2. Les ambiguïtés de la stabilisation internationale

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RELATIONS INTERNATIONALES 1914 1930 : LA FIN DE LA DOMINATION
EUROPEENNE – LES INCERTITUDES
ECONOMIQUES ET SOCIALES DE L’ENTRE
DEUX GUERRE
Cours général d’après B.Droz – A. Rowley
Histoire générale du XX° siècle n°1 (Points Seuil)
I. L’EUROPE DOMINANTE
o (A remplir plus tard…)
c’est un panorama de l’Europe d’avant guerre
voir les fichiers consacrés à (dé)colonisation et à la démocratie pour le début.
Les relations diplomatiques à la vieille de la Guerre. Le problème des « causes » de la guerre. Vision
synthétique. (à compléter par le cours d’hypo)
→ système d’avant guerre reproduit la domination de l’Europe économique sur le monde vu que système
eurocentré (Etats-Unis : protectionnisme considéré comme arme économique et comme système de régulation
économique –et non plus comme une mesure conjoncturelle p 16 + isolationnisme et Japon = ambition extrêmeorientale) –mais qui n’en épouse pas les clivages politiques (démocratie/autocratie) car juxtapose deux systèmes
d’alliances inégalement contraignants.
 la Triplice : c’est elle qui naît la première, héritière du système d’alliance bismarckien qui assure prépondérance
européenne de Allemagne en maintenant France dans position isolement. 1882 par extension de Duplice (all A-H) à
l’Italie.1 Apogée du système : 1887-1888. (conclusion du traité de Réassurance 2 Bismarck-Russie)
Alliance conclue le 20 mai 1882 entre l’Allemagne, l’Autriche-Hongrie et l’Italie. Déjà assuré du concours autrichien depuis la Duplice de 1879,
puis de la neutralité de la Russie depuis le renouvellement de l’entente des trois empereurs en juin 1881, Bismarck souhaitait faire entrer l’Italie
dans son «système». L’Allemagne, en effet, dans le cas d’un conflit avec la France, ne pouvait compter sur un appui militaire de l’Autriche et de
la Russie. Mais une alliance germano-italienne devait obliger la France à faire face sur deux fronts. De son côté, l’Italie, évincée de Tunisie par la
France en 1881 et dès lors consciente de son isolement, désirait un rapprochement avec Berlin. Du fait de la Duplice, elle était conduite à se
rapprocher aussi de Vienne, d’où, il est vrai, elle pouvait espérer un concours dans son conflit avec le Saint-Siège. Quant à l’Autriche-Hongrie,
malgré les ressentiments de 1866 et la persistance d’une propagande italienne dans les «terres irrédentes», elle trouvait aussi avantage à une
alliance italienne qui lui permettait de concentrer ses forces sur un seul front, en cas de conflit avec la Russie. Les trois puissances avaient donc
intérêt à se rapprocher par un traité. Ce traité était défensif et, conclu pour cinq ans, devait être renouvelé jusqu’en 1915. Il stipulait que Berlin et
Vienne porteraient «secours et assistance» à l’Italie en cas d’agression française non directement provoquée. L’Italie remplirait la même
obligation à l’égard de l’Allemagne attaquée par la France dans les mêmes conditions. En cas d’attaque russe contre l’Autriche, l’Italie ne
promettait que sa neutralité bienveillante. Particulièrement avantageux pour l’Italie, le traité donnait à l’Allemagne, pour la première fois, un allié
en cas d’attaque française. Lors de son renouvellement en 1887, deux conventions y furent annexées, dont la première disposait que, si l’Italie, à
la suite d’une extension française en Tripolitaine, attaquait la France en Europe, l’Allemagne lui apporterait son concours armé. Le traité prenait
donc un caractère offensif. Bismarck, cependant, restait soucieux de prévenir une alliance entre la France et la Russie qui, en 1887, venait de
refuser de renouveler l’entente des trois empereurs. Il signa alors avec elle, le 18 juin 1887, un traité de «réassurance» qui, confirmant la
neutralité russe en cas de conflit franco-allemand, promettait à Alexandre
III l’appui diplomatique allemand dans la question bulgare. À partir
de 1890, Guillaume II, las de jongler avec les intérêts contradictoires de l’Autriche et de la Russie, abandonna la «réassurance» et fit de la seule
Triplice l’instrument essentiel de sa politique européenne.
Et rapprochement Allemagne – Royaume Uni . Mais grande fragilité car Russie et A-H. = intérêts contradictiores
dans Balkans et Russie/Royaume Uni dans Empire Ottoman. De + GII et Holstein sont convaincu du caractère
déloyal du Traité de Réassurance vis-à-vis de A-H. Il ne fut pas renouvelé . A partir de 1890 : Weltpolitik. Eviction
de Bismarck (agressivité ciae, ambitions coloniales et surtout navales → inquiètent Royaume Uni ; cf. en 1884-1885
conférence de Berlin sur réglementation du commerce dans bassin du Congo. L’acte finale n’autorise pas de
« partage de l’Afrique », mais dans les faits c’en est un → début d’un second âge colonial).
 La Triple Entente : elle naît – d’une grande entente entre les signataires que des contradictions et maladresses
de Triplice.
Pivot : alliance franco-russe conclue par une série d’accords (financiers emprunts russes + une convention
militaire de 1891 à 1893). Recherchée longtemps par France, acceptée par Alex III pour capitx et fin de isolement
crée par non renouvellement Réassurance et accord anglo-italien de de 1887 sur statu-quo en Méditerranée.
Diplomatie française, Rouvier et Hanotaux, ne néglige pas utilité accord avec Allemagne. Mais alliance russe
encourage à pousser l’avantage et à faire un système bismarckien à rebours.
1
2
Ressentiment à égard de France
1898-1905 : Théophile Delcassé . Italie se rapproche de France (irrédentisme ↑). Accord secret du 10.07.1902 :
Rome conserve neutralité si conflit franco-allemand
avec Royaume Uni : désamorcer tension de Fachoda ; méfiance Royaume Uni à l’égard de Allemagne (politique
navale, pénétration en Turquie et soutien du Kaiser aux Boers d’Afrique du Sud). Les dirigeants allemands voient
dans cette seconde EC (1ère : Lord Palmerston), un « coup de bluff ». Accord Loubet/ Edouard VII en avril 1904 :
pas une alliance formelle mais une série d’accords qui mettent fin aux litiges coloniaux. Les initiatives allemandes
au Maroc en 1905 renforceront cette alliance.
Rapprochement anglo-russe : échec du traité de Björkö de juillet 1905 (Nicolas II/ Guillaume II). Russie affaiblie
par défaite contre Japon → consent à négocier avec Londres la convention du 31.08.07 (répartition des zones
d’influence : anglais en Afghanistan ; mixte en Perse)
→ bipolarité relative. Les systèmes ont leur faiblesse mais les crises internationales qui se succèdent à partir de
1905 vont renforcer leur homogénéité : Maroc et Balkans
1. Le Maroc (cf. cours général)
→ crise de Tanger → démission Delcassé mais soutien britannique conformément à accord de 1904
→ conférence d’Algésiras de 1906 : Royaume Uni + Russie soutiennent France
→ crise d’Agadir de 1911 : Royaume Uni refuse soutien militaire à France mais essaie de forcer Allemagne à
transiger.
2. Les Balkans
→ affaiblissement de Empire ottoman. → ↑ appétit de la « ligue balkanique » (Bulgarie (initiateur), Serbie,
Grèce, Monténégro. 1 an + tard Bulgarie, mécontente du partage de Empire Ottoman se retourne contre la Ligue qui
s’est adjointe Roumanie).
→ expansionnisme serbe → interventions des grandes puissances (mais jeu des alliances marche mal. Cf.
France/Russie et les « intérêts vitaux » → crise bosniaque de 1908 )
→ guerres balkaniques de 1912-1913 : Royaume Uni fait pression sur Serbie pour freiner ses ambitions et
Allemagne essaie de freiner Autriche dans son soutien à Bulgarie.
→ traité de Londres (19053) et Bucarest : redistribution territoriale. Sinon Autriche et Russie , grande puissance =
soucieuse de équilibre mondial. Mais ne suffit pas à enlever sentiment guerre imminente → course aux armements
et resserrement des alliances.
- 1912 : Triplice reconduite pour 6 ans (malgré Italie≠ Autriche). Alliance franco-russe raffermie. Stratégie
commune est mise a point par les états-majors. Idem entre les autres partenaires.
→ Les causes de la guerre :
- jeu des alliances → engrenage. Mais ne suffit pas à donner cause profonde ni à définir les responsabilités.
1. antagonisme franco-allemand : 1871 (courant nationaliste dans les deux pays : revanche / phobie du
redressement ou encerclement français ). Mais depuis 1890,ce thème a perdu du terrain. C’est le Maroc le nerf de
guerre.
2. antagonisme franco-allemand : concurrence sur marché mondiaux et surarmement naval (von Tirpiz (18971900) ≠ loi anglaise de 1905 (two-powers standards. Echec de accord de 1908 sur stabilisation des tonnages →
course aux armements)
3. antagonisme austro-russe : le + dangereux car immaîtrisable par les deux puissances. A partir de 1906 car axe
de puissance russe se déplace de Empire Ottoman → Balkans (panslavisme ≠ tradition plurinationalisme et
centralisme de Emp Austro-Hongrois )
4.
- analyse marxiste : Lénine systématise les propos tenus aux congrès de Stuttgart (1907), de Copenhague (1910),
les thèses de Hilferding (Le Capital financier 1910) et de Rosa Lux ( L’Accumulation du capital 1913) : en 1916 :
L’Impérialisme, stade suprême… → le capitalisme parvenu à maturité c'est-à-dire au stade du « capital financier »
(version marxiste de distorsion entre base industrielle/puissance mondiale) le capitalisme se dévore lui même sous
pression de recherche des débouchés commerciaux et contrôle économique des zones pas industrialisées.
→ Or on sait que :
- les milieux d’affaire de la City ont freiné tendances belliqueuses du cabinet britannique
- dans les milieux économiques anglais : danger allemand est lion (cf. Cartels entre les deux pays)
- rapprochement France-Allemagne : Bagdadbahn, coopération financière, fondation du consortium
international en Chine e 1911
→ les rivalités soulignées par marxistes ont selon Pierre Renouvin envenimé la situation sans être déclencheurs de
guerre. Mais il faut souligner que partenaire économique ≠ de financiers (excellente conjoncture depuis 1908 →
concurrence industrielle . mythe de l’Allemagne comme puissance hégémonique et dominatrice (cf. loi des trois
ans en France)
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E. Monnet
→ est-il possible de faire une hiérarchie des responsabilités ? Kriegsschuldfrage → abondante littérature outreRhin svt justificatrice. Or pavé dans la mare : Fritz Fischer (Griff nach der Weltmacht 1961) : lourde
responsabilité des sphères dirigeantes allemandes acquises à Weltpolitik + annexionisme (s’appuie sur
mémorandum Bethmann-Hollweg du 9.07.14 4 )mais attention de ne pas interpréter de façon rétroactive les
positions prises dans l’euphorie de la de offensive de 14 !
→ légèreté de Allemagne qui a laissé carte blanche à Autriche dans problème serbe. Pression de Etat major
allemand sur pouvoir politique dans déclaration guerre à France
→ légèreté de Russie qui mobilise rapidement et de A-H. dans son ultimatum inacceptable à Serbie.
II. LA GUERRE ET SES RUPTURES
1. Chronologie sommaire – la portée de l’année 1917
 1914 : l’échec de la guerre de mouvement : aussi bien à l’Ouest où, malgré la réussite du plan Schlieffen
allemand, une erreur de stratégie de von Molkte permet à Gallieni d’opérer un redressement lors de la bataille de la
Marne (5-13 septembre) ; après la course à la mer les deux fronts se stabilisent ; à l’Est échec des offensives russes.
 1915 : année favorable aux Empires centraux (échec des offensives de Joffre en Artois, avancée significative à
l’Est où les armées russes sont très affaiblies, entrée en guerre de la Bulgarie qui occupe la Serbie). L’Entente
échoue dans le détroit des Dardanelles (tentative de diversion franco-anglaise) ; seule compensation : l’entrée en
guerre de l’Italie le 25 avril (traité secret de Londres prévoyant la cession des terres irrédentes : Trentin, Istrie et
Trieste, d’une partie de la côte dalmate en échange), qui ne dispose que d’une armée mal préparée.
 1916 : année incertaine, quelques victoires russes et entrée en guerre de la Roumanie qui ne modifient pas
vraiment le rapport de force (la Roumanie est rapidement occupée et son blé utilisé par la Triplice pour parer le
blocus) ; à l’Ouest cependant, affirmation de la suprématie navale anglaise (victoire de Jutland), échec de la stratégie
d’épuisement de Falkenhayn à Verdun, succès locaux de Foch sur la Somme, suprématie matérielle de l’Entente.
 1917 : année des déboires dans les deux camps.
o Sur le plan militaire : dans l’Entente, la défection de la Russie se précise avec les troubles de
février, malgré la volonté affichée par le gouvernement bourgeois (Kerenski) de continuer la
guerre ; échec des offensives Nivelle et débâcle de Caporetto (octobre), mutinerie des troupes. Les
puissances centrales sont confrontées au contre-coup de la guerre sous-marine (qui est un succès au
début : oblige la GB à conclure la paix) : défense de la marine britannique accrue, entrée en guerre
des USA.
o La crise morale des belligérants : populations affectées par les difficultés du ravitaillement, la
hausse des prix, l’exemple de la révolution russe, les inégalités devant la mort et la souffrance. Le
pacifisme pointe : après le semi-échec des conférences de Zimmerwald (1915) et de Kienthal
(1916) organisées par les socialistes pour envisager la paix, tentatives d’accords
intergouvernementaux (par l’empereur Charles 1 er, successeur de François-Joseph, ou négociations
Briand-Lacken, par pape Benoit XV car trop pro-autrichien), mais qui échouent.
o Le raidissement des positions : des reclassements s’opèrent, le pacifisme est assimilé à la trahison.
Hindenburg et Ludendorf achèvent de militariser l’Allemagne, tandis que les cabinets Llyod
George, Orlando et Clemenceau, marquent une détermination à poursuivre la guerre.
→ 1917, c’est bien sûr l’année de la Révolution russe et de entrée en guerre des Etats-Unis
 1918 : c’est la supériorité matérielle alliée qui va dénouer la situation ; pourtant la Russie, après les journées
d’Octobre, signe l’armistice de Brest-Litovsk le 3 mars 1918. Malgré des offensives efficaces en avril et mai,
Ludendorff se heurte à une résistance alliée accrue (2 ème bataille de la Marne), puis doit reculer devant la contreoffensive menée par Joffre en Champagne à partir d’août. L’Autriche-Hongrie doit se retirer sur les fronts italiens,
dans les Balkans, et accepter l’armistice italien de Villa Giusti. Le gouvernement turc signe l’armistice de Moudros
avec la GB. La nouvelle République de Weimar de Max de Bade doit signer l’armistice à Rethondes le11 novembre.
L’entrée en guerre des USA
 La neutralité : elle s’impose de par la tradition isolationniste du pays et parce que sympathie/antipathie pour
belligérants pas nettement dessinées ; neutralité active puisque Wilson par l’intermédiaire du colonel House propose
sa médiation aux belligérants (« buts de guerre »), sans succès notoires et positive car exportations vers Europe = x
35. Cette neutralité devient bienveillante à l’égard de l’entente, qui, malgré les contrôles maritimes anglais imposés
aux navires américains (1916), dispose de la supériorité maritime, et dont les exportations agricoles et industrielles
représentent 3/5 du total + dettes importantes contractées envers les banques américaines.
prévoit annexion par Allemagne du bassin de Briey, de Liège, d’Anvers voire Belfort et bande côtière dans
Flandres. Sujétion économique et commerciale de France et Belgique + Mitteleuropa et MittelAfrika.
5
Ce sera un des arguments de GC dans sa lettres ouverte à Coolidge : vous en avez bien profité produit 3 ans.
NPO d’ailleurs dans cette histoire que aux Etats-Unis dette commerciale > dette politique (réparation) car do ut des :
garanti propriété individuelle. Un des fondements libéralisme américain.
4
Relations internationales 1924-1945 Cours général
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E. Monnet
 Vers la guerre : les élections présidentielles de 1916 voient s’affronter le républicain Hughes et Wilson qui sont
tout deux pacifistes→ c’est la prospérité américaine qui est en jeu. Mais janvier 1917 : décision allemande de couler
tout navire même neutre → c’est indépendance politique qui est contestée : rupture diplomatique (torpillage de
qques navires américains dont le Vigilentia, « télégramme Zimmermann » : entreprises allemandes aux Mexique
contre doctrine Monroe ), la menace du militarisme prussien sur la démocratie en Europe  Wilson demande au
Congrès la déclaration de guerre le 2 avril 1917.
 Une mobilisation importante : dans le cadre d’un nationalisme outrancier ; investissement néanmoins
considérable (36 milliards de $ sur les 147 investis dans la guerre), en particulier par la contribution financière
auprès des Etats et politique (14 points) ; si le rejet du traité de Versailles par le Sénat marque le désir de rester à
l’écart des affaires européennes, la créance de 10 milliards de $ dont elle dispose, par ses capacités renouvelées de
puissance commerciale et monétaire, l’intrusion américaine dans les affaires américaines est inévitable.
2. Une rupture féconde ?
Un bilan contrasté de cette guerre : une Europe saignée, mais aussi promotion de nouvelles formes d’organisation
(politique et économique).
La victoire de la démocratie et les promesses d’un nouvel ordre international
 L’esprit du règlement du conflit : il ne s’agit pas de rétablir un statu quo ante et d’imposer uniquement des
indemnités de guerre, mais de liquider les litiges européens et les possibilités de conflit. La victoire des démocraties
va entraîner la démocratisation de l’Europe  démocratisation des vainqueurs eux-mêmes (suffrage universel en
GB, RP en France, loi électorale en Italie), installation en démocraties dans les Etats issus des traités (Roumanie,
Yougo, Pologne, Baltes, Finlande, Tchécoslovaquie), transformation des anciens régimes en Allemagne et AutricheHongrie (au nom de la sécurité et de Allemagne = mal absolu 6 )
 Un double choix idéologique :
o Le droit des nations : apparition de nouveaux états, 30 millions de personnes émancipées des
tutelles étrangères, mais souvent contourné : ignoré pour les anciennes colonies allemandes, +
stratagème de la reconnaissance des « droits historiques » le plus souvent au bénéfice des
vainqueurs (ex Alsace – Lorraine) cachant des intérêts économiques, ex. région de Ostrava
(gisement houiller important) donné à la Tchécoslovaquie malgré une population majoritairement
polonaise. (idem pour Fiume et Teschen en Silésie). → balkanisation éloignée de l’idéal wilsonien7,
mal évaluée économiquement et surtout politiquement (danger bolchevique)
o Caractère justicier des traités vis-à-vis de l’Allemagne : déclarée responsable de la guerre (article
231 du traité de Versailles), elle se voit retirée son rang de grande puissance (colonies,
participations financières, armée), du circuit diplomatique et des négociations de paix (diktat).
 Le sens du diktat : si son caractère excessif est déjà remarqué par des contemporains (Keynes, les conséquences
économiques de la Paix, dès 19) , la culpabilisation correspond au choc psychologique subi par les états, à la prise
de conscience de l’état d’impréparation des économies en 1914 pour une guerre longue ; en réalité le traité comme
diktat, est indispensable à l’équilibrage des impérialismes en présence (Royaume Uni France/ Etats-Unis Japon), par
la mise entre parenthèse de l’impérialisme allemand, en particulier sur le plan économique (cf. 5 premiers points de
la déclaration des Quatorze points de Wilson, 8 janvier 1918).
o les USA veulent obtenir la liberté des mers, l’ouverture des marchés coloniaux, le maintien du
principe de la « porte ouverte » en Europe,. En échange : livraison de mat 1ère de Allemagne →
France
o la GB veut s’assurer le marché allemand  garanties de sécurité à la France,
o la France veut assurer des débouchés en Allemagne (cf. article 268 prévoyant que les produits
d’Alsace Lorraine seraient reçus en franchise en Allemagne pendant 5 ans pour éviter surpdtion
française ), projet préparé dès 1915 par le comité d’études économiques et administratives relatives
à l’Alsace-Lorraine, avec Dolfuss, Wendel, Renault…
 La prédominance américaine : le TdeV veut une Europe prospère et pacifique c'est-à-dire une Europe où EtatsUnis peuvent investir sans être entraînés malgré eux dans une guerre. l’hypothèse de l’isolationnisme américain au
C’est très clair dans le discours de Clemenceau : d’une part dans la querelle qui l’oppose à Foch : il dit qu’il
adopte sa théorie des « frontières naturelles » mais n’ont pas avec ses implications impérialistes/annexionistes de la
Révolution mais uniquement pour maintien de sécurité collective qui passe par une clause de garantie sur le traité
lui-même (ainsi GC renoncera à l’annexion de Rhénanie (occupation définitive) pour une occupation pdt 15 ans,
conditionnelle (cf. aussi la Sarre).
En revanche –et cela file dans tous ses écrits théoriques si France s’oppose à Allemagne c’est pas pour revanche
(cf. Barodet) mais 1) esquisse de ce qui est pour le moment encore « militarisme prussien » et spectre de la
Mitteleuropa –mais deviendra bientôt Sonderweg (Allemagne destinée par nature à avoir pouvoir fort, autoritaire) :
cf. les réflexion de Clemenceau (alimentée par 1) plébiscite de LNB 2) AD et « faux Henry ») sur Nation/Raison
d’Etat ; Démocratie./ suffrage universel …) : pour lui, l’Allemagne est le pays de la Raison d’Etat souveraine.
7
Clemenceau encore et son jeu de mot sur « candor » quant à Wilson
6
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E. Monnet
lendemain de la guerre est contestable : solidarité d’intérêts entre les USA et l’Europe. Les USA avec Wilson
participent activement aux négociations, imposent leur mode de reconstruction économique (rejet de l’idée
allemande de commercialisation des réparations)  but : intégrer économiquement les états européens autour des
USA. + projet politique promouvant un nouveau rapport de forces international, avec la SDN dont le pacte est signé
le 28 avril 1919, qui ne prévoit ni sanction militaire, ni force internationale permanente, imposant théoriquement
l’universalisation du régime parlementaire.8 La SDN réduit en fait le champ diplomatique, rendant impuissantes les
anciennes politiques basées sur l’alternance des coups de force et des compromis négociés, ouvrant la porte aux
révisionnismes.
→→ dans 20s les divergences de vue entre les fonctionnaires –policy makers – américains (Leffingwell, Hoover, B.
Strong…) et français/anglais (notamment quant aux réparations) mettent bien en valeur :
- la non –cohésion idéologique du « bloc des vainqueurs ». Le « consortium des vainqueurs » : fiction.
- que le vrai problème du Traité, c’est « comment procéder à un transfert économique et financier [ intégration
économique autour des Etats-Unis → atlantisme en germe] par des moyens politiques, psychologiques,
militaires ? »
Les conditions d’une croissance renouvelée
 La guerre n’a pas inversé la tendance longue de l’économie issue de la fin du XIX° : ce n’est qu’un décrochage.
L’inflation qui sévit en 1919 marque la reprise d’une activité économique soutenue (reprise de l’investissement, de
la hausse des profits et de la productivité). Elle n’est pas clairement analysée par les contemporains qui parlent de
« vie chère » jusqu’en 1922 9 . [parler du débat sur l’économie de guerre : moteur de industrialisation ?
appauvrissement et épuisement ?]
 Les capacités d’adaptation du capitalisme :
- la production industrielle augmente fortement à la fin de la guerre, mais celle-ci reste dans la continuité de
l’avant-guerre ;
- mobilisation techniques : confirme deux prémisses vues dans Grande Dépression 1) état et capital peuvent
collaborer à fin commune 2)si des inventions technologiques ont joué, c’est surtout l’extension du taylorisme
( gains de productivité atteignant 50 %), le perfectionnement de procédés existant, 10 mouvements
d’intégration verticale des entreprises pour faire face aux goulets d’étranglement ; délocalisations réussies
d’industries du Nord (Schneider en Normandie). Prolongation et aussi amplification → nouvelle
organisation du travail et production : Incorporation d’une main d’œuvre féminine plus nombreuse (15 % en
France, 35 % en Allemagne et GB), expansion capacité production, concentration des entreprises qui, selon
François Caron, achève un processus de concentration entamé dès le début du siècle.
 Des nouveaux rapports industrie-état : la guerre marque le retour aux trusts fusionnés avec l’appareil d’Etat
permettant une adaptation de la production aux besoins de l’Etat-major, aux fluctuations de la main d’œuvre
(obligatoire en 1915 en Allemagne, War Industries Board aux USA11), ou partenariat industrie –état dans les autres
pays. Concurrence, autofinancement, profit. Mais le nouvel interventionnisme d’état ne fait que renforcer une
présence existante et ne viole pas les doctrines traditionnelles du libéralisme économique (JN Jeanneney) ; c’est
davantage une gestion conjointe (offices des matières premières et agricoles de W. Rathenau, liaison arméeindustrie-pouvoirs publics en France et GB avec A. Thomas et Lloyd George à l’armement), projet Overman aux
USA, avril 1918 sur la mobilisation industrielle. La solidité de ce nouveau lien tient en partie à la possibilité
d’importants profits (continuité avec la tendance de hausse du profit du début du siècle), pas remise en cause par les
gouvernements (ex 17 % de profit pour la chimie allemande).
 Il n’y a pas redéfinition véritable des politiques économiques : planification limitée au contrôle des industries de
guerre, jeu sur le court terme entraînant des effets pervers dont l’inflation, conséquence des taxations et
contingentements. → ébauche d’une économie mixte (intérêt national et consensus dans opinion) Par contre
intervention accrue de l’Etat dans le soutien de la demande, relançant la production au moment où les banques sont
paralysées (augmentation vertigineuse des dépenses d’administrations locales aux USA par ex).
 Essor des profits (depuis déb du siècle) → investissement → poursuite de guerre : la véritable rupture donc
c’est consensus autour d’une nouvelle rationalité économique définie par : profit, productivisme, nationalisme/
8
pur kantisme selon Robert Kagan : universalisation du régime parlementaire et triomphe du droit sur force
(hobbesienne)
9
les mécanismes et manifestations (↑ des prix) de l’inflation sont connus. Mais on ne voit pas avant 1922, date
où le terme s’impose (discussion de la semaine de la Monnaie), que bouleversement quantitatif d’une telle ampleur
équivaut à une mutation de nature. D’où refus de dévaluation, comme on avait voulu éviter en 1915 le contrôle des
change.
10
et non pas innovation technique fulgurante dans des secteurs –aéronautique, automobile –fortement sollicités
par économie de guerre
11
suspension de facto de loi anti-trust
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E. Monnet
3. Le poids d’une guerre
Sur le plan démographique
 La saignée démographique : pertes militaires importantes (0,8 million de mort + 5 millions en Russie), pertes
civiles considérables (2,5 à 3 millions de morts)  une destruction inédite de capacités de production, durée du
conflit qui fait disparaître la majeure partie des forces vives des belligérants (85 % des excédents des décès
supportés par les 20-39 ans en Allemagne), charge financière accrue pour la collectivité (pensions). Ne pas faire de
lien de cause à effet entre guerre et épidémie de grippe de 18 (Esp et Suède touchées aussi)
 L’inégalité devant la mort : sont plus touchés que les autres classes les paysans (surtout en France, génère des
antagonismes sociaux avec les ouvriers, souvent rappelés à l’arrière), et les élites intellectuelles (« génération
perdue » d’Oxford), facteur déterminant dans l’installation d’une gérontocratie dans l’entre-deux-guerres, tournée
vers l’Europe du début du siècle.
 Continuité ou rupture du rythme démographique ? Stabilité notoire du taux de mortalité civile ; l’épidémie de
grippe qui décime 675 000 Français, Anglais et Allemands en 1918 fait autant de ravage dans les pays neutres ; la
guerre n’est qu’un palier dans les progrès de la médecine. Chute importante de la natalité (de 25 à 50 % selon les
pays) mais qui, dans une tendance longue de baisse importante de la natalité, contribue à harmoniser les taux entre
les pays.
Sur le plan économique
 Les transformations de la masse monétaire : disparition des pièces d’or et d’argent, augmentation considérable
de la masse fiducière, les banques centrales n’en ayant plus le contrôle  Abandon de l’étalon-or et hausse du
niveau général des prix.
 L’état surmené : placé devant la double nécessité de maintenir une politique d’aisance financière pour financer
l’effort de guerre et de rationaliser leur gestion financière pour éviter les tensions inflationnistes . Les solutions
d’avant 17 sont insuffisantes (mobilisation de l’épargne, appel au x liquidités des particuliers, cours focéc des
billets)  effort fiscal + emprunts aux particuliers via les bons du trésor à taux élevé. A la fin de la guerre on évalue
mal les risques du surendettement et surtout de la dette flottante, que ni une indemnité de guerre élevée ni le
recouvrement des placements à long terme ne pourraient compenser  hésitations dans la lutte contre l’inflation et
les priorités dans le rétablissement de l’équilibre financier (Etat/ banquier)

Les puissances commerciales internationales écornées : fragmentation et affaiblissement de l’espace
économique européen (dépendance de l’Entente vis-à-vis des USA, épuisement des stocks dans l’Alliance, absence
d’armature industrielle cohérente dans les nouveaux états) → double dépendance atlantique aux niveaux des Etats et
des entreprises + poids nouveau des USA qui s’est substitué aux puissances européennes dans l’absorption des
matières premières, créancier et fournisseur de l’Europe + baisse des investissements ( cause dépense de guerre →
handicape reconstruction à long terme)
 $ devient monnaie centrale (mais « carence conceptuelle » qui fait que l’on vit toujours sur modèle de étalon –
or et du Gold Standard et qu’on croit que équilibre monétaire : quelque chose de mécanique. D’où passivité en 1920 quand fr et £ sont surévalués et spéculation monétaire reprend)
 La formation d’un isolationnisme financier entre les alliés et l’affirmation d’antagonismes économiques :
o Dans l’immédiat après-guerre : du aux divergences de politiques économiques : tandis que les
banques européennes veulent consolider les dettes à court terme 12 (politique de baisse des taux
d’intérêt : avec la guerre le capital change de fonction via l’Etat : d’épargné → investi dans
entreprises) , les Américains veulent, eux, consolider l’acquis de la guerre (les marchés européens).
La reprise de l’activité économique en 1919-1920 est artificielle : poids de l’inflation + appuie les
antagonismes nationaux (les Américains l’utilisant pour écarter l’éventualité d’une réduction des
dettes de guerre).
o Les USA, dominants après l’échec de la conférence de la paix (échec du plan de Keynes), se voient
dans une situation fragile à moyen terme, la relance économique en Europe conditionnant la
solidité du dollar  plans de 1920 (mémorandum d’Amsterdam, janvier 1920) prévoyant
l’internationalisation du règlement des dettes.
 Les réparations et dettes de guerre : la conférence de juin 1919 ne fixe ni le rythme des réparations, ni la
question des changes ; on propose la création d’une commission des Réparations  dissimule les différences
12
les pays européens ne peuvent pas rembourser leur dette à court terme sous peine de se priver des capacités
d’investissement nécessaire à la reconstruction. Or ils ne peuvent compter sur des emprunts aux Etats-Unis donc
doivent compter sur des emprunts privés. ↑ de la circulation monétaire ms aussi inflation qui ruine une partie de ces
efforts → noter que l’antagonisme qt aux solutions économiques choisies se double d’une opposition idéologique
(aux yeux des français, les Etats-Unis : égoïsme ; et aux yeux des américains : européens ne savent pas gérer leur
recontruction)
Relations internationales 1924-1945 Cours général
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E. Monnet
d’exigences (JM Keynes 13évalue la pression maximale des réparations à 40 milliards de marks-or, les Français à
120 milliards, d’autres à 230 milliards !, sans compter qu’il s’agit aussi de l’évaluer dans le temps…).
→ Bref, engagés dans une course contre leurs partenaires européens, les Etats-Unis et l’évolution de leur situation
intérieures, français et anglais cherchent avant tout à ne pas figer des hégémonies rivales. D’où politique incertaine
et dilatoire.
Le bouleversement des sociétés
 L’effritement des unions sacrées : la fraternité du temps de guerre relève surtout de l’idéologie et du
conformisme (de l’intolérance), l’expérience de la mort et les traumatismes engendrent des sentiments
contradictoires qui sapent le consensus du début de la guerre  errements après 1918, recherche d’identité pour des
groupes transnationaux (ouvriers, anciens combattants), qui ‘refusent d’être tenus en lisière des autorités restaurées’.
 La vague moralisatrice (autour de l’idée « d’ancien combattant » utilisée à fins idéologico-politiques) : vague de
conformisme aux USA, croisade patriotique qui fait suite à la multiplication des violences dans certaines villes
(KKK)  Red Scare, prohibition dans le 18° amendement ; méfiance accrue à l’égard de l’état, du syndicalisme,
ignorance de la vie publique et désintérêt des jeunes face à la politique.
 La prise de conscience de la fragilité des régimes politiques : la vacance du pouvoir ne suffit pas pour expliquer
les mouvements spartakistes, la poussée agrarienne (on compte 21 pays d’Europe centrale et orientale qui font une
réforme agrarienne) : recherche de modèles originaux, remise en cause des structures anciennes face à la poussée
révolutionnaire, alors que le triomphe de la démocratie s’accompagne du renforcement des antagonismes de classes
(constitution de partis de masse parmi la paysannerie, les classes moyennes, le prolétariat).
 La petite révolution des avant-gardes culturelles : avec Dada et l’expressionnisme allemand qui dénoncent une
société qui a rendu possible la guerre, d’une science qui a entraîné la disparition d’une génération entière et d’un
nationalisme qui menace la paix future. Mais ces mouvements ont peu de répercussion dans l’opinion publique.
 Les rééquilibrages : avec la transformation de la condition féminine et la rapprochement des statuts
homme/femme : insertion des femmes, qui ont remplacé les hommes pendant la guerre, dans le monde du travail et
dans les luttes sociales (suffragettes), reconnaissance progressive de l’égalité juridique, obtention du droit de vote,
droit de divorcer en cas d’adultère, irruption des filles dans l’enseignement secondaire ; redistribution du revenu
national (alourdissement de la fiscalité dans les pays anglo-saxons). « plus qu’un bouleversement de conditions [ du
type réactivation des clivages riches/pauvres sous le boutoir bolchevique] la guerre a entraîné la disparition de
préjugés sociaux, sous l’effet de la mobilisation des énergies ».
4. Le mythe du retour à la normale
Les fragilités de l’Europe de Versailles
 La fragilité de la « paix durable et définitive » (Clemenceau) : le nouvel édifice diplomatique repose sur la
SDN, ce qui mondialise les rapports internationaux, interdisant les règlements locaux, mais son efficacité est
hypothéquée par l’exclusion de l’Allemagne et de la Russie, alors que les USA sont réticents devant un fauxsemblant de démocratie internationale. La scission de l’Europe en pays favorables au statu quo et en pays
révisionnistes, hostiles aux traités (Russie, Allemagne, Italie)  situation ‘révolutionnaire’ sous des apparences de
stabilité (H. Kissinger, le Chemin de la paix).
 La remise en cause de l’omniprésence européenne :
o Les empires coloniaux : mobilisation économique des colonies et apparition d’industries locales,
diffusion d’idées nouvelles (cf. Chine et abrogation des Traités inégaux à Conférence de Paix) dans
le cadre du messianisme bolchevique (1919 - 1920 : premiers congrès de l’internationale
communiste, encourageant les mouvements d’émancipation) et wilsonien  apparition du principe
de self-governement (objectif : assurer le développement des territoires au bénéfice de ceux qui y
vivent) ; c’est dans cet esprit que sont créés les mandats de la SDN. Rend caduc rayonnement
civilisateur européen
o L’affaiblissement économique : disparition du partenaire économique russe dont 72 % des
importations venaient d’Europe en 1913, faiblesse des nouveaux marchés de l’Europe centrale,
concurrence commerciale des USA et du Japon.
o La difficulté à organiser une politique de force commune : malgré la puissance militaire et
politique réaffirmée chez les vainqueurs : litiges franco-britanniques sur la question des Détroits,
sur les zones d’influence en Syrie et en Irak (par contre consensus sur la question italienne : on ne
soutient pas les revendications sur les terres irrédentes par crainte d’un expansionnisme italien).
 Le rejet du traité de Versailles par les USA en mars 1920 : interprétée à tort en Europe comme un
isolationnisme 14; les USA revendiquent leur ‘indépendance’, marges de manœuvre nécessaires pour défendre leur
13
internationalisation, du règlement des réparations (désormais conjoint aux dettes) seule peut constituer une
garantie face aux exigences nationalistes, en même temps qu’une condition de reprise économique sous caution
américaine.
14
Jusqu’en 24 au moins les Etats-Unis n’emploie pas ce terme
Relations internationales 1924-1945 Cours général
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E. Monnet
strict intérêt (divergent !) : écarter la concurrence japonaise sur le marché chinois, consolider l’implantation
commerciale en Europe, en Amérique du Sud + Mexique.
 La cristallisation des clivages nationaux autour du thème de la sécurité :
o l’Allemagne : veut réintégrer la scène internationale, révision des traités, restauration de la
primauté industrielle allemande face à l’expansionnisme français,
o La GB : souhaitent le maintien d’un équilibre continental, souhaitent la stabilisation de
l’Allemagne pour conter le bolchevisme à l’Est, les velléités revanchardes allemandes. + organiser
sous égide britannique le nouvel équilibre financier, au moment où suprématie navale et armement
contestée par Japon et Etats-Unis.
o La France : occupe militairement pour 15 ans la rive gauche du Rhin, mais privée des garanties
interalliées (non-ratification des traités franco-américains par ex). Déploie un impérialisme
politique et économique en Europe centrale pour répondre à son propre isolement par celui de
l’Allemagne.
Déséquilibres économiques et incertitudes diplomatiques
 Les dérapages économiques de 1920 : après une reprise de courte durée15, baisse de la production en GB et en
Europe, baisse des monnaies (malgré politique déflationniste : pas d’équilibre), chute du volume de l’épargne (car↓
de confiance des industriels d’où pas achat actions)et des investissements. Causes sous-estimées : le réajustement
agricole (après une période de prix élevés (75% de + !), la relance de la production en Europe, la remise à flot des
flottes marchandes, entraînent une crise de surproduction  prix agricoles américains chutent de moitié→ crise des
ciseaux), baisse limitée des prix industriels  généralisation de la crise, 16. Les industries déstockent pour retrouver
du capital, et la baisse des prix nourrit la déflation (effet psychologique néfaste qui ralentit la consommation).
Responsabilité des politiques publiques : politique de régulation monétaire.
→→en privilégiant lutte contre les facteurs monétaires, au nom de la théorie quantitative de la monnaie et des prix,
les pouvoirs publics ont exclu l’éventualité d’une régulation généralisée des échanges . a crise a ainsi consolidé
la force de l’économie dominante. Etats-Unis =44% du stock d’or mondial soit près de 60% de ↑ en 4 ans et en
Europe : dollar gap qui conduit à des politiques de laxisme monétaire (Eurpe de l’Est)
 La solidarité économique internationale compromise : avec le rehaussement des droits de douane (+ 30 % aux
USA), l’abandon du principe wilsonien de la non-discrimination commerciale qui handicape surtout les pays
vaincus, soumis à la clause du pays le plus favorisé pendant 3 à 5 ans. (retour à des pratiques protectionnistes
déclenché par crise sur marché des produits bruts)
 Le problème des réparations : se déploie en plusieurs épisodes, reclassements internationaux successifs.
o La conférence de Spa (juillet 1920) fixe la répartition des réparations (52 % reviennent à la
France, 22 % à la GB), et son montant, considérable : 226 milliards de marks-or (conférence de
Londres 1921); on espère ainsi combler les déficits budgétaires, relancer l’économie par des
paiements à court terme qui satisfont des impératifs électoraux.
o En avril : montant fixé à 132 M. Bizarrement Briand et L. George font cause commune (« mettre la
main a collet » de l’Allemagne . Briand). Acceptation sinon occupation Ruhr.
o Les tentatives de rapprochement franco-allemands : accords de Wiesbaden, octobre 1921, entre
Rathenau et Loucheur, livraison de matériel lourd à la France pour la reconstruction des régions
dévastées et de l’industrie, évitant les gages productifs. Si l’accord ne réduit pas la menace
inflationniste (l’Etat allemand payant la note 17), elle éloigne le spectre de l’invasion de la Ruhr.
o La conférence de Washington sur le désarmement (naval): marque la riposte anglo-saxonne aux
initiatives françaises ; la GB obtient la parité navale avec les USA, abandonnant en échange la
possibilité d’un front de débiteurs européens, et de renoncer au paiement des dettes  renforce les
USA dans leur position de dissociation du paiement des dettes et des réparations. La France est
reléguée à la parité navale avec l’Italie et ses projets de désarmement terrestre ne sont pas soutenus.
(d’où axe Londres-Washington et rivalité France-Italie en Méditerranée !)
o L’impossibilité à régler le problème des transferts monétaires : après Rapallo (germano-russe) qui
renforce l’Allemagne aux yeux des occidentaux, l’adoption du Gold Exchange Standard qui fait du
dollar et de la livre les deux seule monnaies de réserve, alors que la GB reste vulnérable. La GB
entame une ‘moralisation’ des relations internationales (note Balfour), favorable à la liaison dettesréparations, et à la diminution des réparations+ réorg financière par consolidation de dette avec usa
on pense que les bons résultats de 18-20 sont dus à ↓ de inflation par ↓ de circulation fiduciaire (politique de
taux d’intérêts élevés). On pense à une politique d’encouragement à l’épargne pour financer la reprise industrielle
16
due : pour les industrie qui ont connu « boom » pendant guerre : surestimation des capacité du marché (rendu
stable par politique de déflation en plus)
pour les autres (transport) : concurrence
15
le problème c’est qu’en essayant de court-circuiter les transferts financiers pour « réaliser » les Réparations : 1)
désorganisation du marché 2) déstabilisation de industrie allemande car fabrique des outils de production qui ne lui
profiteront pas → inflationniste
17
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o
hostilité de la France et des USA. La multiplication des comités d’experts en 1922, le rejet de leurs
propositions marquent bien le piétinement des 3 puissances.
L’occupation de la Ruhr : méditée depuis 1920, attendue par les Anglais qui y voient une
possibilité de marginalisation de la France vis-à-vis des USA, et une opportunité financière
(emprunt allemand à la Banque d’Angleterre). Succès de l’opération du à la passivité anglaise, à
l’absence de réaction inattendue des USA et à la décomposition de la situation politique et
économique en Allemagne ; Volte face de Poincaré en 23 dépend de attitude anglaise. mais ce
succès ne profite pas à la France qui sort affaiblie (économiquement, par la spéculation des
banques américaines et allemandes contre le franc, politiquement, puisqu’elle subit les pressions
anglo-saxonnes, effrayées devant le risque de dislocation de l’Allemagne qui couronnerait
suprématie frse , tensions autonomistes et projet de création d’une banque rhénane qui menacent
la stabilisation monétaire (d’où soutien de Norman à la politique d’assainissement entamée par
Schacht  volte-face de Poincaré en septembre 1923 qui accepte les comité d’experts ds lesquels
les usa s’intègrent ). L’affaire s’achève avec le plan Dawes de 1924, et la France doit partager son
succès avec ses rivaux, c'est-à-dire accepter la réorganisation sous égide américaine.
III. LA PROSPERITE ET SES LIMITES
On ne peut opposer, dans les années vingt, des politiques de fermeté économique privilégiant l’équilibre
économique et des politiques de conciliation sociale ne regardant pas la dépense : les gouvernements hésitent
continuellement entre les deux solutions. La division économique / social n’est pas pertinente : l’enjeu central est de
reconstruire, d’assimiler les bouleversements des sociétés, de maintenir le sentiment national. Mouvement central :
pour les Européens, refuser la fatalité du destin, opérer un retour à la belle époque, pour les nouvelles puissances,
conforter leur zone de prospérité.
Pbq :
- comprendre spécificité de la brève « prospérité des années 20 », entre la vrai croissance longue de Belle
Epoque et la décroissance des années 30. jms n’a assuré plein emploi (4M de chômeurs en Europe de 26-29)
- comment s’effrite le système de justification d’intérêt ethno-centré sous couvert de « retour à la normale » et
d’assainissement financier qui avait prévalu ds l’interprétation des réparations.
1. Le temps des experts
 Croyance en la possibilité de résoudre les problèmes économiques de manière scientifique, par une gestion
macro-économique dont le dirigisme de guerre avait fourni une première tentative, fin du personnage de l’homme
d’affaire éclectique. Constantes de l’après guerre : rôle de l’Etat – chômage incompressible – irrégularité de la
croissance. L’Etat qui s’infiltre via les experts et de nombreuses commissions, dans le processus de reconstruction
(produit de la guerre).
 L’inquiétude du dérèglement démographique : croissance démographique européenne de 1,5 %, insuffisant
face à l’accroissement de la production industrielle, alors que l’Europe de l’est connaît une surcharge
démographique (début de la transition démographique, Quota act de 1921 et le National Origin Act de 1924,
installant une immigration qualifiée aux USA limitant l’immigration : fin de la complémentarité entre besoin de
main d’œuvre américaine et courant migratoire européen).
 La complexité des reclassement individuels et l’avenir incertain des paysans, bénéficiaires de croiss de 1906 et
de éco de guerre : difficulté de mutation des sociétés aux bouleversements socioprofessionnel. Si la femme prend
place dans le monde du travail (emplois de bureau, et moins à domicile ou à l’usine), la dichotomie homme = travail
qualifié / femme = déqualifié se renforce ( du nombre de femmes médecin aux USA), repli vers des secteurs vitaux
(agriculture, industrie).
 L’augmentation de la productivité : expansion des géants industriels (US Steel, Armstrong-Vickers), dans le
mouvement de concentration industrielle ; développement des fabrications massives de produits standardisés
(Renault, Peugeot et Citroën = 65% du marché français) ; cette rationalisation ne permet pas d’utiliser à plein les
capacités de production, malgré une réduction de la concurrence : baisse de la demande, concurrence des pays neufs.
→ on a cru que capitalisme pourrait se réguler lui-même et éviter surcapitalisation et surproduction. Or
ossification des marchés → appel à l’état et aux « experts » : nouvelle donne issue de la guerre et rend illusoire
retour à normale.
Retard de la théorie économique a empirisme autour de 3 idées nouvelles qui émergent alors :
 L’intervention de l’état dans l’agriculture : détérioration brutale des revenus agricoles ( volume de production,
coûts intermédiaires)  politique de stockage menée par les gouvernements jusqu’en 1927, permet une hausse de la
valeur des exportations alimentaires, pas de crise en ciseaux  maintien d’une situation comparable à avant 1914,
progression de l’équipement technique, transformation des modes de vie (électrification des campagnes, radio,
automobile aux USA).
Relations internationales 1924-1945 Cours général
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 L’intervention de l’état dans l’industrie : création d’une Entente internationale de l’acier en 1926 (autour de E.
Mayrisch et Thyssen), préfigurant la CECA, projet de planification de la production à l’échelle européenne pour
stabiliser les prix. ; politique de grands travaux au Royaume Uni en 23-24 et 26-27
 L’organisation scientifique du travail et le développement du taylorisme :
o Avec concentration financière : fin autofinancement → Avènement de managers, responsables
économiques réunissant les capitaux, intermédiaires avec les banques  ‘révolution
managériale’ + « cadres »; méthodologie du management, diffusion du modèle américain. Mais
taylorisme encore très peu répandu (50 000 ouvriers ? au Etats-Unis . en France : Ernest Mattern
(Peugeot) proférée dans 6 instituts européens, entre 1919 et 1928 (en 24 1er congrès intern du
management à Prague).
o Une révolution industrielle : les innovations prennent en compte l’héritage technique d’avantguerre et de la guerre même (électricité er moteur à combustion intern) : industries de la radio, du
téléphone, de l’aviation, de l’automobile + cadre de l’électrification des campagnes, augmentation
de la production d’électricité, baisse de son prix. Succès immédiat de la radio (+ que la bicyclette) :
croissance exponentielle de la demande (13,7 millions de postes en Allemagne avant la 2 GM).
Développement de l’automobile, luxe des classes moyennes (18 mois de salaire ouvrier en France
pour une citroën, 3 mois aux USA), mais la production augmente et les prix baissent (426 000
voitures produites par les 3 principaux pays producteurs en Europe en 1913, 3,7 millions en 1930).
o L’application : en France, à l’initiative de quelques ingénieurs (Ernest Mattern chez Peugeot), au +
50 000 personnes concernées aux USA.
2. Les ambiguïtés de la stabilisation internationale
 La stabilité aléatoire du Gold Exchange Standard : mis en place à la conférence de Gênes, sa stabilité est
fonction de la concertation internationale ; ‘cacophonie’ des stabilisations monétaires, certains pays rétablissant la
parité-or d’avant guerre (Suède, Pays-Bas, GB) alors que d’autres stabilisent leur monnaie à un niveau bien plus bas
(France : 20 % de la valeur de 1914). Les égoïsmes monétaires déstabilisent le système : chacun cherche à
augmenter sa réserve d’or tout en profitant des possibilités spéculatives sur les avoirs anglais et américains.
 La reconstitution des flux financiers internationaux : similaire à 1914 : les 3 grands pays (USA, France, GB)
exportent des capitaux vers les colonies ou des pays neufs. Mais transformation majeure : les capitaux se dirigent
vers les pays industrialisés. La question de la dette passe à l’arrière plan, priorité : restauration d’une puissance :
o La GB, pour restaurer sa puissance financière et concurrencer les USA, investit et spécule à Wall
Street au lieu d’investir en Europe et d’alimenter en retour un flux de hot money (remboursement
des emprunts par augmentation des excédents commerciaux).
o La France : investissement à court terme à Londres et NY ; brutal retrait de ces fonds en 1928.
o L’Allemagne reçoit 2 fois plus de capitaux que n’en nécessite le règlement des capitaux. Investit
dans les pays industrialisés.
 Le rôle central des USA : élément central de la stabilité ; leadership financier avec les emprunts, accepté tant
que les priorités extérieures n’empiètent pas sur les exigences nationales. Leurs placements représentent 84 % des
placements britanniques, x 5 depuis 1914, premiers pourvoyeurs de fond de l’Allemagne. Mais politique
d’investissement à l’étranger plutôt réduite (les investissements n’assurent que 4 % du revenu national) ; cause :
faible promotion à l’investissement étranger, « faim de capitaux » importante sur le marché intérieur américain +
demande importante de prêts d’Europe  dollar gap. Mais projet financier américain mal conçu : pas d’organisme
de prêt international avant 1930 (Banque des règlements internationaux). La progression du commerce international
dépend essentiellement des USA (exportation de matières premières, impose la compétitivité de ses prix).
 Le retour des protectionnismes : si les conférences douanières de la SDN (1927  1929) s’achèvent sur des
vœux pieux, retour des réflexes protectionnistes  handicap au rétablissement d’une activité internationale. Les
tarifs protectionnistes sont utilisés pour maintenir les prix industriels nationaux. Le bouleversement de la carte
géographique des échanges commerciaux (la disparition de la Russie et de l’Allemagne comme marché régulateur
au plan intra-européen, la puissance nouvelle des USA qui exporte en grande partie des produits bruts).
Le statut des années 24 – 29
Prémices d’un Sedan économique français en 1939, d’une renaissance britannique dans les années 30, d’une
stagnation généralisée ? En tout cas période où le rythme synchrone du développement des économies observé
depuis 1870 est brisé.
 Le retour à la prospérité : par ex. les progrès des profits et de la bourse, ou de l’industrie du bâtiment : chiffre
d’affaires double (USA comme Europe) entre 1919 et 1930 ; augmentation sans précédent de la productivité par
tête.
 Bouleversement des normes de production dans les secteurs de pointe, sans adaptation simultanée des habitudes
de consommation : ex. des pays d’Europe centrale où la croissance de l’industrie n’a pas de lien avec la vie des
habitants, liée à la demande étrangère, ‘hypertrophie industrielle’, nécessité de pratiquer le protectionnisme. Dans
les pays industrialisés les revenus minimaux imposés trop faibles par rapport aux gains de productivité, la
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E. Monnet
détérioration des revenus paysans en 28-29, les tensions inflationnistes qui diminuent les rentes  limitation du
marché, l’équipement automobile en Europe plafonne (1 voiture pour 38 hbts en France).
 Les politiques financières orthodoxes : déflation + élan industriel = équilibre budgétaire, d’où effort fiscal, mais
cela suppose l’exclusion de tout lien entre inflation et reprise du commerce extérieur  manque de lucidité,
équilibre social fragilisé par les crises inflationnistes (perdants : les banques, les rentiers, les chômeurs). La
prospérité échappe aux classes moyennes.
IV. LES BOULEVERSEMENTS DES ANNEES TRENTE : LA CRISE
A compléter
V. LE REMODELAGE DES SOCIETES
Resserrement des sociétés sur elles-mêmes, itinéraires personnels divers dans le monde culturel, tiraillé par les
aspirations sociales des populations et l’exaltation d’un monde disparu (« De profundis d’une Europe qui semblait
déjà ne pas pouvoir en réchapper », P. Morand, Fermé la nuit).
1. Le premier après-guerre
La guerre : parenthèse à refermer, ou rupture irrémédiable ? Ce sont les « roaring twenties », alchimie complexe.
 La nostalgie : curieux compromis entre le souvenir d’un âge d’or et la réutilisation de ses mythes (Français
contre Allemand, Démocrate contre bolchevik) face à l’incapacité des citoyens de comprendre les transformations
en cours. Allergie au pluralisme (cf. 4,5 millions d’adhérents au KKK, haine contre les Noirs, les étrangers et
l’Eglise catholique, désigné par Henry Ford comme l’internationale juive) ; inquiétudes des paysans face aux
réformes agraires et à l’industrialisation (colère des paysans croates et roumains, exaltation d’un retour à l’équilibre
rural précapitaliste).
 Une perception de la réalité approximative : on s’habitue difficilement à la disparition d’un univers familier. Cf.
comportement précautionneux des bourgeoisies européennes (conservation de semi-liquidités, modification dans les
dépenses ménagères :  loyer, vêtements, gages domestiques,  achats d’équipements electro-ménagers, aspirateur,
automobile, évitant les domestiques). Les régimes politiques qui s’installent flattent les vertus d’avant-guerre :
Herriot, Baldwin en 1923 : « la bonne odeur de champs, la saveur de la pomme et de la noisette, les qualités et les
traditions simples que Mr. Baldwin a substitué à la décadente atmosphère des jours d’après guerre » (le Times).
 Un formidable appel d’air : un nouvel art de vivre (night-clubs, mode féminine). Attrait de la modernité, de
l’aventure chez les jeunes, peu concernés par les préoccupations démographiques de la gérontocratie, qui fonde la
cohésion des régimes sur la commémoration. Les jeunes américains refusent le puritanisme d’avant-guerre par la
vogue de l’américanisme, les jeunes anglais ou français idéalisent la flapper, jeune femme excentrique (maquillage,
vêtements masculins, cigarette). Défi de la modernité imposé à la jeunesse, auquel on répond par un nationalisme
parfois ‘fermé’ : protectionnisme britannique face aux films américains, qui passent pour vulgaires…
 La crise européenne (Spengler, Valéry) : son dénouement est un profond renouvellement des individus et des
institutions : réaction des survivants de la guerre qui refusent l’utilisation de la science à des fins militaires, veulent
empêcher le retour du nationalisme par l’édification d’une culture transnationale  nouvelle sensibilité, ex.
Weimar, projet du Bauhaus d’associer Art et technique dans un univers d’harmonie sociale et esthétique ; Gropius,
Flee, Moholy, Mies van der Rohe veulent élaborer une mémoire universaliste, résolument moderniste, voulant
ancrer une culture trans-nationale dans la vie quotidienne. Image inachevée de l’univers donnée par les travaux de la
sciences (Einstein, Schrödinger, Heidegger, Max Scheler). Mais assimilation difficile des innovations par les
démocraties : méfiance à l’égard du Bauhaus qui doit migrer de Dessau à Berlin, art fonctionnel jugé élitiste, non à
tort d’ailleurs puisque cet élitisme est revendiqué lorsque Hitler arrive au pouvoir : G. Grosz fustige la « foule
moutonnière qui prenait un plaisir pervers à choisir son propre boucher », marquant la rupture entre l’Allemagne et
le progrès.
 Un esprit d’ouverture limité aux avant-gardes et institutions : ex. l’Eglise qui veut mettre en place de nouvelles
pratiques religieuses, promouvoir un internationalisme chrétien éduquant les esprits en modifiant les comportements
(Bulletin catholique international)  recréation d’une religiosité populaire unificatrice. Art des années 20 : porteur
de désillusions permanentes (cf. Compositions de Kandinsky : satisfaction du désir indéfiniment remise à plus tard),
utilisation de l’irrationnel et de l’immoral, pour suggérer la beauté et l’amour derrière le quotidien (Proust,
Fitzgerald, Proust). Création de mondes de fantaisie, traduisant une urgence à profiter de la vie, mettant en avant
l’impuissance de l’homme moderne.
 La métamorphose des anciens outils de la culture de masse et des formes de sociabilité : fin des grands
expositions universelles à but pédagogique pour une société essentiellement rurale ; les expos deviennent des foires
spécialisées, où chaque pays fait étalage de ses performances. La presse, si dans ses contenus elle évolue peu (ton
moralisateur, information hasardeuse, place importante des feuilletons, des faits divers), devient un big business : la
presse britannique par ex. opère une concentration importante ( des coûts de fabrication, d’agences
d’information) ; dvt de la presse spécialisée (magazines féminins ou presse enfantine). De nouvelles liaisons
horizontales surviennent avec le cinéma et la radio.
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 La progression de l’uniformisation des modes de vie : déplacement des consensus nationaux vers des valeurs
originales. Les changements quantitatifs (structure de la consommation) sont mesurés (progression modérée des
revenus), mais le progrès technique oriente davantage la consommation vers les services. Surgissement d’une
culture de masse (cinéma, sport, radios uniformisent le rêve) même si l’homogénéisation n’est pas acquise : désir
des pays d’incarner une légitimité culturelle, particularismes de classe. Mais s’impose l’idée d’une culture
transmissible sur l’idée d’une civilisation à exporter (ex : emprunts aux colonies, à la Russie de Kandinsky, de
Stravinski, au jazz).
2. De la méconnaissance au témoignage : la réaction des sociétés face à la crise
 L’étanchéité des mouvements culturels face à la crise : essor du cinéma parlant en 1929  l’industrie du
cinéma échappe au marasme, et les films américains perpétuent le mythe de la prospérité aux USA. La prise de
conscience de la crise est lente : le prix Nobel de littérature est décerné en 1930 à Sinclair Lewis qui présente dans
son œuvre l’Amérique des classes moyennes, de la modernité, de l’industrialisation. Elle débouche sur des
initiatives concrètes (secours alimentaire, travaux ruraux).
 La lenteur généralisée de la réaction : les opinions publiques face à une mauvaise compréhension de la
situation, ne réagissent que tardivement, parfois avec des réflexes anciens (xénophobie, hostilité à la rationalisation),
entretenant le souvenir d’un âge d’or idéalisé.
 L’affaiblissement des sociétés : appauvrissement des victimes de la crise  retour des bidonvilles de Lyon, des
‘Hoovervilles’ du Michigan, exclusion sociale et délinquance + menace omniprésente du chômage. Perte de
cohésion des sociétés et de leur capacité de résistance face aux dérives autoritaires.
 Les échappatoires individuelles : ex. de la scolarisation, à laquelle recourent les parents pour retarder l’entrée
sur le marché du travail de leurs enfants  engorgement des universités, baisse des spécialisations.
 Toutes les catégories sociales se considèrent comme perdantes :
o Paysans : écrasés financièrement par des dettes contractées pour la mécanisation, et qu’ils ne
peuvent rembourser face à la baisse des prix agricoles  abandon des terres ou tentative de
reconstituer un monde clos et autonome (cf. Grenadou).
o Travailleurs manuels et salariés du privé : dénonciation des effets de la rationalisation et recherche
de postes dans des entreprises modernes mieux payés.
o Fonctionnaires : se sentent lésés par l’amputation de leur traitement.
 Un décalage avec la réalité : la réalité des privations reste en deçà des sentiments des contemporains,
conséquence d’une prise de conscience décalée, le témoignage succédant immédiatement à la méconnaissance (
littérature : fuite vers un horizon mythique ou dénonciation de l’absurdité des univers économiques injustes).
 La justice sociale : rencontre un succès limité (échec des projets de limitation de la durée du travail en GB, en
Belgique), on privilégie les revendications spontanées (marches de la faim, mutineries en GB en 1931, en France en
1935). Valeurs privilégiées : travail- effort – communauté ; les sociétés cloisonnées tendent à recomposer un univers
en réponse à l’incertitude (Chacun pour soi, tableau de Kandinsky à son arrivée à Paris).
 Le passage du témoignage immédiat à l’organisation : face à la militarisation des régimes allemands, japonais,
sud-américains dans les années 33-35, on répond à la question ‘comment et pourquoi gouverner’ par la notion
d’intérêt général, de cohésion du corps social ; retour d’idéaux anciens : la charité, l’unité syndicale, le patriotisme,
recentrage sur la vie familiale, apologie des ‘petits’ et retour à une dimension humaine. La crise enfin fait prendre
conscience que le XIX° siècle a bel et bien disparu.
Relations internationales 1924-1945 Cours général
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E. Monnet
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