COUPLAGE DES EVENEMENTS BIOLOGIQUES ET GEOLOGIQUES AU COURS DU TEMPS
Dans le chapitre Datation relative, nous avons vu que les associations de fossiles étaient utilisées comme
repères temporels. Chaque association est appelée biozone (ensemble des êtres vivants végétaux ou
animaux vivant à une époque donnée en un lieu donné). Des variations majeures sont observées au sein
des biozones. Elles définissent les limites des ères géologiques : il y a eu cinq crises majeures (doc 3 p
187) dans l’histoire de la Terre dont les plus célèbres sont :
La crise Permo-Trias (245 Ma) marque la fin de l’ère primaire (Protérozoïque) et le début de l’ère
secondaire (Mésozoïque). C’est la crise biologique connue la plus importante dans l'histoire de la Terre.
57% des familles et 95% des espèces marines disparaissent (les espèces terrestres sont très
majoritairement gétales avec quelques arthropodes (insectes), les Vertébrés sont alors exclusivement
aquatiques (Poissons et Amphibiens)).
La crise Crétacé-Paléocène ou Créta-Tertiaire (65 Ma) (pour être rigoureux il faudrait dire Crétacé-
Paléogène pour mettre en relation des périodes de même importance temporelle) voit disparaître 15 % des
familles. Son importance médiatique (Dinosaures…) ne reflète donc pas sa gravité (5ème par rapport au
nombre de familles disparues). La faune et la flore était alors bien diversifiée dans l’eau comme sur terre.
Comment peut-on expliquer la disparition brutale de nombreuses espèces comme l’extinction des
dinosaures à la fin du crétacé ? Y a-t-il des interactions entre changements biologiques et
géologiques ?
I. UNE CRISE CELEBRE : LA CRISE CRETACE-PALEOCENE (65 MA)
A. La biosphère avant la crise : au Mésozoïque (ère secondaire 245-65 Ma).
1) Le cadre
Durant le Mésozoïque, il y a relativement peu d’évènements oroniques (formation de montagnes). Le
Trias (245-200 Ma) conduit à l’érosion des chaînes hercyniennes (chaînes aujourd’hui qualifiées de
montagnes anciennes : Ardennes,…). Du gypse est également formé à cette époque (couche plastique ou
couche savon présente dans les Alpes notamment). Les continents qui étaient réunis en un seul bloc
appelé la Pangée se fragmentent à nouveau par l’ouverture de l’océan Atlantique et de l’océan Indien.
Au Jurassique (200-145 Ma), la mer, chaude, progresse à l’intérieur des terres (transgression) sur les
reliefs hercyniens aplanis qui forment d’immenses plates-formes littorales : cette tranche d’eau conduit à
un dépôt de séries calcaires de grande puissance (= épaisseur). La France est presque complètement sous
l’eau : seuls les sommets du Massif Central et du Massif armoricain sont émergés ; l’Europe n’est qu’un
vaste archipel.
2) La biosphère
- Les organismes microscopiques : les mers chaudes pullulaient de Foraminifères (unicellulaires à test
calcaire ou siliceux) et d’algues unicellulaires telles que les Coccolitophoridés (formation craie du
Crétacé, Nannoplancton)
- Les Invertébrés : (pas de squelette interne osseux)
Les mers sont peuplées d’animaux aujourd’hui disparus : les Ammonites et les Bélemnites (elles font
toutes les deux parties du groupe des Mollusques céphalopodes aujourd’hui représenté par les pieuvres et
les calmars). Les Ammonites présentent une coquille enroulée cloisonnée en loges. Les Bélemnites ont
une coquille interne proche de celles des Seiches actuelles. Lorsque ces coquilles sont piégées dans les
sédiments, elles se transforment en fossiles : on a alors un moulage interne ou externe des parties dures de
l’animal (l’empreinte des parties molles n’est quasiment jamais conservée).
Sur terre, les Arthropodes sont également bien diversifiés.
- Les Vertébrés :
Les Ammonites et les Bélemnites servaient de nourriture à des reptiles géants, tout comme les groupes de
Vertébrés marins (Poissons et Amphibiens). Les Dinosaures, présents depuis le Trias, étaient soit nageurs
soit marcheurs, ils n’étaient pas tous carnivores mais certains pouvaient faire jusqu’à 30 mètres de long
pour 10 mètres de haut. Ce sont les reptiles qui occupent la plupart des niches écologiques au
Mésozoïque.
A côté des Dinosaures, on trouve des reptiles volants, ainsi que les premiers oiseaux, des Amphibiens et
les premiers mammifères. Ces derniers ne font que quelques centimètres et sont très loin d’être
majoritaires à cette époque.
- La Flore :
Le paysage est très majoritairement rempli par des Gymnospermes (pas de fruit, graine seule) dont les
conifères. Les autres groupes sont également présents (mousse, fougères,…) et les premiers
Angiospermes (fruit autour de la graine) font leur apparition.
Au Mésozoïque, il y a des groupes vivants majoritaires : les Foraminifères et les algues
unicellulaires, les Reptiles, et les Gymnospermes. Ces groupes disparaissent partiellement ou
totalement à la fin de l’ère secondaire.
B. La disparition des espèces et des groupes.
1) La crise Crétacé-Tertiaire sur les continents.
Doc 1 p 188 : Grâce à la construction d’un tableau, montrer quels sont les groupes qui ont disparu,
régressé ou explosé (radiation évolutive) lors du passage de l’ère secondaire à l’ère tertiaire. Pourquoi
dit-on que cette crise est sélective ?
2) La crise Crétacé-Tertiaire dans les océans.
Les indications nous sont données par l’étude de sédiments océaniques (craie, marnes et calcaires) datant
de la fin du Crétacé et du début de l’ère tertiaire.
a. Des indices paléontologiques.
TP Marnes.
Répondre à la question 2 p 189.
b. Des indices sédimentologiques.
Répondre aux questions 1-3 p 193.
Au niveau de tous les sites d’enregistrement de la limite K-T en domaine océanique, la limite K-T est
soulignée par la présence d’un niveau d’argile sombre encadré par des ensembles plus marneux. Le
niveau argileux est l’expression d’un arrêt de la sédimentation carbonatée lié à la disparition du
plancton marin pourvoyeur en carbonates.
+ présence d’une anomalie positive en iridium.
Proposer une ou plusieurs hypothèses pouvant expliquer l’origine de la crise.
La limite Crétacé-Tertiaire (il y a 65 millions d’années) est caractérisée par l'extinction massive et
rapide d'espèces et de groupes des milieux continentaux et océaniques. Certains groupes survivent à
la crise, ils se diversifient rapidement en occupant toutes les niches écologiques.
C. L’ORIGINE DE CETTE CRISE
1) Un évènement d’origine extraterrestre : la chute d’un astéroïde
Répondre aux questions 1 et 2 p 197
L’iridium est un élément présent dans les météorites. Le pic de 100 ng observé à la limite K-T (contre 0,3
ng habituellement) montre un apport extraterrestre d’iridium par la chute d’une météorite à cette période.
De plus, les quartz choqués, les sphérules et les magnétites nickélifères que l’on trouve dans la couche
argileuse vue précédemment sont aussi les témoins de l’écrasement d’une météorite sur Terre : les
conditions de pression et de fusion nécessaires à leur fabrication n’existent pas sur Terre sauf dans le cas
d’un impact de météorite.
Le hasard des sondages a mis en évidence un cratère d’impact près de la presqu’île de Yucatan au
Mexique. Ce cratère d’impact est composé de socle et de roches carbonatées fragmentés et agglomérés
dans une gangue vitreuse (la présence de fragments de carbonates montrent que ce n’est pas une roche
éruptive). L’intégration des anomalies gravimétriques en une image (on mesure la gravité en un point du
globe et on la soustrait à la gravité normale, le sultat est traduit par des teintes différentes) confirme la
présence d’une empreinte météoritique aujourd’hui invisible depuis la surface (sédimentation et érosion).
La datation des minéraux autour de l’impact (quartz choqué, système fermé après l’impact) a donné un
age de 65 Ma.
Une météorite de près de 10 km de diamètre serait entrée en collision avec la Terre à la vitesse de
50 000 km/h. L’impact, d’une violence inouïe, aurait soufflé des régions entières, créant un
immense raz de marée et projetant dans l’atmosphère suffisamment de poussières pour obscurcir le
sol durant des mois. Incapables de vivre sans soleil, de nombreuses plantes auraient fini par
mourir, suivies par les herbivores puis les carnivores
RMQ : Des données récentes tendraient à prouver que l’impact a eu lieu 300 000 ans avant la limite
K-T. L’hypothèse de la crise déclenchée par la météorite est donc à manier avec précaution.
2) Un évènement d’origine terrestre : la mise en place des trapps du Deccan
Répondre aux questions p 195
Un épisode volcanique important a eu lieu il y a 65 Ma : la mise en place des Trapps du Deccan. Cette
province indienne présente un empilement de roches volcaniques de type point chaud représentant un
volume de 3 kilomètres cubes (soit environ 1500 milliards de fois le Stade de France). Cela montre une
modification temporaire de la dynamique interne de la Terre.
Chaque éruption est accompagnée d’émissions de gaz, de poussières qui ont un effet sur l’effet de serre,
l’éclairement et la filtration des UV par la couche d’ozone. Cela a provoqué « un hiver » soudain qui a
mis à mal toutes chaînes alimentaires basées sur la photosynthèse. Cette hypothèse est privilégiée
aujourd’hui même s’il y a toujours débat dans la communauté scientifique.
L'origine de ces événements pourrait être la conjonction de deux phénomènes géologiques. Le
premier est lié à la dynamique de la planète et correspond notamment aux conséquences de la mise
en place des trapps du Deccan ; le second est associé à la chute d'un astéroïde dont le cratère de
Chixulub est la trace. De plus, un certain nombre de familles étaient déjà sur le déclin avant ces
phénomènes, ce qui aura précipité leur extinction.
Quelques pistes explicatives sur l’extinction sélective :
Peut-être la petite taille, donc aussi les besoins en nourriture plus faibles, un régime alimentaire plus
varié que celui des gros herbivores ou des carnivores stricts, une plus grande capacité à se déplacer, à se
cacher, etc..., ont-il été des avantages. Cet atout vaudrait alors pour les Amphibiens, les Lézards, les
Serpents et les Mammifères.
On peut remarquer aussi que ces animaux hétérothermes peuvent rester inactifs et sans nourriture
pendant de longues périodes : les crocodiles peuvent stocker d'importantes réserves de graisse dans leur
queue, et se passer ainsi de nourriture sur plusieurs semaines. Certains amphibiens actuels peuvent passer
l'hiver en diminuant énormément leur métabolisme, et même pour certains en se laissant geler. Peut-être
les dinosaures n'avaient-ils pas ces capacités, surtout si on les suppose " à sang chaud (= homéothermes)",
ou avec un métabolisme élevé
Il semble enfin que les tétrapodes d'eau douce, parmi lesquels on peut placer Tortues et Crocodiles, ont
mieux supporté la crise. C'est aussi vrai pour les poissons d'eau douce, qui ne subissent pas de réel
bouleversement au niveau du nombre de Familles ou de Genres. Même les gros représentants des
crocodiliens connus au Crétacé supérieur semblent avoir survécu. Cette constatation s'accorde avec
l'explication des extinctions par une crise des réseaux alimentaires basés sur la photosynthèse : " l'hiver
d'impact " aurait gravement affecté ces réseaux trophiques, et donc les herbivores et les carnivores qui
s'en nourrissent. Par contre les réseaux trophiques d'eau douce, plutôt basés sur la consommation de
matière organique, dissoute ou en suspension, par les microorganismes puis les petits animaux (larves
d'arthropodes, petits poissons...) n'auraient pas été autant touchés.
II. LES CRISES BIOLOGIQUES : DES REPERES DANS LHISTOIRE DE LA TERRE
A. Crises et découpage des temps géologiques.
À l’échelle des temps géologiques, des modifications brutales et globales liées à des
événements planétaires affectent le monde vivant : ce sont les crises. Elles alternent avec
des périodes plus longues de relative stabilité.
B. Influence des crises au cours des temps géologiques.
Au cours de l’histoire de la Terre, les phénomènes comme la crise Crétacé-Tertiaire ont un
caractère exceptionnel. Ils ont une influence majeure sur l’évolution de la biosphère.
Durant les 500 derniers millions d'années sont survenues plusieurs crises majeures.
C. Les causes des crises.
Lors des crises majeures, les extinctions biologiques massives sont corrélées à :
- des phénomènes géologiques internes (tectonique des plaques, panaches mantelliques et
volcanisme associé) ;
- des phénomènes d’origine extraterrestre (chute d'astéroïdes).
CONCLUSION
Changements géologiques et modifications de la biosphère sont interdépendants.
Produit récent de l'évolution biologique, l'Homme a les moyens d’avoir une influence sur
l’avenir de la planète.
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