L`infection par le virus de l`immunodéficience humaine

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Les défenses immunitaires
Nous vivons dans un monde potentiellement hostile, au milieu d’un nombre
incalculable d’agents infectieux dont forme, taille et composition varient
énormément. Nous ne serions pour eux que de simples refuges utiles pour propager
leurs gènes, si nous n’avions développé des défenses comparables en efficacité et
ingéniosité.
L’infection par le virus de l’immunodéficience humaine, responsable du SIDA, nous a
rappelé que ces agents infectieux sont des organismes vivants capables d’évoluer et
de s’adapter à leur environnement, qu’il s’agisse de virus, bactéries, levures ou
parasites. Mais, si certains peuvent se développer de façon autonome, un grand
nombre (virus, parasites et bactéries intra cellulaires) ne persiste qu’à la faveur du
parasitisme d’un hôte humain ou animal, et leur élimination nécessite donc la
destruction des cellules infectées de l’hôte.
La grippe, maladie contagieuse due au virus influenza, peut atteindre 5 à 20% de la
population, et plusieurs épidémies dévastatrices ont frappé l’espèce humaine. La
variation permanente du virus explique que la maladie ne puisse être éradiquée et
que le vaccin doive être continuellement adapté au nouveau variant viral apparu.
Nous possédons des systèmes de défense qui peuvent établir un état de protection
contre l’infection et dont la mise en route représente la base de l’immunité,
«ensemble des mécanismes biologiques permettant à un organisme pluricellulaire de
maintenir la cohérence des cellules et des tissus qui le constituent et d’assurer son
intégrité en éliminant ses propres constituants altérés et les substances étrangères et
agents infectieux auxquels il est exposé. Cette fonction met en jeu deux catégories
de mécanismes apparus successivement dans l’évolution des espèces et étroitement
intriqués chez les organismes supérieurs:
l’immunité «non spécifique» naturelle ou
innée
de mise en jeu immédiate, puis
l’immunité spécifique, acquise ou adaptative
,
qui se développe en quelques jours et met en place une mémoire immunologique»
(JF Revillard). Immunités naturelle et spécifique impliquent une capacité de
distinction ou de reconnaissance entre les constituants normaux de l’organisme ou le
«soi» et les autres molécules dont l’ensemble constitue le «non soi».
Immunités spécifique et non spécifique mettent en jeu des cellules et des molécules
solubles. Les mécanismes innés constitutifs n’augmentent pas lors de contacts
répétés avec le même agent infectieux. Face à la variabilité par mutation des
multitudes de microbes, ces mécanismes n’ont pas une efficacité universelle. Leur
activité est renforcée par le développement de réponses spécifiques acquises: des
populations de lymphocytes, chacune avec sa propre spécificité pour un composant
étranger particulier, produisent des réponses qui se combinent avec les mécanismes
innés pour assurer une protection forte. Mieux, la mémoire gravée sur le système
immunitaire par l’expansion de lymphocytes spécifiques lors du premier contact avec
la molécule étrangère établit les bases d’une réponse plus forte lors de tout contact
ultérieur, ce qui constitue le fondement de la vaccination.
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Immunité innée
De nombreux mécanismes immunologiques innés, ne changeant pas avec la
répétition de l’infection, se mettent en route lors de toute agression de l’organisme.
1 Les barrières naturelles contre l’infection
Les microbes sont maintenus à l’écart de l’organisme par la peau, la sécrétion de
mucus, les mouvements ciliaires, l’action de lavage de fluides (larmes), l’acidité
gastrique ou les compétitions entre microbes (tube digestif). S’ils parviennent à
pénétrer dans l’organisme,ces agents infectieux sont alors la cible de cellules
phagocytaires et de facteurs solubles.
2 Les cellules phagocytaires
Les principales cellules phagocytaires, assurant la capture et l’ingestion de particules
solides inertes ou vivantes, sont les
polynucléaires neutrophile,
une catégorie de
globules blancs du sang,
et les
macrophages
des tissus; les microbes adhèrent à leur
surface, sont ingérés puis transportés à l’intérieur de la cellule ils fusionnent avec
des granules qui libèrent de nombreux facteurs microbicides comme des dérivés
oxygénés actifs ou des dérivés nitrés. Une autre catégorie de cellules, les
lymphocytes NK (Natural Killer)
peut reconnaître et détruire des cellules modifiées
par une infection virale ou des cellules tumorales. Des facteurs solubles interviennent
également, comme le Complément, les protéines de l’inflammation, ou les
interférons.
3 Le Complément
facilite la phagocytose.
Le Complément est une cascade enzymatique à plusieurs composants qui contribue à
faire affluer les cellules phagocytaires vers les microbes. Le composant le plus
abondant, le facteur C3, est scindé par une enzyme en C3a etC3b qui se lie au
microbe et le signale aux phagocytes. Le composant C5 est alors scindé en C5a et
C5b. C5b se fixe également au microbe et assemble les derniers composants, C6 à
C9, en un complexe d’attaque membranaire perméable. Les liquides extra cellulaires
peuvent alors pénétrer dans le microbe qui gonfle et éclate. Par ailleurs, C5a accroît
la perméabilité des capillaires et attire les polynucléaires neutrophiles.
C3a et C5a agissent également sur des cellules appelées
mastocytes
, qui libèrent des
médiateurs solubles agissant sur la perméabilité des capillaires et l’attraction des
polynucléaires neutrophiles.
4 La réaction inflammatoire aiguë médiée par le Complément.
Après l’activation du Complément, les polynucléaires neutrophiles activés
fixent les microbes revêtus de Complément et peuvent alors les ingérer. L’afflux de
polynucléaires et l’augmentation de la perméabilité des capillaires constituent les
bases d’une puissante réaction inflammatoire aiguë.
L’inflammation peut aussi être déclenchée par les macrophages des tissus
5 Une réponse humorale
constitue une seconde ligne de défense.
D’autres protéines solubles de la phase aiguë de l’inflammation (protéines C réactive,
protéines fixant le mannose), ont une synthèse fortement augmentée par l’infection.
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La protéine fixant le mannose appartient à un groupe de protéines capables de
distinguer les sucres des membranes des microbes de ceux de l’hôte.
6 Mort extracellulaire:
Les virus n’ont pas de possibilité propre de se multiplier. Aussi est-il indispensable
pour eux de pénétrer à l’intérieur des cellules de l’hôte qu’ils infectent afin de s’en
approprier la machinerie réplicative. Il est important pour l’hôte de détruire ces
cellules avant que le virus ait pu se multiplier. C’est le rôle des
lymphocytes NK
(Natural Killer), qui reconnaissent des glycoprotéines apparues à la surface des
cellules infectées qu’ils détruisent grâce à des perforines qui trouent les membranes
des cellules. Un mécanisme semblable intervient pour de nombreux
parasites (maladie du sommeil, paludisme); leur destruction par des polynucléaires
éosinophiles revêtus du Complément les empêche de s’installer dans un hôte
potentiel.
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Immunité acquise
Les agents infectieux qui ont échappé à l’action des mécanismes innés doivent être
contrôlés par des mécanismes différents, selon qu’ils se développent à l’extérieur ou
à l’intérieur des cellules. Les acteurs de l’immunité spécifique sont d’une part les
immunoglobulines, Ig ou anticorps, sous forme soluble dans les liquides biologiques
ou sous forme de récepteurs membranaires à la surface des lymphocytes B (BCR ou
B Cell Receptor), et d’autre part, les récepteurs des lymphocytes T (TCR ou T Cell
Receptor). Ces molécules, qui assurent la reconnaissance des agents étrangers, les
antigènes, par des sites spécifiques complémentaires, sont extrêmement diversifiées
(des dizaines à des centaines de milliards). Elles sont bi fonctionnelles avec une
partie orientée vers l’extérieur de la cellule qui assure la reconnaissance spécifique,
et une partie orientée vers l’intérieur qui envoie des signaux biologiques lors de la
liaison avec un antigène.
1 L’anticorps, adaptateur spécifique,
protège des infections extra cellulaires. Il se
fixe à l’antigène par son site de reconnaissance spécifique, variable selon les
antigènes. Le signal est transmis à la partie constante de la molécule qui active alors
les cellules phagocytaires et le Complément. Par ailleurs, l’inflammation aigue est
activée par la fixation de certains anticorps, les immunoglobulines E, sur les
mastocytes
, cellules des tissus qui libèrent alors des médiateurs comme l’histamine.
Enfin, les complexes immuns anticorps-antigène vont aussi provoquer la libération ds
médiateurs de l’inflammation à partir des macrophages tissulaires.
La structure de base de l’anticorps est un tétra peptide avec
4 chaînes de peptides,
2 chaînes lourdes identiques et 2 chaînes légères identiques, reliées par des ponts
disulfure S-S. On peut couper la molécule d’anticorps au niveau d’une région
charnière pour obtenir 2 fragments identiques fixant l’antigène (Fab), et un fragment
constant Fc.
Les gènes des immunoglobulines
codant pour les chaînes lourdes et légères sont
situés sur 3 chromosomes différents. Dans chaque groupe, il y a plus de 100 gènes
codant pour les régions variables V, environ 5 petits segments de jonction J, et un
seul gène codant pour chaque région constante C. Enfin, dans les régions variables,
certaines régions sont
hyper
variables, créant encore plus de diversité (régions D).
Classes d’immunoglobulines (Ig).
Chez l’homme, il existe 5 types majeurs de chaînes
lourdes, définissant 5 classes d’Ig :
L’IgG est la plus abondante, particulièrement dans les
fluides extra-
vasculaires
où elle neutralise les toxines et combat les microbes qui ont fixé le C3b
en facilitant leur fixation aux phagocytes. Elle traverse le placenta en fin de
grossesse et l’intestin du nouveau né lui permettant d’’’absorber les anticorps du
colostrum maternel.
L’IgA existe sous forme de monomère dans lesang. Mais elle est sous forme
de dimère dans les sécrétions muqueuses où elle représente l’Ig principale
intervenant dans la protection des surfaces internes de l’organisme.
L’IgM, majoritairement un pentamère, est essentiellement intra -vasculaire et
produite précocément. Elle réalise une agglutination des bactéries et intervient dans
la lyse des cellules par le Complément. C’est donc une première ligne de défense
importante contre les bactéries.
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L’IgD, à la surface des lymphocytes,.fonctionne probablement comme un
récepteur d’antigène.
L’IgE se fixe fortement aux mastocytes et le contact avec l’antigène conduit à
une formation localisée d’agents antimicrobiens et à la libération de médiateurs de
l’inflammation. Elle joue un rôle important dans certaines maladies parasitaires et
l’allergie.
Bases cellulaires de la production des anticorps : l’expansion clonale.
Les anticorps sont fabriqués par les plasmocytes dérivés de lymphocytes B de la
moelle osseuse (Bone marrow). Chacun est programmé pour fabriquer un seul type
d’anticorps qui se place à la surface du lymphocyte comme un récepteur. L’antigène
se fixe sur le lymphocyte possédant l’anticorps complémentaire, l’active et provoque
alors l’expansion d’un clone de cellules productrices de ce même anticorps.
Mémoire acquise et vaccination.
Toute nouvelle exposition au même antigène provoque une réponse secondaire plus
précoce et plus forte, prouvant l’existence d’une mémoire. Cela constitue les bases
de la vaccination, qui utilise une forme non dangereuse de l’agent infectieux pour la
première immunisation.
L’immunité acquise est spécifique de l’antigène.
Les anticorps différencient les antigènes parce que la reconnaissance est
basée sur une complémentarité de structure. Le système immunitaire différencie
également les composants propres à un organisme (le soi) des composants étrangers
(le non soi) en fabriquant des lymphocytes anti soi qui ne réagissent pas avec les
molécules normales de l’hôte.
2 Récepteurs du lymphocyte B.
Le lymphocyte B fabrique une immunoglobuline avec un segment intra membranaire
qu’il insère à sa surface où elle remplit un rôle de récepteur spécifique d’antigène.
Cette Ig précoce est une IgM. Lors de la maturation du lymphocyte, une IgD de
même spécificité est fabriquée et exprimée à la surface cellulaire; puis sont produites
les autres classes d’Ig. Les Ig de surface forment alors un complexe avec d’autres
protéines membranaires qui vont transmettre au lymphocyte des signaux
d’activation.
3 Récepteur du lymphocyte T (TCR).
Il est constitué d’un dimère transmembranaire formé de 2 chaînes, chacune avec un
domaine externe variable, un peu comme le FAb des Ig, et un domaine interne
constant. Le codage génétique du TCR est semblable à celui des Ig. La région
variable est formée par l’association de régions V, D et J en une seule région
recombinante V(D)J pour chaque chaîne. Comme les Ig, chaque région V a 3 régions
hypervariables avec un rôle de reconnaissance.
Une immunité cellulaire protège des agents infectieux intra cellulaires.
Une autre classe de lymphocytes, les lymphocytes T cytotoxiques, intervient
dans le contrôle des infections intra cellulaires. Ces cellules possèdent un récepteur
TCR qui reconnaît un seul antigène et entreprend alors une expansion clonale pour
former des cellules effectrices et à mémoire. Mais les lymphocytes T cytotoxiques ne
reconnaissent un antigène étranger, viral par exemple, que s’il est associé à des
molécules de classe I du Complexe Majeur d’Histocompatibilité (CMH) à la surface
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