Après plus de quarante ans d’existence, la Communauté Economique Européenne continue
l’approfondissement de l’intégration entre ses membres. Si sur le plan économique ce processus peut
être qualifié de réussi, il reste sans doute, beaucoup à faire tant sur les plans politique, institutionnel ou
social. Mais, le prochain grand défi que l’Europe s’apprête à relever est l’élargissement de ses
frontières à l’Est. L’adhésion des pays de l’Europe centrale et orientale va ainsi accentuer le processus
de construction européenne. Cette prodigieuse dilatation de notre espace de référence va redonner à
l’Europe son assise continentale en donnant vie à un nouvel ensemble beaucoup plus vaste qu’il ne
l’est actuellement. Cet espace européen déjà marqué par des disparités multiples va, de fait, voir sa
diversité existante renforcée. Ainsi, le rôle joué par la politique régionale européenne sera primordial,
de même que la logique d’aménagement du territoire qui l’accompagne. Cette dernière va-t-elle,
comme c’est le cas actuellement, privilégier l’idée de morcellement ? Dans ce cas, l’aménagement de
l’espace européen ne serait que la somme des aménagements des territoires nationaux. Ou bien, va-t-
on choisir la logique de l’unité ? En effet, il apparaît, dans les dernières évolutions de la politique
régionale européenne mais aussi dans les travaux informels (Schéma de Développement de l’Espace
Communautaire), une volonté de considérer l’espace européen, non plus comme la somme des Etats le
composant, mais comme une entité propre. Dès lors, ne doit-on pas spatialiser la politique régionale
européenne ? Il conviendrait, alors, de déterminer les impacts que l’introduction de ce facteur spatial
peut avoir dans l’élaboration de cette politique. En outre, si l’espace européen est appréhender dans
son ensemble, c'est-à-dire que nous nous plaçons dans une logique d’unité, alors, ne devrions-nous pas
déterminer une nouvel espace d’action pour cette politique ?
Ainsi, il nous est apparu pertinent d’élaborer un historique de la relation entre le processus
d’intégration économique et la politique régionale européenne afin de bien montrer la tension qui a
existait entre ces deux mouvements. Cet historique, nous l’avons mené à la lumière de l’évolution des
théories sous-jacentes de ces deux objets. Or, dans les derniers développements de la politique
régionale européenne, apparaît la volonté de considérer l’espace européen dans son ensemble. Cette
nouvelle orientation nous a conduit à construire une analyse multi-niveaux de cet espace nous
permettant, de ce fait, de mettre en évidences ses différentes caractéristiques. Hormis les analyses
interne et externe, il y a surtout une tentative d’anticipation de ce que pourrait être l’espace européen
de demain. Nous avons ainsi traiter de l’élargissement à l’Est et de ses conséquences, mais aussi et
surtout, de la logique de macro-territoires comme possible espace d’action de la politique régionale
européenne. Ce raisonnement en termes de macro-territoires semble d’autant plus justifié que
l’élargissement risque d’amplifier les difficultés quant à l’aménagement de ce nouvel espace.
I – 1 Plus que le libre échange, l’intégration
Pour les fondateurs de la communauté européenne, la seule constitution d’une zone de libre-
échange n’était pas une fin en soi, ils voulaient aller plus loin dans leur expérience d’intégration. Ces
précurseurs attendaient de l’intégration économique un gain d’efficacité provenant d’une meilleure