Comprendre l’excision
Qu’appelle-t-on « excision » ?
L'excision, aussi appelée Mutilations sexuelles féminines (MSF) ou Mutilations génitales
féminines (MGF), recouvre toutes les interventions incluant l'ablation partielle ou totale des
organes sexuels externes de la femme ou autre lésion des organes sexuels féminins.
L’Organisation mondiale de la Santé distingue 4 types de mutilations sexuelles féminines :
La clitoridectomie : ablation partielle ou totale du clitoris.
L’excision : ablation partielle ou totale du clitoris et des petites lèvres, avec ou sans
ablation des grandes lèvres.
L’infibulation : rétrécissement de l’orifice vaginal par ablation et accolement des petites
lèvres et/ou des grandes lèvres, avec ou sans ablation du clitoris.
Les formes non-classées de MSF : toutes les autres interventions nocives ou
potentiellement nocives pratiquées sur les organes sexuels féminins à des fins non
thérapeutiques.
Une question de vocabulaire : excision ? Mutilation sexuelle féminine ? Mutilation génitale
féminine ?
Excision, parlons-en ! utilise parfois indistinctement les termes de « mutilation sexuelle féminine »
et « d’excision ». Notre réseau et ses adhérent-e-s sont mobilisé-e-s pour l’abandon de toutes les
formes de mutilations sexuelles féminines. Nous utilisons néanmoins parfois le terme « excision »
de façon générique, selon les contextes ou le public avec lequel nous dialoguons.
Nous privilégions également le terme mutilations « sexuelles » à celui de « génitales » car il
reflète mieux l’ensemble des conséquences de l’acte sur la vie des femmes et intègre, en plus de
l’atteinte physique, toutes les dimensions de la sexualité (psychologique, sociologique,
anthropologique…).
Quels sont les risques liés aux mutilations sexuelles féminines ?
Les mutilations sexuelles féminines ne présentent aucun avantage pour la santé et entraînent
de graves conséquences physiques et psychologiques tout au long de la vie des femmes.
Parmi les risques auxquels sont exposées les filles et les femmes victimes d’excision, il est
possible de citer :
Des douleurs intenses : la vulve, les lèvres et le clitoris sont des parties du corps très innervées.
Couper des tissus sensibles des organes génitaux cause des douleurs extrêmes, d’autant que
les mutilations sexuelles féminines sont rarement pratiquées sous anesthésie. Par ailleurs, la
cicatrisation peut se révéler douloureuse dans des contextes où le suivi des soins reste précaire.
Tout au long de leur vie, les femmes peuvent continuer à ressentir des douleurs en raison de
l’emprisonnement ou de l’absence de protection des terminaisons nerveuses.
Des saignements voire une hémorragie.
Des saignements se produisent de façon immédiate. Dans certains cas, il s’agit même de
véritables hémorragies, pouvant alors entrainer la mort.
Des infections : les conditions d’hygiène précaires (par exemple le fait d’utiliser le même
instrument pour exciser plusieurs filles) peuvent être à l’origine d’infections. Par la suite, les
mutilations sexuelles féminines peuvent entraîner de multiples infections vulvaires, urinaires ou
gynécologiques, qui peuvent mener à la stérilité. La diffusion des infections sont susceptibles
d’entraîner des septicémies qui, sans traitement adéquat, peuvent être mortelles.
La mort peut être causée au moment de l’acte par des hémorragies ou des infections, y compris
le tétanos et le choc.
Le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) : l’utilisation d’un même instrument non stérilisé
pour l’excision de plusieurs filles est susceptible d’accroître le risque de transmission du VIH. Par
ailleurs, l’augmentation du risque des saignements au cours des rapports sexuels, qui est
fréquent lorsque la désinfibulation est nécessaire, peut accroître le risque de transmission du VIH.
Les filles et les femmes ayant été infibulées sont particulièrement exposées aux problèmes
urinaires et menstruels : la fermeture quasi complète du vagin et de l’urètre peuvent empêcher
l’urine et les menstruations de s’écouler normalement.
Les conséquences sur la vie sexuelle : les femmes ayant subi une mutilation sexuelle peuvent
connaître des douleurs ou un plaisir sexuel diminué au cours des rapports sexuels, par exemple
en raison des dommages liés à l’ablation de tissus sensibles tel que le gland du clitoris, de
cicatrices résultant de leur excision ou encore de souvenirs traumatisants liés à l’intervention.
Les complications obstétricales : les femmes ayant subi une mutilation sexuelle féminine sont
plus exposées à des complications telles que des saignements excessifs, des déchirures du
périnée et ont souvent recours à des épisiotomies. Un travail prolongé ou un accouchement
difficile peuvent être à l’origine de fistules obstétricales, qui deviennent alors des conséquences
secondaires des complications liées aux mutilations sexuelles féminines.
Un accompagnement médical adéquat des femmes à l’accouchement réduit le risque de
complications obstétricales : Une femme excisée vivant loin d’un poste de santé, en milieu rural a
beaucoup plus de risques de complication qu’une femme excisée vivant dans un pays le
système de santé et développé et accessible.
Les répercussions sur le nouveau- : les résultats d’une étude menée par l’Organisation
mondiale de la Santé sur 28 000 femmes dans différents pays, prouvent que les mutilations
sexuelles des mères ont des conséquences négatives sur les nouveau-nés : les taux de décès
périnatal chez les nouveau-nés sont plus élevés pour les enfants des femmes ayant subi une
mutilation sexuelle que pour les enfants des femmes n’ayant pas subi de mutilation (supérieur de
15 % pour les enfants dont les mères ont subi une mutilation de type I, de 32 % lorsque les
mères ont subi une mutilation de type II, et de 55 % lorsqu’il s’agit d’une mutilation sexuelle de
type III)
Informations empruntées au rapport : labandon des mutilations génitales féminines et de
l’excision, Un examen attentif de pratiques prometteuses. PRP, USAID, 2007.
Les conséquences psychologiques : beaucoup de femmes décrivent les mutilations sexuelles
féminines comme un traumatisme, en raison de la douleur extrême ressentie au moment de
l’acte, du choc et de la force utilisée pour les empêcher de bouger. La douleur et/ou l’hémorragie
peuvent entraîner un choc au moment de la mutilation. Des études ont également montré que
les femmes excisées peuvent avoir une plus grande crainte des rapports sexuels ou connaître un
état de stress post-traumatique, danxiété, de dépression, de perte de mémoire.
Ces informations sont empruntées à : « Eliminer les mutilations sexuelles féminines Déclaration
interinstitutions. HCDH, OMS, ONUSIDA, PNUD, UNCEA UNESCO, UNFPA, UNHCR, UNICEF,
UNIFEM », Organisation mondiale de la Santé 2008.
Pourquoi l’excision est-elle pratiquée ?
Aucune raison liée à « la culture, la coutume, la religion, la tradition ou le prétendu
“honneur”» (Convention d’Istanbul) ne saurait justifier les mutilations sexuelles féminines.
Dans les sociétés elles sont pratiquées, les Mutilations Sexuelles Féminines (MSF) sont le
reflet d’une inégalité entre les sexes et traduisent le contrôle exercé par la société sur les femmes.
Le maintien de la pratique est sous-tendu par un ensemble de croyances culturelles, religieuses
et sociales. Les raisons invoquées par les groupes qui perpétuent lexcision peuvent varier selon
la région, l’ethnie ou la communauté et peuvent se cumuler.
De façon transversale, il est important de comprendre que l’excision constitue une norme
sociale : dans la plupart des communautés, l’excision persiste en raison d’un sentiment
d’obligation sociale très fort. Par conséquent, même lorsqu’elles sont conscientes des
répercussions sur la santé physique et psychologique de leurs filles, les familles préfèrent
perpétuer la pratique pour ne pas subir jugement moraux et sanctions sociales (comme par
exemple l’impossibilité pour une fille de se marier ; dans les sociétés où l'on choisit son
partenaire à l'intérieur du groupe (non seulement social homogamie mais aussi
géographique, professionnel, religieux).
L’Unicef, qui travaille de longue date à la compréhension des dynamiques qui sous-tendent la
perpétuation et l’abandon de l’excision, explique ainsi dans une étude de 2010 : « Dans les
communautés elle est pratiquée, l’E/MGF n’est considérée ni comme dangereuse, ni comme
une violation des droits humains. Elle constitue une étape nécessaire dans la bonne éducation
d’une fille, une façon de la protéger et, dans de nombreux cas, de lui permettre de se marier. Les
parents font exciser leurs filles afin de leur garantir le meilleur futur possible. L’honneur familial et
les attentes sociales jouent un grand rôle dans la perpétuation de l’E/MGF, ce qui permet
difficilement aux familles individuelles ainsi qu’aux femmes et aux filles en tant qu’individus de
renoncer à la pratique. me lorsque les familles sont conscientes des conséquences néfastes
de l’intervention, elles perpétuent la pratique car elles craignent les jugements moraux et les
sanctions sociales au cas elles ne se conformeraient pas aux attentes de la société. Le
moteur principal qui entretient la pratique est souvent le désir de protéger les filles et de leur offrir
le meilleur futur possible leur assurant sécurité économique et acceptation sociale ».
Les justifications suivantes sont notamment invoquées par les groupes qui pratiquent l’excision :
Le contrôle de la sexualité des femmes et le maintien de la domination masculine :
L’excision – en prévenant le désir sexuel, empêcherait les expériences sexuelles prénuptiales
et ensuite les relations adultérines garantissant ainsi l’honneur de la famille et du mari.
Les croyances liées à la religion : bien qu’aucun texte religieux ne prescrive la pratique
qui a d’ailleurs précédé l’apparition des grandes religions monothéistes - certains utilisent
leurs croyances pour justifier l’excision. La pratique se retrouve aussi bien dans des
populations musulmanes, chrétiennes ou animistes.
D’autres croyances, les mythes : certaines communautés pensent que l’excision favorise la
fécondité des femmes ; qu’elle permet dassurer une meilleure hygiène, de rendre les femmes
plus attrayantes ou même de leur ôter les parties qu’ils considèrent comme masculines ou
dangereuses telle que le gland du clitoris.
Le maintien d’une identité et d’une tradition culturelle : pour certaines communautés,
pratiquer l’excision permet de perpétuer une tradition et de protéger une identité culturelle.
L’excision est par exemple parfois associée à des rites de passage à lâge adulte. Pratiquer
l’excision pour préserver son identité culturelle, en particulier au contact de groupes qui ne
pratiquent pas, peut jouer un rôle important, par exemple dans un contexte migratoire.
Certaines familles peuvent parfois perpétuer la pratique en migration pour s’assurer de
transmettre valeurs et identité culturelle.
Qui pratique l’excision ?
La personne qui pratique l’excision n’est pas toujours la même selon les contextes. En Afrique de
l’ouest francophone, l’excision est généralement pratiquée par des femmes âgées dont le savoir
a été transmis par leur mère et qui disposent d’un statut particulier dans leur communauté, ou
encore par des accoucheuses traditionnelles.
Dans certains pays, les mutilations sexuelles minines tendent à se médicaliser, c’est-à-dire
qu’elles sont pratiquées par des professionnels de santé. En Egypte, par exemple, en 2015 ( ?),
75% des excisions sont pratiquées par des professionnels de la santé, contre 24% en 1995
1
.
La médicalisation de la pratique de l’excision ne constitue pas une solution et présente le risque
de lui donner un caractère officiel. L’Organisation mondiale de la santé condamne fermement la
pratique des mutilations sexuelles féminines par le personnel de santé.
En France, le Conseil de l’Ordre des médecins interrogé à ce sujet n’a pu que rappeler la teneur
du code de déontologie : « Aucune intervention mutilante ne peut être pratiquée sans motif
médical très sérieux » (Art/41, Décret n°95-1000 du 6 septembre 1995 portant sur le code de
déontologie médicale).
A quel âge pratique-t-on l’excision ?
Dans l’immense majorité des cas, les filles sont excisées avant l’âge de 15 ans. Dans la
moitié des 29 pays qui pratiquent l’excision, la majorité des filles subissent les mutilations
sexuelles féminines avant l’âge de 5 ans.
En Égypte, en République centrafricaine, en Somalie et au Tchad, au moins 80 % des filles sont
excisées entre 5 et 14 ans, parfois dans le cadre de rites marquant le passage à l’âge adulte.
Pour en savoir plus, consulter le rapport statistique de l’Unicef, publié en 2013.
Cette moyenne cache cependant des disparités puisque l’âge peut varier d’une ethnie à l’autre
ou d’une génération à l’autre.
D’où vient l’excision ?
Les origines de la pratique ne sont pas claires mais celle-ci serait apparue avant le Christianisme
et l’Islam. Certaines recherches lui trouvent une origine en Nubie, dans la Corne de l’Afrique,
dans les régions qui correspondent aujourdhui à l’Egypte et au Soudan. Des momies
égyptiennes présenteraient en effet des marques attestant de la pratique.
Certains chercheurs en sciences sociales pensent que l’excision était pratiquée sur les femmes
dans la société pharaonique par les classes sociales les plus élevées. Par phénomène d’imitation
sociale, la pratique s’est progressivement répandue dans l’ensemble de la société, les classes
sociales moins élevées ayant commencé à exciser leurs filles pour pouvoir les marier aux
hommes de rang supérieur.
1
Docteur Mohamed Farid, qui coordonne des sessions de formation et de sensibilisation du personnel
médical, organisées par le ministère de la Famille en Egypte.
http://www1.rfi.fr/actufr/articles/115/article_82697.asp
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