Kayes : une de régions les plus touchées par le VIH/Sida
Le cercle de Kayes
, principalement connu pour son important flux d’émigration vers l’étranger, et
notamment l’Ile-de-France, est aussi une région carrefour d’immigration. Étalée sur trois frontières
(Sénégal, Mauritanie et Guinée), elle est marquée par un important mouvement humain. Ses mines
d’or principalement concentrées dans la commune de Sadiola et Yatela attirent de la main d’oeuvre
non spécialisée en provenance des pays limitrophes ainsi que la prostitution. Il existe aussi des placers
d’orpaillage à Kéniéba où s’effectue l’exploitation traditionnelle d’or et une usine d’égrainage du
coton à Kita. Lieu d’attractions économiques et de concentration humaine, plaque tournante des
échanges démographiques, économiques et routiers entre les pays du Bassin du Fleuve Sénégal, la
Région de Kayes fait face actuellement à un nombre croissant de nouveaux cas de VIH
.
Faute de centralisation des données épidémiologiques, les chiffres de l’Hôpital Régional de Kayes ne
sont pas exhaustifs, mais ils restent néanmoins représentatifs de l’évolution de l’épidémie.
À l’Hôpital Régional Fousseyni Daou, le nombre de cas est passé de 8 en 1996 à 139 cas en 1999.
Actuellement, la file active est de 526 patients, dont plusieurs enfants. Depuis quelques mois, cinq
patients de Kayes sont suivis à Bamako. Pour la grande majorité des malades, se rendre à la capitale
une fois par mois est impossible. Affaiblis par la maladie ils doivent, en plus, supporter des voyages
pénibles et coûteux et des frais pour les examens biologiques élevés. Il faut aussi avoir de la famille
sur place pour être hébergé, mais cela oblige à l’informer de la raison de ces déplacements : autant de
facteurs qui limitent ce recours thérapeutique, par ailleurs difficile à obtenir, vu l’offre limitée.
Le nombre de décès est équivalent à 10 % des personnes suivies (la file active) annuellement. Ces
chiffres ne représentent pas l’ensemble de la population, car l’accès au dépistage a été complexe. C’est
encore le cas au niveau hospitalier, notamment à cause de la pénurie de réactifs et de la défaillance du
plateau technique du laboratoire. A partir des tests effectués à l’hôpital, le taux de séropositivité était
de 13 % en 2002. Il faut noter que ces tests sont effectués essentiellement à titre de diagnostic chez les
personnes présentant des signes cliniques évocateurs ou compatibles au VIH.
Les femmes : davantage infectées et vulnérables
À Kayes, le taux d’infection chez les femmes est supérieur à celui des hommes (2,3 % contre 1,3 %) et
la classe d’âge la plus touchée est celle des 30-39 ans
. Si la morphologie et les situations
socioéconomiques de vulnérabilité apportent des explications notamment chez des « catégories » telles
que les « travailleuses du sexe », les vendeuses ambulantes et les jeunes « bonnes », il ne faut pas
oublier le biais méthodologique qui fait de chaque femme enceinte une personne « dépistable » en
puissance. Dans la file active de l’Hôpital Régional de Kayes, nombreuses sont les femmes qui ont
appris leur séropositivité lors d’une grossesse, sans que le mari soit forcément dépisté par la même
occasion. Si les femmes sont plus facilement dépistables et donc mieux suivies, ce biais
méthodologique peut renforcer la vulnérabilité et les rapports de pouvoirs asymétriques entre genres.
Cette fragilité « statutaire », qui dans certains cas peut être accrue par des facteurs socioculturels
(précarité, dépendance économique, statut juridique, religion et normes sexuelles régissant les rapports
La Région de Kayes est la première région administrative du Mali. Située à l’extrême Sud-Ouest du pays, elle
couvre une superficie de 120760 km2, limitée au Nord par la Mauritanie, à l’Ouest par le Sénégal, au Sud par la
Guinée et à l’Est par la deuxième région malienne (Koulikoro). Sa population est de 1.403.575 habitants, avec un
accroissement annuel de 2,3 %, un taux de mortalité égal à 11,4 % et un taux de natalité de 49,04 %. La
population est majoritairement musulmane. Région très enclavée, la liaison avec la capitale, distante environ de
300 km, se fait difficilement. Depuis la privatisation de la voie ferroviaire, les trajets sont devenus plus chers et
aléatoires. Une route, dont les derniers 200 km restent à achever, permet le transport routier depuis peu de temps.
Une liaison par voie aérienne est possible depuis plusieurs années, mais son coût (environ 500 euros) reste
prohibitif pour la grande majorité de Maliens.
Les zones frontalières représentent des « lieux à haut risque » pour le VIH, la tuberculose et le paludisme
partout dans le monde.
242 cas avérés sur un total de 681 cas.