Bovins Viande Bovins Lait Ovins Viande Caprins Laitiers Utilisation des protéagineux dans l'alimentation des bovins lait Les crises récentes en élevage ont un retentissement sur l'alimentation des bovins laitiers ; les éleveurs ont le souci de réassurer le consommateur sur les sources alimentaires utilisées par leurs animaux, que ce soit par la volonté de garantir une alimentation sans OGM ou par le souci d'assurer la traçabilité des aliments qu'ils distribuent. Ces démarches les incitent à rechercher l'autonomie alimentaire de l'exploitation, en particulier celle en protéines. Limiter ou supprimer l’achat d’aliments riches en protéines Lupin Dans la très grande majorité des situations, les exploitations de Midi-Pyrénées sont structurellement autonomes en fourrages ; 95 à 100 % des fourrages sont produits par l'exploitation. Seuls des événements climatiques engendrent des achats de fourrages ; ces situations restent conjoncturelles. La plupart du temps, les entrées de ressources alimentaires externes à l'exploitation se limitent aux aliments concentrés, dans des proportions variables selon le système fourrager, le niveau de production par animal et les cultures associées (céréales, oléoprotéagineux) ; l'autonomie en concentrés évolue en général entre 0 et 75 % de la MS en concentrés consommés. Une bonne partie de ces concentrés correspond à des achats de protéines destinées à corriger les rations, notamment celles à base de maïs ensilage, et à équilibrer les concentrés de production. Ces protéines achetées proviennent en majorité de tourteaux de soja importés du Brésil ou des États-Unis puis de tourteau de colza d'origine métropolitaine ou européenne. L'autonomie en protéines se situe généralement entre 0 et 60 % de la MAT provenant des concentrés distribués. L'emploi de ces sources concentrées en protéines peut être limité : Pois • par l'application stricte des apports recommandés de l'INRA pour le rationnement protéique des animaux, sans "marges de sécurité", voire en abaissant le niveau protéique de la ration pour mieux valoriser les fourrages et être plus économe. Cette dernière pratique peut s’accompagner d’une baisse de production. Ces pratiques présentent aussi l'avantage de limiter les rejets azotés défavorables à l'environnement, • par le développement de systèmes utilisateurs d'une plus grande part d'herbe qui constitue la principale source de protéines métropolitaines. La richesse de l'herbe en protéines est permise par un stade d’exploitation précoce, par l'apport d'azote minéral, par l'utilisation de légumineuses cultivées et par l'association de trèfle blanc dans les prairies de graminées, Féverole • en veillant au bon équilibre des régimes en associant correctement les fourrages conservés à base d'herbe et ceux moins riches en protéines comme le maïs ensilage, • par l'utilisation des graines protéagineuses. Le pois, le lupin et la féverole, dont les techniques culturales sont au point en Midi-Pyrénées, peuvent constituer des sources protéiques alternatives intéressantes en remplacement des tourteaux et contribuer significativement à l'autonomie protéique des exploitations d'élevage. Bovins Viande Bovins Lait Ovins Viande Caprins Laitiers Les protéagineux : une valeur azotée intermédiaire entre les céréales et les tourteaux Les graines de pois, lupin et féverole se caractérisent par une valeur énergétique très proche de celle des céréales. Elles contiennent des proportions variables d'amidon : le pois en comporte 45 %, la féverole 38 % et le lupin n'en contient pas. Le pois et la féverole comportent aussi peu de matières grasses que les céréales et les tourteaux déshuilés ; le lupin en contient Lupin 3 à 5 fois plus. Leurs teneurs en matières azotées totales (MAT) sont inférieures de 25 à 50 % à celles du tourteau de soja. Avec près de 35 % de MAT, le lupin est le plus riche. Le pois et la féverole ont des valeurs assez proches comprises entre 20 et 25 % de MAT. Ces protéines présentent la particularité d'être rapidement dégradées dans le rumen. Leur teneur en PDIE n'est donc pas très élevée. Des mesures récentes de l'INRA faites sur la dégradabilité des protéines dans le Févérole rumen ont conduit à proposer une revalorisation substantielle de la valeur en PDIE du pois (116 g/kg brut) et du lupin (140 g/kg brut). Mais les résultats acquis sur les animaux n'ont pas toujours confirmé cette augmentation de valeur pour le pois. Ainsi, les valeurs en PDI des protéagineux Pois proposées dans le tableau 1 sont des "valeurs pratiques" s'appuyant sur celles de l'INRA pour le pois et la féverole (2002) et pour le lupin (1991), proches de celles de l'UNIP-ITCF (2000). Les données 2002 proviennent de la mise à jour des valeurs des aliments faite par l'INRA le 25 octobre 2002 pour toutes les espèces à partir de la banque des données de l’alimentation animale de l’AFZ. Les protéagineux sont un peu plus riches en phosphore que les céréales et sont pauvres en calcium, un peu moins que les céréales. Leur teneur en méthionine digestible peut être un facteur limitant de la production laitière ; ce n’est pas le cas de la lysine digestible. Tableau 1: Composition et valeur nutritive des principales graines protéagineuses Comparaison avec les céréales et les tourteaux d'oléagineux Teneur en MS Matières minérales Matières grasses Matières azotées totales Cellulose brute Amidon Phosphore absorbé Phosphore total Calcium UFL PDIN PDIE LysDI MetDI (%) (g/kg brut) (g/kg brut) (g/kg brut) (g/kg brut) (g/kg brut) (g/kg brut) (g/kg brut) (g/kg brut) (/kg brut) (g/kg brut) (g/kg brut) (% PDIE) (% PDIE) Maïs 86 12 37 81 22 641 1,9 2,6 0,4 1,06 64 84 5,7 1,9 Blé 87 16 15 105 22 605 2,3 3,2 0,7 1,02 70 89 6,7 1,9 (*) = valeur d'usage (INRA 1991 et UNIP-ITCF 2000) Lupin 89 35 84 341 114 0 2,8 3,8 3,4 1,18 200* 139* 6,8 1,6 Féverole T. soja 48 87 88 33 64 13 19 254 453 79 60 383 0 3,4 4,4 4,6 6,2 1,4 3,4 1,04 1,06 162 331 97 229 7,4 6,9 1,5 1,5 T. colza 35 89 70 23 337 124 0 8,1 11,4 8,3 0,85 219 138 6,8 2,0 (Source INRA 2002) Les faibles à très faibles teneurs en facteurs antinutritionnels (tanins, alcaloïdes, facteur antitrypsique, glucosides) n’entraînent pas de problèmes sanitaires ; ils ne gênent pas l’ingestion et les performances de vaches ou Page 2 sur 9 Pois 86 30 10 207 52 446 2,9 4,0 1,1 1,04 130 83 7,7 1,7 de veaux d’élevage qui sont des non-ruminants pendant 1 à 2 mois seulement. Les nouvelles variétés, de lupin en particulier, minimisent la présence de ces composés. Utilisation des protéagineux dans l'alimentation des bovins lait Bovins Viande Bovins Lait Ovins Viande Caprins Laitiers Avec le pois, des performances aussi bonnes qu’avec les tourteaux Les essais conduits sur l'utilisation du pois en remplacement du tourteau de soja sont relativement anciens (fin des années 80-début 90). Dans ces essais sur vaches laitières sur des rations à environ 100 g PDI/kg MS de ration totale, le pois (3,5 à 5 kg/j) associé ou non à une petite quantité de tourteau tanné venait en remplacement de tourteau de soja et d'une céréale. Lorsque les besoins en PDIE sont couverts (4 essais), calculés sur la base de 86 g PDIE/kg brut de pois, la production laitière est légèrement améliorée (+ 0,4 kg) et celle de matières grasses (MG) et protéiques (MP) est maintenue ; d'où une légère baisse du TB et du TP (- 0,6 g/kg) (tableau 2). Deux essais récents (1999-2001) ont été conduits en début de lactation sur des rations complètes à base de maïs ensilage titrant 90 g PDI/kg MS de ration totale ; le pois (4,7 kg/j) associé à du tourteau tanné de colza remplaçait du tourteau de colza associé à du tourteau tanné de colza. L'ingestion totale n'est pas modifiée ; la production laitière a légèrement baissé (- 0,5 kg), les quantités de MG et MP sont maintenues d'où une légère augmentation des taux (+ 0,6 g/kg en TB) (tableau 2). Avec le pois la reprise de poids est plus rapide en fin d’essai qu’en début. Tableau 2 : Utilisation du pois par les vaches laitières témoin t. soja (4 comparaisons) Lot t. soja Lot pois Consommation Ensilage maïs Concentré dont pois Performances Lait TB TP Gain de poids vif témoin t. colza (2 comparaisons) Lot t. colza Lot pois (kg MS) (kg) (g/kg) (g/kg) (g/j) 11,9 5,5 - 12,5 5,5 4,1 15,1 5,0 - 13,8 6,6 4,1 22,2 42,0 30,9 85 22,6 41,4 30,3 40 31,8 35,8 30,3 186 31,3 36,4 30,4 150 (Source Institut de l'Élevage – Chambres d'Agriculture - INRA - ITCF) Le pois peut servir de correcteur unique pour assurer une ration à 25 - 28 kg de lait selon la composition de la ration, en vérifiant que la ration n'est pas déficitaire en PDIE et en acceptant un léger excès en PDIN. Pour aller au-delà de ce niveau, il faut l'associer avec 15 à 25 % de tourteaux tannés (soja ou colza) selon Page 3 sur 9 le niveau de production recherché. On peut aussi l'associer à 20 - 25 % de tourteaux tannés pour reconstituer un concentré de production équilibré de type VL 2,5 à 3 l. Dans ces différents cas, il peut ainsi être utilisé 5 à 6 kg de pois/jour/vache. Utilisation des protéagineux dans l'alimentation des bovins lait Bovins Viande Bovins Lait Ovins Viande Caprins Laitiers Avec le lupin, un lait plus riche en matières grasses et un peu pénalisé en protéines Les essais conduits sur l'utilisation du lupin en remplacement du tourteau de soja sont anciens (années 80). Dans ces essais sur vaches laitières sur des rations à environ 100 g PDI/kg MS de ration totale comportant 80 % d'ensilage de maïs et 20 % de foin de luzerne, 3,5 kg/j de lupin associé ou non à une petite quantité de tourteau tanné venaient en remplacement de tourteau de soja et d'une céréale. Lorsque les besoins en PDIE sont couverts (3 essais), la production laitière est améliorée (+ 0,8 kg) ainsi que celle en matières grasses ; la quantité de matières protéiques est maintenue. Il en résulte un maintien du TB et une baisse du TP (- 0,7 g/kg) (tableau 3). Deux essais récents (1999-2001) ont été conduits en début de lactation sur des rations complètes à base de maïs ensilage titrant 90 g PDI/kg MS de ration totale ; le lupin (3,7 kg/j) associé à du tourteau tanné de colza remplaçait du tourteau de colza associé à du tourteau tanné de colza. L'ingestion totale n'est pas modifiée ; la production laitière s'est maintenue en moyenne (+ 0,4 kg), la quantité de MG est augmentée et alors que celle en MP est maintenue d'où une augmentation du TB (+ 1,3 g/kg) et une baisse du TP (- 0,6 g/kg) (tableau 3). La reprise de poids ne diffère pas entre les lots. Selon les essais, le lupin entraîne une augmentation de production du lait et un maintien du TB ou un maintien de la production de lait et une augmentation de TB. En résumé, la quantité de matières grasses augmente. Tableau 3 : Utilisation du lupin par les vaches laitières témoin t. soja (3 comparaisons) Lot t. soja Lot lupin Consommation Ensilage maïs Foin luzerne Concentré dont lupin Performances Lait TB TP Gain de poids vif témoin t. colza (2 comparaisons) Lot t. colza Lot lupin (kg MS) (kg) (g/kg) (g/kg) (g/j) 11,6 3,3 3,5 - 11,6 3,3 3,5 3,1 15,1 5,0 - 15,1 5,4 3,3 25,5 41,7 30,3 612 26,3 41,8 29,6 600 31,8 35,8 30,3 186 32,2 37,1 29,7 156 (Source Institut de l'Élevage – Chambre d'Agriculture 49 – INRA Lusignan) Le lupin ne pose pas de problème d'appétence jusqu'à 6 kg/jour/vache. Il peut servir de correcteur unique pour assurer une ration à 28 - 32 kg de lait selon la composition de la ration, en vérifiant que la ration n'est pas Page 4 sur 9 déficitaire en PDIE et en acceptant un léger excès en PDIN. Pour aller au-delà de ce niveau, il faut l'associer avec 15 à 20 % de tourteaux tannés (soja ou colza) selon le niveau de production recherché. Utilisation des protéagineux dans l'alimentation des bovins lait Bovins Viande Bovins Lait Ovins Viande Caprins Laitiers Avec la féverole, les mêmes performances qu’avec des tourteaux, mais peu de références Les essais conduits sur l'utilisation de la féverole en remplacement du tourteau de soja sont anciens (années 70) et peu nombreux dans des conditions d'alimentation connues en Midi-Pyrénées, où les fourrages représentent plus de 60 % de la ration. Dans un essai sur des vaches laitières en milieu de lactation (INRA, 1982) avec une ration comportant 50 % de maïs ensilage et 50 % de foins, 2,6 kg/j de féverole venaient en remplacement de tourteau de soja. Sur une production laitière moyenne entre les 2 lots de 14,0 kg/jour/vache, il n'y a pas de modification de production laitière ni de composition du lait. Un essai récent (2002) a été conduit en début de lactation sur des rations complètes à base de maïs ensilage titrant 90 g PDI/kg MS de ration totale ; la féverole (4,0 kg/j) associée à du tourteau tanné de colza remplaçait du tourteau de colza associé à du tourteau tanné de colza. L'ingestion totale n'est pas modifiée ; la production laitière s'est maintenue (+ 0,2 kg), la quantité de MG est augmentée alors que celle en MP est maintenue d'où une augmentation du TB (+ 1,0 g/kg) et un maintien du TP (+ 0,2 g/kg) (tableau 4). La variation de poids ne diffère pas entre les lots. Tableau 4 : Utilisation de féverole par les vaches laitières témoin t. colza (1 comparaison) Lot t. colza Lot féverole Consommation (kg MS) Ensilage maïs 14,4 13,7 Concentré 4,6 5,7 dont féverole 3,5 Performances Lait (kg) 31,3 31,5 TB (g/kg) 36,9 37,9 TP (g/kg) 29,5 29,7 Gain de poids vif (g/j) -172 -224 (Source Institut de l'Élevage – Chambre d'Agriculture 49) Comme le pois et le lupin, la féverole ne pose pas de problème d'appétence. La féverole peut servir de correcteur unique pour assurer une ration à 25 - 28 kg de lait selon la composition de la ration, en vérifiant que la ration n'est pas déficitaire en PDIE et en acceptant un léger excès en PDIN. Pour aller au-delà de ce niveau, il faut l'associer avec 15 à 25 % de tourteaux tannés (soja ou colza) selon le niveau de production recherché. La féverole s'apparente à un concentré de production de type VL 2 litres ; on peut aussi l'associer à 20 25 % de tourteaux tannés pour reconstituer un concentré de production équilibré de type VL 2,5 à 3 l. Le petit nombre d'expériences montre qu'il peut être utilisé 4 à 6 kg de féverole/jour/vache dans des rations à base d'ensilage de maïs ou de foins. Pois, lupin et féverole : mêmes conditions d’emploi • Conserver les graines entières En les récoltant à 15 % d’humidité ou moins, les protéagineux se conservent facilement en graines entières, comme des céréales. Les grains sont protégés par des téguments épais ; ils ne sont pas attaqués par les insectes habituels des grains conservés. Les traitements insecticides pour le stockage ne sont donc pas nécessaires. Les bruches qui sortent des grains en cours de stockage proviennent d’attaques ayant eu lieu avant la récolte ; ces insectes n’attaqueront pas les graines stockées. La grande taille des graines permet une bonne circulation de l’air dans le volume de stockage. Page 5 sur 9 Le stockage est facilité par l’absence de résidus d’adventices ; en cas de récolte avec beaucoup d’impuretés, un tri sera nécessaire pour éviter les risques de moisissures. Durant le stockage, il faut surveiller l’humidité ; quand l’humidité est inférieure à 16 %, il suffit de suivre l’évolution de l’état des grains. Pour une humidité comprise entre 18 et 22 %, une ventilation froide permet de ramener l’humidité des graines à 14 %. Audelà de 22 % d’humidité, un séchage est nécessaire pour éviter moisissures et germination. Utilisation des protéagineux dans l'alimentation des bovins lait Bovins Viande • Bovins Lait Broyer ou aplatir grossièrement les graines avant la distribution Pour être correctement valorisées, les graines doivent être broyées ou aplaties. Vu la richesse des protéagineux en protéines dégradables dans le rumen il faut obtenir une mouture grossière qui évite les flambées fermentaires et les pertes d'azote dans le rumen. Pour juger du résultat obtenu par le broyage ou l'aplatissage, on utilise un tamis à maille carrée de 1 mm de côté ; lorsque plus de 50 % de l'échantillon reste sur le tamis, on estime que les particules obtenues sont suffisamment grossières. Le broyage peut être effectué à l'avance ; les graines broyées se conservent en cellule Ovins Viande Caprins Laitiers pendant 2 mois sans problème particulier sous réserve que leur taux de MS soit supérieur à 85 % et que l'humidité ne pénètre pas dans le tas. En cas de mouture fine, des effets de "voûte" peuvent apparaître au cours de la consommation de la cellule, avec du pois en particulier. Le lupin, grossièrement broyé ou aplati, se conserve également en tas sans modifications apparentes à condition d'être correctement abrité et sur une surface en béton. L’optimum se situe à 2 mois de conservation en tas ; une observation à la ferme expérimentale des Trinottières (49) a montré une bonne conservation après 6 mois en tas (hauteur inférieure ou égale à 1 mètre, abrité, protégé des rongeurs et surveillé). Les vaches laitières valorisent mal les graines entières Un essai d'utilisation de 3,5 kg de graines entières de lupin distribuées à des vaches au lieu de la même complémentation avec des graines de lupin broyées a montré une baisse de performance des animaux (- 2,0 kg de lait/jour/vache et baisse des quantités de MG et MP). Les vaches valorisent mieux les graines de protéagineux broyées ou aplaties. Le trempage de graines entières de lupin est pratiqué par des éleveurs qui souhaitent éviter le broyage. Un volume de graines de lupin est placé dans un récipient contenant 2 volumes d'eau ; les graines trempent pendant une quinzaine d'heures (trempage réalisé vers 15-16 heures et distribution vers 8-9 heures le lendemain) et absorbent l'eau. Leur gonflement les rend plus préhensibles, facilite leur broyage par mastication et leur dégradation dans le rumen. Toutes les graines ne sont cependant pas dégradées. Cette pratique, observée chez des éleveurs distribuant 1 à 2 kg maximum de lupin par vache par jour, nécessite la manipulation de récipients lourds qui peut constituer une limite à cause de la pénibilité de ce travail. Enfin cette pratique ne paraît pas transposable à des quantités supérieures à 2 kg de lupin/jour/vache à cause du risque de moindre valorisation du lupin se traduisant par une production laitière amoindrie de 1 à 2 kg de lait/jour. • Étaler la distribution au cours de la journée L'utilisation de protéagineux dans une ration, en remplacement d'un tourteau d'oléagineux, augmente la part de concentrés présents dans la ration ; elle passe d'environ 20 - 25 % de concentrés selon la ration et le niveau de production à 25 - 33 % de concentrés. Pour que cette situation n'augmente pas le risque lié à des repas de concentrés trop importants (plus de 3 à 4 kg/repas), il est recommandé de passer à 3 repas par jour lorsque l'on distribue individuellement une partie du correcteur protéique et le Page 6 sur 9 concentré de production. Ce risque est normalement maîtrisé en ration semicomplète ou complète par l'apport de la majorité ou de la totalité des concentrés avec les fourrages. • Surveiller la fibrosité de la ration Si la fibrosité de la ration paraît limitée en fibres structurelles, parce que le fourrage finement haché à la récolte est recoupé lors du désilage ou bien laminé et lacéré lors du mélange avec des vis ou par un recyclage trop long, il faudra corriger la ration. De même lorsque les rations à base de maïs ensilage comportent plus de 30 % de concentrés. Dans ces cas, l'apport de 0,5 kg de paille Utilisation des protéagineux dans l'alimentation des bovins lait Bovins Viande Bovins Lait préalablement hachée ou de 1 à 1,5 kg de foin de 1ère coupe dans la ration permettra à chaque vache de se réguler. Sinon la mise à disposition de paille ou de foin en libre service dans un râtelier facilement accessible est une solution, mais qui n'assure pas que chaque vache consomme quotidiennement ce fourrage grossier. La paille de la litière ne présente en général pas une disponibilité suffisante, sauf lorsqu'elle est stockée devant les animaux (cas de logettes paillées). • Assurer une transition L'introduction de protéagineux dans le régime des vaches laitières doit être réalisée progressivement pour que les animaux ne baissent pas leur consommation, comme généralement suite à un changement brutal de nature d'aliment dans la ration. La transition doit être réalisée sur 2 à 3 semaines (selon que l'on veut utiliser moins ou plus de 3,5 kg de protéagineux par jour) en introduisant au maximum 1,5 à 2 kg de protéagineux supplémentaire par semaine. Si l'on veut par exemple distribuer 4 kg de pois dans la ration, on en apportera 1 kg les 3 premiers jours, puis 2 kg les 4 jours suivants, 3 kg les 3 jours suivants et enfin 4 kg les 4 derniers jours ; parallèlement on retirera progressivement les concentrés auxquels on veut le substituer. Ovins Viande • Caprins Laitiers Pour remplacer 1 kg de soja 48, il faut compter 2,6 kg de pois, 1,6 kg de lupin ou 2,5 kg de féverole L'équilibre des rations doit être effectué en s'appuyant sur les valeurs "pratiques" présentées au tableau 1. En repère on peut retenir qu'il faut 2,6 kg de pois, 1,6 kg de lupin ou 2,5 kg de féverole pour apporter la même quantité de protéines qu'avec 1 kg tourteau de soja 48, en retenant la valeur PDIE comme facteur limitant. Sur la même base, il faut apporter 1,7 kg de pois, 1,0 kg de lupin ou 1,6 kg de féverole pour apporter la même quantité de protéines qu'avec 1 kg du tourteau de colza 35. En s'appuyant sur les résultats d'essais disponibles et les valeurs "pratiques", les équivalences suivantes peuvent être retenues pour les protéagineux destinés aux bovins laitiers : - 1 kg de tourteau de soja + 0,8 kg de céréales = 1,5 kg de pois + 0,5 kg de tourteaux tannés, - 1 kg de tourteau de soja + 0,7 kg de céréales = 1,3 kg de lupin + 0,3 kg de tourteaux tannés, - 1 kg de tourteau de soja + 0,4 kg de céréales = 1,4 kg de féverole + 0,4 kg de tourteaux tannés. L'extrusion du lupin Le lupin, protéagineux à plus forte teneur en MAT, est intéressant à utiliser dans des rations exigeantes en protéines complémentaires ou pour des animaux à forte production. Sa forte teneur en protéines dégradables dans le rumen, liée à une solubilité élevée de l'azote, l'empêche d'être utilisé comme source unique substituable aux tourteaux d'oléagineux pour un niveau supérieur à 28 – 32 kg de lait. Le procédé technologique de l'extrusion permet de réduire la dégradation protéique dans le rumen. Il consiste en une cuisson préalable (de 50 à 150 °C sur une durée de quelques minutes à plus d'une heure) suivie de l'application d'une pression mécanique par vis caractérisée par une température (110 à 195 °C sur une durée de l'ordre de la minute à une hygrométrie définie) et une énergie mécanique spécifique. Il y a autant de "traitements" d'extrusion que de combinaisons entre ces différents facteurs les définissant. L'aliment extrudé est ensuite éventuellement broyé, séché et aggloméré. La valeur nutritive du lupin extrudé issue de plusieurs essais in vitro et in vivo, évaluée après différents types de "traitements", est rassemblée ci-après. Selon la température, l'extrusion améliore de 10 à 32 % la valeur PDIN et de 53 à 194 % la valeur PDIE par rapport à celles du lupin cru utilisé dans chaque essai : - lupin extrudé 150 °C 1,10 UFL 233 g PDIN 152 g PDIE, - lupin extrudé 162 °C 1,10 UFL 217 g PDIN 156 g PDIE, - lupin extrudé 195 °C 1,10 UFL 260 g PDIN 217 g PDIE. En pratique, les fabricants d'aliments appliquent une extrusion à température modérée (110 - 120 °C) pour des raisons économiques. Un essai d'utilisation exclusive de lupin extrudé ou de lupin cru pour corriger des rations de maïs ensilage est en cours à la ferme expérimentale des Trinottières (49). Page 7 sur 9 Utilisation des protéagineux dans l'alimentation des bovins lait Bovins Viande Bovins Lait Ovins Viande Caprins Laitiers Conserver les protéagineux par inertage Pour éviter le stockage de graines en cellules ou en tas et le broyage régulier en cours d'utilisation, il est possible de conserver les protéagineux par inertage. Les grains, récoltés à maturité (15 % à 18 % d'humidité), sont broyés grossièrement à la récolte et immédiatement mis en "silo". Les germes respirent pendant quelques jours, et consomment l'oxygène présent dans le tas pour y rejeter du gaz carbonique. Une atmosphère de gaz inerte (CO2) est créée, qui empêche le développement de moisissures et de bactéries. L'inertage n'est pas un ensilage. La largeur et la hauteur du tas sont calculées pour assurer un avancement minimum de 10 cm par jour ; 1 m3 pèse 750 à 800 kg. Les grains broyés sont étalés à la sortie du broyeur, à la pelle, sur une bâche neuve posée sur un sol plat. Le tassement se fait au pied, voire au godet en fin de tas. Les pans de la bâche sont repliés sur le tas de façon à se recouvrir ; une seconde bâche est posée sur le dessus du tas, lestée par des sacs de sable ou de graviers. Un cordon de chaux est épandu autour du tas pour éloigner les rongeurs, à surveiller voire renouveler en cours de stockage. Le chargement correct du front d'attaque et l'avancement suffisant empêchent les pertes à la reprise. En cas de récolte au-delà de 18 % d'humidité, il est possible de les conserver par inertage en ajoutant 400 g d'acide formique par quintal de grain à 70 - 80 % de MS. Les expériences de conservation de ce type, encore peu nombreuses sur pois et lupin, ont été concluantes avec une bonne étanchéité du tas. L'ensilage de protéagineux, pour récolter des graines dont la maturité s'annonce difficile à obtenir Les essais d'ensilages de protéagineux sont anciens (années 80) ; ils montrent que le stade de récolte optimal pour la valeur nutritive se situe à 25 - 30 % MS : pour le pois au début de jaunissement des gousses, pour le lupin à la formation des gousses, pour la féverole au début de noircissement des gousses. Ce stade est en général assez court, en particulier en cas d’été séchant. La teneur en glucides solubles à la fauche étant variable selon l'espèce et le stade de récolte (5 à 12 % de la MS), l'ajout d'un conservateur acide améliore fréquemment la qualité de conservation (3,5 l d'acide formique par tonne de vert). En cas de taux de MS inférieur à 25 %, un ressuyage est conseillé pour éviter la présence de jus au silo ; dans ce cas la teneur en glucides solubles du fourrage ensilé sera faible. Les bonnes conditions de conservation d'un ensilage de protéagineux sont analogues aux précautions à prendre pour les ensilages d'herbe (rapidité de couverture du silo, étanchéité du silo, protection vis-à-vis des oiseaux et rongeurs, vitesse d'avancement et chargement du front d'attaque, …). Leur valeur nutritive (0,75 à 0,90 UFL - 80 à 95 g PDIN - 70 à 85 g PDIE /kg de MS) les rapproche de bons ensilages de graminées en 1ère coupe, moyens en énergie et pourvus en protéines (INRA 1982, valeurs par kg MS) : - pois 27,7 % MS 156 g MAT 0,82 UFL 87 g PDIN 70 g PDIE, - lupin 22,1 % MS 170 g MAT 0,83 UFL 107 g PDIN 86 g PDIE, - féverole 28,2 % MS 171 g MAT 0,77 UFL 102 g PDIN 88 g PDIE. L’ensilage de protéagineux doit s'envisager pour récolter une culture dont le rendement en grains ou la maturité s'annoncent mal. Dans le cas d'obtention de rendements réguliers à bonne maturité, si l'on veut disposer d'un aliment concentré en protéines il est préférable de les récolter en grains. Page 8 sur 9 Utilisation des protéagineux dans l'alimentation des bovins lait Bovins Viande Bovins Lait Ovins Viande Caprins Laitiers Protéagineux pour les veaux et génisses Les veaux consomment les graines entières recevant l'aliment du commerce de type VL 2,5 l ont été les mêmes avec 343 kg d'aliment consommé. Les veaux d'élevage digèrent bien les protéines issues des protéagineux, à condition de respecter la concentration protéique satisfaisant leurs besoins. Pendant la période d'allaitement et de post-sevrage, les veaux ont la capacité à valoriser les grains entiers de gros diamètre (maïs, lupin). On peut leur distribuer un concentré fermier composé de 40 % de graines de lupin entier, 60 % de maïs grain entier avec 40 g d'aliment minéral de type 7/21/5 par kg de mélange. Ce concentré fermier distribué en seau ou à l'auge de la 2ème semaine de vie jusqu’à 6 mois d'âge est croqué par les veaux. Un premier essai en 2002 à la ferme des Trinottières (49) a permis de sevrer les veaux à 71 jours avec un tel mélange à 105 kg de poids vif ; le poids obtenu à 6 mois a été de 209 kg avec du foin distribué à volonté et une consommation de 356 kg d'aliment fermier. Les performances du lot Des essais sont en cours en 2002-2003 sur les veaux naissant aux Trinottières pour tester des mélanges fermiers constitués de grains entiers de pois ou de féverole mélangés à du maïs grain entier. • • Les génisses d'élevage bien les protéagineux valorisent Les génisses d'élevage d'un an et plus, destinées à un vêlage à 24 - 30 mois, peuvent recevoir un aliment concentré complémentaire contenant l'un des trois protéagineux, grossièrement broyé ou aplati, pour corriger la ration en énergie et protéines. Des génisses de 12 à 18 mois consomment 1 à 2 kg de lupin/jour/animal éventuellement accompagnés de céréales selon le régime alimentaire, foin, paille ou ensilage d'herbe. La paille de pois, un bon fourrage pour des génisses d'élevage La paille de pois a une digestibilité de la matière organique supérieure de 26 % à celle d'une paille de blé et une teneur en MAT supérieure de 90 % pour la même teneur en cellulose brute (valeurs INRA 1988). Les valeurs nutritives moyennes – 0,53 UFL - 42 g PDIN - 66 g PDIE /kg MS – et son ingestibilité de 1,27 UEB (au lieu de 1,80 pour une paille de blé) la rendent intéressante pour des génisses d'un an et plus à croissance hivernale modérée. La teneur en MAT de la paille de pois est très variable ; il est recommandé d'effectuer une analyse de la MAT sur un échantillon de la paille disponible avant son utilisation pour adapter la complémentation. A la suite d'un essai à la ferme des Trinottières (2002), un régime de paille de pois à volonté sur des génisses de 12 à 17 mois d'âge avec 3 à 3,5 kg d'un concentré fermier (60 % lupin et 40 % blé broyés) et 100 g d'aliment minéral de type 7/21/5 permet une croissance hivernale de 600 g/j ; durant le printemps et l'été suivants une croissance compensatrice au pâturage, avec complémentation fourragère estivale, permet d'atteindre le poids objectif de 630 - 645 kg avant vêlage à 24 mois. Synthèse réalisée par l’Institut de l'Élevage dans le cadre du programme régional « Utilisation des protéagineux en élevage », coordonné par la Chambre Régionale d’Agriculture de Midi-Pyrénées et financé par l’ONIOL Rédacteur : Ph. BRUNSCHWIG Coordination / Relecture : J. SEEGERS – J.C. MOREAU Mise en page : F. BENOIT Décembre 2002