Tables des matières INTRODUCTION 3 I. 5 CONTEXTE ACTUEL A) Le cadre théorique………………………………………………………………… 5 1. Le téléphone dans la société............................................................................. 5 1. 1. L’appropriation du téléphone portable 1. 2. Les changements occasionnés par son apparition 2. L’influence des médias ...................................................................................... 7 2. 1. Les effets des médias sur les individus 2. 2. L’impact de la publicité B) Le Smartphone à travers la publicité 11 1. L’analyse de corpus publicitaire ......................................................................11 1. 1. La marque Apple 1. 2. La marque BlackBerry 2. Le mythe du Smartphone .................................................................................14 2. 1. Les usagers et les valeurs représentés 2. 2. Les usages véhiculés II. ENQUETE QUALITATIVE ET RESULTATS 17 A) La méthodologie 17 1. Le choix de la méthode ...................................................................................17 2. Les caractéristiques de l’échantillon ............................................................... 18 2. 1. Qui ? 2. 2. Combien ? 2. 3. Ou ? 3. L’élaboration du questionnaire ........................................................................ 19 3. 1. Question 1 3. 2. Question 2 3. 3. Question 3 et 4 3. 4. Question 5 3. 5. Question 6 3. 6. Question 7 et 8 3. 7. Question 9 3. 8. Question 10 et 11 3. 9. Question 12 et 13 3. 10. Question 14 et 15 4. La collecte des données .................................................................................. 20 B) Les observations et analyses 22 1. Les usages des personnes interrogées .................................................... 22 2. Les impacts dans le quotidien .................................................................... 25 CONCLUSION 27 BIBLIOGRAPHIE ..................................................................................................... 29 LEXIQUE .................................................................................................................. 32 2 Introduction L’innovation technique du téléphone portable a eu de nombreuses conséquences au sein de notre société ces dernières années, notamment au niveau de nos habitudes de communication. En effet, plus besoin de se donner rendez-vous ou d’espérer joindre quelqu’un à son domicile pour communiquer, il suffit désormais de mettre sa main dans sa poche et de composer un numéro. Sans oublier que ce petit dispositif est un concentré de technologies puisqu’il rassemble de nombreux appareils : montre, MP3, calculatrice, agenda électronique, etc. Ces nouvelles possibilités techniques ont rapidement convaincus les français puisque selon ARCEP (Autorité de Régulation des Communications Électroniques et des Postes), 96,3% d’entre eux possèdent un téléphone portable en septembre 20101. Depuis environ trois années, un nouvel appareil est apparu sur le marché : le Smartphone ou « téléphone intelligent ». Les différences avec un téléphone portable classique sont : la forme (plus grand et plus large), le tactile, l’accès à l’internet 3G et la possibilité de télécharger de multiples applications. Lancer un nouveau produit sur le marché est toujours un risque puisque la population peut ne pas éprouver le désir de l’acheter et causer ainsi à l’entreprise un véritable échec financier, car ce sont les éléments sociaux, économiques, matériels et les stratégies juridiques qui font ou non la réussite d’une innovation. Et dans le cas présent, le succès du Smartphone implique que des personnes remplacent leur téléphone portable actuel par un de ces nouveaux appareils ; ce qui n’est pas évident. En effet cela a nécessité une importante communication pour argumenter sur les avantages et les nouvelles possibilités qu’offre cet outil. Nous avons été surprises de constater que ce nouveau téléphone se vendait très bien sur le marché et que de plus en plus de personnes de notre entourage en étaient équipées. Une étude rapporte d’ailleurs que les possesseurs de Smartphone étaient 7,14 millions en janvier 20102. C’est alors que nous nous sommes posé plusieurs questions. Pourquoi ce succès ? Qu’apporte-t-il de nouveau dans la société et dans les modes de communication des individus ? Et nous avons supposé qu’il s’agissait d’un effet de mode, de recherche de modernité et d’harmonie avec sa génération. C’est à partir de là que nous avons soulevé le problème principal de notre recherche : puisque selon nous la consommation de ce produit tient plutôt du désir que du besoin, comment ces personnes s’approprient-elles ce dispositif dans leur quotidien? Seraient-elles influencées par un facteur externe dans leurs usages? Autrement dit : s’agit-il ici d’une appropriation personnelle du Smartphone ou d’une influence des médias ? Nous entendons par « appropriation personnelle », l’usage que fait une personne de son Smartphone en fonction de sa personnalité, de son environnement et de ses besoins, un usage individuel qui lui correspond. Tandis qu’une «appropriation influencée par la publicité» serait selon nous une forme de mimétisme des scènes publicitaires effectué sans raison réelle. Il faut savoir que le Smartphone étant un outil nouveau dans la société, il existe très peu de documents traitant de son insertion sociale et des conséquences qu’il peut avoir dans 1 http://www.arcep.fr/fileadmin/reprise/observatoire/obs-mobile/2010/t3-2010/obs-mobile-trim03-2010.pdf 2 http://www.strategies.fr/etudes-tendances/tendances/144924W/2-12-4073/les-smartphonistes-graines-dinfluenceurs.html 3 les modes de vie et dans la société en général. Ainsi nous pensons que les questions que nous nous sommes posées ci-dessus constituent une première réflexion sur ce sujet et qu’elles pourraient éventuellement apporter des éléments de réponse intéressants concernant l’évolution de notre société et de nos modes de vie en parallèle de l’évolution technologique. Concernant le cadre de ce dossier nous nous limiterons aux frontières françaises et aux quatre dernières années passées durant lesquelles le Smartphone est apparut sur le marché et s’est créé une véritable place dans le secteur de la téléphonie mobile. Nous tenterons également de ne pas nous écarter de la dimension strictement communicationnelle du sujet, évinçant tous les aspects techniques et économiques qui ne nous permettraient pas de répondre à notre interrogation. Ainsi pour répondre à notre problématique que nous rappelons : « Le Smartphone : une appropriation personnelle ou influencée par les médias ? », nous allons procéder de façon méthodique. Premièrement nous ferons un rapide état des lieux du contexte actuel d’un point de vue théorique (concernant le téléphone portable en général et de l’influence actuelle des médias dans la société) puis de l’image véhiculée du Smartphone à travers la publicité. Dans un second temps nous aborderons la méthodologie que nous avons employé pour répondre à notre problématique, suivie des observations et analyses que nous avons pu faire suite à notre enquête. 4 I . L e c o n te x te a c tu e l A. le cadre théorique 1. Le téléphone portable dans la société Le Smartphone est une innovation dans la gamme des téléphones portables, or ce dernier est tellement récent qu’il existe peu de documents sur l’insertion sociale* de ce nouveau dispositif. C’est pourquoi, afin de cerner ce domaine nous nous sommes penchées sur des documents traitant du téléphone portable en général dans la société. Par définition, un téléphone portable est un téléphone « sans fil » et « mobile »3. Il est une innovation vis-à-vis du téléphone fixe auquel « l’appelant et l’appelé ne peuvent pas se déplacer de l’endroit où ils sont »4 (cabine téléphonique, appartement, etc.) ; cet appareil se doit d’être branché et/ou à proximité de son réceptacle pour fonctionner. Tandis que le téléphone portable utilise les ondes hertziennes* qui sont captées par une antenne-relais*, ils peuvent donc être utilisés presque de n’importe où. Cette avancée technique a eu de nombreuses conséquences au niveau social, et nous allons en traiter quelques-unes selon deux ouvrages : Le téléphone portable et nous de Corinne Martin5 et Les branchés du portable de Francis Jauréguiberry6 en deux parties distinctes. Premièrement nous verrons ce que les individus ont fait de cet outil et deuxièmement ce que le téléphone portable a changé dans les habitudes et le quotidien des personnes. 1.1. L’appropriation du téléphone portable Tout d’abord il faut savoir que le téléphone portable a eu un certain succès auprès de la population, et aujourd’hui rares sont ceux qui n’en possèdent pas : 82% des français de plus de 12 ans ont un téléphone portable en 20107. Ainsi environ 8 personnes sur 10 sont équipées. Mais selon des recherches en Information-Communication traitant du téléphone portable, cet outil ne sert pas uniquement à téléphoner, il est également un objet personnel voire intime qui permet la construction identitaire (Corinne Martin, p. 79-80). En effet, selon une étude réalisée par l’AFOM8 le téléphone serait un « miroir très personnel de son 3 Définition 4 du Petit Robert 2007, « Téléphone » page 2520 Http://dictionnaire.sensagent.com, mot clé « téléphone fixe » (consulté le 26/12/2010) 5 Corinne Martin : maître de conférences en sciences de l'information et de la communication à l'IUT de Thionville-Yutz et membre du Centre de recherche sur les médiations à l'université Paul Verlaine-Metz 6 Francis Jauréguiberry : sociologue, professeur à l'Université de Pau et chercheur au laboratoire Société, Environnement et Territoire (SET) du CNRS. 7 Selon l’Observatoire sociétal du téléphone mobile (baromètre 2010), 6ème enquête annuelle réalisée par l’AFOM (Association Française des Opérateurs Mobiles) et TNS Sofres. 8 « La place du téléphone mobile dans la société », enquête réalisée en 6 mois à laquelle six chercheurs en science de l’Information et Communication ont participé 5 utilisateur » puisqu’il serait fortement approprié dans son utilisation (applications préférées, contacts et réseau social, etc.) et dans son esthétique : il existe des milliers de logos, sonneries et applications que l’on peut télécharger afin de rendre son téléphone unique et à son image (notion reprise par Corinne Martin p. 111-112). Ce reflet via le téléphone portable serait donc une « extension, un musée de soi » particulièrement prononcé chez les jeunes adolescents puisqu’ils cherchent à se créer un réseau social autonome ; ainsi cet outil leur permet de se créer une identité via de multiples possibilités multimédias et leur mode de communication avec autrui9 ; et ce à travers un « investissement affectif patent qui se traduit de façon très nette par le manque et la perte » (Corinne Martin p. 111-112) D’ailleurs, la valeur identitaire est parfois si forte que l’objet en lui-même ne sert à rien si ce n’est d’être à la mode. Dans son ouvrage Francis Jauréguiberry insiste sur le fait que dès l’apparition du téléphone portable (en 1996), l’apparence et la personnalisation était un enjeu important et les publicités soulignaient le « pouvoir distinguant » de cet outil (Les branchés du portable, p. 16) à tel point qu’il existait des téléphones factices. On peut donc parler d’un outil de « mise en scène » puisque le fait de posséder un téléphone portable et de s’en servir en public est chargé de sens. Par exemple, cet outil est tellement banalisé aujourd’hui qu’il est possible de s’en servir pour se fondre dans la foule et ainsi montrer son indisponibilité10. Ou au contraire d’afficher sa précipitation à couper son téléphone par de grands gestes par exemple, de s’excuser ou encore de mettre fin à un appel pour montrer à un interlocuteur présent physiquement qu’on lui accorde de l’importance (AFOM, « La place du téléphone mobile dans la société »). Et enfin il permet de se donner une image, par exemple de professionnel actif et occupé, de personne sociable, dynamique, etc. Nous supposons qu’ici le téléphone portable permet de se distinguer des autres dans la rue, de se créer une personnalité pour des personnes que nous croisons et qui ne nous connaissent pas. Et ce pour son propre plaisir, pour se valoriser soi-même. Enfin, et d’un point de vue plus communicationnel, nous nous sommes aperçu qu’il y avait également une forte (voire urgente) volonté de s’approprier le téléphone portable afin de rester connecté ou « branché » selon les termes de Francis Jauréguiberry pour ne pas être exclu de ce nouveau « mouvement d’ouverture relationnelle et d’accélération des contacts qui s’est opéré durant la seconde moitié du XXè siècle » (Les branchés du portable, p. 138). Ainsi faire des rencontres et les fixer dans son répertoire téléphonique devient un véritable enjeu puisque cette nouvelle forme de société de communication (plus distante, éphémère et éclatée) permet plus de « choix identitaire (…) et d’opportunités de rencontre » (p. 140). L’auteur rapporte d’ailleurs les propos d’un artisan dans son ouvrage qui illustre bien cette notion « rester en dehors, c’est ne plus exister », on entend exister socialement et économiquement. 1.2. Les changements occasionnés par son apparition L’apparition du téléphone portable n’est pas restée sans conséquence, car en plus de pouvoir être approprié et personnalisé par chacun, il a occasionné des changements notamment au niveau de la gestion du temps. Mais tout d’abord, nous tenons à rappeler que contrairement au téléphone fixe qui relie des lieux, le téléphone portable relie et met en communication des individus : ces 9 Http://www.20minutes.fr/article/368450/France-Joelle-Menrath-Pour-les-ados-le-portable-est-un-musee-de-soi.php, Joëlle Menrath étant l’une des chercheuses ayant participé à l’étude réalisée par l’AFOM « La place du téléphone mobile dans la société » 10 Article d’Emmanuèle Peyret datant du 25 juillet 2006 « le téléphone portable outils anti-fâcheux » sur le site www.liberation.fr (consulté le 26/12/2010) 6 derniers devenant ainsi des « nœuds de tous les réseaux »11 puisque de n’importe quel endroit ils peuvent entrer en communication avec n’importe qui. Avec cet outil la communication est perpétuellement possible. Cette nouvelle organisation du temps se divise en deux aspects : rapidité et « dédoublement du temps ». Premièrement, dans l’introduction de son ouvrage Francis Jauréguiberry explique que le téléphone portable a été crée pour « suivre l’évolution de la société : (…) de plus en plus éclatée (…) entre plusieurs lieux, tâches, rôles et passions. ». Plus concrètement, il permet de jongler plus rapidement entre différentes bulles relationnelles (famille, amis, travail, etc.), de s’organiser à distance, d’économiser du temps, etc. L’auteur nomme cette activité le « zapping », que nous avons interprété de cette façon : nous supposons que le téléphone fait ici métaphoriquement office de télécommande entre les différents aspects de la vie de son propriétaire. Par exemple, il permet de réaliser instantanément le souhait de contacter quelqu’un, il n’y a plus aucune attente. Nous supposons que cet apport du téléphone portable permet de densifier le temps et de le rentabiliser grâce à une meilleure organisation. Deuxièmement, plus que de la rapidité, le téléphone portable permet aussi de superposer différentes sphères temporelles, comme s’il donnait accès au don d’ubiquité. Par exemple lors d’une conversation téléphonique, une personne cumule un temps physique (réel et corporel) avec un temps médiatique (discussion télécommunicationnelle) (Les branchés du portable, p. 48) ; cet individu est donc à deux endroits en même temps : là où il se trouve physiquement et en auprès de la personne avec laquelle il s’entretient (disparition des frontières spatiales et temporelles). Cet aspect permet de modifier le quotidien, puisqu’il permet de gérer son temps autrement : par exemple en attendant un appel professionnel important en faisant ses courses, voire de le fuir : contacter un proche ou un membre de sa famille pour échapper un moment la réalité de son travail. Pour conclure nous partons du fait que la place du Smartphone dans la société est sensiblement la même que celle du téléphone portable. En revanche pour essayer de distinguer les pratiques personnelles de celles influencées par la publicité, nous avons du également nous pencher sur des ouvrages traitant de l’influence des médias, et plus particulièrement de la publicité. 2. L’influence des médias La publicité est abondante dans les médias (presse, TV, radio, affichage, etc.) mais ces deux éléments sont fondamentalement différents puisque l’un est le support de l’autre. Ainsi, nous allons les traiter séparément puisqu’ils ont tous deux une influence différente sur les individus. Tout d’abord nous verrons brièvement l’influence des médias en général (et plus particulièrement la télévision car il nous a semblé que les publicités télévisuelles étaient plus complexes et plus stratégiques) et dans une deuxième partie l’influence de la publicité. 2.1. Les effets des médias sur les masses et les individus Savoir combien de personnes sont touchées par un média et qui sont elles a toujours intéressé les professionnels travaillant dans, avec ou pour les médias. Car cette information permet d’adapter son message à une certaine cible et d’en favoriser la réception. Mais ce qui semble être le plus important à savoir est ce qu’elles en retiennent, ce qui marque leur 11 Propos tenus par Marc Guillaume dans le premier dossier Réseaux intitulé « La communication itinérante » 7 mémoire car c’est à partir de là que l’on peut construire une identité d’une marque ou d’un produit (Rémy Reiffel)12. De plus il faut prendre en compte le fait qu’un message conçu est très rarement reçu de la façon désirée. C'est-à-dire qu’il y a deux effets bien distincts : l’effet de visée (en amont) et l’effet produit (en aval), ce dernier étant inconnu des concepteurs et très recherché, d’où l’existence de nombreuses enquêtes de satisfaction. Il y a différentes raisons pour lesquelles les personnes touchées par les médias n’interprètent pas les messages de la même façon : - Tout d’abord les caractéristiques de chacun (âge, activité professionnelle, classe sociale, etc.) d’où la nécessité de bien cibler des catégories d’individus et de leur proposer un programme qui aura le plus de chance de plaire (sachant que l’on ne peut jamais anticiper le succès ou l’échec d’un message, il y a toujours une certaine marge de risque) - Les « communautés interprétatives » (Lionel Bellenger)13 où le filtrage des messages est collectif et peut parfois constituer une véritable résistance au message ; ici la réception est considérée via « la réalité culturelle et interprétative » des individus et de leurs « expériences personnelles » ; « La communauté interprétative s'apparente ainsi à un « sous-groupe culturel » au sein duquel les membres partagent un même bagage de connaissances et qui s'identifient à certaines normes internes qui régulent leur action et leur interprétation de la réalité sociale. » (Guylaine Proulx)14 - Et selon une certaine forme de « négociation » du public (pensée culturaliste), c'est-à-dire que les récepteurs filtrent et sélectionnent les messages selon leur propres situations. Mais malgré cette forme de « résistance » qui ne permet pas aux médias d’insuffler leurs messages tels quels dans les esprits, il ne faut pas nier qu’ils ont tout de même un certain pouvoir sur les opinions et les éléments retenus. En effet, Mac Combs et Haws parlent de l’«agenda setting », c'est-à-dire la programmation des termes abordés par les médias. Ainsi ces derniers nous « disent quoi penser », ils imposent des thèmes qui engendrent des discussions et des débats bien ciblés. Ils décident de ce qu’ils souhaitent mettre en lumière, exagérer, écarter ou faire oublier15. Et tout cela passe par la hiérarchisation des informations et par l’occultation16. Ainsi, les médias dans leur globalité on un effet sur les opinions et les comportements de la population (vote, consommation, identification etc.). Cette partie nous permet donc d’affirmer que les supports de la publicité (TV, presse, radio, internet, etc.) sont influents et peuvent jouer un rôle dans le mode de vie des individus. Dans un second temps nous nous pencherons davantage sur la publicité elle-même puisque c’est elle que nous souhaitons analyser pour répondre à notre problématique. Nous essayerons de définir si elle aussi peut avoir un quelconque impact dans la société. 12 Sociologie des médias, p. 118 13 Du bon usage des médias, p. 109 14 Mémoire « Les communautés interprétatives d'un enjeu environnemental médiatisé : le cas de l'exportation en vrac de l'eau douce canadienne » p. 13 15 Lionel Bellenger Du bon usage des médias, p. 115-116 16 « La spirale du silence » d’Elisabeth Noëlle-Neumann et Katz : http://www.12manage.com/methods_noelleneumann_spiral_of_silence_fr.html 8 2.2. L’impact des la publicité La publicité peut avoir différentes définitions selon les opinions. D’après le Petit Robert il s’agit « d’exercer une action sur le public à des fins commerciales ; le fait de faire connaître [un produit ou un service] et d’inciter à l’acquérir » ou encore de « faire connaître une marque, à produire ou a entretenir une image de marque (…) à promouvoir les produits ou services d’un secteur d’activité économique. » On peut extraire de cette définition ceci : la publicité ne fait pas qu’exposer quelque chose, elle le promeut pour inciter ses récepteurs à l’acheter. Ainsi influencer est son objectif premier. La question est de savoir comment y parvient-elle ? La publicité a différentes stratégies pour garantir au mieux son succès, nous allons en énumérer quelques unes : - Sublimer la réalité d’un produit afin de stimuler le désir de consommer, en faisant appel à des arguments forts même s’ils n’ont pas toujours un rapport direct avec le produit concerné. Par exemple un yaourt transformé en médicament pour mieux digérer alors, qu’il ne s’agit que de lait fermenté. - Présenter des individus parfaits : à la mode, souriant, en accord avec les exigences esthétiques (mince, bronzé, etc.). L’objectif étant de susciter chez le récepteur le désir de leur ressembler. - L’exaltation : montrer dans la publicité que consommer le produit est un véritable plaisir. - Faire appel à des vedettes (exemple de Georges Clooney dans la publicité Nespresso) - Citer des chiffres et statistiques pour crédibiliser le produit. - Pratiquer la répétition, sans doute pour marquer la mémoire et ainsi attirer le regard sur le produit lors de l’achat. - Jouer avec les émotions : peur pour les campagnes de prévention, empathie avec l’usage de nourrissons, humour, étonnement, etc. - Emplacement stratégique : affichage sur les parkings de supermarché, ou spot télévisé à heure de grande écoute par exemple.17 Cette liste est loin d’être exhaustive car les publicitaires sont toujours à la recherche d’idées originales pour surprendre et marquer la mémoire. Mais ces stratégies sont à utiliser avec précaution car elles ne garantissent pas toujours le succès. 17 Http://www.media-awareness.ca/francais/ressources/educatif/documents_accompagnement/strategies_publicitaires.cfm 9 Pour tenter de répondre au mieux aux attentes de la population vis-à-vis de la publicité, une étude du TNS Sofres18 a cherché à identifier les facteurs qui font que l’on aime ou pas une publicité. Leur analyse se résume dans ce tableau : Éléments positifs Éléments négatifs Publicité en phase avec le monde dans lequel le récepteur vit Publicité répétitive, utilisant toujours la même recette Bien faite et agréable à regarder Qui donne trop de place à l’argent et à la réussite matérielle dans la société Se renouvellent et ont su évoluer Prennent les gens pour des imbéciles Divertissante et distrayante Montrent toujours le même genre de personnes Surprenante, originale et créative Manipulatrices - Omniprésents, envahissante - Superficielles et artificielles Cette étude se termine ainsi : « Pour séduire le plus grand nombre, la pub doit avant tout être pensée comme un divertissement, une distraction ». Et il semblerait que la publicité plaît. Suite à ces différentes stratégies pour que d’une part le produit promu et d’autre part la publicité en elle-même plaisent, on constate selon une étude réalisée en octobre 2005 par le département Stratégies d'Opinion de TNS Sofres que : la population reconnaît être influencée dans ses achats quotidiens par ces spots, affiches, annonces, etc.19 Pour conclure, les médias et plus particulièrement la publicité ont une certaine influence sur la population selon de nombreux auteurs et études. Mais la question est de savoir de quelle façon et à quel degré ? Pour cela nous allons, dans la partie suivante, essayer d’extraire les représentations qui sont créés par les publicités concernant les Smartphones. 18 Intitulé « Publicité et Société 2010 : back to basics » 19 http://www.lombard-media.lu/pdf/FR/TNS_image_pub_Francais_1205.pdf 10 B. le Smartphone à travers la publicité 1. L’analyse de corpus publicitaires Les discours des publicités expriment et immortalisent ce que des annonceurs imaginent des usages, des usagers, etc. Ils mettent en scène le Smartphone, son fonctionnement, ses applications et ses utilisateurs potentiels. Une analyse de ces discours peut donc nous permettre de repérer les imaginaires* associés au Smartphone. Parmi tous les médias nous avons choisi de nous intéresser plus particulièrement à la télévision car elle représente le premier investissement publicitaire des grandes entreprises en 200920. Notre méthodologie pour cette étape consiste à réaliser une grille d’analyse de plusieurs publicités afin de nous permettre d’avoir une vision plus synthétique et prendre ainsi en considération leurs spécificités. Puis notre choix s’est porté sur les deux marques de Smartphone les plus visibles dans les publicités en France à savoir Apple et BlackBerry. 1.1. La marque Apple Apple est une entreprise multinationale américaine crée en 1976 dont les produits les plus connus sont les ordinateurs Mac, les Ipod, Ipad et bien sur les Iphone. Selon un article de l’Expansion de février 201021, elle domine avec 50% des ventes en valeur sur le marché des Smartphones grâce aux Iphones. Nous avons décidé d’analyser les artefacts suivants c’est-à-dire des spots publicitaires pour la première génération d’Iphones (année 2007 et 2009) et une autre pour l’Iphone 4, dernière génération (année 2010). Dans toutes les publicités des Iphones 3G et 3GS, nous voyons simplement le Smartphone et une main assez neutre : il n’y a pas de distinction de sexe (vernis sur les ongles), ni d’âge (rides). La voix off masculine est toujours présente tout comme la musique de The Submarine22, c’est sans doute, un moyen de créer un lien et une reconnaissance plus rapide pour le téléspectateur. Le ton est très sobre, pas de mot compliqué et va a l’essentiel. Ces publicités impliquent directement le spectateur avec par exemple les pronoms possessifs comme « vos » et « votre » dans son énonciation. On peut supposer que tout le monde peut se sentir concerné et avoir l’impression que c’est sa main qui tient le téléphone. Au lancement de son premier Iphone 3G en novembre 2007, les publicités étaient neutres, sans cible particulière et étaient explicatives. Elles jouaient essentiellement sur le design et la performance avec la qualité de son internet « pas une pâle imitation », « pas une version mobile »23. Cette publicité joue sur le fait que l’Internet est le contenu convoité et que l’Iphone est le nouveau contenant ou « média » permettant un accès permanent à Internet. Puis petit à petit les spots visent des catégories de cibles plus spécifiques et misent sur la diversité d’applications avec le slogan « il y a une application pour a peu près tout ». Ils deviennent alors beaucoup plus démonstratifs. Apple met l’accent à chaque fois sur des valeurs, des mots ou bien encore des objets qui sont propres à chaque catégorie. On y 20 Article de Paule Gonzales datant du 14 septembre 2010 « La télé, premier média publicitaire dans le monde » sur le site www.lefigaro.fr (consulté le 03/12/2010) 21Http://www.lexpansion.com/high-tech/apple-detient-50-du-marche-des-smartphones-en-france_226278.html (consulté le 28/10/2010) 22 The Submarines est un groupe pop-rock américain qui a composé « You, me and the bourgeoisie » qui a été choisi pour plusieurs publicités d’Apple. 23 Publicité de Apple datant de 23 novembre 2007 « Internet » (consulté le 12/11/2010) 11 trouve par exemple la cible des professionnels dans lesquels on peut observer la notion de rapidité et des outils qu’ils sont amenés à utiliser comme : «mails professionnels » et «calendrier professionnel »24. Les jeunes y sont aussi représentés avec l’utilisation de mots comme « fac », « studio », « parents » et les notions de liberté et de famille25. Pour finir on peut aussi constater qu’il y a des publicités qui jouent sur des intérêts généraux et qui peuvent donc concerner un plus grand nombre avec des verbes comme : « gér er », « apprendre », « aimer »26. Cette campagne nous rappelle que l’Iphone peut faire plusieurs choses à la fois, téléphoner mais aussi utiliser une application en même temps. En ce qui concerne maintenant les publicités de l’Iphone dernière génération, aussi connu sous le nom de l’Iphone 4, Apple a sorti dernièrement quatre spots en juin 201027. Cette campagne s’appelle « Face Time* » et montre toujours des conversations en visiophonie* entre plusieurs personnes. Les vidéos sont orientées selon nous vers quatre moments clés pour ce type d’utilisation : la rencontre, le sourire, la grande nouvelle et la démonstration. La main de l’utilisateur comme on pouvait la voir dans les spots de l’Iphone première génération a disparu et a laissé place a des mises en scène du quotidien. Il n’y a plus de voix off, tout passe par l’image et les symboliques : comme on a pu le voir auparavant on peut y retrouver tous les moments forts d’une vie comme une naissance ou l’obtention d’un diplôme. Nous avons le sentiment qu’Apple voulait créer une émotion et émouvoir les téléspectateurs. Nous pouvons remarquer que la marque a décidé d’utiliser la musique de Louis Armstrong28 que l’on retrouve à chaque fois comme un fil conducteur (comme une saga). Elle est parfaitement en accord avec le thème de la campagne : elle parle de joie, de sourire et de douceur. On peut donc faire l’hypothèse que cette chanson peut renforcer le sentiment d’émotion et de proximité que le téléspectateur peut avoir en regardant ces quatre publicités. Ne serait ce pas aussi une façon de casser l’image de produit haut de gamme et inaccessible d’Apple ? En effet, les acteurs des spots peuvent ressembler à n’importe qui d’entre nous : sexe, âge, origine et même handicap différent. Apple semble vouloir toucher un maximum de monde et de n’importe quelle catégorie sociale. Nous supposons également qu’Apple cherche à donner au consommateur le sentiment de faire partie d'une communauté sociale* d’utilisateur unique « uniquement sur l’Iphone ». Il joue sur sa diversité « il y a des applications pour a peu près tout » et surtout sur sa performance : fluidité, rapidité et technologie. Cependant Apple n'oublie pas de rappeler la fonction basique de son Smartphone : l’appel. Selon Barthes, le mythe est un signe, un outil de l’idéologie, réalisant des croyances dans le discours et dont la doxa* est le système. Afin de trouver le mythe du Smartphone diffusé à travers de nombreuses publicités, nous étudierons aussi comment sont construites les campagnes de l’un des concurrents d’Apple, c'est-à-dire BlackBerry. 24 Publicité d’Apple datant du 8 avril 2009 « Vraiment très professionnel » (consulté le 12/11/2010) 25 Publicité d’Apple datant du 16 mai 2009 « Logic Immo » sur le site (consulté le 13/11/2010) 26 Publicité d’Apple datant du 7 décembre 2009 « Nature » (consulté le 12/11/2010) 27 Publicité d’Apple datant de juin 2010 « FaceTime » (consulté le 12/11/2010) 28 Louis Armonstrong musicien américain de Jazz est l’auteur de « When you’re smiling » pour la dernière campagne d’Apple. 12 1.2. La marque BlackBerry BlackBerry est une marque de téléphones intelligents créé par une entreprise canadienne Research In Motion (RIM). Elle est commercialisée en France depuis fin 2001 et détenaient 11,6 % des ventes en valeur sur le marché des Smartphones en 2009 selon l’Expansion. Blackberry est surtout connu par les professionnels. Pour cette analyse nous avons choisi d’étudier la dernière campagne de BlackBerry en France qui s’appelle « aimez ce que vous faites »29. Les cinq spots de cette campagne mettent en situation des personnages typiques qui parlent directement aux téléspectateurs afin sans doute de mieux capter leur attention. Ces personnes parlent en tant qu’utilisateurs d’un BlackBerry et non pas comme des commerciaux, ils décrivent ce qu’ils en font. On peut donc supposer que ces discours peuvent être perçus comme plus sincères et plus crédibles aux yeux des téléspectateurs. Toute la campagne est accompagnée d’une même musique du groupe Tuneyards30 pour que le téléspectateur puisse faire le lien entre la campagne, le produit et la marque. Ce groupe est peu connu mais peut supposer gagner en notoriété grâce à l’image de marque de BlackBerry. Cette musique est dynamique ce qui, d’après nous, est en cohérence avec une cible plutôt jeune et peut ainsi peut-être permettre à BlackBerry de casser l’image d’un téléphone réservé uniquement aux professionnels. BlackBerry veut s’orienter vers une cible toujours aussi spécifique mais désormais plus unique en s’appuyant sur des valeurs qui font appel a l’émotion tel que la réussite et la création. Chaque spot représente un métier, un univers, une passion tel que la mode, le sport, la musique, l’art, etc. Les acteurs de ces publicités sont plutôt jeunes, aisés, stylés, dynamiques et surtout passionnés. La notion de sociabilité est très présente dans chacune des publicités de cette campagne car tout les personnages sont en groupe, s’amusent et on entend plusieurs fois le mot « amis » dans certaines d’entre elles. L’annonceur joue aussi sur la notoriété des applications connues comme Google, Facebook, Twiter, etc. pour attirer tout en rassurant les téléspectateurs. BlackBerry semble vouloir renforcer l’image de son Smartphone comme un téléphone unique et personnel avec par exemple l’expression « mon BlackBerry ». Cette image est de plus appuyée par le fait qu’il est toujours dans la main des personnages qui s’adressent aux téléspectateurs. Il insiste sur le fait que grâce aux BlackBerry les utilisateurs peuvent restez en contact avec tout ce qui est important pour eux et cela aussi a l’aide des fonctionnalités performantes dans le temps «quelques secondes », « temps réel » et dans le détail « voir tout ». Après avoir analysé un corpus publicitaires auprès des marques de Smartphone les plus connues en France : Apple et Blackberry, nous nous sommes aperçu que ces deux annonceurs partageaient des valeurs communes telles que la liberté, la sociabilité et la performance. Nous nous sommes donc demandé quelles étaient les raisons de ce choix et ce que ces valeurs représentaient. C’est pourquoi nous nous sommes ensuite intéressées au fond, c'est-à-dire aux imaginaires créés dans toutes les publicités autour du Smartphone. 29 Campagne de Blackberry datant d’octobre 2010 « Aimez ce que vous faites » (consulté le 12/11/2010) 30 Tuneyards est un groupe américain Lo-fi * qui a composé « Fiya », chanson choisi par Blackberry pour sa campagne « aimez ce que vous faites ». 13 2. Le mythe du Smartphone Comme pour toute innovation, l’imaginaire social du mobile classique a été dans un premier temps fortement influencé par les signes. On peut constater à travers les travaux de Lise Renaud31 que cet imaginaire s’est ensuite diversifié au fur et à mesure de son appropriation par les utilisateurs. Ces usages ont donné lieu à de nouvelles représentations circulant dans la société, représentations qui ont été à leur tour réemployées par la publicité. La publicité s’avère en effet une grande consommatrice de stéréotypes sociaux et culturels, ce qui lui permet de produire des discours immédiatement compréhensibles par le plus grand nombre. D’où l’intérêt de se demander ce qui est symbolisé aujourd’hui à travers l’objet « Smartphone ». 2.1. Les usagers et les valeurs représentés Plusieurs images d’usagers sont représentées dans les spots publicitaires analysés sans qu’aucune ne soit plus importante qu’une autre. Néanmoins, de manière générale on peut distinguer une figure de référence chez tous les annonceurs, celles d’une personne jeune, urbaine, passionnée, dynamique et plutôt aisée. Les Smartphonistes sont toujours en contact, ont de nombreux amis et sont heureux. Contrairement aux publicités pour des téléphones classiques, les femmes sont autant présentes que les hommes. Elles ont aussi bien le statut d’appelé, que d’appelant. En ce qui concerne la tranche d’âge, elle se situe généralement vers une trentaine d’années. Cependant on a pu constater qu’on pouvait y trouver des personnes-âgés mais jamais encore des personnes ayant moins de 18 ans. On peut donc supposer que les annonceurs ont essayé d’ouvrir le plus largement possible la cible. La campagne d’Apple « FaceTime »32 est très représentative car on y voit des personnes d’âges et d’origines différentes. Ce sont d’ailleurs les seuls spots pour Smartphones où l’on a vu des individus de plus de 70 ans et des personnes handicapées. A travers notre analyse, nous avons aussi pu constater que l’argumentaire publicitaire se tourne vers trois formes de stratégies. La première est une stratégie basée sur une valeur de performance car tous les arguments sont tournés vers des fonctionnalités telles que la rapidité, la fluidité, l’accessibilité et la facilité. Cette performance donne l’image d’un réel progrès technologique, d’un accessoire de la personne et d’un objet qui valorise le « pouvoir faire » de son possesseur. Pourrait-on alors associer le Smartphone au mythe d’un produit personnel ? Nous en avons déduit qu’il en serait très proche car en plus de mettre en avant la performance, les publicités mettent l’accent sur le fait qu’il peut être personnalisé, individualisé et qu’il est le téléphone de « la nouvelle génération » qui va révolutionner : « ma vie, mes envies, mes applications »33. La Mythologie du portable de Laurence Allard34 nous explique que « le principe de co-design des objets communicationnels par le consommateur est au cœur des processus d’innovation technologique contemporains pilotés par l’usage » car face à un a marché de masse saturé de produits standards, la stratégie « d’user turn »35 consiste à développer une offre personnalisable (p. 10 et 31). 31 Article datant de 2007 : Les représentations du téléphone mobile : des imaginaires aux pratiques 32 Publicité 33 d’Apple datant de juin 2010 « FaceTime » sur le site (consulté le 12/11/2010) Publicité de Samsung datant du 9 novembre 2010 « Samsung Wave 723 » (consulté le 12/11/2010) 34 Laurence ALLARD : maître de conférences en Sciences de la Communication et est chercheure associée à l’Université Paris 3-IRCAV 35 La stratégie de pilotage par l’usage a été identifiée en 1980 par Alvin Toffler sous la problématique de la « customisation de masse » 14 La seconde stratégie, est quant à elle, bâtie sur une valeur d’usage puisque les arguments récurrents jouent sur la multiplicité et la diversité des applications. Les spots publicitaires mettent en scène l’usage de ces nouvelles applications et adoptent une logique d’énumération des autres possibilités d’usages. C’est donc l’image d’un objet polyvalent. Ce nouveau téléphone répond à la demande et aux besoins du consommateur et va même jusqu’à les anticiper par la création de nouvelles applications. Ceci dans l’objectif de satisfaire d’avantage et d’être plus innovant comme on peut le voir entre autre avec le slogan de l’Iphone «il y a une application pour à peu près tout». Pour finir la troisième stratégie est fondée sur une valeur d’image car les annonceurs s’orientent vers une communication de marque. Le Smartphone est donc présenté comme un objet renforçant une idée d’appartenance et fédérant une communauté. Il reflète par conséquent une image de « tribu » et de rang social : avoir un Smartphone c’est comme faire parti d’un groupe, exister et être important aux yeux des autres. Pour renforcer cette idée d’appartenance, comme on a pu le voir dans la partie précédente, les annonceurs misent sur la proximité avec leurs cibles : les énonciations s’adressent directement aux téléspectateurs, le vocabulaire et les usages sont adaptés à chaque cible (« studio » pour les jeunes et « bourse » pour les professionnels) et ils jouent avec leurs émotions. 2.2. Les usages véhiculés Durant la période étudiée nous voyons dans la plupart des publicités la mise en scène d’autres usages (hors l’appel) de plus en plus nombreux comme l’Internet, les jeux, des applications en tout genre, etc. Les usages les plus représentés sont ceux de l’Internet et des réseaux sociaux qui sont désormais très utilisés et acceptés socialement par la majorité des français. Cela peut être un atout important pour les annonceurs face à la concurrence : l’acceptation sociale d’un autre outil peut faciliter l’insertion d’un autre. Néanmoins nous avons pu constater que dans les dernières publicités d’Apple, l’usage de l’appel téléphonique est souvent mis en images à la fin des spots, comme s’il voulait éviter que les téléspectateurs perdent de vue sa fonctionnalité première de téléphone. Le Smartphone n’est plus associé à un seul domaine puisqu’on y repère des usages d’applications professionnels mais aussi d’applications plus orientées vers le loisir et la culture. Cet objet se rapproche du mythe d’une communication réussie : l’utilisateur n’est jamais perdu, ni dérangé puisqu’on peut faire plusieurs choses en même temps. Désormais grâce à un Smartphone les utilisateurs dialoguent en permanence (appel, internet, réseaux sociaux). Les publicitaires jouent sur le mythe d’un lien social renouvelé, c'est-à-dire sur le fait qu’il y a une émancipation des distances spatiales et temporelles encore plus grande qu’avec un téléphone classique. C’est un objet qui permet en tous lieux d’avoir tout son entourage à portée de main, et à portée de voix. En ce qui concerne les lieux d’utilisations ils s’inspirent en général de situation réelle. On y trouve un contexte narratif qui met les personnages en situation et les rendent plus réels et proches des téléspectateurs. Il y a majoritairement des mises en scène à l’extérieur (rue, terrain de sport, magasin, etc.) néanmoins il y en a tout de même qui sont réalisées au domicile de l’usager (surtout dans les dernières publicités d’Apple). On a donc supposé que les publicités des téléphones portables classiques ayant insisté sur la mobilité de l’objet, celles des Smartphones aujourd’hui n’auraient donc plus besoin de mettre en valeur cette particularité. La mobilité d’un téléphone mobile ou d’un Smartphone serait donc acquise. Toujours plus caricaturale que la réalité, la publicité ne maintient plus une frontière entre les usages du mobile et ceux du fixe. Le mobile est souvent associé aux conversations courtes, utiles et toujours joignables même en déplacement. Le fixe est quant à lui lié aux relations longues, d’ordre privé et affectif. Le Smartphone est représenté comme ayant les avantages des deux : ce téléphone est par conséquent un objet plus intime et plus proche de ses utilisateurs. De plus le fait de créer des mise en scène à domicile serait peut être aussi 15 une stratégie de proximité. Tout se passe comme si le Smartphone était doté d’un univers de sens beaucoup plus étendu, plus riche et plus complexe que son semblable le téléphone portable. Ils réussissent à faire de cet objet, un objet quotidien grâce aux autres objets avec lesquels il entre en système (agenda, montre, etc.) c’est donc un quotidien organisationnel mais aussi affectif qui est employé. Ce panorama des différentes représentations du Smartphone dans les publicités que l’on a étudiées, peut nous amener à penser qu’il s’agit d’un téléphone vraiment différent et qui permet de tout faire, que ce soit d’ordre privé ou professionnel. Les annonceurs semblent vouloir créer un esprit de communauté autour d’un objet performant et polyvalent. Cette mythologie, « (…) s’est construite, du vieux rêve de la communication ubiquitaire sans fil aux usages expressifs d’une technologie polyfonctionnelle et personnalisable » (Laurence Allard, p.8). Nous essayerons grâce à une enquête de découvrir, dans la partie suivante, si le monde imaginaire créé autour des Smartphones par les annonceurs se rapproche du réel et si les usages des consommateurs peuvent être influencés par ces représentations. 16 II. Enquête qualitative et résultats A. La méthodologie Concernant la méthodologie employée pour répondre à notre problématique, nous avons essayé d’organiser au mieux notre temps de travail. Pour cela nous avons commencé par réaliser un cahier des charges36 exposant les différents cadres que nous nous sommes imposées : contexte, questions posées, objectifs, etc. Ce récapitulatif nous a servi en premier lieu à nous mettre d’accord sur la formulation de nos idées et dans un second temps à entreprendre un cheminement adéquat et à s’y tenir. Ensuite nous avons déterminé la meilleure méthode possible pour répondre à notre problématique: Le Smartphone, une appropriation personnelle ou influencée par les médias? 1. Le choix de la méthode Nous avions le choix entre différentes possibilités : analyse de corpus, questionnaire, entretien(s) ou encore observation. Nous avons jugé que vis-à-vis de notre problématique le questionnaire était la méthode la plus appropriée puisqu’elle nous permettait de nous adresser directement aux utilisateurs. Nous avons donc commencé par réaliser un questionnaire quantitatif37 d’une vingtaine de questions que nous souhaitions traiter sur le logiciel Sphinx. Les raisons de ce choix étaient assez simples : nous venions toutes deux d’un IUT Information-Communication dans lequel nous avions appris à réaliser des enquêtes et à les traiter. Nous voulions obtenir des données quantitatives sous forme de schémas et de pourcentages afin d’en extraire les tendances actuelles d’usages des Smartphones. C’est ici que nous avons rencontré notre première difficulté : afin de comprendre quels usages de cet outil étaient influencés par les médias, ils nous a fallut cerner le mythe du Smartphone aujourd’hui véhiculé par les publicités. Or nous ne savions pas comment nous y prendre. Nous sommes donc allées nous entretenir avec Philippe Quiton, enseignant chercheur en science de l’information et de la communication à l’ICM. Mais avant de nous conseiller sur ce sujet il nous a en premier lieu donné quelques conseils pour améliorer notre questionnaire : nous tourner plutôt vers une enquête plus qualitative, retirer les questions superflues dont les réponses ne nous apporteraient aucun éléments pertinents (par exemple « avez-vous souscrit à un forfait illimité adapté ? »), ouvrir davantage les questions afin d’inciter la personne interrogée à s’exprimer, ou encore à retirer certains termes qui pourraient influencer les réponses (par exemple « impact » qui était trop négatif, ou « Smartphone » qui aurait pu inciter les interviewés à définir ce terme par sa traduction française littérale « téléphone intelligent »). Et pour compléter notre enquête Philippe Quiton, nous a également conseillé d’ajouter aux réponses des personnes interrogées nos observations personnelles (leurs hésitations, s’ils répondent tout de suite ou prennent le temps de trouver leurs mots, leurs réactions, s’ils demandent de répéter la question, etc.). Ces apports supplémentaires nous ont permis de sélectionner des citations intéressantes, de pouvoir interagir avec la personne interviewée en fonction de son comportement et de ses propos pour la relancer et l’inciter à s’exprimer d’avantage. 36 Cf. 37 annexe 1 Cf. annexe 2 17 Ainsi nous sommes passées d’une méthode d’enquête quantitative à une enquête qualitative avec observations.38 Mais cela changeait la constitution de notre échantillon. 2. Les caractéristiques de l’échantillon 2.1. Qui ? Au départ, en discutant de notre projet avec notre entourage il est ressorti spontanément que la cible à étudier était les jeunes de 15-25 ans. Mais lors de notre analyse d’un corpus de publicités sur les Smartphones (Cf. I.B) nous nous sommes rendues compte que toutes les générations étaient représentées (de la naissance à la retraite). C’est pourquoi nous avons décidé de constituer notre échantillon en trois tranches d’âge : moins de 25 ans, entre 25 et 45 ans et plus de 45 ans. 2.2. Combien ? Nous pensions, au début, interroger un petit nombre de personnes, c’est-à-dire trois individus par tranche d’âge ce qui nous faisait un total de neuf personnes. Car lors de notre formation précédente nous avons appris que pour réaliser des études qualitatives il était préférable de constituer un petit échantillon diversifié (allant de 1 à 30 interviewés) plutôt qu’un grand groupe de personnes trop homogène. Mais ensuite nous avons eu peur de ne pas avoir assez de matière pour répondre à notre problématique. De ce fait nous avons augmenté sensiblement le nombre de personnes que nous souhaitions interroger et nous sommes passées de neuf à quinze individus (soit cinq par tranche d’âge). Nous sommes tout de même restées à un petit nombre d’interviewés car nous nous sommes rapidement rendu compte qu’il était difficile de trouver des personnes ayant un Smartphone, appartenant à la bonne tranche d’âge et acceptant de nous consacrer environ quinze minutes pour répondre à notre questionnaire. 2.3. Où ? Lorsque nous pensions interroger que des jeunes de 15-25 ans, nous projetions d’effectuer ces questionnaires sur le campus à Saint-Martin-d’Hères ou à l’ICM, puis lorsque nous avons étendu notre échantillon aux autres tranches d’âges nous pensions le faire au centre-ville ou dans la rue (à des endroits et des horaires stratégiques pour toucher une population la plus diversifiée possible). Mais nous avons réalisé que ces choix n’étaient pas appropriés car notre méthode demandait beaucoup de temps, de prises de notes et d’observations. Nous risquions donc de nous voir refuser notre questionnaire ou de n’obtenir que des réponses courtes (la rue ne se prêtant pas à des questions trop longues ou trop nombreuses de part l’impatience des passants à retourner à leurs activités). Ainsi pour obtenir l’environnement calme nécessaire afin d’instaurer un climat de confiance avec la personne interrogée, nous avons décidé d’interroger à domicile des individus appartenant à nos propres réseaux sociaux. En effet pour noter les réponses et nos observations de chaque questionnaire, nous avions besoin de beaucoup de temps, d’un certain confort, de matériel (l’ordinateur nous a permis d’écrire plus rapidement pour consacrer d’avantage de temps à notre interlocuteur), d’une ambiance calme incitant à la confidence, etc. 38 Cf. annexe 3 18 3. L’élaboration du questionnaire 3.1. Question 1 : Cette question ouverte dite de connaissance, permet de recueillir la première image/perception qu’a la personne interrogée du Smartphone. Elle est très directe (à la limite de la justesse grammaticale) pour l’inciter à répondre de la façon la plus spontanée et naturelle possible. Elle laisse également une certaine liberté d’interprétation de la question, ce qui laisse la possibilité de s’exprimer. Cette question nous a donc permis d’encourager les personnes interviewées à partager leur point de vue. Il nous semble que cette question n’influence pas la réponse de l’interrogé d’une part parce qu’elle est ouverte, mais aussi parce que nous n’avons pas employé le terme « Smartphone » qui aurait pu inciter l’interviewé à répondre qu’il s’agissait d’un « téléphone intelligent » (traduction littérale du terme) et ainsi d’orienter la réponse vers les thèmes de l’innovation technique et des applications qu’elle permet. 3.2. Question 2 : Comme la question précédente, celle-ci est ouverte et permet de nombreuses possibilités de réponses et non pas uniquement à inciter l’énumération des différentes applications et outils qu’il rassemble. Cette question nous permet de comprendre comment la personne interrogée considère son téléphone en tant qu’outil et donc de voir si elle se l’est approprié (en fonction de son activité professionnelle, études, de leur personnalité, etc.) ou non. 3.3. Question 3 et 4 : Ces questions nous permettent de définir le lien physique qu’a l’interviewé avec son Smartphone : s’il est toujours allumé, toujours sur lui, etc. sachant que cette omniprésence du Smartphone dans le quotidien est une valeur véhiculée par la plupart des publicités de ce produit. 3.4. Question 5 : La fonction première d’un téléphone est de passer des appels (d’où le verbe téléphoner) mais dans cette question la personne interrogée doit numéroter par ordre de préférence les applications les plus utilisées : SMS, appels, vidéos, internet, etc. Nous pouvons par conséquent cerner si ces personnes ont détourné leur Smartphone de leurs fonctions d’origines (appels et textos) et s’ils utilisent en priorité les fonctions promus par les médias. 3.5. Question 6 : Avant l’internet 3G, les téléphones classiques avaient le WAP qui était beaucoup moins simple d’utilisation. Avec ces nouveaux téléphones, les individus peuvent accéder au même Internet que sur leur ordinateur. Cette innovation est aujourd’hui au cœur des publicités actuelles des Smartphones et le fait de savoir l’usage qu’ils en font est un moyen de voir s’ils se le sont approprié ou non. 3.6. Question 7 et 8 : Ces deux questions fermées dites de comportement permettent d’aller au-delà de l’utilisation du Smartphone, elle permet de constater s’ils achètent des applications pour augmenter le nombre de fonctions disponibles sur leur téléphone. Ainsi ces applications 19 achetées servent-elles leurs besoins véritables (appropriation personnelle) ou uniquement pour le plaisir de personnaliser leur Smartphone ? 3.7. Question 9 : Cette question ouverte a un lien direct avec notre problématique. Elle permet de voir si la personne interrogée est consciente ou non de l’impact de la publicité sur son utilisation du Smartphone. La réponse obtenue devra être analysée avec recul puisqu’il s’agira de leur propre point de vue et pas forcement la réalité. 3.8. Question 10 et 11 Cette question fermée dite d’attitude (ce qui est ressenti) permet de recueillir l’opinion des individus sur eux-mêmes et de leurs usages du Smartphone. Ici l’influence des médias sera peut-être perceptible si la personne interrogée reconnaît avoir désormais de nouvelles habitudes superflues ou si elle justifie ses usages du Smartphone pour tout. En résumé nous cherchons à savoir si ces personnes ont changé leur quotidien depuis qu’elles possèdent un Smartphone . 3.9. Question 12 et 13 : Ce Smartphone permet différents types de dialogue (appel, SMS, mails, réseaux sociaux etc.) et de façon instantanée. Cette question nous permet de savoir si avec cet outil qui apporte plus de « liberté relationnelles » les personnes interrogées en font une plus grande consommation ou non. 3.10. Question 14 et 15 : Ce qui est important dans cette question ce ne sont pas les termes choisis mais leur justification : s’ils se rapportent à des expériences personnelles ou s’ils sont formulés comme des généralités (peut-être induites par la publicité ?) Concernant la chronologie des questions nous avons suivi les principes de Sudman et Bradburn (1981) : du plus général au spécifique car la réponse à une question générale n'affecte pas la réponse à la question spécifique mais l'inverse peut être vrai. Nous avons créé plusieurs sujets comportant des questions traitant d’un même thème (usage et impact). Pour éviter que le questionnaire soit monotone nous avons essayé de varier les styles de questions. Cela permet d’éviter d’avoir le même type de réponse consécutive mais également de relancer, voire d’orienter la personne interrogée dans ses réponses. 4. La collecte des données Lorsque nous pensions réaliser une enquête quantitative, nous voulions utiliser le logiciel Sphinx pour traiter les données obtenues. Mais au fil de l’évolution de notre méthodologie, nous nous sommes aperçues que cela nous prendrait sans doute beaucoup trop de temps. Ainsi nous avons utilisé une méthode comparative en observant tour à tour les réponses à une même question, ainsi que les observations que nous avons faites dans l’objectif d’en retirer des similitudes et des différences (en fonction de l’âge des personnes interrogées et de leur activité (professionnelle ou études)). Nous avons procédé de façon méthodique, analysant les réponses question par question afin de conserver la chronologie que nous avions choisie pour le questionnaire. 20 Cela nous a permis de comprendre petit à petit comment les personnes que nous avons interrogées employaient et s’étaient appropriées leur Smartphone et de trouver progressivement des éléments de réponses logiques et ordonnés. Pour conclure sur la méthode que nous avons employée, nous reconnaissons que nous avons eu du mal à trouver notre cheminement, changeant quelquefois radicalement nos décisions (par exemple d’une enquête quantitative à une enquête qualitative ou encore la constitution de notre échantillon) ; et qu’il nous a été difficile de trouver à temps des personnes à interroger qui correspondaient au profil attendu et qui acceptaient de nous accorder un moment assez conséquent. Mais nous supposons tout de même que nous sommes parvenues à obtenir des informations de qualité suffisante pour répondre à notre problématique, des données que nous allons analyser dans la partie suivante. 21 B. Le Smartphone à travers la publicité « Révolution », « progrès » et « avancée technologique », c’est en tout cas ce que disent le plus souvent les personnes interrogées sur l’image des Smartphones. Beaucoup l’ont aussi perçu comme un objet utilitaire et un outil de travail qui permet de consulter ses mails et qui ressemble à un organisateur ou à un ordinateur. Il reste néanmoins perçu par certains comme un objet social : « avant j’en avais rien à faire d’avoir un téléphone pourri mais maintenant que j’ai celui-là, j’ai l’impression d’exister aux yeux des autres » ou bien encore qui « donne l’air plus classe ». Enfin il ne faut pas négliger les fortes dimensions affectives et conviviales qui y sont rattachées comme on peut le voir avec Elise, 22 ans : « Mon Smartphone, c’est le mien, il est unique ! Tout ce qu’il y a l’intérieur est à moi : tous les textos, les notes ou bien encore les photos ont été faites par moi ! ». Un aveu plus facile à formuler pour les femmes, bien que les hommes développent dans la suite de notre enquête un attachement particulier. On peut sûrement expliquer ce phénomène par le contexte actuel, où le mobile est un objet de masse dont l’usager peut aussi bien s’approprier l’apparence que le contenu. En effet, en plus des coques et des fonds d’écran qui sont déjà personnalisables sur les portables classiques, le Smartphone permet grâce aux applications de personnaliser son fonctionnement. En résumé, ces quelques lignes sont les premières images et perceptions des Smartphones que nous avons recueillies, il faut néanmoins noter que la réponse n’a pas toujours été facile à donner et les personnes interrogées ont souvent demandé une reformulation de la question ainsi qu’un temps de réflexion. Nous avons donc supposé que la question était un peu trop abrupte car nous n’avions exposé aucun contexte avant de les interroger. Mais c’est le seul moyen que nous avons trouvé pour recueillir la première impression des personnes sur cet outil sans les influencer par d’autres questions. Nous verrons ensuite quels en sont leurs usages et enfin si ce nouveau mobile a eu un impact sur leur quotidien. 1. Les usages des personnes interrogées Nous avons commencé par analyser l’usage des personnes interrogées, et nous avons pu en extraire 3 types. Le premier concerne un usage plutôt ludique et pratique car les personnes interviewées l’utilisent comme le mythe d’un objet parfait : un objet qui sait tout faire et qui est polyvalent. Cet outil est donc réellement ressenti comme s’inscrivant dans une dynamique de « convergence médiatique » car désormais on peut se servir des mails, d’internet, des réseaux sociaux ou bien encore regarder la télévision. Il est utilisé aussi pour se divertir ou tout simplement pour passer le temps : « regarder des films sur mon téléphone rend mes temps de trajets moins pénibles » comme le dit Marie, 27 ans. Le second concerne un usage informationnel et qui peut les guider. Un Smartphone permet à son utilisateur d’être au courant de tout et de ne pas se perdre grâce à la géolocalisation. Et le dernier usage est plutôt utilitaire puisque ce téléphone leur permet de s’organiser avec la possibilité de gérer leur agenda et de synchroniser leurs contacts. Il leur permet aussi de communiquer (téléphone, mails, SMS). Nous avons pu constater que l’usage de l’appel était systématiquement cité de manière banale ou sur un ton humoristique. Nous avons donc supposé que c’est une manière de rappeler que le Smartphone en plus de ses nombreuses fonctions, était un téléphone avant tout. Nous avons remarqué qu’en fonction de la personnalité, de l’âge ou de la profession de l’individu, l’usage était différent. Par exemple le côté ludique et communicationnel est plus important pour les jeunes que de pouvoir gérer son agenda. Cependant l’usage informationnel a été cité par toutes les personnes interrogées. En ce qui concerne le lien qu’il y a entre l’utilisateur et son Smartphone nous avons pu constater qu’il existait des profils extrêmement différents. Certains l’éteignent souvent selon 22 la situation comme par exemple Patricia, 66 ans, qui déclare que quand elle va voir une pièce de théâtre « je ne fais pas les choses à moitié, j’ai besoin d’être concentrée pour apprécier et je ne veux pas être dérangée ! ». Elle nous explique que c’est une manière de montrer que c’est elle qui décide quand les autres peuvent la contacter et n’a pas l’impression d’être dépassée par cette nouvelle technologie. D’autres au contraire, nous racontent : « Ça fait partie de moi, je regarde toutes les 5 minutes si j’ai un message ou autres choses », Lucile, 20 ans. De nombreuses personnes en parlent comme d’une « nécessité », d’une « boulimie » et ne pourraient s’en passer mais sont ensuite gênées et se rendent compte que ça n’est pas forcément le cas, comme Sylvain, 42 ans, qui nous dit : « c’est vrai que quand je suis à l’étranger au début ça me fait bizarre de ne pas l’avoir mais après j'oublie et je me sens bien ». Les réponses ont étonnamment surpris les personnes interrogées : « il faudrait que je pense à l’éteindre », « j’avoue ». Nous nous sommes rendu compte qu’il s’agissait plutôt d’une habitude et qu’ils ne savaient pas réellement comment nous l’expliquer. Ils se cachaient derrière des excuses qui paressaient futiles comme la flemme, l’oubli ou la difficulté au moment de le rallumer. Les rares personnes qui l’éteignaient nous ont répondu sur un ton humoristique qu’elles le faisaient par peur des ondes. Cette raison est elle vraiment à prendre en considération ou est-ce un moyen de cacher une forme de honte ? Mais en quoi serait-ce honteux de ne pas avoir son téléphone toujours allumé ? De manière générale, les personnes interrogées laissent toujours leur mobile allumé et le gardent toujours sur elles. La peur d’être injoignable et de ne pas être au courant revient fréquemment. Mais pourquoi vouloir l’être tout le temps ? Est-ce une forme d’addiction qu’a créé le Smartphone en temps qu’outil ou est-elle générée par la publicité? D’après notre enquête, dans les outils les plus utilisés nous retrouvons toujours en numéro 1, un usage communicationnel, c'est-à-dire appel ou SMS. Sachant que le SMS est souvent l’usage préféré des plus jeunes car il permet de gagner du temps et joue le rôle d’archive comme nous l’explique Axel, 26 ans : « J’aime regarder plusieurs fois mes messages, ça me permet d’avoir une trace, un souvenir à portée de main ». Ces deux fonctionnalités étaient bien les mêmes outils les plus utilisés que ceux d’un téléphone classique, la seule différence est que désormais nous retrouvons souvent Internet dans le top 3 des usages. Les personnes interrogées nous ont avoué que leur choix dans la hiérarchisation des outils venait beaucoup de l’émergence des formules illimitées. Les outils les moins utilisés sont les MMS et la musique. Les MMS car encore peu de gens sont équipés et peuvent donc les recevoir. La musique quant à elle est peu utilisée comme on peut voir dans les propos de Martin, 19 ans : « ça fait doublon avec mon lecteur MP3 ». Il y a eu beaucoup d’hésitation et de changement d’avis au moment des réponses à cette question sans doute car elle demandait de réfléchir sur ses usages véritables. On a eu une personne qui nous a même dit : « Je viens de penser que je ne joue jamais depuis que j’ai ce nouveau téléphone alors que j’étais sûre que oui ». Mais est-ce que les consommateurs utilisent en priorité les outils promus par les médias ? Comme nous avons pu le voir dans la partie sur le Smartphone à travers la publicité, Internet est beaucoup mis en avant et la fonction téléphonique réapparaît à la fin des spots. Pour ce qui est des SMS ils sont quasi-inexistants : on peut donc supposer que les utilisateurs ne sont pas influencés de ce point de vue et qu’ils se sont vraiment approprié cette fonctionnalité. La musique est, quant à elle, très présente, on a donc émis l’hypothèse que les annonceurs la considéraient comme une mode actuelle, en faisant ainsi de cette fonctionnalité un argument de vente qu’ils valorisent par rapport à d’autres. En résumé le Smartphone intègre de plus en plus de fonctionnalités mais les utilisateurs ne se servent que d’un nombre limité. Comme nous raconte Michel, 57 ans, cela le rassure et lui donne de l’assurance : « je n’utilise pas tout mais je sais que je peux le faire (…) si je le voulais vraiment, je pourrais ! » Pour l’usage d’internet sur le Smartphone nous savions que sa consommation est passée en peu de temps d’une activité occasionnelle à une réalité quotidienne selon TNS 23 Sofres. Les raisons sont les suivantes : la qualité, l’accès facilité et le contenu varié : « je m’en sers beaucoup, même pour bosser ou quand je suis dans le bus » nous communique Erwan, 32 ans. Les personnes interviewées nous ont confiées que pour les recherches qui demandaient du temps et de l’approfondissement, ils allaient très souvent sur leur ordinateur. De manière générale, ils vont sur Internet depuis leur mobile surtout comme un moyen de communication (réseaux sociaux, mails, blogs) et d’information (moteurs de recherches, dictionnaires, forums). Ces deux aspects sont les plus médiatisés, nous pouvons donc présumer que l’usage d’internet sur le mobile est sans doute influencé par les publicités. Concernant l’achat des applications, peu de personnes nous ont affirmé qu’elles en achetaient. Mais, qu’elles soient payantes ou gratuites, elles les utilisent pour personnaliser leur Smartphone en fonction de leurs désirs et de leur besoins. Si elles sont amenées à en acheter c’est plus pour des raisons particulières, pour faciliter par exemple les déplacements des professionnels avec un GPS ou un logiciel pour apprendre une langue. Jean-Baptiste, 23 ans, par contre nous avoue qu’il achète des jeux car dans les gratuits il y a seulement des « démos» qui le poussent à vouloir acheter la version complète. Il les achète donc car il les a essayé avant, c’est une forme de garantie pour lui. Pour tous, l’achat est toujours un acte prémédité qui demande soit de connaître l’application au préalable soit de se renseigner. Habituellement les utilisateurs n’en n’achètent pas pour des raisons économiques (notamment les jeunes) « il y a des applications qui coûtent plus cher que le téléphone luimême ! » et des raisons pratiques, tandis que les plus âgés ne savent pas comment faire ou n’ont pas le temps. Néanmoins nous avons pu constater que certaines personnes pratiquaient un détournement d’usage en débridant leur Smartphone. C'est-à-dire qu’ils modifient le système d’exploitation du téléphone afin d’y transférer n’importe quelle application non prévue par le fabriquant. Cette pratique est totalement illégale mais pourtant très utilisée. Nous pouvons donc admettre que l’achat des applications est souvent associé à un plaisir, plus qu’à un véritable besoin. La question suivante traite de l’impression qu’ont les personnes interrogées d’être influencées ou non dans leur usage du Smartphone. Et nous avons été assez étonnées car la plupart des personnes qui constituaient notre échantillon, nous ont répondu qu’effectivement, elles se sentaient influencées. Elles nous l’ont expliqué par le fait que la publicité représentait (pour la plus grande partie d’entre elles) un « vecteur d’information sur les possibilités d’outils », autrement dit qu’elle faisait office de démonstration, voire de notice. D’autres nous ont répondu qu’elle les a convaincu d’acheter ce produit, notamment Marie « c’est grâce à la publicité que j’achète mes applications et que je les utilise : à chaque fois qu’il y en a une nouvelle, je la veux ! ». Et nous avons été surprises de voir trois ou quatre personnes nous répondre spontanément après avoir entendu le terme « publicité » que leur Smartphone était “trop beau” ou “trop bien” et que c’était pour cette raison qu’elles l’avaient acheté. Un élément qui montre clairement ici l’influence de la publicité. Tandis que ceux qui ne se sentent pas influencés par la publicité disent avoir été plutôt influencés par leur entourage, comme Gil, 52 ans et Patricia qui ont testé les Smartphones de leur proches et découverts avec eux comment les utiliser dans leur quotidien avant de passer à l’acte d’achat. Dans l’analyse de ces réponses, nous avons essayé de rester vigilantes car les propos tenu par ces individus ne reflètent pas forcément la réalité. Nous avons pu le voir avec Jean-Baptiste qui nous a assuré ne pas être influencé par la publicité, mais qui nous a pourtant cité de mémoire un des slogans d’Apple quelques secondes plus tard : « il y a une application pour à peu près tout ». Nous admettrons que certains usages des Smartphones sont influencés par les médias comme on a pu le voir avec Internet par exemple ; alors que d’autres au contraire sont une appropriation totale des individus comme le SMS. Le Smartphone est utilisé comme 24 un ensemble d’objets qui demande des usages spécifiques, tout en restant un objet unique et personnel. Nous essayerons ensuite de savoir si les personnes interrogées ont ressenti ou ressentent un impact dans leur quotidien. 2. Les impacts dans le quotidien Toutes les personnes que nous avons interrogées ont répondu que depuis qu’elles possèdaient un Smartphone, des changements ont eu lieu soit dans leurs pratiques ou leurs habitudes. Même celles qui nous ont répondu par la négative, comme Antoine 32 ans. « Moi je pense que non, ce n’est pas l’appareil miracle » puis qui rajoute un peu plus loin « Parce que mon Smartphone est une substitution de tout ce que je faisais avant, en plus simple ». Il se contredit donc en nous expliquant que cet appareil lui a tout de même permis de s’organiser autrement : plus besoin de tant anticiper, le Smartphone lui permet de contacter quelqu’un ou de chercher une information à la dernière minute. Concernant les personnes qui nous ont affirmé que des changements s’étaient opérés dans leur vie avec ce nouveau téléphone, nous avons recueilli plusieurs fois les mêmes justifications. Par exemple la notion de dépendance revenait souvent notamment avec Elise: « Je pense que ça a changé puisque je suis toujours dessus et cela de plus en plus : je me lève, je le regarde : je suis une accro ! », des propos souvent accompagnés d’un sourire de culpabilité. Ou encore le fait qu’il y a une transformation en termes de spatialité et de temporalité « on peut être toujours joignable et disposer de toutes ses fonctions à chaque instant et n’importe où » répond Anne, 45 ans, sur le ton de l’évidence en ajoutant que de toute façon «il sert à ça ». Et enfin la notion de liberté revient assez souvent par rapport à la mobilité qu’il permet : ne pas attendre un appel important au bureau ou chez soi ou le fait de ne pas se sentir « coincé » devant un ordinateur pour accéder à Internet. Mais par rapport au changement au niveau des relations avec les proches des interviewés, l’avis est plutôt controversé. Il y a ceux qui nous répondent « non, rien n’a changé », parce qu’ils avaient déjà un forfait illimité avant de posséder un Smartphone ou qui n’ont pas l’impression de communiquer plus qu’avant avec cet appareil malgré les nouvelles fonctionnalités dont ils disposent. Mais nous nous sommes demandé si la tournure de notre question n’avait pas « effrayé » en quelque sorte la personne interviewée, puisqu’il n’est pas évident (lorsque c’est le cas) de reconnaître que l’on passe plus de temps avec son Smartphone qu’avec son entourage. On parle ici de la distinction entre la communication directe – considérée normale – et la communication médiatisée via un outil – qui peut donner une image de dépendance, de « geek ». Nous avons eu cette impression lorsqu’Erwan a répondu l’air inquiet « J’espère pas ! ». Et d’un autre coté, il y a ceux qui nous ont dit qu’ils communiquaient beaucoup plus depuis qu’ils possédaient un Smartphone. Ce dernier leur permet d’être plus réactif et de gagner du temps pour répondre à leurs proches donc par conséquent, leurs échanges sont plus fréquents. Pour se justifier, la notion de réseaux sociaux et de forfait illimité revient régulièrement : « maintenant, je peux même envoyer des messages débiles à mes amis » nous dit Eloïse, 17 ans. Pour finir nous avons demandé à ces personnes ce que leur Smartphone leur a apporté concrètement dans leur quotidien. Pour cela nous leur avons proposé des termes, tels que « mobilité » ou « dépendance » et nous avons observé leurs réponses et leur réaction pour faire notre analyse. Nous nous sommes aperçu que de manière générale les réponses à chacun de ces termes n’étaient pas liées directement à la vie de la personne. C’est-à-dire qu’elle ne commençait pas ses phrases par « dans mon cas » ou encore « moi je pense que », mais plutôt « il est comme ceci », « il apporte cela », « avec lui on est plus comme-ci », etc. 25 Comme s’il s’agissait d’une observation faite par une personne extérieure. Par exemple selon Antoine il « permet de ne pas attendre qu’on nous contacte, on peut le faire soimême », ou encore Lucille qui dit qu’« on a accès à internet plus rapidement, on va sur Google et on tape n’importe quoi ». Mais bien entendu, il y a eu des exceptions où quelques personnes nous ont toujours expliqué chaque terme par des expériences ou exemples personnels, comme Elise « je ne peux pas m’en passer. Une fois je me le suis fait voler, je n’allais pas bien du tout. C’est peut être un peu bête mais c’est comme si j’avais perdu un peu de moi et je ne voulais en aucun cas repasser sur un autre téléphone, je voulais celuilà… ». Mais dans l’ensemble et sans s’en rendre compte ces personnes se détachaient d’elles-mêmes pour parler de leur mobile. Nous voyons deux possibilités pour expliquer ce phénomène. Premièrement ces personnes déduisent que leur usage individuel du Smartphone est commun à la société, comme s’il s’agissait d’un usage collectif ; ou deuxièmement les messages publicitaires de ce produit ont profondément marqué leurs esprits et leurs mémoires au point qu’elles les considèrent comme une vérité générale et inéluctable. En revanche, dans les réponses, un terme particulier s’est détaché des autres : celui correspondant au mot « dépendance ». En effet, nous nous sommes aperçu que contrairement aux autres types de réponses, celle-ci était beaucoup moins neutre et se rapportait davantage à la vie et aux expériences personnelles des personnes interviewées : « je fais demi-tour si je ne l’ai pas dans la poche », « c’est dur de passer toute une journée sans… c’est triste à dire non ? » ou encore « je suis tout le temps en train de regarder si j’ai des SMS, c’est presque devenu un tic ». Nous supposons que cette forme de dépendance est une des conséquences de l’incorporation du Smartphone dans la vie de quelqu’un. Mais nous pouvons nous demander si cette dernière n’est pas également provoquée par la publicité, en effet la campagne actuelle de l’Iphone 4 d’Apple passe très fréquemment à la télévision et dans la presse, jouant la carte de la répétition. Ainsi cette omniprésence du Smartphone dans les médias fait davantage circuler le mythe dont nous avons parlé un peu plus haut, et ainsi peut-être créer une forme de communauté sociale via la possession du Smartphone (phénomène déjà observé avec l’Ipod il y a quelques années). L’utilisation du Smartphone peut donc devenir un enjeu : se créer une apparence sociale qui va engendrer l’habitude puis la dépendance. Enfin lors du dépouillement de notre enquête, nous avons réalisé que les personnes interrogées réagissaient différemment en fonction de la valeur des termes cités : s’ils étaient positifs ou négatifs. En effet elles avaient tendance à hésiter davantage avant de répondre par l’affirmative à un terme négatif tel que « isolement » ou « paresse » et certaines nous jetaient parfois un regard d’excuse pour accompagner leur propos, tandis que si leur intention était de répondre négativement à ces notions, elles le faisaient de façon assez vive, comme si cela était impensable : « ah non, dans mon cas non, c’est bon pour les ados ça mais pas pour moi » se défend Anne. Et concernant les termes positifs, nous nous sommes rapidement rendu compte que non seulement les interviewés semblaient pour la plupart considérer que le Smartphone leur avait apporté (presque) tous ces aspects positifs ; mais également qu’ils prenaient un certain plaisir à nous expliquer pourquoi. Autrement dit, les réponses aux termes positifs étaient généralement toutes beaucoup plus longues que celles des notions plutôt négatives (excepté dans les cas où les personnes souhaitaient se défendre et justifier le fait que certes elles étaient plus « paresseuses » ou « dépendantes » mais que ce n’était pas de leur faute). Cette dernière analyse montre bien que notre échantillon n’a pas toujours été objectif dans ses réponses, puisqu’il semblait toujours essayer de défendre son image. Nous tenons donc à rappeler que les conclusions que nous tirerons de cette enquête seront principalement basées sur nos hypothèses. Notre objectif n’étant pas de retirer des réponses et tendances catégoriques de notre enquête, mais plutôt de commencer une réflexion autours du Smartphone dans la société d’aujourd’hui. 26 Conclusion L’objet de notre recherche était de comprendre quel usage font les individus du Smartphone, s’il s’agissait d’une appropriation personnelle ou si les médias y avaient joué un certain rôle, notamment la publicité. Nous rappelons qu’il existe très peu voire quasiment pas de documents de recherche scientifique sur les Smartphones et leur insertion sociale. Ainsi pour répondre à notre problématique, nous avons dû analyser l’environnement publicitaire actuel de ce produit afin d’y déterminer quels y étaient les messages que les concepteurs voulaient transmettre à la population. Cette première analyse sur laquelle est fondé notre dossier est principalement constituée d’hypothèses et nous ne revendiquons donc pas d’avoir trouvé des réponses exactes et immuables. A partir de là nous avons réalisé notre enquête, dans l’objectif de trouver des éléments de réponses directement auprès de la population concernée. Nous avons été plutôt satisfaites des questions et des observations que nous avons ajouté pour compléter notre enquête, puisqu’elles nous ont permis d’obtenir des informations pertinentes mais aussi de faire parfois la distinction entre ce que l’individu disait et ce qu’il pensait. Ce qui n’est pas toujours évident. Suite à cela, nous avons réalisé qu’en règle générale, ces personnes étaient d’une manière ou d’une autre influencée par la publicité. La plupart d’entre elles l’ont d’ailleurs clairement reconnu. En revanche, parmi celles qui nous ont répondu que la publicité n’avait aucun effet sur leur utilisation du Smartphone, nous avons réussi à discerner deux tendance: premièrement ceux qui ne pensent pas être influencés mais qui dans leur propos reprennent inconsciemment les valeurs fortes, arguments voire slogans des publicités télévisuelles, et deuxièmement ceux qui nous ont répondu catégoriquement qu’ils n’avaient rien à voir avec la publicité puisqu’il n’étaient que très rarement en contact avec les médias et/ou parce qu’ils avaient découvert le Smartphone via le bouche-à-oreille. De plus, dans la description des usages que font les personnes interviewées de leur Smartphone, nous avons repéré que souvent les applications préférées, les raisons d’utilisations, les applications téléchargées (par exemple des jeux ou le GPS), étaient souvent celles promues par les publicités. Seuls les SMS ne sont pas abordés par les médias, mais comme toutes les personnes que nous avons interrogées ont classé cette fonction dans leurs trois premières fonctionnalités préférées, nous avons supposé qu’il était inutile pour une entreprise de communiquer à propos d’un élément déjà très apprécié et consommé du public et qui est parfaitement entré dans les habitudes de comportement de la société. Ainsi la publicité influence les smartphonistes dans l’usage de leur mobile. Mais nous pouvons nous demander si cela est dû à une très bonne campagne publicitaire des concepteurs du Smartphone, répondant aux attentes de la population en termes d’innovation, de distraction, d’esthétisme, etc. ou si toutes les publicités en général ont un tel impact sur les consommateurs ? De même, est-il réellement possible de s'approprier un usage de façon individuelle dans un environnement aussi médiatisé ? Car même si les personnes sont influencées par leur entourage, est ce que l’entourage n’a pas été influencé avant d’une manière ou d’une autre ? 27 Dans le cas de notre étude, nous pouvons conclure en disant que les campagnes de communication des Smartphones ont été un véritable succès puisqu’elles ont convaincu certaines personnes de remplacer leur téléphone classique par un « téléphone intelligent », mais aussi parce qu’elles les guident dans leur utilisation de l’outil. En revanche, on voit apparaître de plus en plus de procédés illégaux pour télécharger gratuitement des applications payantes, une pratique qui est loin d’être nouvelle puisque nous l’avons déjà observée dans d’autres domaines, notamment pour la musique et le cinéma. Ainsi on peut se demander si, une fois la « période de nouveauté » passée, les individus ne cherchent pas à s’approprier différemment les offres des concepteurs pour les adapter à leur quotidien ? La publicité servant ainsi de catalogue de possibilités ce qui n’empêchera pas ensuite d’échapper au contrôle de l’entreprise pour se procurer ces biens et services par un autre biais. Cette pratique est certes illégale, mais nous paraît échapper complètement à l’entreprise et ainsi à son influence. Pour finir, nous souhaitons évoquer une nouvelle campagne de communication pour les Smartphones signées par Windows intitulée « il est temps qu'un téléphone vous fasse décrochez du téléphone ». 39 Comme nous l’avons vu dans notre enquête, une grande partie des personnes interrogées nous a confié qu’elle ressentait une forte dépendance pour cet appareil. Ainsi nous supposons que l’entreprise Windows a voulu axer ses propres publicités sur cette notion, proposant un Smartphone comme les autres (sous-entendu avec les même possibilités et fonctionnalités) mais qui permet de passer moins de temps sur son mobile et donc d’être moins dépendant. Et ce par le biais d’une meilleure ergonomie permettant d’aller bien plus vite, de faire moins de clics et donc de revenir plus rapidement à la réalité, à la vie réelle. Windows se sert des idées reçues négatives liées aux téléphones portables pour s’en démarquer et en faire un atout. Nous retrouvons ici une dimension humaine qui n’était pas présente dans les publicités de ses concurrents (uniquement techniques) ainsi qu’un moyen de dévaloriser subtilement les autres Smartphones de marques différentes. Cette stratégie pourra-t-elle influencer les smartphonistes dans leurs usages ? 39 Publicité de Windows datant du 11 octobre 2010 « Windows phone » sur le site www.youtube.fr (consulté le 12/11/2010) 28 Bibliographie Bibliographie : AIM Olivier, BRACHET Camille et TASSEL Julien, Le téléphone mobile aujourd’hui : usage et comportement sociaux, France : AFOM, 2007, 156 p. (Groupe de recherche GRIPIC/CELSA) ALLARD Laurence, Mythologie du portable. France : Le Clavier bleu éditions, 2009, 93 p. (Myth’O) CLAISSE Gérard et ROWE Frantz, Téléphone, communication et sociabilité: des pratiques résidentielles différenciées. France, 1993, 189 p. BELLENGER Lionel, Du Bon Usage Des Médias - Vers Une Nécessaire Remise En Cause, FRANCE : Stratégies, 2000, 221 p. JAUREGUIBERRY Francis, Les branchés du portable. France : Presses Universitaires de France, 2003, 160 p. (Sociologie d'aujourd’hui) MARTIN Corinne et PERRIAULT Jacques, Le téléphone portable et nous. France : L'Harmattan, 2007, 176 p. (Communication et Civilisation) MENRATH Joëlle et GONARD Alban, Mobile Attitude - Ce que les portables ont changé dans nos vies, Paris : Hachette Littératures, 2005, 282 p. PERTICOZ Lucien, Les processus techniques et les mutations de l’industrie musicale : l’auditeur au quotidien, une dynamique de changement. Grenoble : Université Stendhal Grenoble III, Institut de la Communication et des Médias, 2009, 378 p. (Groupe de recherche GRESEC) PROULX Guylaine, Les communautés interprétatives d'un enjeu environnemental médiatisé : le cas de l'exportation en vrac de l'eau douce canadienne. 121p RIEFFEL Rémy, Sociologie des médias, FRANCE : Ellipses marketing, Collection Infocom, 2éme édition 2005, 223 p. 29 Article (support numérique) : AFOM, Le téléphone mobile aujourd’hui : perceptions et pratiques, Mobile et Société, n° 3, Novembre 2007, 33 p. Expansion, Apple détient 50% du marché des Smartphones en France, Mobile, France : L’express, Février 2010, 1 p. (consulté le 28/12/2010) http://www.lexpansion.com/hightech/apple-detient-50-du-marche-des-smartphones-en-france_226278.html GONZALES Paule, La télé, premier média publicitaire dans le monde. France : Le Figaro, Septembre 2010, 1 p. (consulté le 03/12/2010) http://www.lefigaro.fr/medias/2010/09/14/04002-20100914ARTFIG00435-la-tele-premiermedia-publicitaire-dans-le-monde.php JAUREGUIBERRY Francis, Les téléphones portables, outils du dédoublement et de la densification du temps : un diagnostic confirmé. France, 2007, 79-103 p. (Tic & Société [En ligne], Vol. 1, n°1) MENRATH Joëlle, Pour les ados, le portable est un musée de soi. (consulté le 26/12/2010) http://www.20minutes.fr/article/368450/France-Joelle-Menrath-Pour-les-ados-le-portable-estun-musee-de-soi. PEYRET Emmanuèle, « le téléphone portable outils anti fâcheux » (consulté le 26/12/2010) http://www.liberation.fr/vous/010155865-le-telephone-portable-outil-antifacheux RENAUD Lise, Les représentations du téléphone mobile : des imaginaires aux pratiques. Lyon : Université Lumière Lyon 2, Equipe Médias et identités, 2007, 1 p. Etude : AFOM, « La place du téléphone mobile dans la société : des discours aux pratique » AFOM et TNS Sofres, « Le rôle du mobile dans la société », Décembre 2009 AFMM et IPSOS, « Les nouveaux usages du mobile », Juin 2009 AFOM et TNS Sofres, «Observatoire sociétal du téléphone mobile», baromètre 2010 30 Sitographie Les sites officiels d’Appel et BlackBerry (consulté le 09/11/2010) Publicité de Apple datant de 23 novembre 2007 « Internet » (consulté le 12/11/2010) http://www.youtube.com/watch?v=v6T0cd3y15k&feature=related Publicité d’Apple datant du 8 avril 2009 « Vraiment très professionnel » (consulté le 12/11/2010) http://www.youtube.com/watch?v=pl6Qt41yl5U&feature=related Publicité d’Apple datant du 16 mai 2009 « Logic Immo » (consulté le 13/11/2010) http://www.youtube.com/watch?v=mdhUA_f0vck&feature=related Publicité d’Apple datant du 7 décembre 2009 « Nature » (consulté le 12/11/2010) http://www.youtube.com/watch?v=KVA2bGiK3Gw&feature=related Publicité d’Apple datant de juin 2010 « FaceTime » (consulté le 12/11/2010) http://www.youtube.com/watch?v=4Cu-3r5gHyA Campagne de Blackberry datant d’octobre 2010 « Aimez ce que vous faites » (consulté le 12/11/2010) http://www.youtube.com/watch?v=KDkCSx3luzU, http://www.youtube.com/watch?v=h89Zp8Xl6SU&feature=related, http://www.youtube.com/watch?v=kk-9vgthXdc&feature=related, http://www.youtube.com/watch?v=h89Zp8Xl6SU&feature=related, http://www.youtube.com/watch?v=Ie50FZbaVRc&feature=related Publicité de Samsung datant du 9 novembre 2010 « Samsung Wave 723 » (consulté le 12/11/2010) http://www.youtube.com/watch?v=iemYEuoaqtE 31 Lexique Antenne-relai de téléphonie mobile : ce sont des équipements permettant la réception et la diffusion d'ondes électromagnétiques. Elles convertissent des signaux électriques en ondes électromagnétiques (et réciproquement). (cf. page 6) Communauté sociale : elle désigne un groupe social constitué de personnes partageant les mêmes caractéristiques, le même mode de vie, la même culture, la même langue, les mêmes intérêts.... Elles interagissent entre elles et ont en outre un sentiment commun d'appartenance à ce groupe. (cf. page 13) Doxa : est l'ensemble - plus ou moins homogène - d'opinions (confuses ou non), de préjugés populaires ou singuliers, de présuppositions généralement admises et évaluées positivement ou négativement, sur lesquelles se fonde toute forme de communication. (cf. page 13) FaceTime : est le nom de la technologie de visiophonie d'Apple. (cf. page 13) Imaginaire : peut être défini sommairement comme la fabrique des images, des représentations, de visions d'un individu ou d'un groupe, pour exprimer sa façon de concevoir sa relation à l'altérité et au monde. En publicité se sont ces imaginaires qui peuvent permettre aux annonceurs d’influencer les consommateurs. (cf. page 11) Insertion sociale : est un processus permettant l’intégration d’une nouvelle technologie au sein du système socio-économique par l’appropriation des normes et des règles de ce système. (cf. page 6) Lo-fi : (low-fidelity, en opposition à haute fidélité ou hi-fi) est une expression apparue à la fin des années 1980 aux Etats-Unis pour désigner certains groupes ou musiciens undergroud adoptant des méthodes d'enregistrement primitives dans le but de produire un son sale, volontairement opposé aux sonorités jugées aseptisées de certaines musiques populaires. (cf. note de bas de page, page 14) Ondes hertziennes : sont des électromagnétiques produites par des moyens électrotechniques, dont la longueur d'onde est supérieure à celle du rayonnement infrarouge. Elles sont utilisées en télévision, en téléphonie et en médecine. (cf. page 6) Visiophonie : est l'association de la téléphonie et de la télévision permettant aux usagers de se voir pendant leur conversation téléphonique. (cf. page 13) 32