Le narrateur voudrait raconter l'histoire de l'Arabe qui avait trouvé le moyen de fertiliser les déserts
mais il lui a fait jurer de ne pas le faire.
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‘’4e buveur : L'œil de l'idole’’
Nouvelle de 6 pages
Le narrateur a voyagé vers le pays de Paganka pour y visiter le temple du dieu M'ghara qui, bien que
célèbre, ne semble pas être connu des habitants. Un vieillard lui a indiqué le chemin mais, lorsqu'il
atteint le temple, il l'y trouve mort au côté de sa femme qui n'a que le temps de lui parler de l'œil de
l'idole, avant qu'ils soient emportés par des oiseaux-hyènes. L'œil ne lui semble pas différent du reste
de la statue. Mais, le grattant, il découvre que c'est un diamant qu'il extirpe bien que l'idole se soit
animée. Il fuit avec le diamant qu'il tâte : c'est un énorme œil ensanglanté !
Commentaire
Le recueil est fantastique, mais la nouvelle ne se révèle fantastique qu'assez tard (ce qui, en fait, est
le propre du fantastique où il y a intrusion du surnaturel dans le monde réel). Elle se veut d'abord un
récit réaliste, le narrateur ayant le sérieux d'un ethnologue intéressé par le pittoresque des «hommes-
bleus», des «oiseaux-hyènes», qui se gargarise de noms exotiques ; on avale même les sacrifices
humains ; on ne s'étonne guère de ce secret qui n'est pas découvert mais dont la révélation vaut la
peine de mort ; «la Montagne sans Sommet» est bien étonnante pourtant. Mais qu'est-ce que ce
«graft» qui est présenté comme allant de soi alors qu'on n'en a jamais entendu parler? La progression
continue avec «le dieu terrible aux six bras» et voilà que le fantastique se déclare plus nettement par
cette justice expéditive qui semble avoir contracté le temps pour que les vieux soient là avant
l'explorateur, il n'y a que les oiseaux-hyènes qui soient un peu en retard pour achever les hautes
œuvres. Indice supplémentaire sur le secret qui concerne l'œil de l'idole, mais qui n'est pas achevé et,
péripétie, le danger couru par le narrateur. Une chute de l'intérêt est habilement ménagée quand il
croit à son échec, mais sa cupidité, qui est révélée, fait qu'il s'obstine, qu'il découvre le diamant, que
l'idole s'anime, qu'il y a une lutte de vitesse entre l'extirpation de l'œil et la réanimation de la statue
(thème fantastique traditionnel), que le sommet est atteint à «la seconde fatidique». Donc, après
l'apparent succès, il y a, effet dramatique conventionnel mais toujours efficace, la terrible déconvenue
qui est «la malédiction de l'œil de l'idole». Dans les textes fantastiques, l'emploi d'un narrateur permet
de faire accréditer l'incroyable. Les noms, créés avec liberté, jouent le rôle d'effet de réalité.
L'évocation des femmes est un élément hors-d'œuvre, mais qui joue aussi ce rôle. «Peur panique»
est approprié puisqu'est ainsi désignée la peur provoquée par la colère d'un autre dieu, le dieu Pan.
Le souci littéraire du jeune Tremblay, qui n'avait pas encore découvert le filon du joual, mais imitait
plutôt Lovecraft tout en voulant écrire une prose française de haut niveau, se manifeste, par exemple,
par le subjonctif «je pusse», par l'image des «entrailles de métal», par l'antithèse du «monstre à six
bras qui ne valait pas six sous». Comme il n'était pas encore soucieux d'être poliquement correct, de
respecter les diktats féministes, il pouvait encore se permettre de dire de son explorateur qu'il aurait
pu «pleurer comme une jeune fille». La forme «M'ghara» est propre au Sahara où on trouve aussi des
«hommes bleus», les Touaregs. Mais tout cela n'a guère d'importance : Michel Tremblay s'est amusé
à construire son décor de bric et de broc. Au sujet de l'aventurier, la cupidité, et non le goût de
l'aventure ou «la soif de savoir», se révèle comme étant son réel mobile.
Il faut constater la punition de la cupidité, comme celle de l'alcoolisme. Quant à la femme, elle est
punie parce que.... eh bien ! parce qu'elle est une femme, n'est-ce pas suffisant? Michel Tremblay
utilise l'idée qu'on trouve dans ‘’La conscience’’ de Victor Hugo, car l'œil regarde le coupable et l’on
peut supposer qu'il ne va pas cesser de le regarder, de lui faire honte. Cette condamnation a une
valeur plus générale : elle est celle de l'étranger qui perturbe une culture qu'il juge inférieure, de
l'incroyant qui ne respecte pas une religion, du voleur qui s'empare d'un trésor.