“Inter Gentes – Mettre les derniers à la première place
Exercer l’autorité dans une congrégation religieuse
missionnaire œuvrant
dans un contexte international et interculturel,
à la lumière de l’exemple du pape François
(USG, novembre 2013 Heinz Kulüke, SVD)
Au début de notre mandat, en septembre 2012, nous, les membres de l’équipe dirigeante de la
SVD, avions choisi le slogan « Inter gentes Mettre les derniers à la première place » pour
guider notre direction et notre administration. Nous sommes sept SVD venant de sept pays
différents, et chacun d’entre nous a été assigné à un pays et à une culture autres que ceux de ses
origines pendant de nombreuses années. Plusieurs membres de notre équipe ont vécu et travaillé
dans des bidonvilles à travers le monde. Nous savons tous jusqu’à quel point les personnes
marginalisées ont un besoin urgent d'aide, et jusqu’à quel point l'Église a besoin des personnes
marginalisés. Par l’expression « inter gentes », nous tenons à souligner que les missionnaires
doivent vivre parmi les gens en étant proches d’eux.
Au cours des vingt dernières années, les SVD ont choisi de parler de la mission comme d’un
dialogue prophétique qui devrait être marqué par quatre dimensions caractéristiques.
Parmi les interlocuteurs privilégiés de nos communautés internationales et interculturelles, nous
avons identifié les croyants et ceux qui cherchent la foi, les pauvres et les puissants, les personnes
de différentes cultures, les chrétiens et les adeptes d'autres traditions religieuses. Les quatre
dimensions qui caractérisent notre Congrégation sont les attitudes fondamentales à assumer dans
notre vie et notre service si nous voulons venir en aide (communication), contribuer à faire du
monde un endroit meilleur (justice, paix et intégrité de la création ), faire participer d'autres
personnes, en particulier les laïcs (animation de la mission) et, en tant que Missionnaires du
Verbe Divin, avec nos partenaires dans la mission, vivre une vie centrée sur Dieu et basée sur les
saintes Écritures (Bible).
Le Chapitre général de 2006 de la SVD identifie cinq aspects de notre vie religieuse
missionnaire sur lesquels nous voulons nous concentrer, afin de mieux nous préparer pour la
mission prévue par le plan d'action dudit Chapitre. Ces cinq aspects sont : la spiritualité, la
communauté, l’exercice de l’autorité, les finances et la formation. On pourrait changer
l’ordre, mais en plaçant l’exercice de l’autorité au milieu, on veut souligner que tous ces aspects
nécessitent une bonne direction. L'exemple inspirateur du pape François est une confirmation de
ce que nous aimerions faire et peut nous aider à guider nos réflexions. C’est autour de ces cinq
aspects que s’articulera cette contribution:
Spiritualité - Apprendre à vivre avec une question ouverte : «Dieu, que veut-il que nous
fassions ? »
Le pape François: «Chercher de nouvelles méthodes d’évangélisation, pour porter l’Évangile jusqu’aux
extrémités de la terre. »... « Le discernement se réalise toujours en présence du Seigneur, en regardant les signes, en
étant attentif à ce qui arrive, au ressenti des personnes, spécialement des pauvres.... Le discernement dans le
Seigneur me guide dans ma manière de gouverner. »
Les défis dans un contexte international/interculturel :
Il faut chercher de nouvelles formes
de prières interculturelles et de célébrations liturgiques dans les contextes africain, asiatique, sud-
américain et même européen. Pour être proche des gens, prier avec des personnes de tous bords,
il faut de nouvelles façons de prier et de célébrer notre foi. Il sera crucial de trouver un juste
langage que nous puissions tous comprendre. Le Chapitre général de 2006 de la SVD affirme:
«Être proche des gens peut nous conduire à adopter une «spiritualité de la Croix » pour se préparer à une vie qui
comprend sacrifices et échecs... » (# 96, 28)
Ex. : célébrations culturelles du centenaire en Indonésie; liturgies préparées lors des cours de
renouvellement internationaux avec des participants venant de tous les coins du monde
(lecture/échanges bibliques et liturgie des heures).
Communauté Qu’avons-nous en «commun» qui fait que nous formons une
communauté ?
Le pape François: «Bien des fois nous avons vu des accidents de la route. Mais si l'église reste repliée en elle-même,
elle vieillira. Je vous dis : je préfère mille fois une Église accidentée, et non une Église malade !»... « Jésus nous
montre l'autre voie: sortir. Sortir pour témoigner, pour s'approcher de son frère, pour partager, pour questionner.
Devenir la Parole dans le corps et dans l’esprit. »... « On ne peut pas parler de pauvreté si on ne l’expérimente
pas par une insertion directe dans les lieux elle se vit.»... « Et puis la communauté est pour moi vraiment
fondamentale. J’ai toujours cherché une vie communautaire. Comme prêtre, je ne me voyais pas seul. J'ai besoin de
vivre ma vie avec les autres. »
Les défis dans un contexte international / interculturel : « Notre prière, notre vie en communauté
et notre travail ensemble nous soutiennent dans notre mission » (Chap. gén. 2006 # 38 ) Toutefois, être des
« missionnaires religieux» comporte souvent une tension non résolue entre «être religieux » et
«être missionnaire », être proche des gens et passer du temps avec les confrères de la
communauté, avoir « l'odeur des brebis » et celle des confrères ; le «risque» d'être proche des
gens et de passer trop peu de temps avec les confrères ou vice-versa.
Une communauté doit avoir un intérêt commun: La préoccupation commune pour les
pauvres peut aider à former une communauté... Comment obtenir la participation des confrères,
les faire sortir de leur zone de confort? - Il est important de donner l'exemple, de partager les
responsabilités et de montrer l'intérêt et la préoccupation pour les personnes. (Le Samaritain, un
étranger)
Vivre dans des communautés internationales et interculturelles : défis : Assigner les jeunes
confrères internationaux aux communautés vieillissantes en Europe... Lire les esprits et les
visages des confrères.... La communication interculturelle : « Ce n'est pas ce que je voulais dire...
Mais c'est ce que vous avez dit »... Les problèmes linguistiques...
Quelques exemples:
Rétablir la confiance : les anciens pays communistes : «Réunions après réunions. »
Asie/Afrique : la culture de la honte; Amérique du Sud - attitude de franchise, souvent de
confrontation. Asie : Ordre des priorités différent: d'abord la famille, puis « barkada » (amis), puis
communauté religieuse.
Humour incompris : Ce que certains trouvent drôle, d'autres le trouvent offensif.
Retraite : beau cadre, bonne nourriture et soins médicaux, mais solitude.
Mort/Deuil /Affliction: « Le matin enterrer un confrère, l'après-midi retourner au travail. »
« Pendant l’homélie funèbre, j'ai appris pour la première fois qui était le confrère qui a vécu à côté de moi pour
plus de 20 ans».
Ceux qui sont aux périphéries (y compris les confrères) font partie de la communauté. Confrères
en difficulté (toxicomanie, mauvaise conduite sexuelle...)
Les confrères les plus heureux sont souvent ceux qui sont les plus proches des gens, même s’ils
sont fatigués, épuisés...
Service de l’autorité « Comment bien exercer l’autorité dans un contexte interculturel /
international? » - « L'importance du travail d'équipe et de la consultation » - « Quel est
l'objectif fondamental d'une bonne direction ? »
Le pape François: « ... comme archevêque de Buenos Aires, je réunissais tous les quinze jours les six évêques
auxiliaires et, plusieurs fois par an, le Conseil presbytéral. Les questions étaient posées, un espace de discussion
était ouvert. Cela m’a beaucoup aidé à prendre les meilleures décisions. Maintenant j’entends quelques personnes
me dire “Ne consultez pas trop, décidez ».
« Les consistoires, les synodes sont, par exemple, des lieux importants pour rendre vraie et active cette consultation.
Il est cependant nécessaire de les rendre moins rigides dans leur forme. Je veux des consultations réelles, pas
formelles. La consulte des huit cardinaux, ce groupe consultatif outsider, n’est pas seulement une décision
personnelle, mais le fruit de la volonté des cardinaux, ainsi qu’ils l’ont exprimée dans les Congrégations générales
avant le Conclave. Et je veux que ce soit une consultation réelle, et non pas formelle. »
Qu’y a-t-il de vraiment nouveau dans l’autorité exercée par le pape François ? Les gens de
Buenos Aires me disent que « le pape a toujours été comme ça». Ce qui est nouveau, c'est sa
position. Sa position ne le change pas... C’est lui qui change la position... C'est peut-être la
première fois que les responsables des congrégations religieuses sont invités à faire de même. Les
bases restent les mêmes : la simplicité, l'authenticité, l'humilité, ne pas tout savoir, près de Dieu
et proche de la vérité.... Peut-être l'objectif fondamental est-ce faire de l'Église à nouveau
l'Église du Seigneur... « Faire des congrégations, les congrégations du Seigneur... »
Les défis dans un contexte international / interculturel : Simplifier : « Les esprits complexes
des hommes/femmes du XXIe siècle ne peuvent réellement comprendre que les choses très
simples. » (Heidegger)
Trouver un langage simple: appeler les choses par leur nom; donner un nom aux réalités pour
qu'elles commencent à exister (les réfugiés, les migrants, les crimes de guerre, la corruption, une
culture de l'indifférence), ne pas être trop diplomatique.
Une question importante est de savoir comment trouver et former les meilleurs responsables
dans un contexte international et interculturel. Identifier les responsables... - Quand
commencer ? - Pendant les années de formation ? Comment préparer les responsables de
communautés interculturelles / internationales ? Former tout le monde ? Former une élite ?...
Importance de la planification de la relève... Les autorités ecclésiales/ religieuses sont-elles trop
européennes? Comment apprendre à travailler en équipes internationales / interculturelles ?
Comment déléguer ? Comment travailler avec les laïcs ? (de la collaboration à la «
coresponsabilité» - Le Pape Benoît)
Que faire dans les cas, si nombreux, d’institutions qui nécessitent une direction
bonne/internationale (universités, collèges, écoles de théologie et de philosophie, instituts de
recherche, séminaires, hôpitaux...)... Changer la mentalité des confrères et des partenaires laïcs.
«Les responsables à la retraite » - un énorme potentiel de connaissances (langues, expériences...)
Comment l’exploiter ?
Un changement de paradigme, passage de l'«éthique de l'obéissance » à une « éthique de la
responsabilité » (Bernhard Häring)
La direction et l’autorité
L’autorité et les équipes de direction
: L’autorité n'est pas donnée à une seule personne, mais
à un groupe de responsables. Ex : quand des membres déçus approchent les membres du conseil
pour demander des clarifications, dire : ‘Le conseil a déci’ et non pas ‘un tel a dit «oui» et un tel
a dit «non» -. La prise de décision : Ex: La troisième option : « Décider de ne pas décider. »
(Asie)
Les responsables laisseront leur marque à l'institution; aussi de bonnes équipes.
Les équipes de direction internationale et interculturelle : l’autorité à plusieurs visages et couleurs.
Une distinction : les équipes de direction interculturelles mais non internationales...
communautés interculturelles mais pas internationales (Inde, Indonésie, Vietnam...)... Le danger
de cultures dominantes... et d’une surreprésentation dans les équipes (Ex : Timor oriental)
« L’Esprit Saint, apparemment, semble créer du désordre dans l’Église, parce qu’il apporte la diversité des
charismes, des dons ; mais tout cela au contraire, sous son action, est une grande richesse, parce que l’Esprit Saint
est l’Esprit d’unité, qui ne signifie pas uniformité, mais ramène le tout à l’harmonie. Dans l’Église, c’est l’Esprit
Saint qui la fait, l’harmonie.».
L’autorité et l’amour
: L’autorité et l'amour ne peuvent pas être séparés l’un de l’autre. C'est ce
que beaucoup d'entre nous ont sûrement appris de leurs parents. Dans les communautés
internationales / interculturelles, cela peut prendre différentes formes.
« Même si la vie d’une personne a été un désastre, détruite par les vices, la drogue ou autre chose, Dieu est dans sa
vie. On peut et on doit Le chercher dans toute vie humaine. Même si la vie d’une personne est un terrain plein
d’épines et de mauvaises herbes, c’est toujours un espace dans lequel la bonne graine peut pousser ».
L’autorité et le respect
: le respect que vous devez gagner... Ce qui importe c'est votre
exemple... la façon dont vous vivez...
« La première réforme doit être celle de la manière d’être. Les ministres de l’Évangile doivent être des personnes
capables de réchauffer le cœur des personnes, de dialoguer et cheminer avec elles, de descendre dans leur nuit, dans
leur obscurité, sans se perdre. Le peuple de Dieu veut des pasteurs et pas des fonctionnaires ou des clercs d’État.»
L’autorité et le pardon
: Une invitation à utiliser l’autorité de pardonner et d'encourager les
autres à pardonner (dans le contexte asiatique les confrères pardonnent, mais souvent n’oublient
pas).
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