Le tableau économique d`ensemble (TEE)

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Reconstruction et Trente Glorieuses
« Ne doit-on pas-on pas dire glorieuses les années qui ont fait passer la France de la vie
végétative traditionnelle aux modes de vie et aux genres de vie contemporains ? » ( Jean
Fourastié )
La France comme l’ensemble des pays industrialisés connaissent en effet après la guerre
une période de croissance sans précédent.
Comment a-t-on surmonté la situation catastrophique de 1945 ? Quelles ont été les
caractéristiques de ces belles années perdues (snif ) ?
1. Le nouveau départ sous la IVe République (1945-1958)
La fin de la guerre annonce « la 3e bataille de France » (la reconstruction), car le
bilan économique est bien plus lourd qu’en 1918. Même les syndicats s’engagent dans cette
voie : le mot d’ordre de la CGT était « produire d’abord, revendiquer ensuite ». La plupart des
anciens dirigeants s’étant « disqualifiés » (de Gaulle) sous Vichy, c’est à l’Etat d’engager des
réformes de fond pour redresser le pays ; celles-ci se feront en vue de 3 objectifs : la priorité
aux secteurs de base (transports et énergie), les investissements productifs et la possession des
« commandes » du pays (crédit), qui permettent à l’Etat de contrôler et d’orienter les
investissements.
Ainsi, ont eu lieu des nationalisations, spontanées (dès l’automne 44, quand on suspecte
des collabos) ou votées par l’Assemblée constituante (décembre 45-mai 46), dans le but
d’apporter un effort d’investissement initial. De plus, la création en 1946 du Commissariat au
Plan permet la coordination et l’orientation de l’activité publique en vue d’une croissance à
long terme.
Autre facteur de renouveau : le redressement démographique, amorcé dès 1942 (taux de
natalité d’environ 20%o, taux d’accroissement naturel de 0,8 %, rythme le plus rapide de
l’histoire française).
Dans ce climat de confiance générale, les résultats ont été probants : le niveau de
production de 1929 est dépassé dès 1949, et le goulet d’étranglement énergétique se dessert
peu à peu. L’aide américaine facilite le rétablissement des équilibres extérieurs (retour à une
relative stabilité monétaire deux fois plus rapide qu’en 1918, balance commerciale quasiéquilibrée en 1950). L’agriculture devient en quelques années un des points forts de
l’économie (la productivité y augmente de 6,8 % par an de 1949 à 1962), et libère un volume
croissant de main d’œuvre pour les autre secteurs. La signature de la CECA en 1951 accroît le
dynamisme de la sidérurgie. L’autofinancement est élevé, et les taux d’investissement
dépassent les 20 %, cet investissement devenant de plus en plus privé.
Ce constat est cependant à nuancer : la France n’a pas connu de « miracle » à
l’allemande, la production reste orientée vers le marché interne (zone franc). Deux
déséquilibres font peu à peu leur apparition dans les années 50 : l’inflation (1951-2 : hausse
mondiale des coûts des matières premières suite à la guerre de Corée ; 1956-7 : conséquence
de la guerre d’Algérie) et le déficit extérieur (nouvelle dévaluation en 1954). Le pari du Traité
de Rome (1957) semble dès lors très risqué.
2. L’ouverture européenne et ses conséquences ( 1958-1973 )
La mise en place du Marché commun domine la politique économique des années 60,
car si l’ouverture est pour la France un moteur principal de la croissance, elle est aussi
source de nouvelles contraintes.
L’instauration du libre échange au sein de la CEE ne s’accompagne pas de mesures
protectionnistes face au reste du monde, mais d’un tarif commun : les taux d’ouverture des
« six » augmentent. Pour la France, il s’ensuit une réorganisation géographique des échanges
(au profit de la CEE et au détriment de la zone franc).
La compétitivité devient l’objectif principal : les IVe et Ve Plans, avec le modèle FIFI
(physico-financier), annoncent une planification en valeur, tenant compte des flux
financiers, et des mesures fiscales et juridiques tendent à faciliter la concentration,
permettant la constitution de « champions nationaux » (cimenteries, automobile, chimie).
L’investissement s’accélère (taux d’investissement de 23,5 % de 1969 à 1973) : l’Etat
encourage les investissements privés, et son rôle dans l’économie s’amenuise. La forte
épargne des ménages (taux de 16,6 % de 1969 à 1973) ne suffit pas, et la France devient
dépendante de l’extérieur du fait de l’afflux des capitaux étrangers.
Les coûts énergétiques décroissants entraînent un doublement de la consommation
d’énergie entre 1960 et 1973 (de pétrole en particulier, ce qui se traduit par l’essor de
l’automobile). Or le risque d’être dépendant (la France l’étant à 76 % en 1973, contre 50 %
pour l’Allemagne et l’Angleterre), pourtant connu depuis 1956 (crise de Suez) a été pris
quand même, pour ne pas freiner la compétitivité.
Cette période représente la plus forte croissance de toute l’histoire économique
française, alors même que les équilibres financiers ont bonne mine (excédent de la balance
commerciale-encore amélioré par la dévaluation de 1969, de la balance des paiements, des
mouvements de capitaux à long terme, réserves de change à la hausse).
Les actifs agricoles diminuent, ceux de l’industrie augmentent jusqu’en 1962 puis se
stabilisent, au profit des effectifs des services.
Cependant, l’insatisfaction sociale est présente pendant cette période de croissance (cf.
les événements de 1968), du fait d’un retour du chômage (2 à 3 %, soit 500 000 chômeurs en
68), du déclin structurel de certains secteurs (charbonnages, textile, sidérurgie), de
l’accentuation des inégalités de revenu et de l’explosion des effectifs scolaires.
Conclusion : Les défis de la reconstruction ont pleinement été relevés, permettant à
la France de conserver son rang de puissance mondiale. Quoi qu’il en soit, la croissance a
« mauvaise réputation » dans les années 70 (rapport Meadows), alors que le pire est encore à
venir…
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