Désarthrodèses-prothèses : Indications, techniques et résultats. DESARTHRODESES-PROTHESES : INDICATIONS, TECHNIQUES ET RESULTATS. J-P. CARRET Il s’agit d’une étude rétrospective sur une série de 24 désarthrodèses-prothèses totales de hanche réalisées chez 23 patients (1 cas bilatéral) entre 1988 et 2003. Nous n’avons retenu que les cas d’arthrodèses chirurgicales et un cas de spondylarthrite ankylosante présentant une fusion complète de l’articulation coxo-fémorale. Ont donc été exclues de l’étude toutes les ankyloses. La répartition du sexe était de 13 femmes pour 10 hommes avec 6 hanches droites pour 18 hanches gauches. Le tableau 1 résume les étiologies ayant conduit à réaliser ces arthrodèses. A propos de la technique de ces arthrodèses, 16 fois elle avait été réalisée intra articulaire et 8 fois extra articulaire. Etiologie arthrodèse Coxalgie Osteoarthrite Séquelle traumatique Séquelle épiphysiolyse Dysplasie de hanche Spondylarthrite ankylosante Sepsis Nombre hanche 8 9 17 3 1 1 2 Nombre patients 8 9 3 1 1 1 Age moyen 15 16 31 25 15 28 tableau 1 : étiologies ayant conduit à réaliser les arthrodèses L’âge moyen au moment de la désarthrodèse-prothèse était de 53,5 ans (extrêmes 30 ans à 74 ans). L’ancienneté de l’arthrodèse était en moyenne de 35 ans (7 à 59 ans). La position de cette arthrodèse était jugée satisfaisante dans 45% des cas (10 cas) avec environ 20° de flexion, 0 à 10° d’adduction et 0 à 20° de rotation externe. La position de l’arthrodèse était jugée insatisfaisante dans 55% des cas : en abduction dans 3 cas (abduction > 5°), en adduction exagérée dans 4 cas (adduction > 10°) et avec un excès de flexion dans 5 cas (>20°). Indications de la désarthrodèse-prothèse L’indication de désarthrodèse-prothèse était soit liée au retentissement de l’arthrodèse sur les articulations sus et sous jacentes, soit liée au retentissement fonctionnel même de l’arthrodèse. 1 J-P. CARRET Les plaintes fonctionnelles exprimées par les patients étaient les suivantes : - les douleurs : lombaires dans 30% des cas, du genou homolatéral dans 50% des cas et plus rarement de la hanche ou du genou controlatéral. - l’inégalité de longueur (toujours présente dans cette série, en moyenne de 4 cm avec des extrêmes de 2 à 7 cm). - la boiterie Le retentissement sur les articulations de proximité était le suivant : - le rachis lombaire : 18 fois soit 75% - le genou homolatéral : 15 fois soit 62,5% - la hanche controlatérale : 6 fois - le genou controlatéral : 8 fois. Nous avons particulièrement analysé le retentissement sur le genou sous jacent en fonction de la position de l’arthrodèse. Nous avons retrouvé 9 genoux indemnes de toute arthrose (37.5%). 13 genoux étaient arthrosiques (54.5%) avec 6 AFTI, 4 AFTE, 2 arthroses globales et 1 arthrose fémoro-patellaire. Enfin 2 genoux étaient arthrodésés (le patient avec une spondylarthrite ankylosante et 1 patient avec une arthrodèse 30 ans auparavant pour tuberculose). Enfin nous avons analysé le retentissement sur le rachis et notamment pour comprendre les mécanismes d’adaptation. Technique Bilan préopératoire : Radio du bassin de face, pangonométrie pour les axes du membre inférieur et la mesure des inégalités de longueur. Radiographies de la colonne dorso lombaire de profil avec bendings. Pour certains patients il y a eu un scanner permettant d’analyser le stock osseux du cotyle, l’état du moyen fessier. Tous les patients avec antécédents septiques ont eu une scintigraphie. Nous nous sommes assurés en préopératoire de l’état du moyen fessier cliniquement et avec un EMG. Pour tous les patients le moyen fessier était connu comme fonctionnel et pour 3 d’entre eux il a été retrouvé très atrophique en per-opératoire. Concernant la voie : elle a été antéro-externe dans 9 cas, postéro-externe avec trochantérotomie dans 11 cas et postéro-externe dans 4 cas. Le paléocotyle a été retrouvé dans la majorité des cas avec notamment persistance de la synoviale de l’arrière fond acétabulaire. Les implants utilisés ont été : cimentés dans 13 cas, sans ciment dans 9 cas et mixte dans 2 cas (croix de Kerboull et ciment pour le cotyle et tige sans ciment) La reprise d’appui a été différée à 45 jours pour 14 patients (trochantérotomie ou greffe acétabulaire) 2 Désarthrodèses-prothèses : Indications, techniques et résultats. Résultats Le recul moyen au moment de la dernière consultation était de 7 ans et demi par rapport à l’intervention ( extrêmes 11 mois à 15 ans). Les suites post-opératoires ont été simples dans la majorité des cas (20 cas soit 83% des cas). Nous avons constaté les complications suivantes : un cas de parésie du SPE avec récupération complète à 6 mois, un cas de phlébite fémorale régressive sous traitement anticoagulant, un cas de luxation précoce avec fracture du grand trochanter, un cas de sepsis précoce avec fistule nécessitant une reprise chirurgicale pour lavage. Concernant la longueur : 9 patients ont pu être égalisés avec un bon équilibre du bassin (rachis souple). Pour les autres il persistait une inégalité de longueur en moyenne de 2.5 cm (extrêmes 1 cm à 7 cm) nécessitant une compensation dans la chaussure. Concernant la récupération de la mobilité elle a été, comme dans la littérature, moins bonne que lors d’une PTH de 1ère intention : - flexion : 78° en moyenne avec des valeurs allant de 45° à 90° - rotation interne/externe : 15° en moyenne avec des valeurs allant de 0° à 40° - abduction/adduction : 25° en moyenne avec des valeurs allant de 20° à 45° Pour 1 patient l’ankylose de l’articulation opérée s’est réinstallée avec à dix ans une mobilité quasi nulle (0/10/0/0/0/0) du fait d’ossifications périprothétiques (sepsis repris précocement). La canne n’a pu être abandonnée que pour 9 patients. Quelque soit le recul (jusqu’à 11 ans ici) la plupart des patients conservaient une canne. Une boiterie de type Trendelenburg par insuffisance du moyen fessier restait présente pour 11 patients (45%). Cette fréquence diminuait pour les cas avec un grand recul (> 5 ans) (correspondant à la récupération des abducteurs qui dans la littérature peut continuer jusque 4 ans). Un patient a gardé une sensation majeure d’instabilité de sa hanche, en rapport avec un insuffisance importante du moyen fessier, le forçant à garder le déambulateur et 2 cannes pour la marche. Douleurs : Au niveau de la hanche opérée, 2 patients présentaient des douleurs en rapport avec un descellement de la tige fémorale. On avait donc 92% de hanches indolores. Au niveau du rachis lombaire, 4 patients restaient gênés par des douleurs et 14 patients se disaient très améliorés. Au niveau du genou homolatéral, 6 patients conservaient des douleurs invalidantes en rapport avec une gonarthrose. Au total 19 patients ( 79% ) étaient satisfaits de leur intervention, avec une amélioration de la marche, de leurs douleurs et de leur fonction notamment pour la position assise et le lever d’une chaise. 5 patients étaient déçus. 3 patients ont du être repris : 1 pour instabilité, repris dans un autre centre et perdu de vue, 1 pour descellement du cotyle à 7 ans de la désarthrodèse-prothèse, 1 pour descellement du pivot à 1.5 an de la désarthrodèse-prothèse. 3 J-P. CARRET Interventions associées Dans 10 cas l’indication de désarthrodèse-prothèse était posée en vue d’une intervention soit sur le genou homolatéral soit sur la hanche controlatérale. 2 patients ont eu une PTG, 2 patients ont eu une ostéotomie tibiale de valgisation, 1 patient a eu une ostéotomie tibiale de varisation, 3 patients ont eu une prothèse totale de hanche controlatérale. 2 patients devaient avoir une PTG mais la symptomatologie a suffisamment été améliorée pour surseoire à l’intervention. Conclusion Notre série présente donc 80% de résultats satisfaisants , avec un gain modeste au niveau de la mobilité mais important en ce qui concerne la fonction avec cependant souvent la nécessité d’une canne pour la marche chez ces patients dont la hanche était enraidie souvent depuis plus de 40 ans . 4