Dispositif de fidélisation, programme de fidélisation, marketing

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Fidélisation, CRM, marketing relationnel, me too … que retenir de ce
brouhaha ?
La fidélisation est aujourd’hui un terme souvent galvaudé. Il est donc difficile de bien
cerner le sujet, ses enjeux, ses impacts et d’avoir de la visibilité sur la démarche à
adopter.
Un sujet à la mode et pourtant incontournable
En premier lieu, comment peut-on définir la fidélisation ? (Fig. 1). Un client fidèle est un
client qui, face à une alternative d’offre, décide d’acheter à nouveau dans la marque ou
dans l’entreprise. Cette fidélité est due à la relation de confiance que le consommateur
peut avoir avec une entreprise, une marque ou un produit. La fidélisation consiste donc
pour l’entreprise à mettre en œuvre une stratégie permettant d’établir cette relation
dans la durée afin de développer la « part client » et allonger la durée de sa vie. Ainsi,
l’enjeu est de dépasser les critères usuels de choix du client et de se placer dans son
esprit comme incontournable dans son processus d’achat. Toutefois, il faut avoir
conscience que l’entreprise et le client n’abordent pas la fidélisation sous le même
angle. Quand l’entreprise raisonne « client actif, durée de vie, panier moyen, taux de
nourriture … », le client lui pense « qualité de l’accueil, valorisation, avantages,
satisfaction, traitement des réclamations … ».
Les enjeux de la fidélisation
La fidélisation a un véritable effet de levier sur la rentabilité de l’entreprise (Fig. 2). Les
études réalisées par le Gartner Group démontrent qu’une augmentation de 1% du taux
de rétention génère en moyenne une augmentation de 8% des bénéfices de
l’entreprise. En effet, la confiance acquise par le client fidèle et sa meilleure
connaissance des offres proposées augmentent sa fréquence d’achat, son panier
moyen (un client affilié au programme de fidélisation de Casino dépense en moyenne
1,9 fois plus qu’un non porteur) et son taux de nourriture qui peut augmenter de 2% à
8%. La fidélisation permet également de rentabiliser la conquête et de compenser
l’évasion structurelle des clients. D’un point de vue qualitatif, la fidélisation contribue
également à l’image de l’entreprise, à sa capacité de différenciation et à l’implication
des employés dans les enjeux économiques de l’entreprise.
Comment aborder la fidélisation ?
Un postulat évident mais parfois oublié, la stratégie de fidélisation doit être élaborée sur
la base d’une double approche : les attentes des clients et les enjeux de l’entreprise.
Ainsi, tous les clients ne sont pas fidélisables ni à fidéliser. La connaissance des
critères liant l’entreprise à ses clients (Fig. 3) est de fait majeure et est un préalable à
leur qualification permettant de segmenter. Pilier de la stratégie de l’entreprise, la
segmentation n’est pas une fin en soi, mais un moyen au service d’objectifs précis. Elle
est donc fondée non sur les possibilités techniques des outils, mais bien sur les
objectifs stratégiques de l’entreprise. Que la segmentation soit abordée par la valeur –
sur la base de la loi de Pareto - ou par le comportement - segmentation multi-critères -,
elle permet d’identifier les clients à fidéliser et de définir une stratégie propre à chaque
segment. Enfin, il s’agit de fidéliser au bon moment, en tenant compte de la maturité de
l’entreprise, du cycle de vie du client et de la croissance du marché.
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Ou les programmes de fidélisation se situent-ils ?
La fidélisation permet de transférer la relation avec le client sur un autre plan que celui
de la transaction commerciale pure. Or, la plupart des programmes dits de fidélisation
sont essentiellement basés sur de la récompense transactionnelle. Il s’agit là en fait
d’une approche promotionnelle très élaborée, et non de fidélisation. En effet, dès qu’un
concurrent propose un programme de fidélisation plus attractif, le client part chez le
concurrent. C’est ce qui c’est passé quand Leclerc a lancé les « tickets E. Leclerc ».
L’enseigne Carrefour, malgré son programme de fidélisation, a vu un nombre significatif
de clients se déplacer vers Leclerc. A tel point que Carrefour a dû repenser dans
l’urgence son offre de « fidélisation » dans le but de reconquérir ses anciens clients.
Mettre en place un système de récompense n’est pas incompatible avec une stratégie
de fidélisation, à condition que cette offre quantitative soit couplée à des offres
qualitatives à valeur d’usage et d’image. Un des meilleurs exemples en la matière est le
dispositif de fidélisation de Thalys, « Cybelis ».
Comment mettre en place une stratégie de fidélisation ?
Une démarche de fidélisation nécessite une réflexion sur 5 leviers : le
marketing/juridique, les canaux, la technologie, la finance et les hommes. Le marketing
va, pour chaque segment identifié, se concentrer sur l’élaboration de l’offre en
respectant 3 notions clés : la différenciation reposant sur le duo « valeur d’usage/valeur
d’image », la récurrence et l’emblématique liée aux valeurs de la marque. La législation
étant spécifique et complexe, il est indispensable de valider le détail des offres auprès
d’un service juridique spécialisé. Une célèbre enseigne française de grande distribution
s’étant contentée de son service juridique interne a dû jeter plusieurs millions de
catalogues récompenses car elle avait totalement ignoré la loi sur les ventes à primes.
Aborder la fidélisation sous l’angle multicanal permet de placer le client au cœur de
l’entreprise. Il s’agit de mettre en cohérence le canal d’interaction et la valeur
stratégique du client. On va ainsi réserver le face à face pour les cibles stratégiques et
orienter les clients à plus faible valeur ajoutée vers le média le plus économique. Les
canaux sont donc transversaux et ciblés par segment de clientèle, les équipes de
ventes sont dimensionnées selon les segments, les ressources commerciales sont
allouées en fonction de la valeur ajoutée produite et de leur coût, les canaux de vente
sont pilotés par un compte de résultat par canal. La technologie est un élément
essentiel de la mise en œuvre d’une stratégie de fidélisation. En effet, la connaissance
client est la pierre angulaire de la fidélisation et doit sans cesse être enrichie pour
optimiser les campagnes marketing, améliorer les ventes croisées, optimiser l’efficacité
des canaux de distribution. La fidélisation s’appuie donc en priorité sur les outils du
CRM : base de données marketing clients, datamining, gestion de campagnes
marketing, centre de contact clients, internet. Dans tous les cas, l’approche
technologique doit rester le support de la philosophie et des objectifs de la démarche de
fidélisation. Compte tenu des investissements, l’aspect financier est primordial et
nécessite d’inscrire la stratégie de fidélisation dans la durée et de raisonner en compte
d’exploitation (Fig. 4). L’investissement moyen est estimé entre 0,35€ et 0,5€ par client
pour l’élaboration du dispositif de fidélisation, entre 1,5K€ et 2,3K€ par point de vente
pour la technologie et entre 10€ et 12€ par client en année 1 en ce qui concerne les
coûts d’exploitation, et entre 7,5€ et 9€/client en année 2. Quels gains peut-on
espérer ? Le seuil de rentabilité est généralement estimé entre 0,5% et 2,5% et le taux
de pression entre 1% et 4% en année 1 et entre 1% et 2,5% en année 2. Enfin, pour
assurer le succès d’une stratégie de fidélisation, l’ensemble des directions et des
fonctions de l’entreprise doit être impliqué. De fait, considérer le client comme un actif
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de l’entreprise, en l’intégrant dans le processus normal de planification et de suivi,
permet de motiver plus facilement l’interne (Fig. 5).
Quelle démarche méthodologique adopter ?
La mise en place d’une stratégie de fidélisation se déroule en 5 phases (Fig. 6) : étude
de cadrage/opportunité, conception marketing et technique, réalisation marketing et
technique, lancement et exploitation marketing, audit et optimisation. Trois éléments
clés sont à retenir. En premier lieu, la démarche est itérative, et le retour d’expérience
issu de la dernière phase d’audit doit permettre l’enrichissement et l’évolution de la
stratégie de fidélisation. Le deuxième élément clé consiste à repenser l’organisation de
l’entreprise autour du client aussi bien au niveau du marketing que des systèmes
d’information et de l’exploitation. Enfin, il est indispensable de ne pas négliger
l’accompagnement du changement, et ce à tous les niveaux de l’entreprise, afin que la
fidélisation s’inscrive dans sa culture.
Les facteurs clés de succès
Le premier facteur clé de succès consiste à considérer la fidélisation comme étant au
service de la stratégie globale de l’entreprise. Développer une vision partagée du
modèle au sein de l’entreprise, notamment en identifiant dans chaque département des
acteurs clés porteurs du projet est indispensable à la réussite de la démarche. Ceci
nécessite donc au départ une forte implication du top management, un précepte qui
semble évident, mais pourtant rarement appliqué.
Respecter le contrat de base
Le contrat de base est l’offre ou le service minimum attendu par les clients. Là encore
une évidence, mais il ne sert à rien de se lancer dans une stratégie de fidélisation si le
contrat de base passé avec le client n’est pas respecté - c’est à dire si la promesse liée
à la marque n’est pas délivrée. Fidéliser signifie tout d’abord de bien assurer les
fondamentaux de son activité et de répondre aux besoins « primaires » du
consommateur. En effet, peut-on être fidèle à un magasin si les produits qui composent
le cœur de l’achat sont systématiquement en rupture ? En revanche, être cohérent sur
les fondamentaux de son secteur est nécessaire, mais pas suffisant. En effet, ces
fondamentaux sont d’une part de mieux en mieux servis par les acteurs du marché, et
d’autre part ils deviennent souvent un droit acquis pour le client. Faire revenir le
consommateur devient donc plus difficile.
Réinventer l’offre en permanence
La démarche de fidélisation doit en permanence se remettre en question pour capter
l’attention du client, ce qui implique une grande souplesse de la part des hommes mais
également des systèmes pour pouvoir s’adapter à un environnement évolutif. Il est donc
majeur, en termes de différenciation, d’avoir à l’esprit que l’offre à valeur ajoutée
d’aujourd’hui est un des fondamentaux de demain. Quand Darty a lancé le service
après-vente, l’enseigne s’est fortement différenciée de ses concurrents. Aujourd’hui,
tous les concurrents proposent ce service, il s’est banalisé et fait partie du contrat de
base. Par ailleurs, si l’usure est généralement lente pour les médias traditionnels, il n’en
va pas de même en ce qui concerne les canaux utilisés en matière de fidélisation. Les
centres d’appels constatent que leurs scripts doivent être renouvelés sur une base
mensuelle et la fréquence des visites sur Internet dépend de la promesse de
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changement. Cependant, vouloir innover engendre de nouvelles contraintes et risques,
notamment celui de la cannibalisation, qui peut être considérée comme une
concurrence interne. Seules la synchronisation et l’intégration des actions permettent
d’éviter ce piège, tout en assurant la cohérence du discours entre le télé conseiller,
Internet, les mailings et la publicité grands médias.
Assurer une relation client durable
C’est là que la connaissance en profondeur du client prend toute sa dimension. Tout
message a sa durée de vie. Un déménagement, une naissance peuvent être l’occasion
de proposer des services précis. Mais adressés tardivement, ils deviennent polluants et
sans objet. Au-delà du contenu et du canal, le moment nécessite également la maîtrise
des comportements et des habitudes des clients. Une base de données marketing
hautement qualifiée est bien la clé de voûte d’une relation durable à valeur ajoutée pour
l’entreprise. Outil d’aide à la décision et plate forme d’actions, la base de données est
une mémoire pour le marketing, un outil d’aide à la précision et à la qualité, et enfin, un
outil de business intelligence. Attention cependant à ce que la base de données soit
facilement exploitable, en créant notamment des datamart spécialisés selon les besoins
des différents services concernés. Elaborer une gamme d’offres basées sur le cycle de
vie des clients est également un vecteur majeur de la pérennité de la relation client.
Cette démarche est encore peu usitée, à l’exception du monde bancaire qui l’a très bien
intégrée, notamment au travers de son concept de package (Fig. 7 & 8). Enfin,
récompenser, animer et communiquer forment les fondements de toute démarche de
fidélisation. L’approche doit rester souple, être personnalisée, avec des avantages
aussi bien quantitatifs que qualitatifs, permanents que ponctuels, mixant communication
régulière pour la relation et ponctuelle pour l’information et les ventes. Toutefois, on
peut distinguer deux limites essentielles à la fidélisation : celle liée à la démarche en
elle-même qui peut entraîner des biais, et celle liée à sa mise en œuvre et à son suivi,
notamment de par l’importance de l’informatique. Un exemple de biais, dans le secteur
bancaire : la mise en place à outrance de plate formes multi canal centralisées a amené
les conseillers clientèle à communiquer leur numéro de téléphone mobile à certains de
leurs meilleurs clients afin de préserver la qualité de la relation client.
Equilibrer l’interne et l’externe
La bonne offre, au bon client, au bon moment, c’est cela l’équilibre. C’est adapter et
faire correspondre les ressources aux clients. Associer étroitement l’interne et le réseau
à la démarche de fidélisation est un des maillons clés du succès. En effet, les
opérations gagnent en efficacité lorsqu’elles sont élaborées avec l’interne et le réseau,
relayées par ces derniers qui, par ailleurs, font office de baromètre terrain. Il faut
également adapter le média à la taille et au profil des clients. Ceci implique de connaître
à la fois leur potentiel et les coûts de chacun des médias. La stratégie multi canal,
basée sur ces données, permet de définir l’approche qui offre le meilleur contact tout en
confortant la relation client. Enfin, les canaux de distribution sont généralement de bons
vecteurs pour véhiculer les messages dans un sens, mais qu’en est-il des retours ?
L’interactivité est déterminante. Ainsi, les démarches, de même que les systèmes,
doivent être élaborés pour soutenir et favoriser le dialogue.
Evaluer les performances
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Par manque de visibilité 40% à 80% des opportunités générées par les campagnes
marketing ne donnent rien. Le suivi et l’analyse de ces campagnes représentent une
première étape cruciale dans le processus de génération d’opportunités de qualité. Il
est donc indispensable de se doter des moyens nécessaires pour obtenir les éléments
de réponse indispensables au pilotage de la stratégie de fidélisation : notamment le
taux d’acquisition, le taux de réponse par canal, le classement des campagnes, le
pourcentage de réussite des ventes croisées ou additionnelles, le taux de fréquence et
surtout l’évaluation de la Life Time Value (potentiel client sur le moyen et long terme). Il
est également majeur de mesurer le coût d’opportunité qui est une des données les
plus importantes après les mesures de performance. L’idéal étant, par le biais de
certaines applications analytiques, de gérer le processus qui consiste à suivre
l’opportunité depuis son origine jusqu’à la vente finale. Toutefois,
Conclusion
La fidélisation est donc un sujet plus complexe qu’il ne paraît de prime abord,
nécessitant une organisation adaptée, une implication de l’entreprise tout entière et des
moyens technologiques à la hauteur des ambitions stratégiques et économiques. De
nombreux échecs, tant stratégiques que financiers, sont souvent liés à une mise en
œuvre partielle ou à des moyens inadaptés. C’est le cas de Safeway qui a dû
abandonner sa démarche de fidélisation, malgré une offre concurrentielle forte de la
part de Tesco (Fig. 9) et de Sainsbury. De par sa capacité à consolider des informations
sur les clients, la fidélisation sert naturellement de réservoir et de vecteur à des actions
de gestion de la relation client plus larges. Enfin, il est important de garder en mémoire
que l’on peut faire de la gestion de la relation client sans SAP, mais pas sans des
interlocuteurs clients aimables et à leur écoute.
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