Rémi Hervochon Faculté de Médecine 22 ans Le bon docteur Smartphone Aucune avancée technologique n’échappe à une utilité en médecine. Outre la rubrique “Santé” de l’AppStore destinée au grand public, il s’agit ici des applications médicales pour professionnels de santé, regroupées dans la section “Médecine” de la plateforme de téléchargement. En quoi ces applications mobiles vont-elles bouleverser l’exercice de la médecine? Hormis les fonctions classiques des smart phones utiles au praticien (mail, internet, calculatrice, appareil photo), c’est un éventail de plus de 300 applications spécifiquement médicales qui sont à sa disposi- tion. Quatre-vingt pourcents (1) des médecins possèdent un Smartphone, ce qui rend encourageant le développement d’applications. L’appstore présente d’ailleurs dans ses 21 grandes catégories la rubrique Médecine. Les calculateurs sont de loin les outils Smartphone les plus innovants pour l’exercice médical. L’application Medcalc regroupe plus de 200 (2) formules, scores, et classifications. A titre d’exemple, un score tel que l’EuroSCORE (3), évaluant le rapport bénéfice-risque d’une chirurgie cardiaque, dépend d’un algorithme mathématique complexe de 17 paramètres cliniques, radiologiques et biologiques. Le chirurgien peut ainsi poser rapidement une indication opératoire au lit du patient, lors de la visite, ou d’une discussion de dossiers. A coté de cette géniale fonctionnalité, le Smartphone est une réelle banque de données. Le Vidal (4), répertoriant l’ensemble des médicaments, que l’on retrouve dans chaque cabinet médical, propose une application homonyme moyennant 29,99 euros. Les encyclopédies médicales avec leurs illustrations : photographies, anatomie, radiologies sont également disponibles sur le Smartphone du praticien 1 Légende : le smartphone, une base de donnée transportable à la disposition du médecin dans des applications telles que IMAIOS e-Anatomy. Les professionnels de santé en formation sont tout aussi concernés. De nombreuses applications destinées aux étudiants en médecine se diffusent dans les facultés (5) : fiches de cours, résumés, quiz, QCM. Cet outil pédagogique n’est pas négligeable et se justifie d’autant plus qu’il offre une base de données que seul possédait autrefois le « vieux médecin expérimenté ». Par exemple, une application telle que Auscultate fournit une « Play List » de bruits du cœur, normaux et pathologiques, pour exercer l’oreille de l’étudiant et du jeune praticien. L’application « PubMed » donne accès au plus grand moteur de recherches de publications médicales (6), outil précieux pour la prise en charge de pathologies rares et pour se tenir informé des dernières avancées scientifiques. Il est d’ailleurs à noter qu’en recherchant le mot-clef « smartphone » sur PubMed, 106 articles apparaissent (7), ce qui souligne l’intérêt de la communauté médicale pour cette technologie. Nous voyons que l’innovation apportée dans ce domaine concerne autant le fond des connaissances que la forme de l’exercice médical. Il s’agit en effet de délocaliser un gros volume de données, auparavant stockées sur support papier ou dans un ordinateur, au chevet du patient. Ceci transforme le Smartphone en un objet à part entière de la blouse ou de la sacoche du médecin. Les enjeux soulevés par les applications médicales sont considérables. Des clones de certains logiciels informatiques, constitués d’arbres diagnostics et thérapeutiques sont à prévoir (8). Ces sortes d’organigrammes du raisonnement médical permettent de passer du signe au syndrome, du syndrome à la maladie, de la maladie à la thérapeutique. Ces schémas étant quotidiennement appris par les étudiants et utilisés par les praticiens, le support du Smartphone serait le bienvenu. A l’image du lecteur de glycémie adaptable sur l’iPhone pour l’auto-surveillance des patients diabétiques (9), nous pouvons imaginer enregistrer le tracé de l’électrocardiogramme directement sur son Smartphone, ou amplifier et retranscrire les bruits du cœur en adaptant le Smartphone à un stéthoscope électronique. Dans la continuité de la tendance actuelle d’une prescription informatisée et sécurisée (10), nous nous attendons à une prescription via la tablette du médecin, et la possibilité d’y consulter les résultats des examens demandés. Ceci soulève une fois de plus les questions liées à l’informatisation du monde de la santé : le secret médical et l’accès du grand public aux informations médicales. Heureusement ou hélas, aucune technologie ne pourra remplacer l’examen du patient et le bon sens clinique du médecin. Notes : (1 ) http://www.ama-assn.org/amednews/2012/01/02/prl10102.htm (2) http://medcalc.tschopp.biz/ (3) http://www.euroscore.org/ (4) http://itunes.apple.com/fr/app/vidal-2011/id423542227?mt=8 (5) http://www.igeneration.fr/ipad/350-ipad-pour-les-etudiants-de-la-faculte-de-medecine-de-nancy-76672 (6) http://fr.wikipedia.org/wiki/PubMed (7) http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed?term=smartphone (8) http://www.med.univ-rennes1.fr/htbin/adm/reponse.pl?menu=mode_emploi.html (9) http://www.iphon.fr/post/2010/09/22/Sanofi-Aventis-annonce-des-lecteurs-de-glycémie-compatibles-iPhone-pour-lesdiabétiques (10) http://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_590233/les-logiciels-d-aide-a-la-prescription-questions-reponses Sources : - « De plus en plus d’applications santé » Mari-Françoise De Pange. Le quotidien du médecin. 14/02/2011 - « Doctors have to manage smartphone distractions » Kevin B. O’REILLY. 02/01/2012 - www.imedicalapps.com - « The uses of the smartphone for doctors: an empirical study from samsung medical center ». Choi JS. 30/06/2011 2