la parentalite a l`epreuve de la pratique

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LA PARENTALITE A L’EPREUVE DE LA PRATIQUE »
Colloque organisé en juin 2009 par l’Ecole des Parents et des
Educateurs, à PARIS.
Organisateur du colloque : Ecole des Parents et des Educateurs.
Président : Philippe Jeammet, psychiatre, professeur des universités.
1) Le concept de parentalité ou la condition parentale.
Intervenants :
Mirentxu Bacquerie : directrice générale de l’EPE-IDF.
Olivier Peraldi : délégué interministériel à la famille, représentant de Nadine Morano, secrétaire
d’Etat chargée de la famille.
Christine Castelain-Meunier : sociologue, chercheur au CNRS.
Pierre Henri Tavoillot : philosophe, maître de conférence à l’université Paris-Sorbonne, président du
collège de philosophie.
Madame Bacquerie indique que ce concept a été créé en 1929 dans un premier temps pour l’initiation
à la sexualité chez les jeunes.
Aussi, une réponse téléphonique à l’intention des parents a été mise en place dans les années 70.
En 2 générations, le phénomène de l’omnipotence de l’enfance s’est installé et cela a fait émerger
le désarroi des parents.
Il faut donc se réapproprier la légitimité de poser des limites, tout en sachant qu’aimer un enfant, c’est
accepter qu’il nous quitte.
Monsieur Peraldi tout en faisant un rappel de la loi du 5 mars 2007 sur la prévention de la
délinquance et la protection de l’enfance, insiste sur le constat que les structures familiales se
diversifient. Les incivilités, l’absentéisme scolaire sont le reflet d’un malaise dans l’environnement
familial et social.
Il souligne que 77 projets de maison des adolescents sont financés par l’Etat.
Un budget de 4,6 millions d’euros a été alloué aux REAAP (réseaux d’écoute, d’appui et
d’accompagnement des parents).
Madame Bacquerie reprend l’historique de l’EPE :
1929 : -création.
1949 : -agrément « jeunesse et sport » en tant qu’association de jeunesse et d’éducation populaire.
-création de la revue mensuelle « l’école des parents ».
1952 : -reconnaissance d’utilité publique.
1964 : -création de la fédération internationale pour l’éducation des parents.
1967 : -création du dispensaire d’hygiène mentale, aujourd’hui renommé CMP.
1970 : -création de la fédération des écoles des parents et des éducateurs.
2007 : -création du « café » de la ville de Pantin.
Compte-rendu réalisé par Catherine ALBANEL et Isabelle GOMES 12/09
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Madame Castelain-Meunier souligne que la parentalité renvoie inévitablement à la société.
Nous sommes dans une période de transition, d’interrogation du concept de la famille. Il faut aborder
ce thème tout en faisant part de la crise profonde qui n’est pas temporaire Nous vivons une période de
transition pour la famille et la société. Plusieurs questions se posent : dans quel monde vivons-nous à
l’échelle de la planète avec le réchauffement climatique ? Quel monde léguerons-nous aux enfants ?
Comment laisser un monde vivable pour que nos enfants, petits-enfants, puissent vivre dans des
conditions gérables ?
Il devient urgent de prendre des mesures pour éviter les problèmes de santé, de pollution et
d’alimentation.
Nous devons affronter des risques et nous ne savons pas comment les appréhender.
Le rapport à l’environnement traverse l’angoisse parentale ; dans ce contexte la place de l’enfant à
définir est flottante, mouvante. Quand il sera adulte, il vivra dans un monde différent de son enfance.
On vit dans une société où l’avoir le remporte sur l’être.
Il faut développer le potentiel de chacun pour aller mieux et ceci en dehors du cadre de la performance
et du profit.
On connait l’enfant quand il nous quitte et la distance permet de se rendre compte des écueils.
Aucune éducation n’est parfaite.
L’arrivée au monde de l’enfant a besoin d’être encore plus soutenue, notamment en ce qui concerne
les modes de garde. Les entreprises devraient prendre en considération que le salarié est aussi un père.
Plus les modèles familiaux sont diverses, plus la société doit accompagner les familles. On peut
améliorer la manière de mieux accompagner l’enfant, en prenant une place autour de lui, en se
répartissant les rôles, en communiquant et en échangeant pour le rendre adulte. Le passage de la
conjugalité à la parentalité demande un accompagnement afin de permettre aux parents
d’affirmer leur identité, de moins mal comprendre l’autre.
Il est crucial qu’il y ait une meilleure compréhension entre les hommes et les femmes. Ils doivent
absolument échanger sans garder en tête les stéréotypes pour éviter la violence qui est terrible pour
l’enfant.
Il faut comprendre la mise en place de l’engrenage de la violence pour le désamorcer.
Dés la maternelle, il faut ouvrir le jeune enfant à se mettre à la place de l’autre.
C’est fondamental de revenir à des éléments basiques tout en combinant tous les registres.
Monsieur Jeammet : Il faut faire un retour à l’éducatif sans travailler sur la peur des parents. Il faut
revenir à l’essentiel, ne pas se sentir seul dans la peur.
Les liens entre l’école et l’éducatif sont importants ; il faut penser à des rencontres plus
fondamentales lors des accueils des familles dans le milieu scolaire.
Monsieur Tavoillot aborde également ce sentiment de désarroi.
Auparavant être parent allait de soi, on faisait comme on a toujours fait…
Actuellement, on assiste à un brouillage spectaculaire de la parentalité renforcée par l’inquiétude des
parents avec la dissolution des rôles du père et de la mère. Il y a de moins en moins de réponses alors
qu’il y a de plus en plus de questions.
On assiste à une hyper valorisation de la parentalité. Aujourd’hui la réussite de la vie se combine avec
la vie privée. Pour être accompli, il faut être parent. Ce brouillage compose des éléments positifs : des
parents plus réfléchis, plus choisis.
L’enfant est issu d’un désir, d’un projet et cela peut être enfermant pour lui.
On peut également mettre en parallèle le brouillage des âges de la vie. La crise de l’âge adulte est en
brouillage à cause d’une adolescence interminable.
Il ne suffit plus d’être parent pour être adulte et d’être adulte pour être parent.
Les parents ne savent plus quel rôle tenir. On ne sait plus où se situe la supériorité de l’adulte sur
l’enfant.
Définition d’un adulte par un enfant : c’est quelqu’un qui n’a jamais le temps.
Compte-rendu réalisé par Catherine ALBANEL et Isabelle GOMES 12/09
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On est considéré âgé sans être vieux. Autrefois, on vénérait les vieux car le passé était source de
référence. Maintenant la société est projetée dans l’avenir et vénère les plus jeunes.
La valorisation de l’enfant a pris sa source dans le christianisme avec « l’enfant sauveur ».
La vraie révolution, c’est quand les femmes ont été considérées comme des adultes.
Notre époque véhicule des normes plus exigeantes = peur de ne pas être à la hauteur de la fonction
parentale ou de la fonction d’adulte. On doit être performant dans tous les domaines ;
Un adulte est une personne qui a de l’expérience (rapport au monde), de la responsabilité (rapport aux
autres), et de l’authenticité (rapport à soi).
La jeunesse est dans l’expérimentation.
Parentalité = se mettre en rapport avec des petits en tant qu’adulte avec supériorité de
responsabilité et non d’égocentricité.
La parentalité peut s’exercer dans le milieu du travail ou à l’école avec une supériorité de
responsabilité.
On fait des enfants pour assurer l’immortalité.
Le terme de la parentalité est dissociable de l’ordre conjugal ; actuellement changement de la
structure de la parentalité avec différentes parentalités = mono, homo et beau-parentalité.
Ces nouvelles parentalités transforment les rapports familiaux de la sphère privée. L’enfant est
au centre de la famille et non pas l’inverse. De plus en plus de personnes sont placées de façon
parentale (adoption, gamètes, soins, éducation des enfants) ce qui peut entraîner un flou dans les
places et les assignations des acteurs avec multiplication des repères.
Ce caractère évolutif de la parentalité est un processus de nouveaux acteurs qui apparaissent avec
notion d’affiliation et de lien avec les nouvelles familles.
Pas de notion juridique pour la parentalité mais désignation de situations de fait avec pour facteurs
l’affectivité et la temporalité.
La parentalité représente un système qui organise un réseau de figures parentales renvoyant à
des constellations différentes.
2) A quoi s’engage - t’on lorsque l’on devient parent ?
Intervenants :
Christian Hoffmann : psychologue, professeur des universités, Paris Diderot.
Brigitte Cadéac : directrice du service téléphonie sociale de l’EPE-IDF.
Jean Chambry : psychiatre, psychanalyste, conseiller technique à l’EPE-IDF.
Les écoutants du plateau parents : service de téléphonie sociale de l’EPE-IDF.
L’engagement se partage, élever des enfants c’est permettre leur indépendance.
Monsieur Hoffmann se pose la question suivante : Quand est-il du désir d’être parent,
indépendamment des droits et des devoirs des parents ?
Monsieur Chambry évoque la parentalité comme une pratique concrète qui s’inscrit dans le champ
social et juridique. On devient parent, c’est une construction partagée avec l’enfant.
Il se réfère à Georges Devereux, ethnopsychiatre, qui construit la parentalité sur 3 piliers :
a) le pilier biologique (importance des origines)
b) le pilier légal : autorité parentale (devoir d’entretien, d’éducation, de protection et de
surveillance, fournir un toit) ; la loi ne parle pas d’amour.
c) le pilier affectif : besoins pour se construire : construction de l’image interne.
Le regard parental est important pour la construction de l’enfant. Le désir d’enfant d’après Freud a des
motivations narcissiques.
La parentalité ne s’exprime pas de la même façon chez l’homme et la femme. Cette différence est
nécessaire à la construction de l’enfant. La fonction maternelle permet à l’enfant d’intérioriser ses
propres émotions. Le père permet l’ouverture sur le monde.
L’adolescence est un moment révélateur de ce qui a été acquis ou pas. Elle va révéler les fragilités de
l’engagement parental.
L’injonction paradoxale est un exemple où l’adulte ne veut plus porter la responsabilité du choix.
Devenir parent, c’est accepter le renoncement.
Compte-rendu réalisé par Catherine ALBANEL et Isabelle GOMES 12/09
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Pour Winnicott, psychiatre et psychanalyste, il est demandé aux parents de ne pas être parfait « good
enough » et d’aimer son enfant comme il est.
3) Praticiens à l’épreuve de la parentalité.
Intervenants :
Nathalie Isoré : directrice du service accueil de l’EPE-IDF.
Michaël Ayoun : responsable du café de l’EPE-IDF.
Animateur : Marcel Rufo, pédopsychiatre, professeur des universités, chef du service d’adolescents
« Espace Arthur », Marseille.
Il a été évoqué le symbolisme de la main courante qui permet de revaloriser la parole de la personne
qui raconte son vécu parental à une tierce personne qui représente l’autorité.
Madame Isoré donne comme exemple l’expérience du Café parental où un questionnaire est
renseigné auprès des parents et leur permet d’échanger sur leur vécu.
5 questions fondamentales construisent ce questionnaire :
1- Quels sont pour vous les comportements idéaux des parents ?
2- Quels sont pour vous les comportements idéaux que devrait avoir votre enfant ?
3- Quels sont pour vous les comportements que vous attendez de votre enfant ?
4- Quels sont pour vous les comportements que vous tolérez de votre enfant ?
5- Quels sont pour vous les comportements interdits de votre enfant ?
L’analyse des réponses permet de définir les fonctions parentales dans les domaines de la protection,
l’autonomie et l’autorisation.
Marcel Rufo indique que le fait d’être parent est de se sentir coupable. Les « psycachalots » comme il
nomme les professionnels aident les parents à se défaire de ce sentiment négatif.
4) Les nouvelles parentalités.
Intervenants :
Serge Héfez, psychiatre, psychanalyste, responsable de l’unité de thérapie familiale, hôpital de la
Pitié-Salpêtrière, Paris.
Geneviéve Delaisi de Parseval, psychanalyste.
Gérard Neyrand, sociologue, professeur à l’université de Toulouse.
L’animateur, Didier Lauru, psychiatre, psychanalyste, donne une définition de la parentalité sous
l’angle anthropologique, en stipulant que plusieurs adultes contribuent à l’éducation des enfants avec
une notion de « circulation » des enfants.
Pour Serge Héfez, la question des origines est une question de narration qui est en cours, elle n’a pas
de sens que si elle n’englobe pas tous les protagonistes de cette histoire.
Il distingue 2 types de fonctionnement familial : classique et nouveau
Famille verticale traditionnelle hiérarchisée : chaque parent devient un parent à part entière, il est
parent avant d’être père ou mère.
Famille horizontale : ce n’est plus le mariage qui fonde la famille mais les enfants = décloisonnement
des sexes et dans la distribution des rôles.
Compte-rendu réalisé par Catherine ALBANEL et Isabelle GOMES 12/09
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FAMILLE VERTICALE
AUTORITAIRE
HOLISTE
FILIATION
POUVOIR, HIERARCHIE
TRANSCENDANCE
PUISSANCE PATERNELLE
PARENTE
DIFFERENCE DES SEXES
LIENS, TRANSMISSIONS
FAMILLE HORIZONTALE
DEMOCRATIQUE
INDIVIDUALISTE
AFFILIATION
AUTO-ORGANISATION
IMMANENCE
AUTORITE CONJOINTE
PARENTALITE
EGALITES DES SEXES
RELATIONS, INTERACTIONS
Gérard Neyrand expose les différents types de parentalité : mono-parentalité, beau-parentalité, homoparentalité en précisant que désigner les choses c’est arriver à mieux les comprendre.
Il ajoute que dans le terme parentalité le conjugal et le familial sont dissociés, alors qu’actuellement
l’enfant est le centre de la famille et non plus le couple. Cela fait écho à l’intervention de Monsieur
Tavaillot sur la sacralisation de l’enfant.
Quelques questions restées sans réponse : dans le cadre du recours à l’assistance à la procréation,
l’homosexualité, comment qualifier le rôle de ces co-géniteurs non parents ? Comment reconnaître une
parentalité ?
Compte-rendu réalisé par Catherine ALBANEL et Isabelle GOMES 12/09
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