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Section 2 - Les nouvelles contraintes pesant sur la politique économique
Le progrès économique et social est un objectif affirmé par toutes les politiques
économiques. Dans la pratique, il apparaît fréquemment le "carré magique" des incompatibilités
qui veut qu'une politique économique engendrant simultanément la croissance, le plein-emploi, la
stabilité des prix et l'équilibre extérieur soit difficile à concrétiser. Aujourd'hui, la politique
économique connaît une forte remise en cause en raison de la persistance d'un fort chômage
notamment dans plusieurs pays européens. En France, l'existence d'un taux de chômage élevé
(aujourd’hui aux environs de 10% de la population active) et d'une population d'exclus ou de
marginalisés d'environ 6-7 millions entraîne une remise en cause des politiques économiques. La
situation actuelle s'oppose à celle des années 60 où existait un quasi plein-emploi et où l'on pensait
qu'il était possible d'opérer un réglage fin de la conjoncture macro-économique, c'est-à-dire de
moduler l'activisme de la politique économique en fonction de l'activité économique agrégée.
Dans les faits, il s'agissait de relancer la demande globale par la politique budgétaire et
fiscale ou par la politique monétaire lorsque l'économie montrait des signes d'essoufflement ou au
contraire, de pratiquer des politiques restrictives en cas d'un dynamisme économique trop soutenu
engendrant des signes de surchauffe. En France, par exemple, pour caractériser ce doute à l'égard de
la politique économique, on a parlé de pensée unique pour signifier que toute liberté de choix en
matière de politique économique était illusoire et que la France n'avait pas d'autre alternative que
d'appliquer une gestion suiviste de la monnaie calée sur la politique de la Bundesbank (situation
avant l'entrée en vigueur de la monnaie unique). Mais cette défiance n'est pas spécifique à la France.
Ainsi, au Japon, avant le début de la crise asiatique, plus précisément dès les années 90, les
pouvoirs publics japonais ont essayé de sortir le pays de la grave récession qui le touchait, après
l'éclatement de la bulle spéculative des années 80. Ils ont agi en recourant aux instruments habituels
de régulation de la demande, notamment l'outil budgétaire. En 1995, leur déficit atteignait plus de
7% du PIB. Cela n'a pas eu d'effet majeur sur la croissance économique nipponne puisque en 1996,
le taux de croissance s'élevait à 3% et atteignait moins de 1% en 1997. Et donc devant l'incapacité
de tant de pays à soutenir le rythme de leur activité et à faire reculer le chômage, on en est venu à se
pose la question de l'inefficacité actuelle de la politique économique.
La réponse doit être nuancée : ainsi, dans les années 60, en France, le faible chômage était
dû à une politique monétaire ouvertement inflationniste, malgré la rigueur budgétaire, qui a abouti à
une accoutumance des agents économiques à l'inflation, dont le pays aura le plus grand mal à se
défaire dans les années 80. Il s'en affranchira en acceptant un chômage durable et élevé.
Inversement, le thème actuel de l'impossibilité d'une politique macro-économique cherchant à
aménager les évolutions économiques ne se retrouve pas d'autres pays. Ainsi, aux Etats - Unis,
l'expérience contemporaine amène plutôt à constater l'efficacité de la politique économique, tant
budgétaire que monétaire.