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C'est ainsi que dans le domaine des marchés, la Securities and Exchange Commission (SEC) s'occupe
des marchés au comptant et la Commodity Futures Trading Commission (CFTC) des marchés
dérivés. La loi a ajouté à la complexité du paysage institutionnel en créant deux nouvelles
institutions: le Financial Stability Oversight Council, qui est le Conseil du risque systémique, et
l'Agence de protection financière des consommateurs (Consumer Financial Protection Agency).
Les principes pour sécuriser les marchés dérivés issus de la titrisation des crédits sont simples. Il ne
faut titriser que des crédits homogènes, donc standardisés, en s'assurant que les emprunteurs ont été
évalués sur la base de leurs capacités à rembourser les prêts. Cela implique d'interdire le démarchage
des ménages par des officines sans scrupule. C'est le rôle de la nouvelle Agence de protection
financière des consommateurs. Il faut aussi que les pools de crédit constitués par les arrangeurs pour
émettre les titres en contrepartie aient des risques compréhensibles par les investisseurs
institutionnels qui les achètent. La composition de ces pools doit donc être divulguée. Les
empilements de titrisation (de type CDO, Collateralized Debt Obligation, des produits toxiques qui
ont été au coeur de la crise des subprime) sans utilité économique autre que les commissions de ceux
qui les fabriquent doivent être interdits. Les banques qui vendent les portefeuilles de titres sur les
crédits doivent retenir au moins 5% du risque de crédit. Les vendeurs de produits non standardisés
doivent couvrir les montants à vendre par une garantie plus élevée.
Les dérivés de crédit et les autres produits financiers qui sont vendus de gré à gré, entre
établissements financiers, doivent, autant que faire se peut, être compensés par des chambres de
compensation centralisées. Mais le compromis qui a abouti à la loi Dodd-Frank a laissé de
nombreuses exemptions. Un grand nombre d'utilisateurs de dérivés de crédit en font partie, y
compris les hedge funds dans des opérations de couverture des risques. Mais les stratégies des fonds
étant construites de manière à combiner de multiples facteurs de risque, la distinction entre les
transactions pour couverture et celles pour spéculation est souvent impossible. Il est donc à craindre
que l'organisation centralisée des marchés dérivés soit largement contournée.
Concernant les acteurs des marchés, la loi américaine fait la distinction ambiguë entre les activités
bancaires de marché pour compte propre - pour la banque - et pour compte de tiers - pour les clients.
Elle incorpore la règle Volcker en interdisant aux banques les activités pour compte propre ainsi que
la possession, la promotion et l'investissement en capital dans les hedge funds. Mais elle n'introduit
aucune contrainte supplémentaire sur ceux-ci, si ce n'est l'obligation de s'enregistrer auprès de la
Securities and Exchange Commission (SEC) au-delà d'un seuil d'actifs sous gestion. Sinon, les
managers de fonds spéculatifs gardent toute liberté dans leurs rémunérations, les commissions
imposées aux investisseurs, leur domiciliation offshore et leurs leviers (*) . Les seules restrictions
concernent les fonds qui pourraient être considérés comme des entités à importance systémique par
le nouveau conseil de stabilité financière et seraient contrôlés plus strictement au titre de la
prévention du risque systémique.
Enfin, l'autorité de la SEC sur les agences de notation est accrue. Le but de la SEC est de banaliser les
agences auprès des investisseurs en abolissant toute mention faisant une référence statutaire aux
agences dans les exigences d'évaluation des produits financiers. L'objectif est ainsi de forcer les
investisseurs à faire leur propre évaluation des risques incorporés dans les produits qui leur sont
proposés.
Europe: une avancée partielle. Si la régulation financière américaine souffre de la fragmentation
institutionnelle, l'Europe est minée dans ce domaine, comme dans les autres, par les chasses gardées
nationales (voir pages 64-67). En ce qui concerne les marchés financiers, un organisme européen a été
créé, la European Securities and Markets Authority (ESMA).