2 la synusie - Tela Botanica

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Fiches de
phytosociologie théorique
2 - La synusie
Version 1, rédigée en janvier 2010.
Cette fiche a été élaborée lors des réunions du Cercle de réflexion phytosociologique les 27
janvier, 9 mars 2010 en présence d’Emmanuel CATTEAU, CAROLINE FARVACQUES, Bruno DE
FOUCAULT, Philippe JULVE, Cécile LEMONNIER, Claire NICOLAZO (ordre alphabétique).
Citation : Cercle de réflexion phytosociologique, janvier 2010. La synusie. Fiches de
phytosociologie théorique, 2 : 4 p. Lille.
Avant-propos : Tous les concepts développés dans cette fiche sont transposables aux autres
domaines de la biocénologie (animaux, champignons, protistes, bactéries, archées, nanobes,
virus…). Néanmoins dans le cadre de ce groupe de réflexion nous privilégions l’approche
phytosociologique qui semble la plus en avance sur le plan théorique biocénotique. Les
experts des autres groupes pourront la plupart du temps transposer les concepts sans
difficultés et ajouter les concepts nouveaux nécessaires.
I. Propositions
1) Une synusie est un objet concret, observable et mesurable.
2) De l’ensemble de relevés décrivant des synusies semblables statistiquement se dégage
la notion typologique abstraite d’association végétale.
3) La notion de synusie est applicable à tous les domaines de la biocénologie. Elle n’est
donc pas restreinte au monde des plantes.
4) Une synusie végétale est constituée de l’ensemble cénologique des plantes appartenant
à des espèces différentes mais partageant un même compartiment fonctionnel des
écosystèmes.
5) Il existe plusieurs critères d’homogénéité pour reconnaître les synusies sur le terrain
(d’après JULVE, 2010, mais modifié) :
5.1) L’homogénéité de la composition floristique1 dans l’espace étudié, en prenant en
compte les écophènes (accomodats et stades de développement).
5.2) L’homogénéité spatio-temporelle, qui concerne l’espace vital en trois dimensions, le
volume minimal2 de la communauté et le temps minimal de recherche des espèces.
5.3) L’homogénéité globale des stratégies de vie, qui prend en compte les types biologiques
(plantes) ou les types nutritionnels (animaux). Elle inclut également beaucoup d’autres
caractères adaptatifs reliés à la morphologie qui prend en compte la taille moyenne des
1
Par homogénéité floristique on entend la constance globale de la combinaison d’espèces et non pas la régularité
de la répartition sur le terrain des individus.
2
Nous avons étendu la notion d’aire minimale pour intégrer la dimension verticale.
espèces, les types de feuille et de systèmes racinaires, les types de tige et les types de
croissance, les modèles architecturaux, la pilosité, voire des adaptations anatomiques
(aérenchymes, crassulescence…) et physiologiques (plantes en C3, C4, CAM) ou des modes
de dispersion (diaspores) ou de conquête de l’espace (stolons, rhizomes…).
Il faut utiliser ces critères avec une vision statistique.
5.4) L’homogénéité phénologique qui sépare les phénophases3 vernales et estivales, les
phases migratoires des animaux.
5.5) L’homogénéité dynamique qui suppose de décrire les combinaisons d’espèces à
l’intérieur d’une phase dynamique4 donnée. Elle permet parfois de distinguer à l’intérieur
d’une synusie les espèces relictuelles d’une phase passée, modales et pionnières d’une phase
ultérieure.
Cet ensemble de critères constitue une catégorie polythétique au sens de la théorie des
ensembles, c'est-à-dire qu’il n’est pas nécessaire que tous les critères d’homogénéité soient
remplis ni suffisant de ne s’appuyer que sur un seul.
6) La présence d’une synusie correspond à un certain niveau d’homogénéité
écosystémique. En d’autres termes, la synusie est conditionnée par des éléments
biocénotiques tels l’architecture de la végétation dans laquelle elle s’intègre, des
pressions anthropozoogènes, et par des éléments du biotope tel le sol et le mésoclimat.
7) Une synusie peut se rencontrer sous la forme d’une communauté d’un seul tenant ou
en plusieurs fragments en interrelations biologiques.
8) Une synusie est une communauté d’individus qui présente une unité de réponse aux
conditions de milieu, y compris dans la dimension dynamique.
3
On parle de phénophases distinctes lorsqu’on observe une rupture marquée dans la succession des
développements végétatifs des espèces.
4 Par phase dynamique on entend phase pionnière, mature ou sénescente et non pas les stades de succession vers
les climax.
II. Quelques définitions historiques
Synusie (synusia) : terme d’origine grecque, que l’on trouve par exemple dans Platon ou
Plutarque, mais dans un sens philosophique. La première utilisation dans un sens écologique
semble remonter à Gams.

GAMS, 1918, p. 20 : « A group of plants of one or several related life forms, growing under
similar environmental conditions. »

BRAUN-BLANQUET, 1928, p. 72 : « Assemblage naturel d’espèces appartenant à un même
groupe de formes biologiques et ayant des exigences écologiques uniformes. »

REYNAUD-BEAUVERIE, 1936, p. 40 : « Groupement des plantes qui dépendent d’un même
facteur écologique dans un ensemble floristique qui, à son tour, obéit à un ensemble de
facteurs écologiques déterminés. »

REYNAUD-BEAUVERIE, 1936, p. 41 : « Ensemble de plantes ayant les même besoins
stationnels et entre lesquelles règne la lutte pour la vie. »

CAIN, 1944, p. 489 : « Minor communities within a phytocoenosis that are characterized
by relative uniformity of life form, floristic composition and environment. »

HARANT & JARRY, 1964, p. 291 : « Groupement d’individus dépendant d’un même facteur
d’habitat. »

KUCHLER, 1967, p. 20 : « …Often correspond to horizontal layers of a community. »

GILLET, DE FOUCAULT & JULVE, 1991, p. 320 : « Ensemble, connexe ou fragmenté
spatialement, d' écodèmes dont les organismes sont suffisamment proches par leur espace
vital, leur comportement écologique (sensibilité/tolérance aux contraintes et dissymétries
du milieu, mode d'exploitation des ressources) et leur périodicité pour partager à un
moment donné un même milieu isotrope à l'intérieur d'une biogéocoenose. »

GILLET, DE FOUCAULT & JULVE, 1991, p. 321 : « Synusie d'écodèmes végétaux,
caractérisée par une composition floristique homogène, ainsi que par la forte
représentation d'une stratégie adaptative, d'un type morphologique végétatif et d'un type
biologique déterminés. »

ALLABY, 1998 : « A distinct layer in an area of vegetation that is composed of plants of a
similar life-form, e.g. Polytrichum moss on the ground layer of an open oak wood.
Different synusiae may appear in the same layer at various seasons of the year. »

HARRISON, 2004 : « an association of plant species with a similar life form and similar
ecological requirements occurring together in the same habitat ; sometimes called a
"union"; most habitats are occupied by several synusiae, which may grow above each
other in layers, beside each other, or in mixture ; for example, an open tree synusia or
layer over a grass-dominated synusia or layer. »

BOX & FUJIWARA, 2005, p. 111 : « A synusia is a group of species of roughly the same
size, sometimes of similar form, occupying the same layer in a vegetation stand, for
example the synusia of ground-layer herbs in a forest. The species in a synusia are similar
in that they are subject to similar micro-environmental conditions, such as low light levels
on the forest floor. »

ANSWER.COM, 2010 : « A structural unit of a community characterized by uniformity of
life-form or of height. »

EUROPEAN UNION IN WEBSTERS ONLINE DICTIONNARY, 2010 : « Any component of a
community of one or more species, belonging to the same life-form, having similar
environmental requirements and occurring in a similar habitat, e. g. lianes in forest and
including stratified communities, e. g. a layer of moss plants. »

ENCYCLOPÆDIA BRITANNICA, 2010 : « Plants with similar stature and life-form can be
grouped into categories called synusiae, which make up distinct layers of vegetation. In
tropical rainforests the synusiae are more numerous than in other ecosystem types. They
include not only mechanically independent forms, whose stems are self-supporting, and
saprophytic plants but also mechanically dependent synusiae such as climbers. »
III. Bibliographie citée
ALLABY, M., 1998. A Dictionary of Plant Sciences. Encyclopedia. com.
<http://www.encyclopedia.com>. Consulté le 7 Jan. 2010.
ANSWER.COM, 2010. <http://www.answers.com/topic/synusia>. Consulté le 7 Jan. 2010.
BOX, E. & K. FUJIWARA, 2005. Vegetation types and their broad-scale distribution. In E. VAN
DER MAAREL (ED.), Vegetation ecology, pp. 106-128.
BRAUN-BLANQUET, J., 1928. Pflanzensoziologie. Grundzüge der Vegetationskunde. Biol.
Studienbücher, 7. 330 p. Berlin.
CAIN, S. A., 1944. Foundations of plant geography. 556 p. Harper. New-York.
Encyclopædia Britannica, 2010. Tropical rainforest. Encyclopædia Britannica Online.
<http://www.britannica.com/EBchecked/topic/606576/tropical-rainforest>. Consulté le
7 Jan. 2010.
EUROPEAN UNION IN WEBSTERS ONLINE DICTIONNARY, 2010. http://www.websters-onlinedictionary.org/sy/synusium.html. Consulté le 7 Jan. 2010.
GAMS, H., 1918. Prinzipienfragen der Vegetationsforschung. Ein Beitrag zur Begriffsklärung
und Methodik der Biocoenologie. Vierteljahrschrift der Naturf. Gesell. in Zürich, 63 :
292-493.
GILLET, F., B. DE FOUCAULT & PH. JULVE, 1991. La phytosociologie synusiale intégrée :
objets et concepts. Candollea, 46 : 315-340.
HARANT, H. & D. JARRY, 1964. Guide du naturaliste dans le midi de la France. 2 tomes, 316 et
398 p. Delachaux et Niestlé. Neuchâtel.
HARRISON, J.W., 2004. Classification of vegetation communities of Maryland : First iteration.
NatureServe and Maryland Natural Heritage Program, Wildlife and Heritage Service,
Maryland Department of Natural Resources. Annapolis, MD.
JULVE, PH., 2010. Les synusies d’oiseaux en France : approche méthodologique et relations
avec les communautés végétales. Actes du colloque de Velaines-en-Haye (2008).
KUCHLER, A., 1967. Vegetation mapping. 472 p. Ronald Press. New-York.
REYNAUD-BEAUVERIE, M. A., 1936. Le milieu et la vie en commun des plantes. Notions
pratiques de phytosociologie. 237 p. Lechevalier. Paris.
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