Sophie Liotard Conférence d’économie (M. Cyrille Stevant) Fiche technique n°34 (conférence 12) Le modèle Mundell-Fleming En 1960, R.A Mundell et L.M. Flemming élargissent le diagramme IS-LM des Néo-keynésiens en y intégrant l’équilibre extérieur (= situation où la balance des paiements est en équilibre, c'est-àdire où le solde des transactions courantes est compensé par celui des mouvements de capitaux1). Le modèle permet d’analyser le rôle joué par la mobilité internationale des capitaux dans l’efficacité de la politique macroéconomique sous différents régimes de change (on présentera ici les changes fixes et flottants). Si les capitaux sont mobiles, en régime de taux fixes, la politique monétaire est inefficace alors que la politique budgétaire est efficace ; en régime de taux flottants, la politique monétaire est efficace et la politique budgétaire inefficace. i IS La courbe IS-LM, rappel: le revenu national (Y en abscisse) est déterminé en fonction du taux d’intérêt (i en ordonnée). L’équilibre réel est monétaire est réalisé quand les courbes du marché des biens (IS: Investment/Saving) et de la monnaie (LM: Liquidity/Money) se croisent. Les égalités I=S et L=M sont vérifiées pour un même couple taux d’intérêt, taux d’activité (i*,Y*). On obtient ainsi une modélisation des possibilités d’action sur la conjoncture par le biais des politiques budgétaire (influe sur IS) et/ou monétaire (influe sur LM). LM i* Y* Y Le modèle Mundell-Fleming lorsque les capitaux sont mobiles : Politique monétaire (influe sur LM) Politique budgétaire (influe sur IS) Changes fixes INEFFICACE: ↓ des taux d’intérêt, sortie de capitaux, dépréciation du taux de change, la Banque Centrale vend des devises, la masse monétaire ↓, ↑ taux intérêt, contraction de l’activité. => pas de politique discrétionnaire possible. (1) EFFICACE: (3) ↑ des taux d’intérêt (cf. ↑ de la demande de monnaie de transaction), éviction partielle sur l’investissement, mais ↑ des entrées de capitaux, appréciation du taux de change, la Banque Centrale achète des devises, ↑ de la masse monétaire, ↓ du taux d’intérêt, effet d’éviction annulé. Changes flottants EFFICACE: ↓ des taux d’intérêt, sortie de capitaux mais reprise de l’activité (2), ↑ des importations, déficit extérieur, dépréciation du taux de change, stimulation des exportations, ↓importations =second effet expansif. INEFFICACE: ↑ des taux d’intérêt, éviction sur l’investissement, ↑ entrée capitaux, appréciation du taux de change, ↓ des exportations, ↑ des importations, déficit extérieur, ↓ taux de change… (1) Le modèle Mundell-Fleming montre l’incompatibilité des trois objectifs que l’on peut assigner à une politique macroéconomique. On ne peut obtenir simultanément l’autonomie de la politique monétaire, la libre circulation des capitaux et la fixité des changes, c’est le triangle d’incompatibilité de Mundell ou de Padoa-Schioppa. 1 En tant que document comptable, la BP est toujours en équilibre, néanmoins on convient de parler de déficit lorsqu’il y a sortie nette de devises et d’excédent dans la situation inverse. 1 (2) L’efficacité directe de la politique monétaire comme outil de relance est conditionnée par 4 facteurs: - le niveau de départ du taux d’intérêt: il y a un taux d’intérêt minimum à partir duquel toute offre de monnaie supplémentaire part en thésaurisation (=encaisses oisives par opposition aux encaisses actives utilisées pour les transactions). En effet, le taux d’intérêt ne peut plus baisser, le cours des titres est à son maximum et les agents ont tendance à ne pas acheter d’obligations: la demande de monnaie de spéculation augmente. Il s’agit d’une situation de trappe à liquidité (c’est la situation dans laquelle se trouve le Japon actuellement). Pour Keynes, le taux d’intérêt est le prix de la renonciation à la liquidité (cf. la préférence des agents pour la liquidité) et il détermine ainsi le partage de l’épargne entre placements financiers et thésaurisation et non entre consommation et épargne. - la sensibilité de l’investissement au taux d’intérêt, mesuré par son élasticité (le cas extrême étant celui de l’accélérateur pur où IS est verticale, c'est-à-dire que l’investissement ne réagit pas aux variations du taux d’intérêt). - l’existence de capacités de productions inutilisées sinon la relance implique une reprise de l’inflation. - le niveau de départ du chômage. (3) La politique budgétaire de relance repose sur le multiplicateur Keynésien, lequel s’appuie sur plusieurs hypothèses: - des capacités de production en partie inutilisées (sinon, inflation), - des prix rigides, - un sous-emploi de type Keynésien (lié à l’insuffisance de la demande), - un taux d’intérêt constant, il n’y a donc pas d’effet d’éviction, - en économie ouverte le multiplicateur dépend non seulement de la propension marginale à consommer mais aussi de la propension marginale à importer (=les importations sont des fuites de revenus à court terme). Le cas de la zone euro: le taux de change n’est plus un objectif dans la mesure où les taux sont mobiles. La renonciation à la variable d’ajustement que représente le taux de change pose la question de savoir si la zone euro peut être qualifiée de zone monétaire optimale. Zone monétaire optimale (ZMO): il s’agit d’un ensemble de régions ou de pays dont les relations monétaires sont régies soit par des changes fixes soit une monnaie unique, tout en étant capables de répondre à des chocs réels ou nominaux. Une zone monétaire est qualifiée d’optimale si, lors de chocs asymétriques (=soit des chocs locaux soit des chocs communs mais dont les effets sont différenciés ou spécifiques à chaque membre, par opposition aux chocs symétriques qui sont des chocs communs ayant le même impact dans les différents pays) affectant la demande de produits ou l’offre d’un de ces pays, il existe un mécanisme d’ajustement permettant de résorber le choc rapidement. Remarque: dans le cas d’un pays isolé, si le choc est asymétrique, il peut être résorbé en modifiant le taux de change: une dévaluation ou une dépréciation peut permettre de relancer les exportations et limiter les importations. Dans une ZMO, trois variables d’ajustement sont à prendre en compte: - la mobilité des facteurs de production dont notamment celle du travail. Exemple: soit une zone monétaire entre les pays A et B. Si un choc de productivité positif affecte le pays B, la demande de produit se déplace alors vers du pays A vers le pays B. Un chômage et un déficit de la balance courante apparaissent dans le pays A alors que dans le pays B, la forte activité créé des tensions inflationnistes et un excédent de la balance courante. Si le facteur travail est mobile, le réajustement se fera par une migration des travailleurs du pays A vers le pays B. - les transferts budgétaires: si le pays B connaît un choc de productivité positif, un système de transferts de revenus de pays B vers le pays A permet d’amortir la récession dans le pays A. - la flexibilité des prix et salaires: le pays affecté par la récession peut relancer ses exportations en modifiant le taux de change réel par une baisse des salaires et des prix. Au regard de ces différents critères, on estime que la zone Euro n’est qu’imparfaitement une ZMO (pas de système de fédéralisme fiscal, prix et salaires relativement rigides, migrations intraeuropéennes limitées). Il appartient à la coordination des politiques budgétaires d’opérer un lissage de la conjoncture, mais cela n’est pas mis en œuvre actuellement. 2