qu'il lui a remis sa carte Vitale ? Sait-il ce que les opérateurs privés font des données
collectées sur des sites de e-santé dont l'approche « patient » dissimule trop souvent des
intérêts marchands : échangées, vendues et revendues leurs données... Consentir, selon un
mode unique et de façon éclairée, c'est le premier pas du respect des droits individuels.
Deuxième sujet, les droits collectifs. L'horizon était à refondre, tant la rédaction de la loi de
2002 les avait mal « fagotés ». Mais, il n'y a pas un mot pour répondre aux attentes des
acteurs associatifs qui ont pourtant reçu mission, eux et eux seuls, de représenter les usagers
du système de santé. Le sujet est pourtant simple : pas de démocratie sans moyens équitables
pour faire valoir son point de vue. Or, si les autres parties prenantes du système de santé
disposent toutes d'un modèle économique pour tenir leur place dans les instances de
démocratie sanitaire, c'est loin d'être le cas des acteurs associatifs. Comme si l'on pouvait se
satisfaire de voir qu'au fil du temps les bénévoles se découragent et renoncent de plus en plus
souvent à siéger dans les instances où ils représentent les usagers, les patients ou encore les
victimes. Pas étonnant en l'absence d'un statut facilitant l'exercice de leur mandat comme cela
existe pour l'élu politique ou le représentant syndical. Sur ce plan, rien ne bouge.
Le projet de loi reste aussi étonnamment silencieux sur la création d'une union des
associations d'usagers ... alors que pas moins de trois rapports publics l'ont recommandée : dès
2003, en 2011 et au début de cette année-même ! Donner un mandat public et légal à une telle
union aurait pourtant été l'occasion de répondre à l'attente sur le statut de représentant des
usagers autant que de clarifier de multiples questions comme celles du rôle attendu des
associations en matière de démocratie sanitaire ou encore, plus prosaïquement, de l'agrément
des associations auquel plus personne ne comprend rien à force d'incohérences dans son
attribution.
Troisième sujet, les lieux et les processus de décision, après une série de scandales
sanitaires, les militants attendaient mieux que ce qui est proposé. Ils resteront exclus du
cœur de la prise en charge thérapeutique : absents du Comité économique des produits de
santé, de la Commission de la transparence, et du collège de la Haute autorité de santé. C'est-
à-dire des principaux lieux de décision sur le prix et l'admission au remboursement d'un
médicament et la qualité de la prise en charge. C'est un peu too much ! Comme si,
décidément, dans l'histoire tumultueuse et malheureusement si souvent judiciaire du
médicament en France, nos décideurs tenaient encore à l'entre-soi médico-administratif.
Quant à la Conférence nationale de santé (CNS), que la loi de 2002 avait judicieusement
transformée en Conseil national de santé avant qu'une autre loi ne revienne en arrière, il n'est
même pas proposé de la rendre autonome. De quoi avons-nous peur dans ce pays ? Si l'on
veut vraiment un exercice démocratique en santé, cette instance doit disposer des mêmes
moyens que ceux dévolus au Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie ou au Haut
conseil de santé publique. C'est loin d'être le cas. Pas étonnant que le taux d'absentéisme à la
CNS, instance par ailleurs pléthorique, soit vertigineux, au point de fragiliser plus encore un
travail qui n'est pas toujours suffisamment à distance de la main publique.
On pourra objecter que l'avant projet de loi prévoit désormais que la stratégie nationale de
santé résulte d'une consultation publique. Encore faudrait-il quelques garanties légales, car
nous venons de vivre un épisode inouï qui a vu un comité des sages présider à l'établissement
d'une stratégie nationale de santé dont ont été exclus autant les parlementaires que les
représentants des usagers du système de santé !