la gouvernance urbaine

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1
LA GOUVERNANCE URBAINE : ENTRE COMPLICATIONS ET
COMPLEXITES, COMMENT S’ORIENTER ?
Communication de Claude Jacquier présentée lors du colloque « Vers une
Nouvelle Gouvernance des Territoires » organisé le 15 septembre 2008 à Reims par
JM Beaupuy, président de l'intergroupe Urban-Logement au Parlement
européen.
LA GOUVERNANCE URBAINE : ENTRE COMPLICATIONS ET
COMPLEXITES, COMMENT S’ORIENTER ?
Claude Jacquier
Directeur de recherche au CNRS
[email protected]
15 septembre 2008
Communication présentée pour le colloque « Vers une Nouvelle Gouvernance des Territoires »
« Towards New Territorial Governance » Urban.logement, 15 septembre 2008 Reims
Sommaire
1234-
La gouvernance, la pluralité des acceptions ....................................................................... 2
La gouvernance urbaine, pourquoi ? ................................................................................... 3
La gouvernance en quête de démocratie ............................................................................ 5
Conclusion ........................................................................................................................... 7
Mots-clés :
Gouvernance, complexité, villes, région urbaine, développement soutenable, coopération
2
1 - Gouvernance, la pluralité des acceptions
1.1 La notion de gouvernance est fréquemment utilisée, et dans des sens fort variés, par les
spécialistes des relations internationales, par les experts des systèmes politicoadministratifs, par des politologues, des sociologues et des économistes. Sous le
qualificatif de «bonne gouvernance», elle est même devenue un label distribué par les
organisations internationales.
1.2 Multiplicité des utilisateurs et multiplicité des usages, donc multiplicité du sens et des
définitions possibles, la notion de gouvernance est parfois convoquée pour rendre compte
de réalités opposées. Par exemple chez certains économistes 1, promoteurs de cette
notion il y a quelques décennies, elle qualifie les modes de coordination de la firme lui
permettant d’échapper aux coûts de transaction que lui impose le marché. Sous la
formulation «corporate governance», gouvernance d’entreprise, elle est apparue dans les
années quatre-vingt-dix lors de la révélation des nombreux scandales financiers (cf. Enron)
pour réaffirmer la nécessité d’un contrôle des mandants (les actionnaires) sur les
mandataires (les instances de management). Dans son usage plus récent par les
politologues, elle désigne une action publique qui déploie des formes de partenariat publicprivé afin de mieux intégrer les mécanismes du marché (voir en particulier les sociétés à
capital mixte, les délégations et concessions de services publics, etc ). Bref, la
gouvernance, notion commune à plusieurs disciplines ne désigne pas forcément la même
réalité, le même objet de recherche et ne donne donc pas naissance à une définition
stricte partagée et adoptée par tous.
1.3 Pour la science politique, la sociologie, voire la géographie et l’urbanisme, disciplines qui
nous intéressent plus particulièrement ici, la notion de gouvernance qualifie un processus
de transformation et de recomposition des modes d’action publique mettant en jeu la
construction de mécanismes de régulation des acteurs au sein des sociétés locales. Le
succès de cette notion se manifeste en accompagnant deux mouvements concomitants :
d’une part, un retrait relatif des pouvoirs centraux et des formes traditionnelles de
gouvernement et, d’autre part, une montée en puissance des collectivités territoriales et de
leurs instruments (sociétés d’économie mixte, agences, etc.), au sein des régions et
notamment des grandes villes, d’où la notion de gouvernance urbaine. Cette notion qui
souvent s’articule et parfois s’oppose aux modes traditionnels de gouvernement
(centralisés, hiérarchisés, descendants «top-down», procéduraux) postule et parfois
promeut une approche fondée sur des réseaux d’action publique et des mécanismes de
coopération, de régulation, voire d’intégration dans des systèmes et dispositifs d’action
d’une large diversité d’acteurs publics et privés (systèmes polycentrés, réticulaires,
horizontaux, transversaux, processuels, ascendants «bottom-up»)
1.4 Dans cette dernière formulation intégrative, la gouvernance est à rapprocher de la première
définition donnée par les économistes en matière de coûts de transaction. Mais alors qu’il
s’agit pour eux, grâce aux firmes, de créer un espace à l’abri des coûts de transaction, pour
les autorités publiques, il s’agit au contraire de nouer précisément des relations avec
d’autres acteurs présents sur les marchés (cf. partenariat public-privé). La perspective est
bien une meilleure coordination des acteurs publics et privés qui opèrent de manière
relativement autonome sur un territoire et dans des champs de contraintes qui leur sont
propres. Cette intégration est souvent l’objectif poursuivi par les nouvelles politiques
urbaines, politiques partenariales, transversales et territoriales qui cherchent à dépasser la
traditionnelle sectorisation de l’action publique ainsi que les logiques bureaucratiques et
corporatistes qui la caractérise. Ces politiques visent la coproduction de la ville par les
acteurs urbains, quels qu’ils soient. Il faut mentionner toutefois que peu nombreuses sont
les définitions politiques de la gouvernance qui font explicitement référence aux
mécanismes démocratiques que pourtant la seconde définition de la gouvernance
suggérée par les économistes (contrôle des mandataires par les mandants, contrôle et
régulation des pouvoirs et des intérêts potentiellement en conflit).
1.5 Esquissons une définition large de la gouvernance permettant de regrouper différentes
variations sur ce thème. La gouvernance serait la constitution délibérée de coalitions
1-
COASE, Ronald.H (1991).- The Nature of the Firm.- in «The nature of the firm : origins, evolution and
development» edited by Oliver E. Williamson, Sidney G. Winter, New York : Oxford University Press, 235 p.
3
formelles ou informelles d’intérêts ou d’acteurs divers afin d’assurer la fourniture de
biens et de services qui ne pourrait l’être par l’action indépendante d’acteurs isolés. Elle
suppose de nouveaux modes de décision à diverses échelles, fondés sur des relations
multilatérales entre acteurs dans des contextes organisationnels perçus comme étant de
plus en plus complexes et fragmentés. Une telle définition devrait donc faire toute sa place
à la dimension démocratique représentative, participative ou encore, tel que nous le
suggérons dans cet article,… contractuelle.
2 - La gouvernance urbaine, pourquoi ?
2.1 De nombreuses hypothèses sont généralement avancées pour expliquer l’émergence de
cette notion. Ces hypothèses sont portées par les phénomènes et les transformations des
sociétés dont cette notion essaie de rendre compte.
2.2 La première hypothèse généralement avancée met l’accent sur l’essoufflement des
grands modèles explicatifs et la reconfiguration partielle des logiques d’action autour
d’approches réellement pluridisciplinaires. Il s’agit plutôt d’une remise en question de
modèles trop simplificateurs de la réalité, une réalité qui apparaît plus complexe que ce que
pouvaient en dire ces analyses sommaires. Ainsi, la notion de gouvernance serait moins
élaborée pour rendre compte de processus de régulation de sociétés devenues plus
complexes que pour prendre en compte, enfin, une complexité largement occultée
jusqu’ici. Les représentations de la réalité ne se réduisaient-elles pas jusque-là au
fonctionnement de quelques mécanismes abstraits parmi lesquels la toute puissance
supposée de l’intervention étatique, la domination du capital, voire… des puissances
divines ?
2.3 La seconde famille d’hypothèses renvoie à quelques évolutions majeures survenues dans
le gouvernement des sociétés occidentales. La première hypothèse concerne l’éclatement
apparent des structures de pouvoir dans les sociétés capitalistes avancées, l’Etat n’étant
plus le seul garant de l’intérêt général (thèses néo-libérales). La fragmentation et la
redistribution des pouvoirs, la multiplication des centres de décision seraient la norme.
Cette perte de centralité de l’Etat qui affecte particulièrement certains pays
s’accompagnerait de la montée en puissance d’autres instances, notamment des grandes
compagnies industrialo-financières (thématique de la mondialisation et de la globalisation),
des instances supra-nationales (par exemple l’Union européenne) ainsi que des
collectivités territoriales parmi lesquelles, les grandes villes. Jadis, territoires d’application
des politiques sectorielles imaginées par l’Etat (politiques sociales, politiques urbaines), les
villes seraient donc désormais placées en première ligne pour jouer un rôle innovant dans
la recomposition et l’élaboration des politiques publiques.
2.4 Les villes et les régions urbaines apparaissent ainsi comme le lieu privilégié de la
régulation des contradictions qui affectent des sociétés mondialisées enracinées dans
des cultures et des territoires singuliers. C’est en effet, à leur échelle et sur leurs territoires
que doivent être régulées les tensions au sein d’un triple système d’interactions, voire de
contradictions entre les piliers constitutifs du développement soutenable (économique,
social et environnemental) régulations qui reposent sur des mécanismes de coopération
conflictuelle, une notion apparentée aux «luttes-coopérations» de François Perroux 2 :
2-
-
Le premier système d’interactions à réguler par de telles coopérations concerne les
rapports entre l’économie et le social. Les économies participant activement à la
compétition mondiale, créatrice de richesses sont aussi génératrice de chômage et
d’exclusions. Il leur faut donc assurer le maintien de la cohésion sociale de leur territoire
au risque de limiter, par les prélèvements fiscaux, l’efficacité et la réactivité des acteurs
économiques. C’est la dimension équitable du développement soutenable.
-
Le second système d’interactions à réguler concerne les rapports entre l’économie et
l’environnement. Les économies en compétition génèrent une fragmentation de leurs
PERROUX F (1964).- L’économie du XXème siècle.- PUF.
PERROUX F (1990).- Dictionnaire économique et social.- Hatier, Paris.
4
territoires, des gaspillages et des pollutions et il faut, au risque d’exacerber les
concurrences pour l’occupation de l’espace, mettre en œuvre des politiques publiques
de cohésion territoriale financées elles aussi par des contributions qui pèsent sur le
dynamisme économique. C’est la dimension viable du développement soutenable.
-
Enfin, le troisième système d’interactions porte sur les rapports entre le social et
l’environnement. Les politiques publiques de cohésion sociale et de cohésion
territoriale sont loin d’être toujours compatibles entre elles. L’équilibre social de certains
territoires ne peut s’établir que sur le renoncement à satisfaire les exigences de
certaines demandes ce qui se manifeste par des confrontations sociales au sein des
territoires urbains (voir le réflexe NIMBY), mais aussi au sein des coalitions sociopolitiques nécessitant des arbitrages délicats au sein des arènes locales. C’est la
dimension vivable du développement soutenable.
Les pouvoirs urbains doivent répondre à ces trois grandes exigences en ayant peut-être,
plus que d’autres, la nécessité de renforcer la citoyenneté et la démocratie sur leur territoire
dans des environnements socio-économiques et politiques en rapides mutations (choc
asymétrique des pays émergents).
2.5 La prise en compte de ces trois systèmes d’interaction interroge les niveaux et les modes
de régulation les plus appropriés. Leur régulation ne peut se faire, en effet, ni par le recours
aux seuls mécanismes marchands, ni par la seule édiction de normes centrales. En effet, si
on admet que le social et l’environnement ne se limitent pas à une simple option correctrice
des «dégâts» ou des «horreurs» économiques, mais qu’ils sont des champs d’activités et
d’enjeux à part entière alors, le marché et les conventions juridiques ne sont pas vraiment
en mesure de réguler ce triple entrelacs contradictoire. Sa coordination et sa mise en
cohérence reposent en fait sur des choix politiques déployés aux diverses échelles
locales, régionales, nationales ou continentales, le plus souvent de manière combinée
et subsidiaire à partir d’interventions politiques notamment à l’échelle des communautés
locales, des villes, des régions ou des systèmes urbains réticulés. Il n’y a pas de territoire
politico-administratif pertinent. A chacun de ces niveaux, des compromis doivent être
trouvés sur lesquels édifier des coalitions socio-politiques pertinentes mais il apparaît
clairement que villes et régions urbains sont de plus en plus les acteurs collectifs majeurs
capables d’organiser ces systèmes de régulations. Pour le moment, malgré de
nombreuses initiatives prises par la Commission européenne, 3 les Etats-nations restent
réticents à leur reconnaître un pouvoir qui pourrait, dans un partenariat en direct entre UE
et régions urbaines, aboutir à ce que ces Etats perdent un peu plus la main.
2.6 Une troisième hypothèse explicative trop souvent négligée peut être convoquée pour
expliquer l’émergence des nouvelles formes de gouvernance urbaine. Elle concerne les
transformations que le développement urbain a connues avec le passage du «faire la
ville» à l’époque du boom de l’urbanisation (grosso modo des années 30 aux années 70)
au «faire avec la ville», avec ses territoires, ses populations et les acteurs qui y
interviennent. Cette mutation se caractérise par le passage d’un aménagement du territoire
reposant sur une intervention «productiviste» en sites «vierges» (l’urbanisation massive
des premières ceintures agricoles périphériques) dont les caractéristiques sont peu ou prou
niées à une reconquête d’espaces anciennement urbanisés (restauration immobilière,
requalification et renouvellement urbain) qui nécessite de faire avec les composantes de
base des territoires, à savoir les lieux, les populations qui y sont localisées et les institutions
3-
Voir certaines communications de la Commission publiées en 1997 et en 2006 ainsi que l’initiative de la
Présidence Allemande en 2007 sous l’impulsion des villes et des lander (Charte de Leipzig).
COMMISSION EUROPEENNE (1997). Cadre d’action pour un développement urbain soutenable dans
l’Union européenne. Communication (Forum de Vienne 1998), un document-clé qui explicite les enjeux
concernant l’économique, le social et l’environnement (soit les trois piliers du développement soutenable) et
surtout qui met l’accent sur une quatrième dimension qui est la gouvernance des interactions entre ces trois
piliers, une dimension essentielle trop souvent oubliée. Elle est devenue une référence majeure dans toutes les
politiques structurelles européennes (confère communication de Bristol en 2006 et la Charte de Leipzig en 2007).
Cette formulation doit beaucoup aux travaux menés dans le cadre des réseaux de villes et aux contributions que
ces réseaux ont fait en 1993 au « Carrefour des villes » présidé par Jacques Delors alors président de la
Commission. De ce Carrefour des villes est issu le Programme européen « URBAN » en 1994.
COMMISSION EUROPEENNE (2006). Cohesion Policy and Cities : the Urban Contribution to Growth and
Jobs in the Regions Com 385 de juillet 2006 (connue sous le nom de Communication de Bristol)
PRESIDENCE ALLEMANDE (2007).- Charte de Leipzig sur les villes durables européennes.
5
censées réguler leurs interactions. Cette reconquête suppose donc, à la fois, de tenir
compte de ces composantes des territoires urbains et de veiller à une plus grande
complémentarité et simultanéité des interventions des différents acteurs.
2.7 Pour l’action publique, cette mutation a de multiples conséquences qui sont au cœur de ce
que l’on appelle la gouvernance et qui emprunte à des manières de faire initiées il y a
parfois fort longtemps dans les divers pays européens au niveau local. Le nouveau n’est
bien souvent qu’un habillage de l’ancien. On passe ainsi :
- du principe de fragmentation et de balkanisation des espaces urbains au principe de
coopération territoriale (cf. l’intercommunalité), mouvement amorcé en Europe,
d’ailleurs dès la fin du 19ème siècle ; ce mouvement de recomposition des territoires
politico-administratifs ne s’est jamais interrompu et se prolonge au niveau européen
avec la coopération transfrontalière, transrégionale ou transnationale (cf. INTERREG),
ou pour la période 2007-2013 la coopération territoriale européenne avec la mise en
place récente des Groupements européens de coopération territoriale –GECT),
- du principe de hiérarchisation au principe de subsidiarité et d’intégration verticale
(approches contractuelles, multilevel mariant top-down et bottom-up), une tendance
amorcée partout en Europe et ailleurs outre-Atlantique au cours de la décennie
soixante-dix.
- du principe de sectorisation et de cloisonnement au principe de transversalité et
d’intégration horizontale (partenariat, interministérialité, interservice, réseau)
2.8 De toutes les formes de coopération que nous venons de présenter, cette dernière est sans
doute la plus difficile à mettre en œuvre et tous les pays buttent en la matière sur des
résistances. Alors que les deux premières coopérations conduisaient à un élargissement
des pouvoirs et des prérogatives de l’appareil politico-administratif, la troisième conduit à
une mise en tension des champs de compétence politique traditionnels et surtout des
cultures professionnelles, des déontologies, des routines et des logiques bureaucratiques.
Personne n’est vraiment prêt à céder une parcelle de pouvoir et de territoire. La
gouvernance serait donc, dans cette hypothèse, une manière de contourner le
fonctionnement traditionnel des administrations (selon les logiques d’appareil) par la mise
en réseaux des acteurs qui les composent. Les logiques autoritaires, dirigistes,
généralement top down (pouvoir d’un centre sur une étendue et un territoire bien délimité
par une frontière) doivent céder le pas à la coopération contractuelle (territoriale, verticale
et surtout horizontale) entre acteurs publics et privés au sein d’espaces moins homogènes
et parfois plus fragmentés dont les limites et les frontières sont devenues plus floues. Tout
cela relève pour paraphraser la conspiration des modernisateurs de Pierre Grémion, d’une
conspiration réformiste. 4 De nombreuses initiatives prises par les pays européens
offrent des occasions pour que se manifestent de telles formes de coopérations. Ainsi, les
approches intégrées de développement urbain soutenable qui voient le jour dans la plupart
des pays européens depuis le milieu des années quatre-vingt relayées depuis le milieu des
années quatre-vingt-dix par l’Union européenne (PIC Urban 1 et 2, orientations
Communication de la Commission en 1997 et Forum de Vienne 1998, Communication de
la Commission de 2006, Charte de Leipzig 2007) constituent certainement des laboratoires
particulièrement probants pour la construction de ces nouvelles formes de gouvernance.
3 - La gouvernance en quête de démocratie
3.1 Les recherches sur la gouvernance ne font pas explicitement de la question de la
démocratie un thème majeur de leurs analyses alors que cette thématique est au cœur des
débats urbains contemporains. Et pourtant, en bousculant le champ où opèrent des
autorités publiques et en introduisant des possibilités de discussions, de confrontations et
de négociations entre divers acteurs publics et privés, la gouvernance offre la possibilité de
4-
GREMION P (1987).- L’échec des élites modernisatrices.- Esprit, Novembre, n° 11, pp. 3-8.
JACQUIER C. (2005).- On relationship between integrated policies for sustainable urban development and
urban governance.- in Beaumont J., Musterd S Governance, Decentralization and the Rise of Local
Participatory Democracy?., Tijdschrift voor Economische en Sociale Geografie Vol. 96, No. 4, the Royal Dutch
Geographical Society KNAG, Blackwell Publishing, Oxford
6
nouvelles donnes socio-politiques dans les villes. Peut-on dire, cependant, que l’on a
pris la pleine mesure de ces transformations et qu’on les a suffisamment examinées dans
toutes leurs conséquences et leurs dérives possibles. En s’édulcorant quelque peu, en
passant du gouvernement à la gouvernance, le pouvoir politique et ses manifestations n’ont
pas pour autant disparu. L’assouplissement des frontières et des contraintes ne signifie pas
en effet, et pour autant, l’émergence d’un monde moins autoritaire, moins discriminant et
plus civilisé. En revanche, on peut se demander si la multiplication et la généralisation de
ces diverses formes de gouvernance ne signifient pas une complication accrue des
procédures et une perte de contrôle plus grande de la part des citoyens sur la
sphère politico-administrative ? Dans les formules contractuelles qui associent l’Etat aux
collectivités territoriales et les instances publiques aux acteurs privés, où se situent
désormais les vraies responsabilités politiques ? N’y a-t-il pas là une dissolution
dommageable des responsabilités déjà perceptible en de nombreux domaines notamment
avec la multiplication des formes contractuelles ? Que deviennent, dans ces conditions, les
principes d’imputabilité et d’évaluation (accountability) ? Finalement, le gain par rapport à
un pouvoir moins monolithique dans le domaine de l’élaboration des décisions et la
flexibilité dans l’application des règles ne se paie-t-il pas d’une perte pour les citoyens en
matière d’accès aux services et aux voies de recours possibles ?
3.2 En fait, les approches de la gouvernance ont tendance à expulser la question de la
conflictualité des acteurs au profit de logiques plutôt consensuelles comme le laisse
entendre la notion de partenariat. C’est ce que souligne Rob Atkinson : «Une
gouvernance couronnée de succès suppose l’existence d’un accord intersubjectif poussé
assez loin, ainsi que la marginalisation sinon l’exclusion d’intérêts et de groupes
potentiellement perturbateurs, ou bien que ces intérêts et ces groupes soient convaincus
d’accepter les limites et les buts de cette gouvernance, tels que les déterminent les
groupes dominants.» 5 Vieille question propre aux débat sur la souveraineté, à savoir le
consentement des sujets. En mettant en avant la négociation entre acteurs, la
gouvernance ne met pas véritablement en évidence le fait que cette rencontre des intérêts
ne va pas de soi et que, lorsqu’elle aboutit à un accord, compte tenu de son mode
d’élaboration (exclusion de certains intérêts), elle ne participe pas nécessairement à la
construction d’un «intérêt général». Par ailleurs, élargie à d’autres entités que le seul
pouvoir politique légitime, la gouvernance est détentrice d’un pouvoir politique renforcé
(légitimation partielle par les acteurs participants au tour de table) qui s’impose aux acteurs
exclus sans possibilité pour ceux-ci d’en limiter les prérogatives, sauf à constituer des
partenariats alternatifs et concurrentiels. Or, peut-il en être vraiment ainsi compte tenu de
l’assymétrie des forces en présence ? Dans certains cas (partenariats construits aux
frontières de la puissance publique), les mécanismes de la gouvernance peuvent même
confier à des acteurs organisés en lobby des prérogatives de puissance publique alors que
ceux-ci n’ont aucun titre pour y prétendre.
3.3 Portée en partie par la vague économique néo-libérale, cette conception renouvelée du
gouvernement local n’a guère laissé de place aux principes de base prônés, eux, par la
doctrine politique libérale, à savoir la protection des intérêts particuliers face à la toute
puissance des pouvoirs publics ou privés qui dès lors peuvent se révéler proliférant. Elle ne
l’a fait, ni par la voie de la limitation des domaines d’intervention, une des voies
possibles tracée par la doctrine politique libérale car ce mode de «gouvernement» ignore,
par nature, les frontières, ni par la seconde voie, celle de l’équilibre des pouvoirs et des
contre-pouvoirs. Là encore, en favorisant la construction de partenariats entre les acteurs
publics et les acteurs privés, la gouvernance interdit, semble-t-il, d’opposer «l’ambition à
l’ambition», un principe cardinal mis en avant par les pères fondateurs de la doctrine
libérale.
3.4 Par ailleurs, la gouvernance urbaine et ses multiples configurations d’acteurs ne prend
guère en compte la question de la démocratie dans trois domaines où, dans les villes, elle
a tendance à souffrir d’insuffisances chroniques dommageables pour le dynamisme
européen : la sous-représentation politique des urbains (la démocratie participative
apparaissant comme le palliatif d’un problème que les partis politiques ne veulent ou ne
peuvent pas aborder), la sous représentation des femmes et la sous-représentation ou
5-
ATKINSON (Rob).- Les aléas de la participation des habitants à la gouvernance urbaine en Europe.- Les
Annales de la recherche urbainen° 80-81, 1998 pp. 75-83, p. 75
7
la non représentation des étrangers non communautaires. La gouvernance urbaine ne
peut guère apporter de réponses à ces défaillances qu’elle n’a pas engendrées mais à
l’heure des débats sur une possible relance d’une Europe politique la gouvernance n’estelle pas une opportunité pour tenter d’innover en ces domaines. En premier lieu, ne
conviendrait-il pas de réformer les mécanismes de la démocratie représentative ou de
délégation en rétablissant l’équilibre en faveur des territoires urbains, en faveur des
femmes qui jouent un rôle de plus en plus importants dans les territoires les plus touchés
par les mécanismes de fragmentation urbaine, et en faveur des populations étrangères non
communautaires qui y résident principalement et dont l’Europe et sa démographie
vieillisante aura de plus en plus besoin. De manière analogue, ne conviendrait-il pas de
rétablir la transparence dans les affaires publiques et les mécanismes de contrôle des
processus de décision en renforçant la séparation des pouvoirs au niveau local et leur
équilibre ainsi qu’en simplifiant et en clarifiant les responsabilités entre les échelons
politiques (subsidiarité).
3.5 Cela étant dit, on peut cependant se demander si les formes de gouvernance dans le cadre
d’une évolution vers des économies de services et de l’immatériel n’offrent pas une voie
possible à l’émergence de pratiques de démocratie participative d’une autre nature. La
démocratie participative pose problème en ce qu’elle est moins aujourd’hui l’objet de
revendications comme ce fût le cas, il y a quelques décennies où le thème de la
participation (l’empowerment) en tant qu’accès et partage du pouvoir politique était plus
porté en étendard qu’un objet concédé, voire octroyé et instrumentalisé pour d’autres fins
par les pouvoirs en place. Compte tenu des mécanismes de fragmentation sociale et
spatiale à l’œuvre dans toutes les métropoles et régions urbaines, cette offre participative
embraie mal sur des populations et des groupes sociaux qui s'organisent d'une autre
manière, à travers un certain nombre de réseaux en voie d’expansion souvent stigmatisés
(réseaux communautaires, religieux, intégristes ou encore maffieux ce que je qualifie
d’économie de braconnage) mais des réseaux qui reposent aussi sur des mécanismes de
solidarité primaire, des liens de solidarité de proximité qu'il faudrait un peu mieux prendre
en compte. (Peter Marden)
3.6 Il semble nécessaire d’aller plus loin en réfléchissant à cette généralisation de la coproduction des biens et des services, des activités et des informations dans les sociétés
contemporaines. Aujourd’hui, la plupart des services dits aux usagers, aux clients, aux
ayant-droits, aux consommateurs sont des services qui nécessitent la participation active
de ceux-ci pour exister. Si l’on parle de «gouvernance», c’est précisément parce que
l’acteur «gouvernement» qu’il soit étatique ou local n’est plus en mesure de gouverner seul
(s’il l’a été un jour) et qu’il doit composer et coproduire avec d’autres acteurs et partenaires.
Cela suppose bien évidemment la conduite de processus et de procédures capables
d’intégrer des actions (en associant nécessairement une grande diversité d’acteurs) et de
gouverner les interfaces. En quelque sorte, il s’agit de gouverner des réseaux.
3.7 Nul doute qu’en la matière, la démocratie représentative seule compte tenu des
insuffisances soulignées plus haut est d’une efficacité limitée. Plutôt que de recourir à la
notion de démocratie participative, il faut examiner ce que pourrait être une démocratie qu’à
défaut de qualificatifs plus appropriés on appellera… démocratie contractuelle. Il ne s’agit
pas ici de substituer les formules conventionnelles aux principes d’élaboration
démocratique des décisions mais bien de voir comment ces formules peuvent féconder les
approches démocratiques à un moment privilégié où, à l’échelle européenne et mondiale,
on assiste à une modification profonde des frontières entre les champs de compétence et
de pouvoir. Il s’agit de trouver une forme démocratique adéquate et efficace capable aussi
d’inscrire les transformations qui ont cours dans nos sociétés pour donner toute leur place
aux acteurs qui occupent ce territoire des frontières où s’invente la ville.
4 - Conclusion
4.1 Les sociétés européennes, comme les autres sociétés «post-industrielles» dans le monde
mais aussi comme les pays en voie de développement, doivent affronter des défis qui
s’enracinent dans les trois sphères d’activités identifiées par le rapport Brundtland
(Commission mondiale sur l’environnement, 1987) : sphère économique, sphère sociale,
sphère environnementale.
8
4.2 Le premier défi concerne la sphère économique. Dans un contexte de mondialisation
accélérée et de compétition ouverte généralisée, les économies de vieille industrie doivent
se positionner sur les secteurs à très hautes valeurs ajoutées incorporant du travail très
qualifié. Elles doivent se «débarrasser» en quelque sorte des secteurs moins compétitifs
dans le secteur concurrentiel faisant appel à de la main d’œuvre moins qualifiée. Sans
compter que la délocalisation vers les pays asiatiques (Chine, Inde) touche désormais des
emplois hautement qualifiés notamment dans le secteur de la recherche fondamentale et
de la recherche développement. Dès lors, que faire de ces secteurs et surtout de ces
populations ? Quelle est «l’utilité» sociale des populations les plus pauvres dans des
économies post-industrielles ouvertes et extraverties (prédominance de la base
exportatrice sur la base domestique –Sombart 1916) ? L’insertion de ces personnes
faiblement qualifiées est-elle possible dans cette base domestique, non délocalisable (cf.
les 17 gisements d’emplois de la Commission européenne 6) dont il faut trouver les moyens
de son financement ? Comment réguler la concurrence entre les villes et les régions
urbaines pour attirer et capter les flux de ressources (idées, investissements publics et
privés, nationaux et internationaux, personnes qualifiées, ménages disposant de
ressources et en particulier les retraités, etc.) ? Une recherche doit être engagée d’urgence
dans les villes et les régions urbaines sur les grandes tendances économiques à l’œuvre
(développement de l’économie de services, des services à la personne, de l’économie
immatérielle, etc.) et sur leur conséquences en matière de distribution dans l’espace des
facteurs de production (capital et travail). Notamment il y a une réflexion à conduire sur le
télétravail, la téléactivité et le travail mobile en lien avec l’économie immatérielle à haute
valeur ajoutée, une thématique étrangement absente de la plupart des rapports sur le
développement des territoires. 7
4.3 Le second défi concerne le système de reproduction sociale. Face aux défis
économiques précédents, la réponse institutionnelle (du type Etat-providence) a atteint des
limites, redoublées par le laminage et la déstructuration des systèmes de solidarité
traditionnels. Les systèmes de distribution et de redistribution monétaires, publics et privés,
sont désormais à flux tendus et dans l’incapacité d’assurer la reproduction sociale sur une
base élargie. Compte tenu des niveaux de consommation moyens atteints dans les
sociétés occidentales, un salaire ne suffit plus à assurer la reproduction de la force de
travail d’un actif et de sa famille. Critique des prélèvements fiscaux et des systèmes de
redistribution aidant, on assiste ainsi à une réduction globale de la capillarité des systèmes
économico-sociaux ce qui explique les difficultés de diffusion de toute reprise économique
au sein de la société (faible ruissellement de la croissance et faibles effets d’entraînement).
Par ailleurs, la fragmentation sociale des territoires et l’affaiblissement des mécanismes de
solidarité institutionnelle renvoient les individus et les groupes à des mécanismes de
solidarité communautaire, souvent sur une base ethnique ou géographique avec un risque
d’instrumentation politique et de nouvelle balkanisation des territoires (qu’il s’agisse des
communautés closes «gated communities» de classes sociales aisées, qu’il s’agisse des
communautés dites «ethniques»). 8 Ajoutons à cela que l’évolution démographique des
pays européens (vieillissement et non reproduction des classes d’âge) et la dégradation
accélérée des conditions de vie dans une partie de la planète réchauffement climatique
aidant (cf. Afrique et la pénurie d’eau potable) conduiront au renforcement de flux
migratoires vers le Nord de la planète, sans commune mesure avec ceux que nous avons
connus jusqu’ici.
4.4 Le troisième défi est celui des enjeux territoriaux au sein de la sphère environnementale.
Si, en Europe, on assiste à une réduction des écarts de développement entre les pays et
6-
7-
8-
COMMISSION EUROPEENNE (1995).- Les initiatives de développement et d’emploi. Enquête dans l’Union
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française. Rapport au premier ministre.
MARDEN P (2003).- The Decline of Politics. Governance, Globalization and Public Sphere.- Ashgate.
9
les régions, la fragmentation sociale s’accroît au sein des territoires urbains 9 en se
doublant d’un défi environnemental majeur : épuisement des ressources non
renouvelables, pollution et dégradation des éco-systèmes urbains, augmentation de
l’empreinte écologique («ecological footprint») avec l’exploitation grandissante des
ressources naturelles renouvelables, amplification des risques naturels et sociaux. Un
changement de paradigme doit être envisagé mettant en jeu les rapports de l’espace et
du temps. En raison du développement des technologies de transport (automobile, avion)
et sa démocratisation (curieuse formulation), pour une même durée de déplacement,
l’espace parcouru et consommé augmente. Tout cela se paie, sans être comptabilisé en
termes de PIB, par une destruction massive de ressources non renouvelables (air, eau,
énergies fossiles) avec des effets non négligeable sur l’attractivité des villes et des régions
(pollutions de l’air et de l’eau, sans oublier la pollution par les ondes acoustiques,
vibrations, ondes électro-magnétiques) face à des entreprises de plus en plus exigeantes
compte tenu des enjeux mondiaux. Une recherche devrait être conduite en ce domaine
compte tenu des mutations économiques en cours (notamment dématérialisation)
permettant de repenser la question de la mobilité (cf. télétravail et téléactivité).
4.5 Mais alors que le rapport Brundtland prône une interaction entre ces sphères séparées en
proposant de les réencastrer les unes dans les autres, il ne mentionne pas suffisamment le
fait que ce réencastrement ne peut se faire spontanément par le marché et qu’il y faut
l’intervention du politique et une intervention politique d’une autre nature que celle à
laquelle nous avons été habitués. En fait, le principal enjeu pour les sociétés dites
«développées» réside dans leur capacité de recréer des interactions entre ces trois
sphères d’activités et donc de construire des coalitions socio-politiques en mesure
d’accepter et de nourrir les nouveaux compromis sociétaux nécessaires. C’est peut-être
cela la gouvernance (c’était le quatrième volet de la communication de l’UE en
1997« Cadre d’action pour un développement urbain soutenable dans l’Union
européenne ») et les régions urbaines sont peut-être les seules à offrir les opportunités de
la mettre en œuvre dans cette quête improbable des objectifs de Lisbonne en 2010. Il est
parfois des relectures utiles.
Bibliographie
ATKINSON (Rob).- Les aléas de la participation des habitants à la gouvernance
urbaine en Europe.- Les Annales de la recherche urbainen° 80-81, 1998 pp. 75-83, p.
75
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urban development and urban governance.- in Beaumont J., Musterd S
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9-
Voir les rapports successifs de la Commission européenne sur la cohésion économique et sociale.
10
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