Mot du metteur en scène
Ce qui m’a intéressé quand on m’a proposé de mettre en scène “Confidences trop intimes”,
scénario, film, avant d’être une pièce de théâtre, c’est le sentiment que le voyeurisme en était le
thème principal...
Le voyeurisme, s’il n’est pas l’essence même du cinéma (être voyeur de...) au moins en est-il un
de ses thèmes favoris, naturels, déclinés maintes fois par certains de ses grands réalisateurs :
Hitchcock, Almadovar, Brian de Palma, Beineix, Zulawski.
L’idéal, au théâtre, pour y faire du cinéma (sans jeu de mot facile...) serait de mettre le spectateur
dans cette position privilégiée du réalisateur, qui, à travers l’œilleton de sa caméra, avec ses
choix de focale (gros plan, plan moyen, plan large) oriente le regard, choisi l’approche, parviens
à capter, à “voir” ce que l’œil humain ne perçoit pas. Mais cet artifice du cinéma, indispensable
élément technique, on le sait, est sans réelle utilité au théâtre.
Le théâtre a ses propres armes : le dévoilement, direct et instantané, l’introspection (sans filtre)
des sentiments secrets de l’individu, la mise en lumière de la transparence de son âme, la mise à
nu sans écran de son intimité...
Au cinéma, comme au théâtre, avec “Confidences trop intimes”, ce qui intéresse, ce qui fascine,
ce qui nous amène à être spectateur, c’est la “mise en partage”, “l’offrande” de l’intimité des
êtres, à voir ou à entendre, ici, sous la forme d’une confrontation psychanalytique, où
l’inconscient, le désir, la curiosité, la maladresse, la perversité, le fantasme, le sexe, peut-être
même l’amour se mélangent.
Si le spectateur de théâtre n’a pas droit au gros plan, au moins a-t-il droit à la chair et aux os des
personnages qui nous en diront tout autant, si pas plus, sur le pourquoi du “trop intime”...
A la fin de la représentation, de ce huit-clos sensuel et mystérieux, on aura oublié, je l’espère,
que “Confidences trop intimes” fut un bon scénario avant d’être une grande pièce de théâtre.
Bernard Yerlès
Bruxelles le 9 décembre 2010