APM International
Mardi 7 octobre 2014 - 10:06
Annonce d'un dommage lié aux soins: une formation par simulation itinérante développée par
le réseau ligérien Aquarel
(LAUREAT EX-AEQUO DU CONCOURS APM DE LA MEILLEURE IDEE DE REPORTAGE
HOSPITALIER)
(Par Caroline BESNIER)
CHATEAU-GONTIER (Mayenne), 7 octobre 2014 (APM) - Le réseau Aquarel santé (Association pour
la qualité, la gestion des risques des établissements Est ligérien) a formé en 2014 une quarantaine de
professionnels par simulation à l'annonce d'un dommage lié aux soins dans trois départements des
Pays-de-la-Loire, a indiqué à l'APM sa coordinatrice Marie-Christine Moll, lors d'une session organisée
au centre hospitalier (CH) du Haut-Anjou à Château-Gontier le 18 septembre.
Elaborée en collaboration avec le Centre de simulation du CHU d'Angers (Cesar), cette formation a
été testée à Angers en 2013 puis sept sessions ont été proposées en 2014 à Angers, Château-Gontier
et Saint-Saturnin (Sarthe) afin de rendre la formation par simulation plus accessible aux
professionnels.
Le projet bénéficie d'une enveloppe de 150.000 euros de l'agence régionale de santé (ARS) Pays-de-
la-Loire dans le cadre du Fonds d'intervention régional (FIR), a précisé à l'APM Paul Després,
ingénieur qualité du réseau, également en charge des risques au CHU. Il constitue l'un des trois
programmes régionaux de développement professionnel continu (DPC) par la simulation en santé que
l'ARS a demandé au réseau de mettre en oeuvre entre 2013 et 2017.
La formation est gratuite pour les 120 premiers inscrits travaillant dans l'un des 200 établissements de
santé et d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) de Maine-et-Loire, Mayenne et
Sarthe, membres d'Aquarel santé. Néanmoins, son coût est évalué à environ 1.500 euros par
apprenant et, afin d'en couvrir une partie, le réseau envisage de la faire payer 600 euros, a expliqué
Marie-Christine Moll.
Elle a un intérêt dans le cadre de la certification V2010 des établissements par la Haute autorité de
santé (HAS) car l'information du patient en cas de dommage lié aux soins (critère 11c) "se place en
troisième position du palmarès des critères donnant lieu à recommandation", a souligné Soisik
Verborg, ingénieur qualité du réseau. Cela traduit "la difficile communication entre les professionnels
et les patients notamment dans les situations où l'annonce peut nuire à leur relation".
La délocalisation nécessite de transporter plusieurs cartons de matériel technique (un projecteur, trois
caméras, des ordinateurs et plusieurs mètres de câbles) à installer à chaque fois dans deux pièces,
l'une où a lieu la simulation (deux personnes formées et deux acteurs) et l'autre où elle est retransmise
en direct au reste des participants et aux formateurs.
Face aux difficultés techniques rencontrées régulièrement, il est prévu d'investir dans du matériel plus
robuste et éventuellement à plus long terme d'avoir un petit camion serait installé tout l'équipement
technique.
Quand la formation a lieu en dehors du centre de simulation d'Angers, les scénarios sont actuellement
limités aux dommages annoncés dans un bureau et correspondent donc en général à celles faites aux
proches d'un patient. A Angers, des chambres d'hôpital sont utilisées pour la simulation et permettent
de former également à l'annonce au patient.
Lors de la session à laquelle l'APM a assisté, quatre participants venaient du CH de Château-Gontier,
deux de Doué-la-Fontaine (Maine-et-Loire) et la dernière d'Evron (Mayenne). La plupart ont déjà
faire des annonces de dommages mais pas forcément irréversibles. Pour certains, la formation avait
été proposée par leur établissement, d'autres l'ont choisie parmi toute une série de formations et une
cadre l'a demandée expressément ayant été confrontée à une situation difficile.
DES SCENARIOS ADAPTES ET DES ACTEURS CONVAINCANTS
Chaque session est composée de trois modules, une présentation théorique, une mise en situation
simulée sur des scénarios de dommage réversible et une autre sur un dommage irréversible. Les
objectifs sont de savoir communiquer autour de faits connus et vérifiés, garder la confiance du patient
et de ses proches et informer sur la continuité de la prise en charge et du suivi.
Initialement, six professionnels étaient formés sur un jour et demi. Le nombre de participants a été
augmenté à huit et la formation allongée à deux jours. Parmi eux figurent essentiellement des
médecins, des chirurgiens et des cadres de santé même si la formation est aussi ouverte aux
directeurs d'établissement, pharmaciens, odontologistes, sages-femmes et paramédicaux. La
formation est organisée pour que les simulations soient réalisées en binôme, en général un médecin
et un cadre. En discutant avec les participants, il est apparu que cette organisation par binôme n'était
pas encore généralisée dans les établissements.
Les personnes formées sont entourées de quasiment autant de formateurs et acteurs. Elles sont
encadrées par un médecin, une psychologue et un ingénieur qualité chargé aussi de la technique, qui
ont un diplôme universitaire ou une attestation de formation par simulation en santé.
Le 18 septembre, les scénarios étaient joués par une actrice trentenaire professionnelle, un médecin
du CHU d'Angers à la retraite et sa femme, pharmacienne également à la retraite, tous deux membres
de la troupe de théâtre du CHU, Tréteauscope. "Ils sont bons vos acteurs!", s'est exclamée à l'issue
d'une simulation une des médecins, visiblement émue par la situation dans laquelle elle avait été
placée.
Les formateurs essayent d'adapter les scénarios en fonction des spécialités des participants et leur
demandent au préalable s'ils souhaitent éviter des situations pouvant leur rappeler une expérience
délicate. Le 18 septembre, les scénarios de dommages irréversibles ont concerpar exemple une
erreur d'administration de médicament ayant entraîné un décès, une fugue de personne désorientée et
une réanimation réalisée alors que la patiente avait refusé tout acharnement thérapeutique.
Avant chaque simulation, la situation est expliquée à tous et le binôme choisi a quelques minutes pour
se concerter sur sa stratégie d'annonce. La mise en situation dure une vingtaine de minutes et est
retransmise en direct aux formateurs et aux autres participants. Elle est suivie d'un débriefing d'environ
45 minutes au cours duquel les participants sont d'abord interrogés sur leur ressenti et leurs difficultés.
La psychologue emploie les méthodes de pratique réflexive et les aide à comprendre les mécanismes
régissant les réactions des proches mais aussi les leurs.
"Le temps d'échange est important, il est bien encadet il n'y a pas de jugement", a souligné une
participante tout en en souhaitant encore davantage. Cette volonté de parler s'est retrouvée lors des
pauses et du déjeuner, la plupart des professionnels ont continué à débriefer ou à comparer les
pratiques entre leurs établissements.
DE L'EMOTION MAIS DES PROFESSIONNELS PLUS A L'AISE A LA FIN
Les retours des premières sessions sont positifs, les professionnels se sentant globalement plus à
l'aise à l'issue de la formation pour annoncer un dommage réversible ou irréversible lié aux soins, a
rapporté Marie-Christine Moll. Une évaluation à six mois est en cours.
Lors des débriefings, les participants ont fait part de leur difficulté à gérer des proches avec des
comportements très différents (agressivité et abattement/confusion) et à calmer la colère. Ils se sont
interrogés sur la nécessité d'un contact physique pour réconforter quelqu'un, l'opportunité de proposer
d'emblée un soutien psychologique, les limites de la transparence et leur légitimité parfois à faire
l'annonce plutôt que la direction ou un autre médecin plus directement touché. Plusieurs ont alisé
qu'il ne fallait pas être trop optimiste pour éviter des complications si la situation se dégrade.
Les formateurs ont aussi mis l'accent sur l'importance de ne pas faire reposer la faute sur une
personne mais d'évoquer une responsabilité collective et institutionnelle, d'employer le "nous".
Interrogées à l'issue de la formation, les professionnels l'ont jugée "très enrichissante", "très prenante"
car ils étaient obligés d'être actifs et que le scénario collait à leur fonction quotidienne. Tout en
reconnaissant l'efficacité de la simulation, une participante a néanmoins observé que les scénarios
suscitaient beaucoup d'émotion car elle les vivait comme dans la réalité et ne se sentait pas prête à
suivre une autre formation par simulation à court terme.
Une cadre de santé ayant suivi la formation il y a plusieurs mois a indiqué à l'APM qu'elle la jugeait de
"haute qualité, avec des intervenants de valeur, respectueux de chacun et attentifs", "des situations
que l'on trouve au quotidien dans [les] services" et des acteurs "crédibles", "qui maîtrisent à la
perfection leur sujet et [...] font vivre la situation avec toute l'émotion que nécessite le sujet".
Les acteurs, qui peuvent participer au débriefing, ont rapporté à l'APM qu'ils se retrouvaient face à des
comportements très différents, certains étant plein d'empathie et d'autres ayant plus de difficultés à
gérer les réactions et à trouver les bons mots. Ils ont tous insisté sur l'importance de leur faire vivre
ces situations face à de faux proches ou patients.
PRIX DU CONCOURS APM
Ce sujet est le lauréat ex-aequo de la meilleure idée de reportage hospitalier, lors du concours
organisé en mai par l'APM auprès des visiteurs des salons de la santé et de l'autonomie à Paris.
Le thème de ce reportage, proposé par Soisik Verborg, a été retenu comme l'un des plus susceptibles
d'intéresser un large lectorat de responsables hospitaliers. Le jury réunissait Gérard Vincent, délégué
général de la Fédération hospitalière de France (FHF), le Dr Francis Fellinger, conseiller général des
établissements de santé (CGES) et deux journalistes de l'APM, Sabine Neulat-Isard, rédactrice en
chef, et Caroline Besnier.
L'autre premier prix, proposé par la clinique des Cèdres (Capio) à Toulouse, porte sur une application
de suivi pré- et post-opératoire de la chirurgie ambulatoire développée avec la société Sovinty (cf APM
MBRJ6001).
cb/san/APM polsan
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CBRJ6001 07/10/2014 10:06 ACTU
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