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II. Les organisations financières internationales : fonctionnement et limites
Une institution financière internationale (IFI) est, par définition, une institution qui
accorde des prêts.
FMI et Banque mondiale sont les deux Institutions financières internationales (IFI) les
plus importantes. Ce sont les seules IFI à caractère mondial. Il existe également des IFI à
caractère régional, comme la Banque européenne d’investissement (BEI) ou la Banque
africaine de développement (BAD). Les agences nationales de développement, comme l’AFD
(Agence française de développement), sont également des IFI.
Alors que le FMI prend essentiellement en charge des questions d’ordre
macroéconomique, la Banque Mondiale se préoccupe principalement de questions
microéconomiques : elle accorde des financements pour des projets précis (nous verrons
quelques exemples dans la suite du cours). Le siège de ces deux institutions se trouve à
Washington, dans la même rue.
FMI et Banque Mondiale ont été créés en juillet 1944, lors de la conférence de Bretton
Woods. Lors de cette conférence, l’issue du conflit mondial ne fait plus guère de doute. Les
futurs vainqueurs y préparent donc l’après conflit. Il s’agit de mettre en place un nouvel ordre
mondial qui tire les leçons de la crise de 1929. A Bretton Woods s’affrontent la thèse
américaine, défendue à White (secrétaire au Trésor) et la thèse anglaise, défendue par Keynes.
Pour l’essentiel, le compromis qui résulte des discussions de Bretton Woods marque la
victoire de la thèse américaine [voir polycopié que je distribuerai dans les jours à venir]
L’OMC, pour sa part, n’est pas une IFI. Localisée à Genève, cette organisation
internationale est en charge de l’application des traités de libéralisation des échanges,
négociés et signés par les Etats-membres, ainsi que de la promotion du libre-échange. Elle
partage néanmoins les soubassements théoriques aux fondements de l’action des institutions
de Bretton Woods (voir première partie du cours). L’OMC a succédé, en 1995, au GATT
(General Agreement on Tariffs and Trade), dont les premiers accords remontent à 1947.
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2.1. Mandat et fonctionnement des OFI
2.1.1. Le Fonds Monétaire International (FMI)
Le Fonds monétaire international (FMI) est une institution monétaire
intergouvernementale basée sur la coopération. Créée à l’issue de la conférence de Bretton
Woods en juillet 1944, elle a été fondée officiellement le 27 décembre 1945, date à laquelle
29 pays ont ratifié ses statuts. Ses activités financières ont débuté le 1er mars 1947.
2.1.1.1. Mandat et champ d’action
Le FMI se concentre sur la politique macroéconomique et sur la politique relative au
secteur financier (régulation et contrôle des banques et des autres établissements financiers).
D’après ses statuts, l’objectif premier du FMI est d’assurer la stabilité du système financier
international et de créer les conditions d’une croissance économique durable.
L'article Ier des statuts du FMI en précise les buts : « Encourager la coopération
monétaire internationale; faciliter l'expansion et l'accroissement harmonieux du commerce
mondial; promouvoir la stabilité des changes; aider à établir un système multilatéral de
paiements1; mettre temporairement, moyennant des garanties adéquates, ses ressources
générales à la disposition des États membres qui font face à des difficultés de balance des
paiements. Plus généralement, et conformément à ses autres buts, le FMI a pour responsabilité
d'assurer la stabilité du système financier international. »
Le FMI est donc, statutairement, responsable de la liquidité du système financier
international. Il doit éviter le blocage des échanges et la contagion à tout le système (risque
systémique) de problèmes momentanés de solvabilité qui peuvent être rencontrés par des pays
ou des banques centrales. Il s’agit donc en quelque sorte d’une « banque centrale des banques
centrales et trésors publics ».
Pour remplir ses missions, la principale activité du FMI consiste à accorder des prêts
aux Etats-membres ayant des difficultés de balance des paiements, ou dont le système
1 La balance des paiements d’un pays est le solde des transactions de ce pays avec le reste du monde.
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bancaire et/ou le trésor public présentent des risques de solvabilité. Le FMI n’intervient
jamais de lui-même : ce sont toujours les Etats qui font appel à lui.
Pour pouvoir obtenir des prêts, les Etats s’engagent, dans une lettre d’intention
adressée au FMI, à mettre en œuvre des « politiques d’ajustement structurel. » Il s’agit de
politiques de réformes économiques, inspirées du « consensus de Washington. » Ces
politiques ne sont pas imposées par le FMI, mais il est impossible d’obtenir un prêt si l’Etat
demandeur ne s’engage pas à mettre en œuvre les réformes qui lui ont été conseillées au
préalable par le FMI.
Les principes généraux des politiques d’ajustement structurel sont les suivants :
- « Assainir » (sic) les finances publiques du pays, en réduisant les dépenses publiques et en
diminuant la dette publique.
- Prendre des mesures de contrôle du crédit (limitation du crédit et donc de la création
monétaire2) et de hausse des taux d’intérêt.
- Mettre en place une régulation par le marché, en :
o Supprimant le contrôle des prix : il s’agit de « rétablir la vérité des prix. »
o Supprimant les monopoles.
o Privatisant les entreprises publiques et des institutions financières du pays
(grandes banques, etc.)
- Ouvrir l’économie sur l’extérieur afin de l’insérer dans la compétition internationale (cf.
HOS, etc.).
- Déréguler le « marché du travail » en diminuant la protection de l’emploi.
Deux idées générales sont sous-jacentes :
1) L’ouverture de l’économie permet toujours de générer une croissance soutenue (cf.
première partie) ;
2) C’est toujours le secteur privé qui « tire » la croissance, le secteur public ne faisant que la
freiner. Par exemple, pour les néoclassiques, si l’Etat augmente les dépenses publiques, il
va devoir financer ces dépenses nouvelles en prélevant des impôts et/ou en lançant un
emprunt. Les impôts vont freiner l’activité économique en décourageant les entreprises
2 Pour les monétaristes, l’inflation est « toujours et partout un phénomène monétaire » : l’augmentation de la
masse monétaire, par les mécanismes de crédit ou par l’augmentation de l’offre de monnaie en circulation,
suscite mécaniquement des tensions inflationnistes (voir théorie quantitative de la monnaie).
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ou les consommateurs. L’emprunt va provoquer une hausse de la demande de fonds
prêtables. A offre inchangée, cela va induire une hausse des taux d’intérêts, et donc sur la
diminution de l’investissement privé : la dépense publique évince l’investissement privé
(« effet d’éviction »).
Les effets sociaux souvent dramatiques des politiques d’ajustement structurel
(explosion du prix des denrées de base, émeutes, famines), et les vives critiques suscitées par
elles a amené le FMI à introduire, durant les années 1990, un volet social dans l’ajustement
structurel. Il comprend des mesures de protection des groupes les plus vulnérables, et des
mesures compensatoires et dispositions transitoires vis-à-vis des groupes touchés par
l'ajustement (par exemple, prime de départ pour les agents publics dont l’entreprise est
privatisée). Il est donc désormais porté un plus grand soin à l’accompagnement social des
programmes, ce qui se traduit notamment par une exigence de maintien du niveau des
dépenses sociales dans les plans de réduction du déficit budgétaire encadrés par le FMI.
Auparavant, le FMI demandait simplement de diminuer les dépenses publiques, ce qui se
traduisait, dans de nombreux cas, d’abord et avant tout par des baisses des budgets sociaux.
Plus récemment, le FMI a tenté d’intégrer à l’ajustement structurel les aspects
institutionnels liés à l’ajustement (« bonne gouvernance »). En particulier, la lutte contre la
corruption occupe une place de plus en plus importante. Le FMI intègre également
progressivement la dimension écologique dans la conditionnalité, à des niveaux certes
relativement timides.
Au sein des organismes internationaux, la bonne gouvernance se définit, de manière
générale, comme le respect des critères suivants :
- Sécurité des citoyens assurée, respect de la loi garanti.
- Gestion efficace et équitable des dépenses publiques.
- Information disponible et facilement accessible pour tous les citoyens (« transparence »).
- Obligation pour les dirigeants politiques de rendre des comptes devant leurs populations.
Le FMI vérifie régulièrement la bonne application des réformes économiques
auxquelles les pays se sont engagés, et en évalue l’impact sur l’évolution des variables
macroéconomiques. Il peut décider de suspendre le versement de ses prêts (qui sont, la plupart
du temps, versés par « tranches ») s’il juge que l’Etat ne respecte pas ses engagements.
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L’obtention et le maintien de ces prêts sont essentiels pour les Etats : même si ceux-ci
sont, généralement, insuffisants pour renflouer les économies en difficulté, l’obtention d’un
prêt auprès du FMI rassure les acteurs privés comme les grandes banques internationales.
Ainsi, pour un pays, la « caution » du FMI est souvent capitale, dans la mesure où elle
constitue un « signal » important pour les investisseurs étrangers. En outre, une écrasante
majorité d’Etats refusent d’accorder des prêts bilatéraux à des pays auxquels le FMI aurait
refusé de prêter. Le véritable pouvoir du FMI n’est donc pas de prêter, mais de ne pas prêter :
si le FMI refuse de prêter à un Etat, il est très peu probable que quelqu’un d’autre le fasse.
Mis à part la mise les prêts, qui constituent l’essentiel de l’activité du FMI, cette
institution peut également offrir à ses pays membres des conseils dans le domaine
économique ; une assistance technique ; et des programmes de formation.
2.1.1.2. Financement et fonctionnement
Le financement du FMI est assuré par les emprunts qu’il peut effectuer auprès des
organismes financiers publics, peut l’être par des emprunts privés (il n’y a jamais eu recours
pour l’instant), par ses bénéfices nets et ses réserves, et enfin par les contributions des Etats-
membres. Ces dernières, définies en termes de « quotes-parts » ou « quotas », constituent
l’essentiel des ressources du FMI.
Le FMI compte au jour d’aujourd’hui 184 Etats-membres, la seule condition requise
pour adhérer au FMI étant de payer cette cotisation. Les quotas représentent la part du capital
du FMI détenue par chacun de ces pays. Le quota de chaque pays est calculé, au moment de
son adhésion au FMI, sur la base de critères économiques comme le PIB, la balance des
paiements et les réserves de change du pays. Ils sont recalculés tous les 5 ans à partir des
mêmes variables.
Le total des quotes-parts représente aujourd’hui un peu plus de 200 milliards de DTS3.
Les dix principales quotes-parts sont celles des Etats-Unis (17% environ), du Japon (6 %
env.) de l’Allemagne (6% env.) de la France (5,0% env.) et du Royaume-Uni (5,0% env.), de
l’Italie et de l’Arabie Saoudite, du Canada et de la Chine et de la Russie (3,0% environ pour
chacun des ces pays).
3 Le Droit de Tirage Spécial (DTS) est l’unité de compte du FMI. Il vaut 1,2 € environ.
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