Bienvenu Camille Lequinio Agathe 31/01/2011 Cancéro, Immunité et Cancer, Mr Semana IMMUNITE ET CANCER Voici les questions auxquelles nous avons répondu pendant ce cours: Existe-t-il une réponse immunitaire anti-tumorale? Quel est le rôle de la réponse immunitaire innée? Quel est le rôle de la réponse immunitaire acquise? Comment ces tumeurs peuvent-elles aller au delà de la réponse immunitaire (échappement de la tumeur)? I-Ya-t-il une réponse immunitaire antitumorale? A-Preuves chez l'homme Tout d'abord on peut mettre en évidence la présence de clones T et B qui sont spécifiques d'antigènes de tumeurs: la rémission spontanée est associée à la présence d'anticorps et de clones T spécifiques de la tumeur. Ceci est visible à l’analyse de la tumeur. lors d'une biopsie de tumeur, on met en évidence la présence de Lymphocytes Infiltrant la Tumeur (=TIL). D'ailleurs on récupère ces TIL pour les multiplier in-vitro afin de les réinjecter au patient. De nombreux Ag de tumeurs ont été découverts par l'amplification et le clonage de Lymphocytes T activés par la tumeur autologue. On a donc mis en évidence que les lymphocytes avaient des cibles particulières, ils sont dirigés contre des sites spécifiques de la tumeur. Aussi on a remarqué que les individus immuno-déficients sont plus susceptibles à certaines tumeurs, principalement celles induites par des virus. Par ailleurs, pour certaines tumeurs (comme les mélanomes malins et les carcinomes médullaires du sein) l'infiltration par des Lymphocytes (les TIL) est corrélée à un meilleur pronostic. Les lymphocytes participent donc à l’élimination de la tumeur. B-Modèle animal: preuves chez la souris Rôle de l'IFN γ (Interféron gamma) Des souris déficientes en IFN γ (IFNγ -/-) développent spontanément, ou après induction chimique, la tumeur. Les souris sans Ly T ni Ly B (Rag -/-) ont un taux plus élevé de tumeurs spontanées. Rq : Rag sont des gènes important pour la différentiation des lymphocyte T et B car ils permettent de fournir les récepteurs pour l’antigène ( BCR et TCR). Les souris à la fois IFN -/- et Rag -/- présentent une fréquence de carcinomes encore plus élevée, ces 2 éléments sont donc en partie indépendants : - les souris Rag -/- ont un déficit en immunité acquise, donc concernant les T CD8 cytotoxiques - les souris IFNγ -/- ont à la fois un défaut d'immunité acquise (T CD8) et d'immunité innée (l'IFN γ active les cellules NK) Rôle de la perforine Les souris déficientes en Perforine (perforine -/-) développent également plus de tumeurs que les souris « sauvages ». La perforine étant un des composants des granules cytolytiques des Ly T CD8 et des cellules NK. Ces cellules les secrètent pour détruire leurs cibles. Ainsi, toute modification de la réponse immunitaire, naturelle (chez l’homme) ou induite (chez la souris) entraine une augmentation des tumeurs, il existe donc une réponse immunitaire anti-tumorale. II-Rôle de la réponse immunitaire innée dans le rejet de tumeur Pour qu'il y ait une réponse immunitaire adaptative antigène spécifique, il faut en premier lieu une réponse innée qui prenne en charge la tumeur. Il faudra donc que les cellules tumorales soient reconnues comme étrangères pour avoir secondairement la réponse adaptative. Cette réponse innée a 3 rôles: Reconnaître la tumeur comme élément étranger alerter, c’est-à-dire envoyer des signaux pour faire savoir que la tumeur est là. détruire, les cellules tumorales qui commencent à proliférer. A-Reconnaître 1-Les cellules NK Elles sont activées par la reconnaissance des cellules tumorales ayant perdu l'expression de leurs molécules HLA classe I. (Rappel: les molécules CMH-I se lient à un récepteur inhibiteur des cellules NK, donc les protège de la lyse de ces NK). Les tumeurs vont perdre ces molécules. Elles sont en même temps activées via le récepteur NKG2D qui reconnaît : des molécules MIC-A et MIC-B, dont l'expression à la surface des cellules tumorales est induite par le stress la protéine Rae I, exprimée principalement sur les tumeurs. Si une tumeur est recouverte d'anticorps, les cellules NK vont la détruire via le phénomène d'ADCC (cytotoxicité cellulaire dépendante des Ac), ceci impliquant la molécule CD16 qui est le récepteur au fragment constant (Fc) des IgG. De plus, des médiateurs solubles tels que le TNFα, l'IL-2 ou encore l'IL-12 potentialisent l'action des cellules NK. 2-Les lymphocytes T γδ Cellules minoritaires, ils représentent moins de 10% des Lymphocytes T. Comme les T αβ ils sont générés dans le thymus. Ces T γδ vont aussi détruire la tumeur. Ils sont activés par des molécules de petit poids moléculaire (peptides antigéniques différents de ceux des lymphocytes T αβ), généralement phosphatés, communiquant des signaux de stress et/ou d’infection. Ce sont donc l’expression de signaux de danger. 3-Les cellules dendritiques (DC) Ce sont les cellules présentatrices d’antigène par excellence, elles présentent les peptides aux lymphocytes T dans les organes lymphoïdes secondaires. Dans le cas des tumeurs, les DC sont activées par reconnaissance de fragment de fibronectine par leur TLR-4. Les molécules de stress cellulaire HSP (Heat Shock Proteins) participent également à l'activation des DC, en étant reconnues par la molécule CD 91, les TLR-2 ainsi que les TLR4. B-Alerter Il faut alerter leur environnement pour faire savoir que le danger est présent et activer le système immunitaire antigène spécifique. Les cellules NK et les Ly Tγδ vont sécréter de l'IFNγ, il véhicule l’information pour activer les cellules immunocompétentes. Quand aux DC, une fois activées par la fibronectine ou les HSP, elles vont maturer et donc pouvoir synthétiser des cytokines inflammatoires type Th1, c'est à dire du TNFα, de l'IFNγ et de l'IL-12. Ces cytokines activent la réponse immunitaire cellulaire. Elles vont aussi pouvoir présenter l'Ag, en augmentant l'expression des molécules HLA classes I et II, en augmentant l'expression des molécules de co-stimulation : CD80, CD86, CD4O. Ce sont des molécules qui permettent à la CPA de coopérer avec le lymphocyte T. en dégradant et en présentant des peptides exogènes (débris de cellules tumorales) sur les molécules HLA. C-Détruire Les cellules NK vont induire l'apoptose des cellules cibles (les cellules tumorales) par libération de perforine/granzyme (voie soluble). Ce sont des molécules lytiques qui rentrent dans la cellule cible et la détruisent en perforant sa membrane. expression de Fas-L (fas-ligand) qui va entraîner une signalisation via Fas récepteur (voie membranaire) expression de la molécule Trail (ressemble à Fas) qui va entraîner une signalisation via trail receptor (voie membranaire). Tous ces mécanismes vont activer des caspases dans les cellules tumorales, induisant leur apoptose. D-Eliminer Concernant les Ly Tγδ, ils vont induire l'apoptose des cellules cibles par libération de perforine/granzyme conduisant à la perforation de la membrane de la cellule tumorale, se qui induit l'activation des caspases. Les macrophages, activés par l'INFγ, possèdent des récepteurs aux fragment Fc des Ig. La reconnaissance des Ig spécifiques des cellules tumorales par ces récepteurs va entraîner : la libération d'enzymes lysosomiaux toxiques la libération de métabolites oxygénés également toxiques pour les cellules cancéreuses la sécrétion de TNFα, qui favorise l'apoptose grâce au récepteur TNF-R1 impliquant l'activation de caspases, et qui favorise aussi la nécrose de la tumeur, car il entraîne une thrombose des vaisseaux à l'origine d'une hypoxie. Récapitulatif : La réponse immunitaire innée a donc 3 rôles : reconnaître, alerter, détruire Reconnaître Grâce à ses systèmes de reconnaissance : - du stress (MIC, HSP, TLR-2 et -4) - du non-soi (perte de l'expression des molécules HLA de classe I) Alerter: induction de la réponse immunitaire acquise - Grâce aux cytokines et aux médiateurs lipidiques inflammatoires (IFNγ, TNFα, IL-12, PGE2) - Grâce à la maturation des cellules dendritiques par la signalisation via les TLR et le TNF Détruire - Cellules NK et Tγδ : lyse par perforine/granzyme et Fas/Fas-L - Macrophages activés et armés : lyse par enzymes lysosomiales Quand la réponse immunitaire innée n'est pas suffisante pour éliminer toutes les cellules tumorales, la réponse immunitaire antigénique spécifique peut prendre le relais. Et cela est valable pour toute défense de l’organisme vis-à-vis du non soi. III- La réponse immunitaire anti-tumorale antigénique spécifique Conditions pour une réponse anti-tumorale spécifique : existence d'antigènes spécifiques de la tumeur ou d'un type de tumeur. reconnaissance de ces antigènes par les lymphocytes T via le TCR. A- Les Antigènes de tumeur 1-Les différents types Ag spécifiques d'une tumeur ou d’un type de tumeur : Ils sont retrouvés lors d'une mutation ponctuelle unique à un patient comme une translocation chromosomique par exemple. Ce sont des antigènes spécifiques d’un type tumoral, par exemple concernant - des gènes des protéines de fusion BCR-ABL - des idiotypes Ig et TCR dans les lymphomes B et T. Idiotype: c'est la partie variable d'une Ig sur un lymphocyte B et d'un TCR sur un Lymphocyte T, deux structures qui servent à reconnaître mais peuvent aussi être reconnues. Dans les leucémies B ou T, suite à un réarrangement concernant ces récepteurs, il y aura une expansion clonale de cellules tumorales ayant le même TCR ou Ig de surface. Ces derniers vont entraîner la fabrication de clones anti-T ou anti-B luttant contre la tumeur. Ag communs à plusieurs tumeurs de même type : - Mélanomes/carcinomes: MAGE, BAGE, GAGE - Ag viraux dans les tumeurs viralement induites, par exemple : → les produits des gènes E6 et E7 du papillomavirus humain codent pour des protéines impliquées dans le carcinome cervical. → Le produit du gène EBNA-1 de l'Epstein-Barr Virus, est particulièrement exprimé dans les tumeurs lympho-induites (Lymphome de Burkitt). Ag communs à de nombreuses tumeurs de type différent - Antigène carcino-embryonnaire (CD66) - Alpha-foetoprotéine (AFP) - P53 mutée 2-Propriétés des Ag de tumeurs Antigènes de tumeurs « vrais » (nouvelles molécules formés par mutation et absentes à l’état normal) Ce sont le produit de gènes ne s'exprimant pas à l'état normal, comme par exemple la protéine de fusion BCR-ABL (retrouvée dans la leucémie myéloïde chronique) et MART2 (retrouvée dans le mélanome) Protéines du soi sur-exprimées dans les tumeurs par rapport aux tissus normaux( sont présentes chez l’individu sain mais ne sont exprimées qu’à un certain moment ou qu’à un certain endroit) : l'ACE et l'AFP qui ne sont exprimées qu'au stade embryonnaire. MAGE, exprimée essentiellement dans des tissus protégés du système immunitaire (testicules + cerveau = « no man's land immunitaire »). Comme il n'y a pas de lymphocytes dans ces organes, le système immunitaire ne connait pas ces protéines. Ainsi, lorsque celles-ci seront exprimées par d'autres tissus (tumoraux), elles seront reconnues comme étrangères par le système immunitaire. B- Mécanismes d'action de l'immunité antigénique dépendante 1-Réponse dirigée par les LT CD4 Th1 C’est la plus importante . Les LTCD4 Th1 ( LT auxiliaires) vont activer les effecteurs de la réponse immunitaires : les LTCD8 cytotoxiques, via la sécrétion d’IL2 et d’IFNγ. Les cellules dendritiques peuvent également activer les LTCD8. Ces T CD8 vont reconnaître, par leur TCR, les peptides antigéniques dans le contexte HLA classe I, et vont induire l'apoptose des cellules cibles par : - libération de perforine/granzyme - expression de Fas-L - Trail. 2-Réponse dirigée par le Ly T CD4 Th2 Les Th2 orchestrent la réponse humorale, en sécrétant certaines cytokines (IL-4, IL-10) Ils interviennent dans la différenciation du LB en plasmocyte sécréteur d'anticorps, avec les cellules dendritiques également. (Le rôle des Ac est indéterminé dans la réponse anti-tumorale) Les anticorps libres vont reconnaître des Ag sous leur forme « native »( un LB ne voit pas un peptide antigénique mais l’ensemble de la cellule tumorale) et entraîner : cytotoxicité cellulaire anticorps dépendante (ADCC) : activation des macrophages cytotoxicité dépendante du complément, qui agit en trouant la membrane de la cellule cible. 3-Bilan On pense qu'une immunité anti-tumorale efficace doit emprunter la voie Th1/T CD8, car : les Antigènes de tumeurs sont pour la plus grande part des Ag intracellulaires ils sont donc présentés dans un contexte HLA classe I au T CD8 chez la souris, l'IFNγ, l'IL-2 et la perforine (composants essentiels de la réponse cytotoxique Th1/TCD8) sont nécessaires à une bonne immunité anti-tumorale (cf supra). Le rôle des immunoglobulines dans la réponse anti-tumorale est indéterminé. On n’est pas certain que leur rôle soit prépondérant. Il existe donc une immunité anti-tumorale innée et acquise. Pourtant, certains individus immuno-compétents développent des tumeurs. En permanence nous luttons contre des Ag tumoraux, il y a une course de vitesse entre le développement de la tumeur et la réponse immune, et parfois la tumeur prend le dessus, provoquant un cancer = échappement de la tumeur à la vigilance immunitaire. IV- Echappement de la tumeur au système immunitaire Une tumeur a deux propriétés essentielles : l’instabilité génétique, une tumeur maligne subit en permanence des mutations, elle contient en moyenne 10 000 mutations de plus qu'une lignée saine équivalente. la capacité de prolifération. La tumeur va subir la pression de sélection darwinienne par le système immunitaire : les cellules tumorales qui subissent des mutations les rendant « invisibles » seront sélectionnées, les cellules immunitaires ne les reconnaîtront pas, l'organisme s'habituera et la tumeur se développera. A- Echappement à la réponse Ag spécifique Diminution ou perte des molécules HLA-I de surface donc il n'y a plus de présentateur de peptides aux T CD8. La tumeur devient donc invisible au système immunitaire et résiste à la lyse des TCD8 alors que ce sont les principaux effecteurs de la réponse anti-tumorale. Perte de la réponse à l'IFNγ donc il n'y a pas d'augmentation d'expression des molécules HLA-I sur la tumeur ( normalement, l'IFNγ augmente l’expression des molécules HLA de classe I) Diminution ou perte des molécules HLA-II de surface donc pas d'activation des T helpers en l'absence de cellules présentatrices d'Ag infiltrant la tumeur. Perte des molécules de co-stimulation (CD80, CD86, CD40) entraînant une mauvaise activation des LT qui ne pourront pas répondre. Perte des Ag de tumeurs qui restent à l’intérieur de la cellule et ne s’expriment pas. Sécrétion de cytokines immuno-suppressives (tolérogènes) comme l'IL-10 et le TGFβ qui vont empêcher la maturation des cellules dendritiques et induire des LT régulateurs en périphérie, qui régulent négativement et bloquent la réponse immunitaire normale. Inhibition de l'apoptose induite par les LT CD8 : - par perte d'expression ou de fonction de Fas et des caspases - par acquisition de FLIP - par surexposition de Bcl2 FLIP et Bcl2 sont deux molécules anti-apoptotiques. Induction de l'apoptose des LT activés, la cellule tumorale exprime Fas-L induisant l'apoptose des LT Induction des LT régulateurs. Une étude montre que les LT régulateurs sont plus fréquents dans le sang périphérique des patients présentant une tumeur. B- Echappement à la réponse innée Inhibition de l'inflammation via sécrétion de cytokines anti-inflammatoires telles que l'IL10 et le TGFβ. Non-expression des molécules MICA et B, qui sont des molécules de stress reconnues de façon non spécifique par les cellules NK. Si perte de l'expression des molécules HLA de classe I classiques, il y a expression des molécules non classiques comme HLA-G qui inhibe la lyse NK via les récepteurs KIR (récepteurs inhibiteurs de la lyse).