou se perd, s’échange comme tout le reste, y compris
les personnes.
Colette Godard
4
NOTES SUR L’ADAPTATION
LE RÉGIME IMPOSÉ À CATHERINE
La société de l’époque de Shakespeare est fondamentalement patriarcale. À tous les niveaux, la femme est
assujettie à l’homme. Pourtant, dans les premières
pièces historiques qu’il écrit au début des années
1590, Shakespeare joue avec les stéréotypes en développant des rôles féminins forts, autour desquels
l’action gravite. La Mégère apprivoisée prend pour
sujet la figure de la femme insoumise, en rébellion
contre l’autorité : elle refuse de se cantonner au rôle
social que lui dicte la norme en vigueur, celui de
l’épouse dont le devoir est, par excellence, de s’enfermer dans le silence. Ces femmes qui refusent de se
taire sont qualifiées de mégères et des punitions
publiques leur sont infligées (port d’une bride de
mégère, exposition publique sur des charrettes, sévices
divers…). Face à cette violence faite à la femme et à
son corps, Shakespeare prend le parti de la comédie.
Catherine, contraire de la femme idéalisée, presque
éthérée – elle a les pieds sur terre, et elle a un solide
appétit – est mise au régime par Petruccio, qui la sèvre
de viande (comme on sèvre un rapace pour le dresser
à chasser pour l’homme). Il empêche, dans un premier
temps, sa nouvelle épouse de se livrer à son activité
favorite, récriminer, ronchonner, râler, crier et tempêter. En prenant littéralement le rôle de la mégère,
il en prive Catherine. Alors qu’elle assénait à tous ce
type de discours, c’est maintenant elle qui doit les écouter et les subir. Jusqu’au moment où elle comprend
qu’il joue…
L’apparente tyrannie du tyran se déjoue aisément
dès lors que l’on a compris qu’il faut entrer dans son
jeu. Catherine a intégré la leçon, l’élève se hisse à la
hauteur du maître, et jubile autant de lui que des
bons tours que cela leur permet de jouer aux autres.
LA LANGUE DE LA MÉGÈRE DE SHAKESPEARE :
UN SENS INNÉ DE LA RÉPARTIE
L’ÉCOLE DE PETRUCCIO
Le personnage de Catherine détonne. Le cadre imposé par les conventions sociales (une fille doit se marier
et épouser celui que son père choisit) ne lui convient
pas, et elle le rejette, soulignant le côté convenu en dénonçant son artificialité et le jeu social (et théâtral)
dont il relève. C’est une femme qui manie parfaitement la rhétorique et l’humour, qui a un sens inné
de la répartie, qui sait jouer avec le langage et avec
les mots. Elle fait donc peur à tous les hommes, et se
retrouve isolée et rejetée. Ce n’est qu’avec Petruccio,
initialement intéressé par la richesse de sa famille,
qu’elle trouve, enfin, un partenaire de jeu, de dialogue,
à la hauteur de son talent. La première rencontre des
deux personnages est un festival de réparties, toutes
plus vives et drôles les unes que les autres. La logique
est donc l’inverse exact des punitions infligées aux
mégères à l’époque de Shakespeare : la langue de la
femme insoumise est la source vive d’un moment de
théâtre jubilatoire pour le spectateur autant que pour
les deux protagonistes.
De retour à Padoue, Petruccio lance une compétition
pour voir lequel des autres hommes récemment mariés aura l’épouse la plus obéissante, récompense en
or à la clé. Catherine, complice, montre le visage de
l’obéissance la plus parfaite et s’offre le luxe de faire
la leçon aux deux autres épouses, dont sa sœur que
toujours on a placée au-dessus d’elle. Le discours
qu’elle prononce et qui met en parallèle l’obéissance
au monarque et celle de l’épouse est aussi celui qui
lui donne le premier rôle. Sa plaidoirie pour l’obéissance conjugale est prononcée avec toute l’emphase
d’un discours trop énorme pour ne pas être ironique.
Elle monopolise la parole et un certain type de discours pour mieux piéger son auditoire. Elle joue le
rôle de la femme soumise pour extorquer à son propre père une coquette somme d’or tout en faisant
passer sa sœur pour une idiote avec tout le talent et
la jubilation à jouer un rôle qu’elle a appris de
Petruccio ; loin de réduire Catherine au silence, la fin
de la pièce la met de plus en plus au centre. Consciente
que tout discours est affaire de circonstances et d’auditoire, et que les mots prononcés n’ont de valeur
5
que relativement à ce que la manipulation de l’auditoire permet d’obtenir, elle vole la vedette à tous les
autres personnages, masculins comme féminins.
L’école de Petruccio, où les futurs maris apprendraient
à dresser leur femme, n’existe que dans l’imagination
des hommes de Padoue. La véritable école de Petruccio
n’a qu’une seule élève, Catherine, et c’est l’école du
théâtre.
rôle réservé à la femme, et Petruccio, qui est trop formidable (au sens premier du terme, à savoir énorme,
hors norme) pour entrer dans le cadre conventionnel. Tout l’enjeu de la pièce est de mettre ces deux
personnages en présence l’un de l’autre, rencontre
où chacun trouve un adversaire à sa démesure…
Au cœur de cette comédie, l’enjeu est celui du pouvoir, de l’oppression et de la liberté de la femme. Les
thèmes que parcourt la pièce sont intemporels : masculin/féminin et guerre des sexes, normes sociales,
conventions et liberté de parole et de pensée, identité sociale et jeu de rôles, conformisme et manipulation. La comédie est un moyen de rire de l’oppression, de la tyrannie, de démonter un certain type de
discours normatif en exposant ses rouages et en soulignant sa théâtralité, sans jamais oublier que les armes
supposées de la femme (la langue et les larmes) sont
aussi l’essence même de l’art du comédien.
MONTER CETTE PIÈCE AUJOURD’HUI
Les « lieux » que Shakespeare fait visiter au spectateur sont des clichés, des lieux communs (poétiques,
dramaturgiques) des relations entre hommes et femmes : femme-image, femme-objet inaccessible, amour
au premier regard (coup de foudre) qui rend idiot,
amours contrariées par le vieillard têtu (aux airs de
Pantalone de la commedia dell’arte) qui sert de père
à la jeune femme. Ces archétypes contrastent violemment avec Catherine, qui refuse d’entrer dans ce
© B. Enguerrand
Delphine Lemonnier-Texier
6
NOTES DE MISE EN SCÈNE
DE MÉLANIE LERAY
© B. Enguerrand
Shakespeare décontextualise sa pièce de l’Angleterre
à l’Italie, pays de l’amour. Je propose de transférer le
monde patriarcal et riche de Padoue de la fin du XVIe
siècle dans un monde contemporain luxueux et clinquant pour mettre en avant la vulgarité de la situation de départ : un père qui vend ses deux filles aux
enchères.
Nous réfléchissons à un espace plus qu’un décor. Il
sera fait d’éléments qui évoquent le casino, le hall
d’hôtel, voire le bar de nuit. Un univers de jeux, d’alcool, de plaisir et d’argent.
L’univers musical sera fait, entre autres, de reprises
de chansons interprétées par une chanteuse et actrice.
C’est une comédie où il fait chaud, où le désir, les allusions et les blagues sexuelles sont omniprésents. Le
corps des femmes, mais aussi celui des hommes, est
au centre de la pièce ; des corps prêts à danser qui se
montrent, se regardent, s’exhibent… Les vêtements
seront contemporains et très été.
Je veux réinterroger cette comédie d’un point de vue
féminin, en particulier celui de Catherine, l’insoumise, celle qu’on a réduit dans la langue française à
l’état de « mégère apprivoisée ».
Le prologue ne sera pas celui de Shakespeare mais
celui de 3 actrices, dont l’une dira le discours d’Elisabeth Ire à ses armées en 1588. Elle y rappelle à ses
soldats sa force, la leur, mais s’excuse d’habiter « le
corps d’une faible femme », tout en affirmant qu’elle
a le courage d’un roi.
Nous utiliserons la vidéo en direct sur le plateau
pour aller chercher des visages en gros plan. Par instants essayer de saisir ce qui n’est pas dans les mots
pour regarder celle ou celui qui se tait, comment il
éclaire une situation ou la rend plus complexe.
La pièce interroge en permanence la question de la
représentation, du langage, du faux et du vrai, comment se jouer de l’autre, faire semblant, se déguiser,
se mettre en scène, mettre l’autre en scène.
Tout est comédie. Les caméras et l’image en direct
pourront être aussi un accessoire de jeu pour montrer cela.
Bianca, l’objet de toutes les convoitises, sera beaucoup filmée et dans chacun des plans, sublimée : le
pouvoir de l’image. Le grand pouvoir de la beauté et
de la jeunesse, celui-là qui ôte la raison et envoûte
celui qui regarde.
Les amoureux Lucien et Bianca sont moqués par l’auteur ; leur amour est fait de l’attirance qu’ils ont, de
leur image, de leur jeunesse. C’est un amour inconsistant, qui s’arrête à la surface.
En contraste, Petruccio et Catherine s’affrontent, rivalisent, se répondent de manière jubilatoire : ils détiennent le pouvoir des mots, et c’est cela qui les attire
l’un vers l’autre. En faisant de Catherine une aussi
grande « actrice » que lui, Petruccio achève son éducation en lui enseignant les clés de la manipulation
et nous donne une leçon sur le pouvoir, la manipulation, et en même temps sur l’art du comédien.
Catherine souffre, s’insurge, elle est insatisfaite. Son
statut de femme lui commande de se taire alors qu’elle
voudrait dénoncer l’injustice, celle qui la frappe,
mais aussi celle qui frappe les autres. C’est également
une femme blessée parce qu’elle n’a aucun prétendant, à l’inverse de sa sœur qui les multiplie.
7
« J’ai beau en faire le vœu,
rien ne me changera en homme
Je ne peux pas être homme
simplement parce que
je le désire,
Je dois donc rester femme
et souffrir jusqu’à en mourir. »
Béatrice (Trop de bruit pour rien)
Petruccio est le premier à laisser Catherine parler et à ne pas craindre de lui donner la réplique. Ensemble, ils
parlent librement et il la fait rire, elle le fait rire.
Un des enjeux principaux de la pièce serait-il l’amour ? Pas un amour de surface, d’apparences, mais une
véritable complicité d’esprit, une relation d’égale à égal qui, si elle ne peut s’affranchir complètement des
codes (le mariage), les renouvelle et permet l’épanouissement et la revanche de ceux qui n’avaient ni la
beauté, ni la jeunesse idéale. Mariage arrangé par excellence, couple improbable pris dans le carcan oppressif du mariage vu comme domestication de la femme par l’homme, le couple Petruccio-Catherine a tout
pour échouer et rien pour réussir. Pourtant, c’est l’inverse qui se produit, et des trois couples que présente
la pièce, c’est le seul qui fonctionne. Cette complicité, cette affection et ce plaisir d’échanger avec l’autre viennent les prendre par surprise et assurent à l’un comme à l’autre un semblant d’être qu’ils ne cessent de
rechercher dans leur insoumission au monde.
Avec Delphine Lemonnier-Texier, la traductrice, nous avons veillé à garder au maximum la beauté de la
langue tout en s’assurant que l’humour soit bien perceptible. Car, même si au cœur de la pièce l’enjeu est
celui du pouvoir, de l’oppression et de la liberté de la femme, La Mégère apprivoisée est une comédie, grivoise
et moqueuse.
Mélanie Leray
8
Ch. Berthelot
PISTES
PÉDAGOGIQUES
9
À LA DÉCOUVERTE DE LA PIÈCE
ABORDER L’ŒUVRE
RÉFÉRENCE MYTHOLOGIQUE: Le terme Mégère est d’abord
le nom d’une des furies, incarnation de la vengeance.
Mégère a pour mission de semer parmi les hommes
les querelles et les disputes. C’est elle aussi qui poursuit les coupables avec le plus d’acharnement. C’est
de ce personnage que découle l’acception moderne :
femme acariâtre et méchante.
→ Réfléchir sur le titre de la pièce – faut-il lire The
taming of the shrew comme une pièce misogyne ?
Propos de Mélanie Leray recueillis par Adèle Duminy :
M. L. : Je suis arrivée à ce texte par le titre français, qui
est une aberration. En anglais, The Taming of the
Shrew signifie « Comment dompter l’insoumise ? ».
Et « shrew » est autant féminin que masculin.
Donc, dans la traduction, « insoumise » est traduit par
« mégère ». Tout un programme ! Entre « insoumise »
et « mégère », il y a une différence… Au moment de
l’écriture par Shakespeare, le système patriarcal domine. La femme est gouvernée par l’homme, qui est
gouverné par le père, qui est gouverné par le roi, luimême gouverné par Dieu. Mais la grande contradiction de tout ça, c’est qu’à la tête de l’Angleterre, c’est
une femme, Élisabeth I, qui est célibataire et qui
refuse d’avoir des enfants, qui se dit vierge et qui ne
veut pas se marier. Tout le contraire de ce que doit
être une femme à l’époque !
J’ai envie d’envisager La Mégère sous cet angle. Pour
moi, le parcours de Catherine c’est celui d’une femme
vers la liberté et la compréhension. Catherine est une
très jeune femme insoumise qui se demande pourquoi elle ne serait pas l’égale des hommes. Personne
ne veut lui donner la réplique parce qu’elle ne veut
pas se soumettre à l’ordre établi. Donc, ce que j’ai
envie de raconter, c’est comment cette femme va rencontrer Petruccio, le premier homme à lui donner la
réplique, et comment il va lui apprendre, malgré lui,
que c’est en maniant la langue qu’elle va pouvoir faire
son chemin. Que ce n’est pas en étant en colère mais
plutôt en composant avec l’état du monde qu’elle va
pouvoir exister.
Petruccio lui apprend à manier les mots qu’on attend
d’elle. Catherine, en jouant parfaitement son rôle de
femme, à la fin devient libre de faire ce qu’elle veut.
→ Analyse d’un extrait de l’œuvre : le prologue
« Mon peuple bien-aimé,
Nous avons été persuadée par ceux qui prennent soin
de notre sécurité, de veiller à ne pas nous présenter
devant la multitude armée, de crainte d’une trahison ;
mais je vous l’assure, je me refuse à vivre en me défiant
de mon peuple fidèle et aimant. La peur est l’affaire des
tyrans, pour ma part j’ai toujours fait en sorte, à la
grâce de Dieu, de placer ma plus grande force et ma
confiance dans le cœur et la bonne volonté de mes sujets.
C’est pourquoi je suis venue parmi vous, comme vous le
voyez, à cette heure, non pas pour y trouver plaisir ou
distraction, mais parce que je suis résolue, au milieu et
au plus fort de la bataille, à me battre et à mourir à vos
côtés. À risquer mon honneur et à verser mon sang pour
Dieu et mon royaume, et pour mon peuple, même si je
devais mordre la poussière. Je sais que j’ai le corps
d’une femme, faible et faillible ; mais j’ai le cœur et l’estomac d’un roi, et d’un roi d’Angleterre, et peu m’importe que le prince de Parme ou le roi d’Espagne ou
quelque autre prince d’Europe ose envahir mon
royaume. Plutôt que de risquer le déshonneur, je préfère
prendre moi-même les armes et être moi-même votre
général, votre juge et celui qui récompensera chacune
des vertus dont vous aurez fait preuve au combat. Je
sais que votre bravoure appelle déjà des récompenses et
des honneurs. Et nous vous donnons notre parole de
prince qu’on vous honorera comme il se doit. D’ici là,
mon lieutenant en chef prendra ma place, c’est le plus
noble et le plus méritant sujet qu’un prince ait jamais
eu sous ses ordres. Ne doutant pas de votre obéissance à
mon général, grâce à la bonne entente dans le camp et
votre valeur sur le champ de bataille, je sais que nous
ne tarderons pas à remporter une victoire retentissante
sur ces ennemis, les ennemis de Dieu, de mon royaume
et de mon peuple. »
Discours d’Elisabeth I aux troupes à Tilbury, 1588
10
→ Faire le point avec les élèves
sur le théâtre élisabéthain
→ Relever avec les élèves les éléments qui, dans la
mise en scène de Mélanie Leray, incarnent ce caractère comique. Qu’apportent-ils à la pièce ?
http://users.skynet.be/fralica/images/illustr/pages/theatre/thelisab.htm
→ Rappeler que le théâtre élisabéthain n’était joué
que par des hommes.
Les rôles de femmes sont ainsi tenus par de jeunes
acteurs, conseillés par des acteurs plus expérimentés
qui leur apprennent le métier. On peut ici faire le
parallèle entre la situation de ces jeunes acteurs apprenant les ficelles de leur métier, et Catherine, qui,
par les conseils de Petruccio, apprend à se conformer à la société de son époque.
→ Faire un point sur l’influence de la commedia
dell’arte dans le théâtre shakespearien
On pourra proposer aux élèves de faire des recherches sur la commedia dell’arte et d’effectuer un
rapprochement avec les personnages de La Mégère apprivoisée.
Évoquer le mélange des registres que l’on trouve dans
ce théâtre, entre tension dramatique et bouffonnerie.
Larousse.fr – Jacques Callot,
Danse de comédiens italiens
« Même si au cœur de la pièce l’enjeu est celui du pouvoir, de l’oppression et de la liberté de la femme, La Mégère apprivoisée est une comédie, grivoise, moqueuse. »
Mélanie Leray
« La ligne de partage qui détermine le degré de proximité ou de distance avec le spectateur réside avant tout
dans la langue utilisée. Il est essentiel que la langue ne
soit pas un obstacle à l’immédiateté de la comédie, ne
fasse pas obstacle à l’humour ; il faut qu’elle soit aussi
limpide, vive et immédiate que l’est celle du texte anglais,
y compris pour le spectateur d’aujourd’hui. Il faut rendre aussi toute l’amplitude de l’éventail de la comédie
que Shakespeare y déploie, les scènes de farce et les chapelets d’injures cohabitant avec des effets d’incongruité,
de parodie et de caricature. »
Le site Commedia dell’arte d’Arlequin à Molière
(http://paularbear.free.fr/commedia-dellarte/heritage/personnages.html) constitue un support
accessible et clair.
Shakespeare tire le sujet de sa pièce de I Suppositi (Les
Méprises), une pièce d’Arioste qui fut représentée à
Londres, à partir de 1566. On reconnaît dans La Mégère apprivoisée les personnages de la femme acariâtre
et de son prétendant, incarnés par Catherine et Petruccio. Autre inspiration majeure, la commedia dell’arte,
et en particulier les masques italiens qui ont visiblement
influencé la création des personnages secondaires :
Baptista peut être rapproché du docteur Lombardi,
Grémio de Pantalone, Lucentio de Lélio et les valets
Tranio, Biondello et Grumio des célèbres Scapin,
Brighella et Arlequin.
Delphine Lemonnier-Texier
Le théâtre Élisabéthain avait en effet l’ambition de
satisfaire des publics extrêmement variés, aux attentes
et aux références culturelles souvent opposées. On
trouve ainsi dans ce théâtre des scènes poétiques alternant avec des passages triviaux. Le rôle du bouffon, du pitre est primordial dans ce théâtre, instaurant une distance salutaire avec l’intensité du spectacle. La comédie permet de plus d’aborder des thèmes
graves avec légèreté, et de transmettre le message
avec plus d’efficacité.
11
ANALYSE DE LA MISE EN SCÈNE
LA MÉGÈRE APPRIVOISÉE
→ Étudier avec les élèves le concept de la mise en
abyme. (définition p. 28)
La Mégère apprivoisée commence d’abord par un prologue dans lequel un lord anglais revenant de la chasse
tombe sur un homme saoul. Lui et ses compagnons
de chasse décident de l’emmener et de lui faire croire
qu’il est riche. Ils lui présenteront une femme (l’un
d’entre eux déguisé) comme la sienne et lui conteront
l’histoire de La Mégère apprivoisée. L’histoire de Catherine est donc présentée comme un récit de pure fiction. C’est un personnage créé par d’autres personnages de la pièce. Le spectateur est donc prévenu de
la dimension fictive de ce récit et peut prendre une
distance vis à vis de lui. Mélanie Leray a choisi de ne
pas garder ces deux scènes de prologue. Pourtant,
par le biais de cette création, elle conserve la mise en
abyme initiale. En plaçant sa pièce sous l’égide des
discours d’Elisabeth I et de Catherine, elle met par
ailleurs en exergue la dualité de la condition féminine, entre revendication d’émancipation et soumission, feinte ou assumée.
Elizabeth I, "Darnley Portrait"(1575)
→ Proposer aux élèves d’interpréter eux aussi un extrait de la Mégère sur le mode de l’audition. Quels
conseils le metteur en scène pourrait-il donner ? Quelles pourraient être les différentes interprétations
d’une même scène ?
→ Demandez aux élèves de décrire les costumes des trois femmes du premier tableau de la pièce.
Quel message ces tenues transmettent-elles ?
Proposer aux élèves une recherche internet sur les costumes élisabéthains.
Le site Elizabethan costume propose une multitude d’articles et d’illustrations sur les costumes de l’époque élisabéthaine ainsi que quelques conseils pratiques (comment amidonner sa fraise, par exemple) : http://www.elizabethancostume.net/(site en anglais).
On montrera aux élèves une page en particulier qui constituera un clin d’œil amusant,
« dressing Cecily » : http://www.elizabethancostume.net/doll/index.html
Cette page nous propose d’habiller une femme nue, sur le mode des modèles de papier, avec les vêtements de
notre choix parmi la sélection proposée. Le rapprochement que l’on peut faire entre ce jeu et certaines scènes de
la pièce ne manque pas de sel !
12
1560
1570
PRÉSENTATION DE LA MODE DE LA FRAISE
DES ANNÉES 1560 À L’AN 1600
http://lecostume.canalblog.com/archives/collerette__pour_femme_/index.html
1580
1590
http://lesderniersvalois.com/gl/2013/12/clothing-womens-collerette-partlet/
On abordera également avec les élèves la présence de la bride de mégère, présente dans cette première scène
(voir passage sur la condition des femmes et document annexe page 26).
→ Le décor :
« Shakespeare décontextualise sa pièce de l’Angleterre à l’Italie, pays de l’amour.
Demander aux élèves de décrire les différents éléments du décor qu’ils ont identifiés.
À quels univers ces éléments font-ils référence ? Quel rapprochement peut-on faire avec la pièce ?
→ La vidéo :
Quel usage est fait de la caméra ? Pourquoi passer par ce médium ?
Faire remarquer aux élèves que le film permet au spectateur de considérer différemment la personne filmée,
en intégrant le point de vue de la personne qui se tient derrière la caméra.
13
CORPUS
POUR
UNE ÉTUDE
EN CLASSE
Quelques propositions de textes
complémentaires pour étudier la pièce
dans le cadre d’une séquence
sur l’argumentation.
Trois pistes sont proposées : l’éducation
des femmes par les hommes, les portraits
de mégères et l’émancipation féminine.
© B. Enguerrand
Les textes vont de l’antiquité au XXe siècle
et mêlent différents genres littéraires.
14
I. UNE FEMME À DOMPTER,
QUELQUES CONSEILS :
XÉNOPHON,
L’Économique
(autour de 362 av. JC)
— Crois, ma femme, que je ne préfère pas la céruse
ni le rouge à tes véritables couleurs. Les dieux ont
voulu que le coursier plût à la jument, le taureau à la
génisse, le bélier à la brebis : les hommes croient
aussi qu’un homme est très agréable lorsqu’il n’emploie aucun fard. Des étrangers peuvent bien être
dupes de pareilles supercheries ; mais des époux qui
vivent toujours ensemble se trahissent nécessairement s’ils essayent de se tromper. Ils se surprendront au sortir du lit avant la toilette ; une goutte de
sueur, une larme décèlera l’artifice, ou bien ils se verront au bain dans toute la vérité de la nature. »
— Et que te répondit-elle ?
— Elle se corrigea ; elle se montra devant moi avec
une parure simple et modeste : ce fut sa réponse.
Elle me demanda pourtant si je pourrais lui indiquer
le moyen non seulement de paraître, mais d’être
véritablement belle. Je lui conseillai de ne pas rester
continuellement assise comme les esclaves. Elle
assisterait en bonne maîtresse aux travaux des
femmes ; avec l’aide des dieux, elle s’efforcerait ou de
leur enseigner ce qu’elle saurait mieux, ou d’apprendre ce qu’elle saurait moins bien ; elle aurait l’œil à la
boulangerie, serait présente aux mesurages de la
femme de charge, ferait sa ronde pour examiner si
tout est bien en place. Ce serait pour elle une promenade en même temps qu’un acte de surveillance.
Détremper le pain et le pétrir, battre et serrer les
habits et les tapisseries, voilà encore un bon exercice. Un tel régime, disais-je, fera l’assaisonnement
de ses mets, lui donnera une meilleure santé, une
plus belle carnation. D’ailleurs, si son air contraste
avec celui d’une esclave, si elle est plus proprement
et plus convenablement vêtue, elle n’en sera que plus
séduisante, surtout si c’est d’elle-même et non malgré elle qu’elle cherche à lui plaire. Quant à ces
épouses continuellement assises avec un air de
fierté, qu’on les range dans la classe des femmes
amies de la parure et de l’artifice. Apprends, Socrate,
qu’aujourd’hui la mienne suit les leçons que je lui ai
données, et se conduit comme je viens de te dire.
Ischomaque rapporte
à Socrate ses conseils
pour tenir au mieux
une maison. Il aborde
entre autres le rôle
de l’épouse et ses devoirs.
Un jour, Socrate, je la vis toute couverte de céruse
afin de paraître plus blanche qu’elle ne l’était, et de
rouge pour se donner un faux incarnat. Une élégante
chaussure semblait ajouter à sa taille. « Réponds,
ma femme : si je te montrais l’état de mes biens au
plus juste, sans te rien exagérer, sans te rien cacher,
consulterais-je mieux nos intérêts communs, me
trouverais-tu plus digne de tendresse que si j’essayais de te tromper en te disant que j’ai plus que je
ne possède, en te montrant de l’argent de mauvais
aloi, des colliers de bois recouvert en métal, de la
pourpre que je donnerais pour vraie, tandis qu’elle
serait de mauvaise teinte ?
— Que les dieux t’en préservent ! Si tu étais l’homme
que tu me dépeins, de la vie je n’aurais une sincère
affection pour toi.
— En nous unissant, ma femme, ne nous sommesnous pas fait un don mutuel de nos corps ? — C’est
ce que disent les hommes.
— Me recevrais-tu plus amoureusement dans tes
bras, si, au lieu de te donner un corps sain, fortifié
par l’exercice et d’une belle carnation, je me présentais à toi frotté de vermillon, les yeux peints, te faisant illusion, et te donnant, au lieu de ma personne,
du vermillon à voir et à toucher ?
— Certes, j’aimerais mieux te toucher que du vermillon, voir la couleur de ton teint et le vif éclat de
tes yeux que des couches de fard.
15
MOLIÈRE,
L’École des femmes,
Acte 1 scène 1 (1662)
Mais il faut pour le moins qu’elle ose le vouloir ;
Et la stupide au sien peut manquer d’ordinaire,
Sans en avoir l’envie et sans penser le faire.
ARNOLPHE.
À ce bel argument, à ce discours profond,
Ce que Pantagruel à Panurge répond :
Pressez-moi de me joindre à femme autre que sotte,
Prêchez, patrocinez jusqu’à la Pentecôte ;
Vous serez ébahi, quand vous serez au bout,
Que vous ne m’aurez rien persuadé du tout.
CHRYSALDE.
Je ne vous dis plus mot.
ARNOLPHE.
Chacun a sa méthode.
En femme, comme en tout, je veux suivre ma mode.
Je me vois riche assez pour pouvoir, que je croi,
Choisir une moitié qui tienne tout de moi,
Et de qui la soumise et pleine dépendance
N’ait à me reprocher aucun bien ni naissance.
Un air doux et posé, parmi d’autres enfans,
M’inspira de l’amour pour elle dès quatre ans ;
Sa mère se trouvant de pauvreté pressée,
De la lui demander il me vint la pensée ;
Et la bonne paysanne, apprenant mon désir,
À s’ôter cette charge eut beaucoup de plaisir.
Dans un petit couvent, loin de toute pratique,
Je la fis élever selon ma politique,
C’est-à-dire ordonnant quels soins on emploîroit
Pour la rendre idiote autant qu’il se pourroit.
Dieu merci, le succès a suivi mon attente ;
Et grande, je l’ai vue à tel point innocente,
Que j’ai béni le Ciel d’avoir trouvé mon fait,
Pour me faire une femme au gré de mon souhait.
Je l’ai donc retirée ; et comme ma demeure
À cent sortes de monde est ouverte à toute heure,
Je l’ai mise à l’écart, comme il faut tout prévoir,
Dans cette autre maison où nul ne me vient voir ;
Et pour ne point gâter sa bonté naturelle,
Je n’y tiens que des gens tout aussi simples qu’elle.
Vous me direz : Pourquoi cette narration ?
C’est pour vous rendre instruit de ma précaution.
Le résultat de tout est qu’en ami fidèle
Ce soir je vous invite à souper avec elle ;
Je veux que vous puissiez un peu l’examiner,
Et voir si de mon choix on me doit condamner.
CHRYSALDE.
J’y consens.
ARNOLPHE.
Vous pourrez, dans cette conférence,
Juger de sa personne et de son innocence.
ARNOLPHE.
Épouser une sotte est pour n’être point sot.
Je crois, en bon chrétien, votre moitié fort sage ;
Mais une femme habile est un mauvais présage ;
Et je sais ce qu’il coûte à de certaines gens
Pour avoir pris les leurs avec trop de talens.
Moi, j’irois me charger d’une spirituelle
Qui ne parleroit rien que cercle et que ruelle,
Qui de prose et de vers feroit de doux écrits,
Et que visiteroient marquis et beaux esprits,
Tandis que, sous le nom du mari de Madame,
Je serois comme un saint que pas un ne réclame ?
Non, non, je ne veux point d’un esprit qui soit haut ;
Et femme qui compose en sait plus qu’il ne faut.
Je prétends que la mienne, en clartés peu sublime,
Même ne sache pas ce que c’est qu’une rime ;
Et s’il faut qu’avec elle on joue au corbillon
Et qu’on vienne à lui dire à son tour : « Qu’y meton ? »
Je veux qu’elle réponde : « Une tarte à la crème ; »
En un mot, qu’elle soit d’une ignorance extrême ;
Et c’est assez pour elle, à vous en bien parler,
De savoir prier Dieu, m’aimer, coudre et filer.
CHRYSALDE.
Une femme stupide est donc votre marotte ?
ARNOLPHE.
Tant, que j’aimerois mieux une laide bien sotte
Qu’une femme fort belle avec beaucoup d’esprit.
CHRYSALDE.
L’esprit et la beauté…
ARNOLPHE.
L’honnêteté suffit.
CHRYSALDE.
Mais comment voulez-vous, après tout, qu’une bête
Puisse jamais savoir ce que c’est qu’être honnête ?
Outre qu’il est assez ennuyeux, que je croi,
D’avoir toute sa vie une bête avec soi,
Pensez-vous le bien prendre, et que sur votre idée
La sûreté d’un front puisse être bien fondée ?
Une femme d’esprit peut trahir son devoir ;
16
FÉNELON,
De l’éducation des filles
(1687),
Instruction des femmes
sur leurs devoirs,
chap. XI
GEORGE BERNARD
SHAW,
Pygmalion (1914)
« Venons maintenant au détail des choses dont une
femme doit être instruite. Quels sont ses emplois ?
Elle est chargée de l’éducation de ses enfants ; des
garçons jusqu’à un certain âge, des filles jusqu’à ce
qu’elles se marient, ou se fassent religieuses ; de la
conduite des domestiques, de leurs moeurs, de leur
service ; du détail de la dépense, des moyens de faire
tout avec économie et honorablement : d’ordinaire
même, de faire les fermes, et de recevoir les revenus.
La science des femmes, comme celle des hommes,
doit se borner à s’instruire par rapport à leurs fonctions ; la différence de leurs emplois doit faire celle
de leurs études. Il faut donc borner l’instruction des
femmes aux choses que nous venons de dire. Mais
une femme curieuse trouvera que c’est donner des
bornes bien étroites à sa curiosité : elle se trompe ;
c’est qu’elle ne connaît pas l’importance et l’étendue
des choses dont je lui propose de s’instruire.
Quel discernement lui faut-il pour connaître le naturel et le génie de chacun de ses enfants, pour trouver
la manière de se conduire avec eux la plus propre à
découvrir leur humeur, leur pente, leur talent, à prévenir les passions naissantes, à leur persuader les
bonnes maximes, et à guérir leurs erreurs ! Quelle
prudence doit-elle avoir pour acquérir et conserver
sur eux l’autorité, sans perdre l’amitié et la
confiance ! Mais n’a-t-elle pas besoin d’observer et
de connaître à fond les gens qu’elle met auprès
d’eux ? Sans doute. Une mère de famille doit donc
être pleinement instruite de la religion, et avoir un
esprit mûr, ferme, appliqué, et expérimenté pour le
gouvernement.
Peut-on douter que les femmes ne soient chargées
de tous ces soins, puisqu’ils tombent naturellement
sur elles pendant la vie même de leurs maris occupés au dehors ? Ils les regardent encore de plus près
si elles deviennent veuves. Enfin saint Paul attache
tellement en général leur salut à l’éducation de leurs
enfants qu’il assure que c’est par eux qu’elles se sauveront. »
LE SUJET : À la suite d’un quiproquo, l’un d’eux, Henry
Higgins, phonéticien réputé, fait la connaissance
d’un collègue, le colonel Pickering, et d’une pauvre
fleuriste, Eliza Doolittle. Après s’être vanté de pouvoir,
par des leçons de prononciation, faire passer Eliza
pour une duchesse, cette dernière finira, grâce
aux leçons de son Pygmalion, à prendre le pouvoir
et à s’émanciper de sa condition.
Extrait de l’acte 1 (p. 17, éd. de l’Arche)
LE PRENEUR DE NOTES :
« Une femme qui émet des sons aussi attristants et
aussi inconvenants, n’a aucun droit d’être où que ce
soit. Elle n’a pas le droit de vivre. N’oubliez pas que
vous êtes une créature humaine, avec une âme et le
don divin du langage articulé ; que votre langue
natale est la langue de Shakespeare et de Milton, et
de la Bible ; et puis ne restez pas ici à glousser
comme un pigeon en colère.
[…] Vous voyez cette créature avec son anglais de
trottoir ; l’anglais qui la maintiendra dans le ruisseau jusqu’à la fin de ses jours. Eh bien, monsieur, en
trois mois, je pourrais faire passer cette fille pour
une duchesse dans une garden-party d’ambassade.
Je pourrais même lui trouver une place comme
femme de chambre ou demoiselle de magasin, ce qui
exige le meilleur anglais. »
17
II. FEMME ADORÉE, FEMME ABHORRÉE :
CHARLES PERRAULT,
Les Fées, Contes, 1695.
lui sortit de la bouche deux roses, deux perles et
deux gros diamants. “Que vois-je là !” dit sa mère
toute étonnée ; je crois qu’il lui sort de la bouche des
perles et des diamants. D’où vient cela, ma fille ? (Ce
fut-là la première fois qu’elle l’appela sa fille.) La
pauvre enfant lui raconta naïvement tout ce qui lui
était arrivé, non sans jeter une infinité de diamants.
“Vraiment, dit la mère, il faut que j’y envoie ma fille.
Tenez, Fanchon, voyez ce qui sort de la bouche de
votre sœur quand elle parle ; ne seriez-vous pas bien
aise d’avoir le même don ? Vous n’avez qu’à aller puiser de l’eau à la fontaine, et, quand une pauvre
femme vous demandera à boire, lui en donner bien
honnêtement. — Il me ferait beau voir, répondit la
brutale, aller à la fontaine ! — Je veux que vous y
alliez, reprit la mère, et tout à l’heure. ”
Elle y alla, mais toujours en grondant. Elle prit le
plus beau flacon d’argent qui fut au logis. Elle ne fut
pas plus tôt arrivée à la fontaine, qu’elle vit sortir du
bois une dame magnifiquement vêtue, qui vint lui demander à boire. C’était la même fée qui avait apparu
à sa sœur, mais qui avait pris l’air et les habits d’une
princesse, pour voir jusqu’où irait la malhonnêteté
de cette fille. “Est-ce que je suis ici venue, lui dit cette
brutale orgueilleuse, pour vous donner à boire ? Justement j’ai apporté un flacon d’argent tout exprès
pour donner à boire à Madame ! J’en suis d’avis : buvez à même si vous voulez. — Vous n’êtes guère honnête, reprit la fée, sans se mettre en colère. Eh bien !
Puisque vous êtes si peu obligeante, je vous donne
pour don qu’à chaque parole que vous direz, il vous
sortira de la bouche ou un serpent, ou un crapaud.”
D’abord que sa mère l’aperçut, elle lui cria : “Eh
bien ! Ma fille ! — Eh bien ! Ma mère ! Lui répondit
la brutale, en jetant deux vipères et deux crapauds.
— O ciel, s’écria la mère, que vois-je là ? C’est sa sœur
qui est en cause : elle me le paiera” ; et aussitôt elle
courut pour la battre. La pauvre enfant s’enfuit et
alla se sauver dans la forêt prochaine. Le fils du roi,
qui revenait de la chasse, al rencontra et, la voyant si
belle, lui demanda ce qu’elle faisait là toute seule et
ce qu’elle avait à pleurer ! “Hélas, Monsieur, c’est ma
mère qui m’a chassée du logis.” Le fils du roi, qui vit
sortir de sa bouche cinq ou six perles et autant de
diamants, lui pria de lui dire d’où cela lui venait. Elle
Double vision de la
femme dans cet extrait où
seule la femme docile est
récompensée.
« Il était une fois une veuve qui avait deux filles : l’aînée lui ressemblait si fort d’humeur et de visage, que,
qui la voyait, voyait la mère. Elles étaient toutes deux
si désagréables et si orgueilleuses, qu’on ne pouvait
vivre avec elles. La cadette, qui était le vrai portrait
de son père pour la douceur et l’honnêteté, était avec
cela une des plus belles filles qu’on eût su voir.
Comme on aime naturellement son semblable, cette
mère était folle de sa fille aînée, et, en même temps
avait une aversion effroyable pour la cadette. Elle la
faisait manger à la cuisine et travailler sans cesse.
Il fallait, entre autres choses, que cette pauvre enfant
allât, deux fois le jour, puiser de l’eau à une grande
demi-lieue du logis, et qu’elle rapportât plein une
grande cruche. Un jour qu’elle était à cette fontaine,
il vint à elle une pauvre femme qui lui pria de lui
donner à boire.
“Oui-dà, ma bonne mère”, dit cette belle fille ; et, rinçant aussitôt sa cruche, elle puisa de l’eau au plus bel
endroit de la fontaine et la lui présenta, soutenant
toujours la cruche, afin qu’elle bût plus aisément. La
bonne femme, ayant bu, lui dit : “Vous êtes si belle,
si bonne et si honnête, que je ne puis m’empêcher de
vous faire un don ; car c’était une fée qui avait pris la
forme d’une pauvre femme de village, pour voir
jusqu’où irait l’honnêteté de cette jeune fille. Je vous
donne pour don, poursuivit la fée, qu’à chaque
parole que vous direz, il vous sortira de la bouche ou
une fleur, ou une pierre précieuse.”
Lorsque cette belle fille arriva au logis, sa mère la
gronda de revenir si tard de la fontaine. “Je vous
demande pardon, ma mère, dit cette pauvre fille,
d’avoir tardé si longtemps” ; et, en disant ces mots, il
18
MOLIÈRE,
Les Femmes savantes,
Acte I, scène 1, 1672.
lui conta toute son aventure. Le fils du roi en devint
amoureux ; et, considérant qu’un tel don valait
mieux que tout ce qu’on pouvait donner en mariage
à une autre, l’emmena au palais du roi son père, où
il l’épousa.
Pour sa sœur, elle se fit tant haïr, que sa propre mère
la chassa de chez elle ; et la malheureuse, après avoir
bien couru sans trouver personne qui voulut la recevoir, alla mourir au coin d’un bois. »
Être savante ou s’occuper
de son ménage ?
C’est sur ce thème que
s’affrontent deux Sœurs,
Armande et Henriette.
ARMANDE
« Mon Dieu, que votre esprit est d’un étage bas !
Que vous jouez au monde un petit personnage,
De vous claquemurer aux choses du ménage,
Et de n’entrevoir point de plaisirs plus touchants
Qu’un idole d’époux et des marmots d’enfants !
Laissez aux gens grossiers, aux personnes vulgaires,
Les bas amusements de ces sortes d’affaires ;
À de plus hauts objets élevez vos désirs,
Songez à prendre un goût des plus nobles plaisirs,
Et traitant de mépris les sens et la
À l’esprit comme nous donnez-vous toute entière.
Vous avez notre mère en exemple à vos yeux,
Que du nom de savante on honore en tous lieux :
Tâchez ainsi que moi de vous montrer sa fille,
Aspirez aux clartés qui sont dans la famille,
Et vous rendez sensible aux charmantes douceurs
Que l’amour de l’étude épanche dans les cours ;
Loin d’être aux lois d’un homme en esclave asservie,
Mariez-vous, ma sœur, à la philosophie,
Qui nous monte au-dessus de tout le genre humain,
Et donne à la raison l’empire souverain,
Soumettant à ses lois la partie animale,
Dont l’appétit grossier aux bêtes nous ravale.
Ce sont là les beaux feux, les doux attachements,
Qui doivent de la vie occuper les moments ;
Et les soins où je vois tant de femmes sensibles
Me paraissent aux yeux des pauvretés horribles.
JUVÉNAL,
Satires, VI,
435-458
(entre 90 et 127)
Juvénal nous présente
dans cette satire sa vision
d’une “femme savante” :
« Plus assommante est cette autre qui, à peine à
table, loue Virgile, justifie Didon prête à mourir, met
les poètes en parallèle, les compare, suspend dans la
balance Virgile d’un côté, Homère de l’autre. Les
grammairiens mettent bas les armes, les rhéteurs
s’avouent vaincus, tout le monde fait silence.
Impossible à un avocat, à un crieur public, à une
femme même, de placer un mot, tant est dru le flot
de ses paroles. On dirait un tintamarre de chaudrons
et de clochettes. Plus n’est besoin de tourmenter les
trompettes et les cuivres : à elle seule, elle saura
secourir la lune en détresse (=éclipse de lune).
[…] Puisse la femme qui partage ta couche n’avoir
pas de style à elle, ne pas décocher en phrases arrondies l’enthymème (=sorte de raisonnement) tortueux, ignorer quelque chose en histoire et ne pas
comprendre tout ce qu’elle lit. J’abhorre une femme
qui reprend et déroule sans cesse la Méthode de
Palaemon, sans manquer jamais aux règles du langage : qui, férue d’érudition, me cite des vers que je
ne connais pas, et qui relève chez une amie ignorante des fautes auxquelles des hommes ne feraient
pas attention. Je veux qu’un mari puisse se permettre de lâcher un solécisme. »
HENRIETTE
Le Ciel, dont nous voyons que l’ordre est tout-puissant,
Pour différents emplois nous fabrique en naissant ;
Et tout esprit n’est pas composé d’une étoffe
Qui se trouve taillée à faire un philosophe.
Si le vôtre est né propre aux élévations
Où montent des savants les spéculations,
Le mien est fait, ma sœur, pour aller terre à terre,
Et dans les petits soins son faible se resserre.
Ne troublons point du Ciel les justes règlements,
Et de nos deux instincts suivons les mouvements :
Habitez, par l’essor d’un grand et beau génie,
19
À lui, la foudre en main, Jupiter s’apparut.
On aurait peine à bien dépeindre
La peur que le bonhomme en eut.
Je ne veux rien, dit-il, en se jetant par terre,
Point de souhaits, point de Tonnerre,
Seigneur demeurons but à but.
Cesse d’avoir aucune crainte ;
Je viens, dit Jupiter, touché de ta complainte,
je faire voir le tort que tu me fais.
Écoute donc. Je te promets,
Moi qui du monde entier suis le souverain maître,
D’exaucer pleinement les trois premiers souhaits
Que tu voudras former sur quoi que ce puisse être.
Vois ce qui peut te rendre heureux,
Vois ce qui peut te satisfaire ;
Et comme ton bonheur dépend tout de tes vœux,
Songes-y bien avant que de les faire.
À ces mots Jupiter dans les Cieux remonta,
Et le gai Bûcheron, embrassant sa falourde,
Pour retourner chez lui sur son dos la jeta.
Cette charge jamais ne lui parut moins lourde.
Il ne faut pas, disait-il en trottant,
Dans tout ceci, rien faire à la légère ;
Il faut, le cas est important,
En prendre avis de notre ménagère.
Ça, dit-il, en entrant sous son toit de fougère,
Faisons, Fanchon, grand feu, grand chère ;
Nous sommes riches à jamais,
Et nous n’avons qu’à faire des souhaits.
Là-des jus tout au long le fait il lui raconte.
À ce récit, l’Épouse vive et prompte
Forma dans son esprit mille vastes projets ;
Mais considérant l’importance
De s’y conduire avec prudence :
Blaise, mon cher ami, dit-elle à son époux,
Ne gâtons rien par notre impatience ;
Examinons bien entre nous
Ce qu’il faut faire en pareille occurrence ;
Remettons à demain notre premier souhait
Et consultons notre chevet.
Je l’entends bien ainsi, dit le bonhomme Blaise ;
Mais va tirer du vin derrière ces fagots.
À son retour il but, et goûtant à son aise
Près d’un grand feu la douceur du repos,
Il dit, en s’appuyant sur le dos de sa chaise :
Pendant que nous avons une si bonne braise,
Qu’une aune de Boudin viendrait bien à propos !
À peine acheva-t-il de prononcer ces mots
Que sa femme aperçut, grandement étonnée,
Un Boudin fort long, qui partant
D’un des coins de la cheminée,
Les hautes régions de la philosophie,
Tandis que mon esprit, se tenant ici-bas,
Goûtera de l’hymen les terrestres appas.
Ainsi, dans nos desseins l’une à l’autre contraire,
Nous saurons toutes deux imiter notre mère :
Vous, du côté de l’âme et des nobles désirs,
Moi, du côté des sens et des grossiers plaisirs ;
Vous, aux productions d’esprit et de lumière,
Moi, dans celles, ma sœur, qui sont de la matière »
CHARLES PERRAULT,
Les Souhaits Ridicules
« Si vous étiez moins raisonnable,
Je me garderais bien de venir vous conter
La folle et peu galante fable
Que je m’en vais vous débiter.
Une aune de Boudin en fournit la matière.
Une aune de Boudin, ma chère !
Quelle pitié ! c’est une horreur
S’écriait une Précieuse,
Qui toujours tendre et sérieuse
Ne veut ouïr parler que d’affaires de cœur.
Mais vous qui mieux qu’âme qui vive
Savez charmer en racontant,
Et dont l’expression est toujours si naïve,
Que l’on croit voir ce qu’on entend ;
Qui savez que c’est la manière
Dont quelque chose est inventé,
Qui beaucoup plus que la matière
De tout Récit fait la beauté,
Vous aimerez ma fable et sa moralité ;
J’en ai, j’ose le dire, une assurance entière.
Il était une fois un pauvre Bûcheron
Qui las de sa pénible vie,
Avait, disait-il, grande envie
De s’aller reposer aux bords de l’Achéron :
Représentant, dans sa douleur profonde,
Que depuis qu’il était au monde,
Le Ciel cruel n’avait jamais
Voulu remplir un seul de ses souhaits.
Un jour que, dans le Bois, il se mit à se plaindre,
20
S’approchait d’elle en serpentant.
Elle fit un cri dans l’instant ;
Mais jugeant que cette aventure
Avait pour cause le souhait
Que par bêtise toute pure
Son homme imprudent avait fait,
Il n’est point de pouille et d’injure
Que de dépit et de courroux
Elle ne dît au pauvre époux.
Quand on peut, disait-elle, obtenir un Empire,
De l’or, des perles, des rubis,
Des diamants, de beaux habits,
Est-ce alors du Boudin qu’il faut que l’on désire ?
Eh bien, j’ai tort, dit-il, j’ai mal placé mon choix,
J’ai commis une faute énorme,
Je ferai mieux une autre fois.
Bon, bon, dit-elle, attendez-moi sous l’orme,
Pour faire un tel souhait, il faut être bien bœuf !
L’époux plus d’une fois, emporté de colère,
Pensa faire tout bas le souhait d’être veuf,
Et peut-être, entre nous, ne pouvait-il mieux faire :
Les hommes, disait-il, pour souffrir sont bien nés !
Peste soit du Boudin et du Boudin encore ;
Plût à Dieu, maudite Pécore,
Qu’il te pendît au bout du nez !
La prière aussitôt du Ciel fut écoutée,
Et dès que le Mari la parole lâcha,
Au nez de l’épouse irritée
L’aune de Boudin s’attacha.
Ce prodige imprévu grandement le fâcha.
Fanchon était jolie, elle avait bonne grâce,
Et pour dire sans fard la vérité du fait,
Cet ornement en cette place
Ne faisait pas un bon effet ;
Si ce n’est qu’en pendant sur le bas du visage,
Il l’empêchait de parler aisément,
Pour un époux merveilleux avantage,
Et si grand qu’il pensa dans cet heureux moment
Ne souhaiter rien davantage.
Je pourrais bien, disait-il à part soi,
Après un malheur si funeste,
Avec le souhait qui me reste,
Tout d’un plein saut me faire Roi.
Rien n’égale, il est vrai, la grandeur souveraine ;
Mais encore faut-il songer
Comment serait faite la Reine,
Et dans quelle douleur ce serait la plonger
De l’aller placer sur un trône
Avec un nez plus long qu’une aune.
Il faut l’écouter sur cela,
Et qu’elle-même elle soit la maîtresse
De devenir une grande Princesse
En conservant l’horrible nez qu’elle a,
Ou de demeurer Bûcheronne
Avec un nez comme une autre personne,
Et tel qu’elle l’avait avant ce malheur-là.
La chose bien examinée,
Quoiqu’elle sût d’un sceptre et la force et l’effet,
Et que, quand on est couronnée,
On a toujours le nez bien fait ;
Comme au désir de plaire il n’est rien qui ne cède,
Elle aima mieux garder son Bavolet
Que d’être Reine et d’être laide.
Ainsi le Bûcheron ne changea point d’état,
Ne devint point grand Potentat,
D’écus ne remplit point sa bourse,
Trop heureux d’employer le souhait qui restait,
Faible bonheur pauvre ressource,
A remettre sa femme en l’état qu’elle était.
Bien est donc vrai qu’aux hommes misérables,
Aveugles, imprudents, inquiets, variables,
Pas n’appartient de faire des souhaits,
Et que peu d’entre eux sont capables
De bien user des dons que le Ciel leur a fait. »
21
III. LA RÉVOLTE DES FEMMES
ARISTOPHANE,
Lysistrata, 507-538
LYSISTRATA – Raison ? Comment, malheureux ?
Vous preniez des résolutions funestes, et il ne nous
était même pas permis de vous conseiller ? Mais
quand nous vous entendions publiquement dire
dans les rues : «N’y a-t-il pas un homme dans ce
pays ?» et un autre répondre : "Non, par Zeus, il n’y
en a pas", alors nous résolûmes sur l’heure, dans une
réunion de femmes, de travailler de concert au salut
de l’Hellade. Car, qu’aurait servi d’attendre ? Si donc
vous voulez écouter à votre tour, quand nous vous
conseillons sagement et, à votre tour vous taire,
comme nous vous faisions, nous serions un correctif
pour vous.
LE COMMISSAIRE – Vous, pour nous, C’est trop
fort, ton langage m’est intolérable.
LYSISTRATA -Tais-toi.
LE COMMISSAIRE – Me taire pour toi, maudite ?
pour toi qui portes un voile sur la tête ? Plutôt cesser
de vivre.
LYSISTRATA – Si c’est là ce qui t’arrête, je te le
passe, ce voile, prends-le, tiens, et ceins-en ta tête,
puis tais-toi.
CLEONICE – Prends encore ce fuseau, et la petite
corbeille que voilà. Puis rassemble les plis de ta ceinture et file la laine en croquant des fèves.… «"La
guerre sera l’affaire des femmes»
Lasses d’une guerre
interminable, Lysistrata
et ses amies veulent
obliger leurs maris
à conclure la paix.
Elles ne supportent plus
d’être, à la maison,
réduites au silence
et tenues à l’écart
de la vie politique,
dans la Cité.
LYSISTRATA – Nous, durant les premiers temps de
la guerre, nous avons, avec la modération qui est
nôtre, tout supporté de vous, les hommes, quoi que
vous fissiez, car vous ne nous permettiez pas d’ouvrir
la bouche. Et pourtant, vous n’étiez pas précisément
pour nous plaire ; mais nous, nous sentions bien ce
que vous étiez, et maintes fois, étant chez nous, nous
apprenions vos résolutions funestes sur une affaire
importante. Alors, bien qu’affligées au fond, nous
vous demandions avec un sourire : «Qu’a-t-on
décidé d’inscrire sur la stèle au sujet de la paix, à
l’Assemblée d’aujourd’hui ?» – «Qu’est-ce que cela
te fait ?» disait le mari, «tais-toi». Et je me taisais.
CLEONICE – Oh ! Mais moi, jamais je ne me taisais.
LE COMMISSAIRE – Alors, qu’est-ce que tu prenais
si tu ne te taisais pas !
LYSISTRATA – Aussi, moi, je me taisais-je. C’était,
d’une fois à l’autre, quelque pire résolution que nous
apprenions de vous, et nous demandions :
«Comment pouvez-vous, mon homme, agir avec si
peu de sens ?» Mais lui, aussitôt, me regardant en
dessous, de me dire : «Si tu ne tisses pas la toile, la
tête te cuira longtemps.» «La guerre sera l’affaire
des hommes1»
LE COMMISSAIRE – Il avait raison, par Zeus, celuilà.
1
Parole d’Hector à Andromaque, Iliade VI, 492
→ Quel verbe, répété huit fois
dont trois à l’impératif, résume
l’injonction masculine qui pèse sur les femmes ?
Quels sont les deux objets qui symbolisent
la condition féminine ?
Si vous êtes touché par la révolte de Lysistrata,
prenez sa défense.
22
HENRIK IBSEN,
Une maison de poupée,
1879 2
TORVALD : A la fois la tienne et celle des enfants,
ma Nora chérie.
NORA : Hélas ! Torvald, tu n’es pas homme à m’élever de façon de faire de moi une véritable épouse
pour toi.
TORVALD : Et c’est toi qui dis cela ?
NORA : Et moi,… comment suis-je préparée à élever
les enfants ?
TORVALD : Nora !
NORA : Ne l’as-tu pas dit toi-même tout à l’heure,…
tu n’oserais pas me confier cette tâche.
TORVALD : Dans un moment d’emballement !
Comment peux-tu en tenir compte ?
NORA : Si ; tu avais grandement raison. C’est une
tâche que je ne peux remplir. Il y a une autre tâche à
remplir d’abord. Je dois tâcher de faire ma propre
éducation. Ça, tu n’es pas homme à m’y aider. Il faut
que je sois seule pour cela. Et c’est pourquoi maintenant je te quitte.
Nora et Torvald Helmer sont mariés depuis huit ans
et ont trois enfants. Après des années financièrement
difficiles, le ménage peut enfin mener une vie
confortable avec le nouveau poste de Torvald
qui devient directeur de banque. Nora se contente
en apparence d’être une épouse délicieuse et frivole
que personne ne prend au sérieux, surtout pas Torvald.
Mais pour sauver son mari malade qu’elle aimait,
alors qu’ils manquent d’argent pour aller le soigner
en Italie, elle n’a pas hésité à agir à son insu
en contractant une dette et pire, en faisant un faux
en écriture. Elle s’est tue pendant huit ans,
jusqu’au jour où son débiteur menace de tout révéler
à son époux.
2
http://chroniques-d-isil.over-blog.com/article-une-maison-de-poupee-
ibsen-68121419.html
EXTRAIT :
TORVALD : Nora, comme tu es ingrate ! N’as-tu pas
été heureuse ici ?
NORA : Non ; je ne l’ai jamais été. Je le croyais ; mais
je ne l’ai jamais été.
TORVALD : Non… pas heureuse ?
NORA : Non ; seulement gaie. Et tu as été toujours si
gentil avec moi. Mais notre foyer n’a jamais été rien
d’autre qu’une chambre à jouer. J’ai été ici ta femmepoupée, comme chez papa j’étais son enfant-poupée.
Et les enfants, à leur tour, étaient mes poupées. Je
trouvais que c’était agréable, quand tu me prenais et
jouais avec moi, comme ils trouvaient que c’était
agréable, quand je les prenais et jouais avec eux.
Voilà ce qu’a été notre mariage, Torvald.
TORVALD : Il y a du vrai dans ce que tu dis,… Si exagéré, si outré que ce soit. Mais il en sera autrement
désormais. Le temps du jeu est fini ; maintenant va
venir celui de l’éducation.
NORA : L’éducation de qui ? La mienne ou celle des
enfants ?
23
© B. Enguerrand
ANNEXES
24
WILLIAM SHAKESPEARE
The "Flower portrait" of Shakespeare
Le poète conquiert l’amitié de ses camarades et la
bienveillance des grands seigneurs, et surtout l’estime de la jeune reine Elisabeth I qui marque pendant
toute sa vie une préférence pour l’œuvre de Shakespeare. Il entame sa carrière en reprenant des
pièces à sujet historique, puis compose des pièces
inspirées de l’Antiquité. Un autre « groupe » de pièces
est celui des tragédies, parmi lesquelles figurent en
tête Roméo et Juliette (1 595), puis Hamlet (1602),
Othello (1604), le Roi Lear (1606) et Macbeth (1606).
La Tempête (1611), est considérée comme la dernière pièce de l’auteur qui se retire à Stratford, riche
et apaisé, à l’âge de quarante-sept ans.
La fin de vie de Shakespeare est un peu agitée :
assigné en justice pour avoir clôturé ses terres, privant de revenus de nombreux paysans ; on accuse
son futur gendre d’avoir eu des relations sexuelles
avec une autre personne que Judith, sa fiancée.
Shakespeare meurt à l’âge de 52 ans.
Né à Stratford-on-Avon (Angleterre), probablement le
23 avril 1564 (puis baptisé le 26 avril 1564), William
Shakespeare est considéré comme l’un des dramaturges les plus grands de tous les temps, mais sur
qui l’on a le moins de précisions biographiques. Fils
de commerçant aisé, il épouse à dix-huit ans Anne
Hathaway, mais ne semble pas avoir été heureux en
ménage. Nous perdons ensuite la trace de Shakespeare pendant près de dix ans.
Des trente-sept pièces qui lui sont attribuées, seize
seulement furent publiées de son vivant. Notons que
deux œuvres ne sont pas parvenues jusqu’à nous :
Peines d’amour et peines gagnées (mais il s’agit
peut-être d’un autre nom de la pièce Beaucoup de
bruit pour rien), et Cardenio, une pièce composée
en collaboration avec un autre auteur.
Enfin, il existe des textes, écrits au xVIIe siècle, dont
Shakespeare est peut-être l’auteur, mais nous n’en
avons aucune preuve. Certains érudits ont contesté
l’existence de Shakespeare, y voyant un prête-nom
pour quelque grand seigneur ou bien attribuant à
Bacon la paternité, alors qu’aujourd’hui on croit généralement au vrai Shakespeare.
On n’omettra pas de signaler l’existence d’une biographie de William Shakespeare écrite par Victor Hugo.
On ne sait rien de ce qu’il fit au cours de cette période, mais l’on sait qu’il quitta Stratford pour rejoindre
Londres (sans doute vers 1587), et que sa femme
accoucha de plusieurs enfants : Susanna, en mai
1583 ; ainsi que des jumeaux, Hamnet et Judith, en
février 1585 (Hamnet mourut jeune, en août 1596).
Shakespeare trouve du travail dans un théâtre et révèle son talent en « arrangeant » des pièces achetées
aux auteurs. Il prend les dramaturges de son époque
tels que Marlowe, Greene et Peele comme modèles.
Peines d’amour perdues (1590?) est considéré comme
sa première pièce originale, suivie de plusieurs poèmes
galants (Vénus et Adonis, Le Viol de Lucrèce).
http://www.atramenta.net/authors/william-shakespeare/360
25
LA PLACE DE LA FEMME
DANS LA SOCIÉTÉ
LA CONDITION DE LA FEMME AU XVIe SIÈCLE
INSTRUMENTS DE RÉPRESSION DES MÉGÈRES
Dans cette société patriarcale, la femme est considérée comme une éternelle mineure et passe de l’égide
paternelle à l’égide maritale. Son éducation se limite
généralement aux arts d’agrément. Elle est cantonnée à une minorité civique, sociale, culturelle. Elle
est, selon la Genèse, l’inférieure de l’homme (Eve
sortie de la côte d’Adam) et considérée comme étant
responsable de la chute ce qui attire sur elle suspicion et défiance. Une femme ne peut acquérir de
reconnaissance sociale en dehors du mariage. La
femme n’a pas de statut de citoyenne. Toute femme
soupçonnée d’actes ou même d’avoir une attitude
répréhensible pouvait être « corrigée » par le biais
de méthodes dégradantes et violentes.
On fera cependant remarquer aux élèves que si
Baptista considère le mariage de ses filles
comme seule issue envisageable, au point de sacrifier
le bonheur de Catherine, il les a cependant dotées
d’une éducation complète et humaniste. Les femmes
de cette pièce sont loin d’incarner une caricature
de la femme : elles savent manier les mots et occupent
dans la pièce une place centrale. C’est d’ailleurs
à Catherine que revient la plus longue réplique
de toute la pièce.
Scold's bridle,
Germany, 1550-1800
A branked scold
in New England,
from an 1885 lithograph
Documents extraits de http://susaufeminicides.blogspot.fr/2014/05/bride-ecossaise.html)
26
DÉFINITION DE LA FEMME AU XIXe SIÈCLE
PAR PIERRE LAROUSSE (1817-1875)
NOUVEAU PETIT LAROUSSE ILLUSTRÉ, 1956
Grand dictionnaire universel du XIXe siècle
Femme [fam] n.f. (lat.femina). Compagne de
l’homme ; épouse. Celle qui est ou a été mariée. Femme de chambre, personne attachée au service intérieur d’une personne de son sexe. Femme de charge,
celle qui a soin du linge, de l’argenterie… d’une maison. Femme de ménage, femme chargée du soin
d’un ménage dans une famille, et qui est payée à
l’heure ou à la journée. Bonne femme, femme âgée ;
femme sans prétentions.
FEMME s.f […] Femelle de l’homme, être humain
organisé pour concevoir et mettre au monde des
enfants : Une belle FEMME. […]
- Collectiv. Femmes en général, ensemble des personnes du sexe féminin : J’ai trouvé la FEMME plus
amère que la mort (Ecclésiaste) […] — ÉPOUSE,
femme en puissance de mari : Sa FEMME vient d’accoucher. […]
Encycl. Anat. Et Physiol. […] Le corps de la femme
atteint un bien moins grand développement que celui
de l’homme : c’est ce qui fait qu’elle est plus précoce
et que ses fonctions vitales sont beaucoup plus rapides. Sa constitution corporelle se rapproche de celle
de l’enfant ; c’est pourquoi elle est, comme celui-ci,
d’une sensibilité très vive, se laissant facilement impressionner par les divers sentiments de joie, de
douleur, de crainte, etc. ; et, comme ces impressions
agissent sur l’imagination sans être accompagnées
d’ordinaire par le raisonnement, il s’ensuit qu’elles
sont moins durables, et que la femme est plus sujette
à l’inconstance. […]
Si l’on examine l’organisation de la femme dans les
divers climats du globe, on trouve qu’elle est beaucoup plus sujette que l’homme aux influences de
température et d’alimentation. Ainsi, les climats tempérés, un heureux état de liberté sociale, des habitudes douces, un air pur, une nourriture saine, une
éducation soignée, contribuent au plus haut degré
au développement des formes extérieures de la femme
et en font la digne compagne de l’homme civilisé ;
tandis que, dans les régions polaires et dans les pays
brûlés par les ardeurs du soleil, où la femme est
réduite à l’état d’esclave et soumise presque toujours
à une alimentation insuffisante, elle présente une dépravation physique et morale qu’on ne trouve jamais
dans les contrées d’Europe. La dégénération comme
l’amélioration des races commence toujours par le
sexe féminin ; et les Turcs et les Persans, d’origine
tartare, ne doivent d’avoir effacé leur laideur originelle qu’aux fréquentes unions qu’ils ont contractées
avec les belles Géorgiennes.
PETIT LAROUSSE EN COULEURS, 1988
Femme. [fam.] n.f (lat.fémina). 1. Être humain du
sexe féminin (par opp. A homme). La loi salique
excluait les femmes de la possession de la terre. 2.
Adulte du sexe féminin (par opp. à fille, à jeunefille). C’est une femme maintenant. 3. Épouse. Il
nous a présenté sa femme. 4. (Qualifié). Adulte du
sexe féminin considéré par rapport à ses qualités, ses
défauts, ses activités, ses origines, etc. Une brave
femme. Une femme de parole. Une femme de lettres […]
→ Comparez les articles des dictionnaires
ainsi que l’article du dictionnaire de l’académie.
Commentez.
27
DÉFINITION
DE LA MISE EN ABYME
DICTIONNAIRE INTERNATIONAL DES TERMES LITTÉRAIRES
7. (Poétique, d’après André Gide). Procédé consistant
à insérer dans un texte un fragment qui le représente. La mise en abyme est une autoreprésentation
diminutive.
Figuration de l’écrivain par lui-même en train de
composer son œuvre ; certains romanciers par
exemple ont ainsi présenté dans leur récit un écrivain qui écrit.
Dans le cas du théâtre dans le théâtre, le spectateur
peut voir des acteurs jouant des personnages qui
jouent eux-mêmes un rôle.
[…]
8. (Narratologie). Dispositif insérant un récit (soustexte) dans le récit principal ou primaire reproduisant les caractéristiques du récit primaire lui-même,
l’illustrant, l’expliquant, le contredisant, le prolongeant comme contrepoint.
Selon Mieke Bal, la fabula principale et la fabula
enchâssée se paraphrasent mutuellement grâce à
l’élément ou aux éléments qu’elles ont en commun.
La fonction du sous-texte est d’être un signe du texte
principal ou primaire. V. les articles FABULA, PARAPHRASE, SOUS-TEXTE.
9. (Théâtre). Pièce dans la pièce. La mise en abyme
la plus célèbre du répertoire dramatique est probablement dans la tragédie de Shakespeare la pièce
qu’Hamlet fait jouer devant le roi reproduisant les
circonstances de l’assassinat du frère du roi par le
roi lui-même.
28
LE MONOLOGUE DE CATHERINE
DANS L’ACTE V
CATHERINE : Allons, allons, arrête de froncer les sour-
Si elle refuse des caresses qui n’ont rien de déshonorant,
Alors c’est une infâme rebelle, une ingrate et une
traîtresse envers son maître qui l’adore.
J’ai honte de voir que les femmes peuvent manquer
d’esprit
Au point de faire la guerre alors qu’elles devraient à
genoux déposer les armes.
Elles cherchent à avoir de l’autorité, du pouvoir, de la
superbe,
Alors qu’elles sont nées pour servir, aimer et obéir.
Pourquoi avons-nous un corps doux, faible et lisse,
Inapte au labeur et trop frêle pour les dangers de ce
monde ?
C’est pour que notre douceur de caractère et de
coeur
Soit en parfaite harmonie avec notre aspect extérieur.
Misérables vermisseaux que vous êtes !
Afin de rendre mot pour mot et trait pour trait,
Mon esprit a été aussi grand que le vôtre,
Mon coeur est aussi noble que le vôtre,
Ma raison peut-être encore davantage,
Mais je sais maintenant que nos armes sont des
brins de paille,
Nos forces sont dérisoires et nos faiblesses
immenses,
Et nous avons l’air d’être le plus ce que nous
sommes le moins.
Alors ravalez votre orgueil, il ne sert à rien du tout,
Posez vos mains à terre, au pied de votre époux.
Moi aussi je fais ce geste, et s’il le souhaite
À son bon plaisir, ma main est prête.
cils comme ça,
Et ne jette pas ces regards noirs et méprisants
Pour blesser ton seigneur, ton roi, ton capitaine.
Cela gâche ta beauté comme la morsure du gel brûle
la prairie,
Cela gâche ta réputation comme la tempête brise les
bourgeons
Et cela n’est ni convenable ni plaisant.
Une femme en colère est comme une fontaine aux
eaux troubles,
Impure, laide, sans finesse, et sans attrait.
Et tant qu’elle reste ainsi, aucun homme, fût-il mort
de soif
Ne daignera la toucher, en boire ne serait-ce qu’une
gorgée, ni même une goutte.
Ton époux est ton seigneur, ta vie, ton gardien,
Ton chef, ton souverain : c’est lui qui prend soin de
toi
Et te donne ce dont tu as besoin ; il ne ménage pas
sa peine,
Il met son corps à dure épreuve, sur terre comme en
mer,
Il veille la nuit dans la tempête, il veille le jour dans
le froid,
Pendant que toi tu es au chaud chez toi, à l’abri des
menaces et du besoin,
Et pour récompense de tous ces efforts, tout ce qu’il
demande,
C’est ton amour, ta beauté et ta vraie obéissance—
Ce n’est pas cher payé pour une dette aussi grande.
Un sujet a envers un prince les mêmes devoirs
qu’une épouse envers son mari ;
Si elle est impatiente et insoumise, si elle a l’air boudeur ou qu’elle est pleine d’aigreur,
29
LE THÉÂTRE ÉLISABÉTHAIN
Elisabeth Ire (1558-1603), reine très cultivée et amatrice
d’art, protestante modérée, protège le théâtre contre
les attaques des protestants puritains qui considèrent
le théâtre (qu’ils appelaient «la maison du diable»)
comme une école du vice et de la débauche. Ainsi en
Angleterre, le théâtre est-il très florissant. Le drame
liturgique est très vite abandonné au profit d’un théâtre profane, beaucoup plus ludique et surtout davantage consacré à l’histoire de l’Angleterre. En effet, aux
histoires sacrées, le public préfère les histoires des rois
du passé et des faits divers qui ont marqué leur règne.
Comme au Moyen-Âge, le théâtre est mobile, on
construit des «mansions roulantes» qui se déplacent
de ville en ville. On joue sur les places publiques et
après le spectacle, on fait la quête : c’est le début du
théâtre payant. Puis on décide de rassembler toutes
les mansions en seul lieu, dans une cour d’auberge
par exemple, et de faire payer l’entrée, dès lors, le
peuple le plus démuni est exclu des représentations.
C’est à partir de cette idée que va naître le théâtre
fixe, appelé "théâtre à ciel ouvert", dès 1575, tels le
Rideau, La Fortune, les Blackfriars. Les théâtres
étaient construits à l’extérieur de Londres en raison
du décret de 1574 qui interdisait toute représentation théâtrale intramuros. Néanmoins, certains réussissent à contourner la loi et on voit se développer
des théâtres privés qui s’installent dans des palais.
un espace vide. C’est dans ce théâtre que la plupart des
pièces de Shakespeare furent jouées. Mais en 1613,
au cours de la représentation d' Henry VIII, les canonniers chargés de tirer les coups de canon (placés sous
le toit) pour saluer le roi, n’ont pas prêté attention
aux étincelles et le feu ravagea le théâtre, sans pour
autant faire de victimes. Il fut alors reconstruit mais
le chaume du toit fut remplacé par des tuiles.
Devenu payant, le théâtre est moins démocratique
et distingue deux catégories de spectateurs : les plus
modestes, ceux du parterre, qui restent debout et les
plus aisés qui sont assis dans des loges ou sur des
gradins. Les spectateurs entourent les trois côtés de
la scène ce qui permet une relation étroite entre les
acteurs et les spectateurs.
Le statut des acteurs évolue, on compte de moins
en moins d’acteurs amateurs et de plus en plus d’acteurs
professionnels: c’est la naissance des troupes de théâtre convoitées par les grands seigneurs qui jouent en
quelque sorte le rôle de mécène, tel Lord Chamberlain qui permit à Shakespeare de fonder la « Lord
Chamberlain’s Company of actors » en 1594. Seuls les
hommes pouvaient être acteurs, aussi les rôles féminins étaient-ils joués par des jeunes hommes (n’ayant
pas encore mué si possible) travestis en femme. (cf à
ce sujet le film Shakespeare in love) Les spectacles se
jouaient en matinée et étaient souvent suivis de
numéros d’acrobates.
AGENCEMENT DU LIEU SCÉNIQUE :
→ l’avant-scène, ou scène en éperon (the apron
stage) où se déroulaient les batailles, les duels et les
monologues. Le public, le plus souvent debout entourait ce plateau sur trois côtés.
→ l’arrière-scène, fermée par un rideau, où se déroulaient les scènes d’amour et les agonies, c’est là que
se situait le tombeau de Juliette. Ce lieu servait aussi
de salle du trône.
→ le balcon (upper stage), lieu où se situe la scène
nocturne entre Roméo et Juliette (acte II, scène 2)
→ la scène proprement dite (main stage), où se déroulaient toutes les autres scènes, c’est-à-dire, la plus
grande partie.
Les théâtres étaient construits en bois, tel le Globe,
construit en 1594 au bord de la Tamise. Ils sont de
forme circulaire ou polygonale ; au centre on trouve
30
© B. Enguerrand
L’ÉQUIPE
ARTISTIQUE
31
MÉLANIE LERAY est comé-
vies, puis sous la direction de Gérard Oury L’As des
As, Lewis Gilbert Moonraker, Robert Aghion Pédale
Douce, Robert Enrico De guerre lasse, Patrick Mario
Bernard et Pierre Trividic Dancing et L’Autre, avec
Dominique Blanc, Krzystof Zanussi Contrat, Marcel
Bluwal Le plus beau pays…
À la télévision Peter Bonke tourne, entre autres, sous
la direction de José Dayan Tourbillons, Marcel Bluwal L’Affabulatrice, À droite toute, Jeanne Labrune
La Digue, Luc Beraud Les Croix sur la mer et apparaît de manière récurrente dans Un Village Français.
Il développe parallèlement une carrière au théâtre :
Le Récit de la servante Zerline de Hermann Broch
par Klaus-Maria Gruber avec Jeanne Moreau, Les
Revenants d’Ibsen par Olivier Werner, avec Edith
Scob, Liaison transatlantique de Simone de Beauvoir par Patrice Kerbrat, avec Marie-France Pisier,
La Double Inconstance de Marivaux et le Tartuffe de
Molière dans des mises en scène de René Lyon,
Richard II par Jean-Baptiste Sastre avec Denis Podalydès, Les Juifs de Lessing sous la direction
d’Olivia Kryger… Peter Bonke aborde également un
répertoire musical avec Labyrinthe Hotel (opéra de
chambre) par Luc Ferrari et Farid Paya, ainsi que
L’Opéra de Quat’sous de Bertolt Brecht musique de
Kurt Weill avec Jean-Louis Martin-Barbaz.
dienne, metteuse en scène et auteure. Elle est formée à l’école du Théâtre
National de Bretagne de
1991 à 1994. Elle travaille
comme actrice avec le
Théâtre des Lucioles et
Christophe Lemaître, Jean
Deloche, Gilles Dao, François Rancillac, Patricia
Allio, Pierre Huyghe…
Au cinéma, elle a tourné avec Manuel Poirier (prix
du Jury du Festival de Cannes 1997), xavier Beauvois, Marion Vernon, Benoît Jacquot, Roch Stephanik, Christophe Jacrot, Pascale Breton, Hubert
Grillet, Fred Pell, Jalil Lespert etc. Elle obtient en
2001 le Lutin de la meilleure actrice pour Les filles du
12 de Pascale Breton.
Elle tourne également pour la télévision des films avec
Édouard Niremans, Lou Genet, Hervé Baslé, Jean
Larriaga, Claude D’Anna, Sisser, David Delrieux, Florence Strauss, P. Poivre D’Arvor, Pascale Dallet…
Elle met en scène au Centre Pénitentiaire de Rennes
avec le TNB, des femmes de la prison et des artistes
extérieurs : Voir et être vu (B. Strauss et Sarah Kane,
2000) et J’étais dans ma maison et j’attendais…
d’après le texte de Jean-Luc Lagarce (2001).
Avec Pierre Maillet, elle met en scène deux pièces :
Automne et Hiver (2004) et La Veillée (2005) de Lars
Norén.
Elle crée au Festival Corps de Texte à Rouen Erma
et moi de Mario Batista (2006), au Théâtre du Rond
Point à Paris La Chaise de Florian Parra (2006) et au
Théâtre National de Bretagne à Rennes deux spectacles qui rencontrent un grand succès : Leaves de
Lucy Caldwell (2009 & 2011) puis Contractions de
Mike Bartlett (2012), repris en 2014.
LUDMILLA DABO est for-
© X.DR
mée au Conservatoire national supérieur d’Art Dramatique où elle a notamment pour professeurs
Dominique Valadié, Alain
Françon, Jean-Damien
Barbin, Guillaume Gallienne et Michel Fau.
Au théâtre, elle joue entre autres pour : Bernard Sobel
(Théâtre de la Colline), Irène Bonnaud (Théâtre du
Nord, Comédie de Reims entre autres), Jean-Philippe Vidal (au Théâtre de l’Ouest Parisien et la
Comédie de Reims entre autres) Philippe Grandrieux et Pavel Hak (Montévidéo Marseille), Saturnin
Barré (Théâtre d’Auxerre), Denis Moreau (Parole
Errante–La Maison de l’Arbre, Montreuil), Lena Paugam
(Confluences, Théâtre 95), Malgorzata Kaspzycka
(Mexique). Elle est membre de la Compagnie JTLE
crée par Simon Gauchet en 2007 et de la Compagnie Volcano Song crée par Malgorzata Kaspzrycka
et destinée à des formes performatives et visuelles
axées à la fois sur le théâtre et sur la musique. Elle
met en scène Le Jugement denier d’Odon Von Horváth et une comédie musicale Eunice Kathleen Wa-
© X.DR
PETER BONKE étudie au
Conservatoire Royal de
Copenhague, et débute
sa carrière de comédien
au Danemark, son pays
natal. Titulaire d’une bourse d’études, il s’installe à
Paris ; il fait aussitôt ses
débuts au cinéma dans
Barocco de Téchiné, aux côtés de Gérard Depardieu et Isabelle Adjani. Suivront plus d’une vingtaine
de longs-métrages : aux côtés d’Alain Delon sur Le
Toubib de Pierre Granier-Deferre, Trois hommes à
abattre de Jacques Deray et Le Choc de Robin Da-
32
mon ou la vie de Nina Simone (Théâtre du Conservatoire), L’Enfant d’or et l’enfant d’argent (spectacle
jeune public), elle met en scène et joue dans Misterioso-119 de Koffi Kwahulé (Théâtre Gérard Philipe-Saint Denis). Elle joue actuellement dans Afropéennes, une mise en scène d’Eva Doumbia qui se
jouera en février 2015 au Carreau du temple à Paris.
que danseur avec K. Reynolds, collabore en tant
que chanteur au groupe « les portugaises ensablées ». Il joue et possède une expérience dans
une dizaine de courts, longs métrages, et prête sa
voix à la radio pour des documentaires historique
ainsi que des fictions. David Jeanne-Comello travaille actuellement et met en scène La Campagne
de Martin Crimp, et Face de cuillère de Lee hall…
LAETITIA DOSCH a été
DAVID JEANNE-COMELLO
Après des études au
Conservatoire national
d’Art Dramatique de TelAviv & New-York, YUVAL
ROZMAN (né en 1984),
crée l’ensemble Voltaire
en 2010 et, présente ses
propres travaux en France, en République Tchèque, aux États-Unis et en Israël. L’Ensemble a reçu
les félicitations du jury et le premier prix du C.A.T
International Théâtre Festival de Tel-Aviv 2011 pour
la pièce Cabaret Voltaire. Il collabore également avec
des chorégraphes, réalisateurs et plasticiens internationaux. En 2013, il a présenté une mise-enespace de Je crois en un seul dieu de Stefano Ma-
© B. Cruveiller
CLARA PONSOT est une
actrice française née en
1989. Elle a étudié au
Conservatoire national
supérieur d’Arts Dramatiques.
Clara Ponsot fait ses premiers pas au cinéma dans
Bus Palladium de Christopher Thompson (2009) et Poupoupidou de Gérald
Hustache-Mathieu (2010), avant de se faire remarquer en petite amie étudiante de Gilles Lellouche
dans Les Infidèles de Jean Dujardin (2012). En mars
2012, elle interprète le personnage d’Emmanuelle
Béart jeune dans le film Bye Bye Blondie de Virginie
Despentes, puis elle tourne pour Danièle Thompson
Des gens qui s’embrassent (2013). On la verra en
2015 dans Peur de rien de Danielle Arbid.
Pour le théâtre, elle a joué dans : Le Misanthrope de
Molière, mise en scène David Géry, Théâtre de la
Commune (2006), Ma vie de chandelle de Fabrice
Melquiot, Théâtre Les Déchargeurs (2010), Faites
avancer l’espèce d’après Wystan Hugh Auden et
Shakespeare, mise en scène Bruno Bayen, CNSAD
(2012), Le Jeu de l’amour et du hasard de Marivaux,
mise en scène Laurent Laffargue, Théâtre de l’Ouest
parisien (2014).
© X.DR
étudiante à la classe libre
du Cours Florent ainsi qu’à
l’École Périmony, puis
part en Suisse pour entrer
à la « Manufacture ».
Elle a joué au cinéma avec
Frédéric Mermoud pour
Complices (2010), Justine Triet pour Vilaine Fille, Mauvais Garçon (2011),
puis encore La Bataille de Solférino (2012) de la
même réalisatrice, puis avec Maiwenn, Catherine
Corsini, Guillaume Senez et Christophe Honoré. Elle
joue le rôle récurrent de Daphné dans la série Ainsi
soient-ils, saison 2, coproduite par Arte.
Au théâtre Lætitia Dosch a notamment joué Isabelle
dans le Mesure pour mesure de Jean-Yves Ruf, avec
Éric Ruf. Dans la danse contemporaine, Lætitia Dosch
a travaillé à plusieurs reprises avec le chorégraphe
Marco Berrettini, et avec la chorégraphe espagnole
La Ribot.
Elle est aussi metteuse en scène et auteure de
théâtre, notamment de Lætitia fait péter… (titre évolutif) qu’elle joue à Beaubourg et, au festival Artdanthé, Klein à la Ménagerie de Verre.
Actuellement Lætitia Dosch travaille à sa nouvelle création Un Album (Théâtre Arsenic, festival ActOral)
avec Yuval Rozman comme collaborateur artistique.
© X.DR
© X.DR
est un acteur formé à l’école du Théâtre National
de Bretagne, il est co-fondateur du Théâtre des
Lucioles. Avec Pierre Maillet, Marcial di Fonzo Bo,
Mélanie Leray, et Frédérique Loliée, il participe
à la mise en jeu d’auteurs contemporains, (R.V.
Fassbinder, Leslie Kaplan, Ingmar Bergman, Alberto
Moravia, Valère Novarina, Lars Noren, Martin Crimp…).
Il travaille également avec les metteurs en scène :
Marc François, Dominique Pitoiset, Guy Delamotte,
Dominique Terrier, Mathieu Cruciani, Max Denes…
Il participe à des projets chorégraphiques en tant
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VINCENT WINTERHALTER
ssini au Théâtre du Merlan – Scène nationale, et en
2014, il a présenté une mise-en-espace de Sight is
the sense that dying people tend to lose first de Tim
Etchells, dans le cadre du festival ActOral à
Marseille. Actuellement, il vit à Paris, et travaille sur
sa nouvelle pièce Tunnel Boring Machine (Théâtre
de l’Odéon, festival ActOral, théâtre de Vanves)
avec Laetitia Dosch qu’il retrouve aussi comme collaborateur artistique sur sa nouvelle création Un
Album (Théâtre Arsenic, festival ActOral).
Au cinéma on le voit dans : Sans Titre, long métrage
de Maïwenn, Cupcakes, long métrage d’Eytan Fox,
Le Fils de l’autre, long métrage de Lorraine Lévy au
Festival international de Jérusalem, Épilogue, long
métrage d’Amir Manor au Festival de Venise et de
Jérusalem, A word, court métrage de Yoav Inbar prix
du meilleur film au Festival international du film de
Tel-Aviv, au Festival de Londres, Sous d’autres cieux,
long métrage d’Ariel Templer. Il joue dans Itamar et
moi, série dramatique réalisée par Oren Yaniv. Pour
le théâtre Yuval Rozman joue dans : Le Lait et le miel
mis en scène par N.Kerszenbaum, Incendies de
W.Mouawad mis en scène par M.Ronen, L’Idiot de
Dostoïevski (le prince L.Mychkine) mis en scène par
Misha Lorya, Suicidé de N. Erdman mis en scène
par Uri Paster.
© X.DR
se forme auprès de Nicole
Mérouse, et d’Herbet au
Studio/New York, et à l’école de Cirque Fratellini.
Au théâtre, il travaille
avec Jean-Gabriel Nordmann, François Rancillac, Robert Cantarella,
Jean-Paul Delore, Jorge Lavelli, Georges Lavaudant,
Hélène Vincent, Jacques Nichet, Gildas Bourdet,
Laurent Laffargue, Didier Bezace, Jacques Vincey…
et aux États-Unis avec Larry Collins et Bo Brinkman.
Dernièrement, on a pu le voir dans Le Roi Lear de
Shakespeare, mise en scène Christian Schiaretti,
Stuff Happens de David Hare, mise en scène Bruno
Freyssinet et William Nadylam, Mary Stuart de Friedrich Von Schiller, mise en scène Stuart Seide, 1418, Le temps de nous aimer mise en scène de Patrick Pineau. Il a mis en scène Phèdre de Racine et
Jack’sFolies de Robert Desnos. Au cinéma, on a pu
le voir notamment dans Aux yeux du monde d’Éric
Rochant, L’Instinct de l’ange de Richard Dembo, La
Nouvelle Eve de Catherine Corsini, Une pour toute
de Claude Lelouch, Parenthèse de Bernard Tanguy,
Du sang sur la croix de D.Othnin-Girard, JP Rappeneau, Éric Woreth. À la télévision, on le retrouve
dans différentes séries : Le Boiteux, Fais pas ci fais
pas ça, Nicolas Le Floch, Engrenages, Maigret…
JEAN-BENOÎT UGEUX est
un acteur de théâtre et de
cinéma Belge. Avec une
réelle prédilection pour les
créations contemporaines
avec des compagnies
étrangères – souvent dans
des langues qui le sont
tout autant. Il travaillera
donc avec des metteurs en scène ou des compagnies
telles que Wayntraub, Ivan Vrambout, Wim Vandekeybus, Rodrigo García, BERLIN, Blitz Theater Group…
Au cinéma, on le voit dans une flopée de films
belges et étrangers avec une prédilection pour les
projets ambitieux et/ou casse-gueule et/ou sans
budget. Il travaille pêle-mêle avec Joachim Lafosse,
Emmanuel Marre, Cédric Bourgeois, François Pirot,
xavier Seron, Matthieu Donck… le duo Amachoukeli/Burger, Brigitte Sy.
Il a également réalisé et monté un triptyque expérimental appelé : VALEURS. Il est aussi un peu photographe et (fût) un peu musicien électro-acoustique.
Il s’oriente actuellement plutôt vers le cinéma et produit un film-tryptique intitulé Avant-Terme, réalisé par
cinq réalisateurs Belges.
© Ch. Olinger
© X.DR
JEAN-FRANÇOIS WOLFF
est un acteur formé au
Conservatoire de la ville
de Luxembourg.
Le théâtre de Molière lui
donne l’occasion de jouer
Monsieur Jourdain dans
Le Bourgeois Gentilhomme et Arnolphe de L’École
des Femmes. Il interprète Titus dans Titus Andronicus de William Shakespeare. En rôle-titre dans le
théâtre contemporain, on le voit dans Orphelins de
Lyle Kessler et Quelqu’un va venir de Jon Fosse.
Au cinéma, il tourne pour Jeanne Labrune dans Sans
queue ni tête, Philippe Claudel Avant l’hiver, Bouli
Laners Les Géants, Sandrine Bonnaire J’enrage de
son absence, Frédéric Fonteyne La Femme de Gilles
et en international pour Julian Farino Byron, Michael
Rathford The merchand of Venice et récemment
dans la série The missing pour la BBC.
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RENCONTRE
RÉSERVATION SUR LE SITE INTERNET www.theatredelaville-paris.com RUBRIQUE « RENCONTRES-CALENDRIERS & INSCRIPTIONS »
DIMANCHE 15 MARS
« UN DIMANCHE POUR UNE RENCONTRE »
Après la représentation de La Mégère apprivoisée, rencontre avec Mélanie Leray et l’équipe artistique.
TOURNÉE
3 au 6 fév.
10 au 12 fév.
17 au 20 fév.
24 au 29 mars
1er au 10 avr.
16 et 17 avr.
5 et 6 mai
11 au 13 mai
Cergy-Pontoise, l’Apostrophe
Maison de la Culture d’Amiens
La Rochelle, La Coursive
Sceaux, les Gémeaux
MC2 : Grenoble
Théâtre de Saint-Quentin-en-Yvelines
Brest, le Quartz
Maison de la Culture de Bourges
BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE
• La Mégère apprivoisée, William Shakespeare, traduit de l’anglais
par Delphine Lemonnier-Texier (L’Arche éditeur)
• Écrits sur le théâtre, sur le théâtre intime et sur Shakespeare, August Strindberg,
traduit du suédois par Terje Sinding (Circé)
• Shakespeare, Tomasi Di Lampedusa (Allia)
• Représentations et identités sexuelles dans le théâtre de Shakespeare,
Mises en scène du genre, écritures de l’histoire,
sous la direction de Delphine Lemonnier-Texier (Presses universitaires de Rennes)
• Shakespeare et le désordre du monde, Richard Marienstras (Gallimard)
SÉANCES D’AUDIO DESCRIPTION
EN COLLABORATION AVEC ACCÈS CULTURE
DIMANCHE 8 MARS 15 H
MARDI 10 MARS 20 H 30
FACEBOOK
HTTPS://WWW.FACEBOOK.COM/LERAY2052
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PRESSE
Ouest France, 7 janvier 2015
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Ouest France, 13 janvier 2015
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