
L’entrepreneur n’est pas l’inventeur ou le découvreur d’un bien mais celui qui tente d’introduire
une innovation. Pour cela, il doit surmonter plusieurs obstacles : proposer de nouvelles combinaisons
productives ou de nouvelles techniques commerciales ou encore présenter un nouveau produit, sans sa-
voir comment la situation se déroulera et en se heurtant parfois à des résistances. Il doit rompre avec les
automatismes existants et il doit lui-même aux habitudes de manière à pouvoir penser.
Il faut souligner que Schumpeter distingue quatre types d’entrepreneurs qui apparaissent succes-
sivement au cours de l’histoire :
Le fabricant-commerçant qui détient les moyens de production – le capitaliste – et sa position est
souvent héréditaire car le propriétaire d’une affaire va le transmettre dee génération en génération ;
c’est donc la propriété qui est transmise, seule condition pour exercer la fonction d’entrepreneur. Il oc-
cupe, par ailleurs, toutes les fonctions au sein de l’entreprise.
Le capitaine d’industrie n’est plus le représentant de ses propres intérêts ou de ceux de sa fa-
mille ; il agit par influence personnelle. Soit il possède l’entreprise, soit il est actionnaire majoritaire
mais il peut aussi être président d’un conseil d’administration ou occuper un autre type de poste. Il peut
n’avoir aucune relation directe soit avec l’entreprise soit avec la main d’œuvre ce qui ne l’empêche pas
de diriger la politique d’une ou plusieurs entreprises.
Le directeur est avant tout un salarié de l’entreprise si bien qu’il peut, à l’intérieur même de
l’entreprise, conduire celle-ci et innover. Il n’est pas capitaliste et n’assume donc pas dans ce cas les
risques techniques et commerciaux. Il recherche des revenus élevés mais son principal souci sera le goût
du travail bien fait, la responsabilité, la recherche d’une reconnaissance tant auprès de ses collabora-
teurs que du public.
Le fondateur est seulement motivé par le « lancement » de nouvelles affaires et peut, une fois
« lancées », s’en détourner.
Par ailleurs, les consommateurs et les collaborateurs ne sont pas toujours prêts à modifier leur
comportement ; et les concurrents, menacés par la nouveauté, chercheront à empêcher cette innovation
nuisant à leurs intérêts. C’est ce non-conformisme de l’entrepreneur qui permet à une économie
d’évoluer.
L’entrepreneur n’est donc plus un homo-oeconomicus, dominé par le calcul rationnel. Il n’est pas
non plus au service du consommateur qui exprime ses besoins et cherche à obtenir une satisfaction
maximale. Il n’est pas non plus celui qui cherche à obtenir le profit maximal. Il serait davantage celui qui
crée et cela pour des motifs irrationnels : volonté de puissance, plaisir de créer…
Toutefois, l’action de l’entrepreneur est principalement motivé et guidé par la réalisation de béné-
fices obtenus par les risques pris. La conception du profit défendue par Schumpeter est originale. con-
trairement aux Classiques qui font du profit la contrepartie des efforts productifs (capital et travail) de
l’entrepreneur ou à la conception marxiste qui place l’origine du profit dans la confiscation de la plus-
value (appropriation par le capitaliste d’une partie de la richesse créée par le prolétariat), Schumpeter
pense que le profit est la sanction de l’initiative créatrice et des risques pris par l’entrepreneur. Les pro-
fits seront d’autant plus importants et durables que l’entrepreneur est capable d’éliminer toute forme de
concurrence directe et immédiate.
L’entrepreneur a donc un rôle dynamisant : « le rôle de l’entrepreneur consiste à réformer ou à
révolutionner la routine de production en exploitant une invention, ou plus généralement, une possibilité
technique inédite » (Schumpeter). L’entrepreneur cherche donc à faire autrement c'est-à-dire produire
autrement, vendre autrement, produire autre chose ou vendre chose. Schumpeter développe le processus
de « concurrence destructrice » dans la mesure où ces nouvelles façons de procéder vont engendrer du
« gaspillage social ». Des activités, des emplois, des machines sont délaissés et remplacés, des dépenses
–souvent inutiles – seront réalisées : frais de publicité, achat de brevets sans exploitation seulement dans
le but d’étouffer les nouvelles méthodes de production, …