Projet de diffusion Les aménagements physiques pour une meilleure sécurité dans les unités psychiatriques et d’urgence Afin de développer une culture de gestion de la qualité et d’amélioration continue relativement aux aménagements physiques pour une meilleure sécurité dans les unités psychiatriques et à l’urgence, l’Unité d’évaluation des technologies et des modes d’interventions en santé mentale (UETMISM) a préparé ce rapport de transfert de connaissances dont l’objectif est de divulguer les recommandations décrites au rapport ETMIS fait à l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal. Les références retenues pour l’élaboration de ce document de diffusion est le rapport ETMIS complet : « Les aménagements physiques pour une meilleure sécurité dans les unités psychiatriques et à l’urgence ». Note et figures préparées par : Karen Medina, M.D. Responsable scientifique : Alain Lesage, M.D. La sécurité dans les unités de soins en santé générale, les unités de psychiatrie et l’urgence, est un enjeu qui mérite beaucoup d’attention Le rapport d’évaluation des technologies et des mode d’intervention en santé (ETMIS) : « Les aménagements physiques pour une meilleure sécurité dans les unités psychiatriques et à l’urgence » rédigée à l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal, mentionne qu’au niveau mondial : a) 32,4 % des patients hospitalisés en psychiatrie ont un comportement agressif ou violent, b) 50 % de tous les incidents agressifs impliquent des actes de violence physique, c) 37 % des incidents violents ou agressifs entraînent des blessures physiques pour le personnel, d) 80 % des incidents dans le milieu hospitalier se passent aux services d’urgence, et e) plus d’un quart des médecins de l’urgence et des infirmières ont rapporté qu’ils étaient victimes d’agressions physiques. Le rapport mentionne aussi qu’un patient agressif, dans les unités de soins psychiatriques en particulier, peut attaquer verbalement et physiquement les autres patients et le personnel soignant, mais peut également se faire mal à lui-même. Les chercheurs soupçonnent que la disponibilité des moyens contribue à la réussite d’une tentative de suicide. Seulement en 2003, l’Association américaine de psychiatrie a indiqué que des 31 484 suicides aux États-Unis, 1 500 se sont produits en milieu hospitalier. Les événements produits ont été exécutés souvent par pendaison, asphyxie ou saut. Par conséquent, selon les chercheurs, l’élimination des moyens disponibles a été considérée comme un pas vers la diminution des suicides de patients hospitalisés. Les variables reliées aux patients, au personnel soignant et aux aménagements physiques semblent jouer un rôle important sur l’agressivité dans les unités de soins en psychiatrie Selon le rapport de l’UETMISM, trois types de variables influencent les comportements agressifs des patients hospitalisés et indiquent que l’atmosphère à l’unité joue également un rôle important. Il est démontré qu’il y a une relation inversement proportionnelle entre les risques et la sécurité et les deux influencent l’atmosphère présente dans l’unité. Dans les unités où les risques sont plus grands, la sécurité est plus faible. Une théorie proposée par les auteurs Ulrich et al. postule que si les unités de soins étaient conçues avec des aménagements qui réduisent le stress, la violence aussi pourrait être réduite. Voici, un modèle proposé par l’Unité d’évaluation des technologies et des modes d’intervention en santé mentale Figure 1 : Le modèle théorique PATIENT/AUTRES PATIENTS • psychopathologie • soutien social • dangerosité PERSONNEL • protocole de soins • organisation du travail • interactions • compétences culturelles • formation et protocole de prévention et réponse aux crises ATMOSPHÈRE DE L’UNITÉ AMÉNAGEMENTS SÉCURITAIRES: • fenêtres extérieures avec des vitres incassables • tuyauterie camouflée partout • garde-robe fixé • miroir incassables • tringles à rideaux détachables AMÉNAGEMENTS ENVIRONNEMENTAUX/APAISANTS: • chambre individuelle • faible bruit et bonne acoustique • accès à un jardin en plein air • fenêtres avec vue sur la nature • ameublement de type familial SÉCURITÉ RISQUES • suicide • automutilation • agression à l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal, qui montre le lien entre les facteurs environnementaux et l’agressivité (Figure 1). Le centre du modèle est souligné par ces trois catégories de variable : • Les variables reliées aux patients : la dangerosité des patients, le soutien social des patients de la part des autres patients, du personnel et de leurs familles. La psychopathologie a été identifiée comme étant une source majeure qui influence l’agressivité. Certaine troubles mentaux, comme les trouble psychotiques, les manies, les troubles de la personnalité, la toxicomanie ou les syndromes organiques cérébraux ont été associés au comportement agressif dans le milieu hospitalier psychiatrique. • Les variables reliées au personnel : contribuent aussi à l’atmosphère de l’unité, à la sécurité et à la gestion des risques. Les interactions problématiques entre le personnel et les patients ainsi que les règles dans l’unité, dans les cas où elles sont mal comprises, ou l’inaccessibilité du personnel peuvent générer des frustrations pour les patients et ainsi mener à une augmentation des risques d’agressivité et de violence dans l’unité. • Les aménagements physiques : peuvent être classifiés dans deux catégories : a) sécuritaires : sont des éléments qui peuvent empêcher les actes violents contre soi-même ou contre une autre personne, b) environnementaux ou apaisants : sont les caractéristiques ambiantes comme le bruit, l’éclairage, la qualité de l’air, les caractéristiques architecturales, etc. UNITÉS DE SOINS PSYCHIATRIQUE Les niveaux de sécurité par zone Figure 2 : Les niveaux de sécurité par zone Le rapport ETMIS a identifié cinq niveaux de sécurité classés par zone. Ces cinq niveaux correspondent aux types de construction intérieure dans un établissement psychiatrique selon le Design Guide for the Built Environment of Behavioral Health Facilities. En passant d’un niveau à un autre, les aménagements sont de plus en plus sécuritaires (Figure 2). Niveau 5 Salles d’entrevue et d’admission et chambres d’isolement. Dans cette zone, le personnel interagit avec les patients qui présentent des risques inconnus. Niveau 4 Chambre du patient, salle de toilette et salle de bain. Dans cette zone, les patients passent beaucoup de temps seuls. Niveau 3 Couloirs, zones communes, salles d’activités, cuisines et salles à manger. minimum Dans cette zone, les patients peuvent passer du temps avec un min de supervision. Niveau 2 La classification par niveaux de sécurité qui correspondent à chaque niveau est détaillée dans le rapport complet de l’UETMISM. ! Niveau 1 Salles de thérapie, salles d’examen et salles polyvalentes. supervisés Les patients sont autorisés dans cette zone, mais ils sont superv et ne sont jamais seuls pendant de longues périodes. Zone de travail du personnel et les aires de services. Les patients ne sont pas autorisés dans cette zone. Des aménagements environnementaux apaisants recensés dans la littérature qui peuvent contribuer à la réduction des risques dans les unités psychiatriques. La figure 3 représente les autres facteurs qui influencent positivement la réduction des risques dans les unités psychiatriques. Pour les cas psychiatriques spécifiques, comme la dépression sévère ou l’Alzheimer, le rapport indique que l’assignation des patients à des chambres exposées à la lumière naturelle pour des périodes prolongées favorise leur rétablissement ou diminue leur niveau d’agitation. UNITÉS D’URGENCE pour faire face aux épisodes de violence et pour la sécurité des unités d’urgence. La sécurité du personnel des soins psychiatrique Les aménagements physiques qui contribuent à la sécurité du personnel, sont les mêmes que ceux décrits précédemment pour la sécurité de patients, mais il existe d’autres facteurs qui influencent la sécurité comme : a) la formation du personnel pour reconnaitre et prévenir la violence, b) des modalités de soutien par d’autres employés en cas d’urgence, c) la vérification de routine du matériel cassable, d) des procédures claires pour l’utilisation du système d’alarme, e) des précautions prises avant d’évaluer le patient, f) l’éducation et la sensibilisation du public, de la police, des travailleurs de soins de la santé et des professionnels, et g) une plus grande communication et coopération entre les organisations et entre les administrations. Le rapport mentionne que les aménagements suivants contribuent particulièrement à la sécurité du personnel (Figure 4). Les aménagements sécuritaires Figure 3 : Aménagements environnementaux / Apaisants Des stratégies de conception et d’aménagement physique sont aussi mentionnées au rapport ETMIS, pour améliorer la sécurité dans les unités d’urgence. Les stratégies soulignées au rapport complet sont : a) la surveillance facile par le personnel, b) les zones délimitées par groupes d’utilisateurs, c) la prévention des fugues et la réduction des risques de blessures, d) les mesures indirectes de protection pour le personnel, et e) les autres facteurs qui influencent la sécurité. Le rapport ETMIS mentionne que la formation du personnel médical, pour donner des réponses rapides et appropriées aux usagers et visiteurs, quand les signes potentiels de la violence sont reconnus, est aussi essentielle Architecturales : chambres individuelles, salles de bains privées, jardins accessibles aux pa8ents, unités avec un nombre réduit de pa8ents avec une vue sur la nature, avec des couloirs de dimensions restreintes Ambiantes : l’éclairage, l’exposi8on à la lumière naturelle, un niveau fiable de bruit, une bonne qualité de l’air et une bonne ven8la8on Design intérieur : réduire l’aspect ins8tu8onnel des unités, avoir un environnement de type familial, couleurs s8mulantes et apaisantes, présence d’art d'un milieu naturel (plantes, etc.) Aménagements environnementaux/ apaisants Sociales : salles de séjour ouvertes et polyvalentes pour encourager l’interac8on avec le personnel, disponibilité d’espaces ou les pa8ents peuvent se re8rer Spécifique : le poste infirmier ouvert avec une bonne visibilité sur l'unité, situé à proximité des zones d'ac8vités Figure 4 : Aménagements sécuritaires pour le personnel Les zones situées à l’extérieur du bâtiment doivent: Être bien éclairées la nuit Logements lorsque «sur appel» Situés dans une zone sécuritaire Avoir le mobilier du jardin ancré ou très lourd Les pierres, le gravier ou le matériel qui pourrait être utilisé comme des armes sont déconseillés L’accès bien éclairé Le bâtiment doit être sécuritaire Des téléphones dans le salon et dans chaque chambre La collaboration des parties prenantes participant au rapport ETMIS permet aussi d’identifier des points communs avec la littérature consultée, de souligner des éléments différents, et de tenir compte des suggestions émises par des experts en sécurité. Les parties prenantes participant au rapport ETMIS ont aussi envisagé avoir des salles d’isolement avec des éléments apaisants et un aspect plus chaleureux, éviter la surpopulation des unités et adapter les réaménagements au type d’unité selon les besoins de la clientèle. Il y avait un consensus sur la nécessité d’assurer la confidentialité des dossiers et la nécessité de sensibiliser et éduquer le personnel pour diminuer les fausses croyances. Ils ont aussi suggéré de prendre les précautions nécessaires à l’égard des infections pendant les réaménagements. Dans les unités de soins Fenêtres extérieures avec des vitres incassables Tuyauterie camouflée partout Garde-robe fixé CONCLUSION À ce jour, les aménagements sécuritaires effectués dans différents milieux hospitaliers québécois s’appuient principalement sur l’expérience du personnel soignant et auxiliaire, sans une réelle utilisation des données probantes de la littérature scientifique. À l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal, en lien avec les préoccupations constantes pour la sécurité du personnel, des patients et leur famille et la qualité des soins, il y a eu la production de deux rapports ETMI avec l’objectif d’identifier et de résumer des recommandations qui constituent la meilleure documentation disponible à ce jour sur les aménagements physiques dans les unités psychiatriques et à l’urgence. Finalement, le rapport ETMIS Les aménagements physiques pour une meilleure sécurité dans les unités psychiatriques et d’urgence recommande fortement : a) de tenir compte des recommandations du rapport pour les aménagements sécuritaires des unités psychiatriques et d’urgence, b) la consultation des guides américains précités dans le rapport, produit par le Département des anciens combattants des États-Unis et par l’Association Miroirs incassables Tringles à rideaux détachables nationale de systèmes de santé psychiatriques, c) l’utilisation des éléments d’aménagements environnementaux / apaisants, dans le plan d’améliorations, et d) demander à l’Association québécoise des établissements de santé et de services sociaux de produire un guide sur les aménagements sécuritaires pour les unités de soins psychiatriques et d’urgence, adaptés au contexte québécois. Référence GHEORGHIU I. Les aménagements physiques pour une meilleure sécurité dans les unités psychiatriques et d’urgence : Institut universitaire en santé mentale de Montréal; 2014. Rapport ETMIS II.