EVANS Nicolas MULLER Benoit Revue de Presse 04/03/09 Dans le contexte de l’actuelle crise financière et économique, les Etats ont déployé un ensemble de mesures interventionnistes afin de soutenir le niveau de l’activité économique. Nous allons nous interroger sur la nature de cette intervention, et sur la portée économique des mesures annoncées. I. L’actualité a été dominée par les moyens mis en œuvre par les pouvoir publics afin le lutter contre la crise économique. USA : Comment justifier le niveau record du déficit américain ? Le plan de relance présenté par B. Obama va t-il dans le bon sens ? Aux Etats-Unis, malgré la forte popularité de Barack Obama, des critiques ont commencé à se faire entendre, notamment depuis la présentation du plan budgétaire fédéral. Le déficit budgétaire atteint en 2009 un montant record de 1750Md $, soit 12 % du PIB (niveau le plus élevée depuis la fin de la WWII). Au delà du vaste plan de relance annoncé mi-février (787 Md $) et de la mise en place des promesses de campagne d’Obama (notamment en matière de santé), le budget américain intègre le coût des guerres en Irak et en Afghanistan. Les démocrates ont été accusés de vouloir créer une multitude de plans gouvernementaux, entrainant une dispersion de l’investissement public. Les Républicains se montrent bien plus favorables à un programme d’incitation fiscale ciblant notamment les classes moyennes. Quels sont les enjeux économiques des plans de relance et de la hausse des déficits publics ? Éléments que l’on retrouve aussi bien aux USA qu’en Europe : les réductions d’impôts. Quel intérêt ? Tout d’abord cela libère une capacité de pouvoir d’achat pour les ménages concernés. Deux types d’effets peuvent être envisagés : a. EFFET SUR LES PRIX = Peut concerner les impôts indirects – la TVA notamment – cela permet une relance la consommation. Par exemple, au RU parmi les mesures annoncées figure une baisse de 2,5 points de la TVA. De même, en Chine, 17,5 Md $ ont été alloués à une baisse de la TVA. b. EFFET SUR LES REVENUS = Peut concerner les impôts directs. Aux USA, 95 % des ménages de la classe moyenne devraient bénéficier de réduction d’impôts. L’intérêt de cette mesure est de jouer sur la plus forte propension marginale à consommer des classes moyennes par rapport aux catégories les plus aisées1. B. Obama propose également d’augmenter les impôts pour les couples gagnant plus de 250’000 $ par an et de relever les plafonds d’imposition. Inversement, les engagements du nouveau président en matière de politique de santé devraient amener à une protection accrue des ménages les moins aisés. Autrement dit, cela devrait donner lieu une hausse des revenus de transferts, et donc une hausse corrélée de la consommation (d’autant plus que ces ménages ont une forte propension à consommer). Éléments de dépense amenés à impacter l’agrégat « Progrès technique ». Aux USA, le plan de relance prévoit de dépenses de 43 md $ dans l’énergie, 111 Md $ dans l’industrie et la sciences. En Chine, il a été prévu de consacrer 23 Md $ à l’innovation technologique 1 Notons que les classes moyennes disposent d’une propension marginale à consommer moins forte que les catégories les plus populaires. A relativiser dans la mesure où une hausse des revenus de cette catégorie, si elle ne se traduit pas en consommation peut donner lieu à un niveau d’épargne supplémentaire. Or, en fonction de l’aversion au risque des ménages concernés, cela pourrait avoir un impact positif sur les marchés financiers. 1 notamment. Autant de dépenses qui devraient permettre d’augmenter la productivité des facteurs. D’une manière plus générale, il convient également d’insister sur l’impact des politiques de grands travaux publics. En Chine, 263,7 Md $ seront consacrés au développement des infrastructures, 54 Md $ à l’urbanisation des zones les plus rurales. Aux USA, 111 Md $ sont destinés aux infrastructures et la science. A la lumière de la théorie keynésienne relative au multiplicateur d’investissement, de telles dépenses devraient, elles aussi, contribuer à une hausse du niveau de l’activité économique. D’une manière plus concrète, il s’agit d’une manière de justifier par exemple le niveau de déficit américain (soulignons toutefois l’existence d’un risque d’éviction relatif au besoin en financements généré par une hausse des dépenses publiques). EUROPE : Quelle coopération en matière de relance pour l’Union Européenne ? Les pays Est européens ont fait appel aux pays les plus riches de l’Union afin de recapitaliser leur système bancaire et de rééchelonner leurs dettes en devises. Le 1er mars s’est tenu un sommet de l’UE au cours duquel a été promise une aide aux pays Est européens. Néanmoins, durant cette même réunion, la proposition hongroise (180Md €) a été rejetée. Un assainissement insuffisant des systèmes financiers Est européens pourrait avec des conséquences directes sur l’économie des pays les plus riches de l’UE (financement des investissements à l’est par des banques de l’ouest). Les dirigeants européens ont également rappelé leur souhait de rejeter toute dérive protectionniste et de coordonner leurs plans de relances nationaux. En quoi une concertation à l’échelle européenne semble t-elle primordiale en matière de relance ? Nous évoquions au sujet des plans de relances européens et américains la théorie du multiplicateur d’investissement. Dans ce cadre, il est essentiel de prendre en compte la contrainte extérieure. Une politique d’investissement public isolée ne permet pas à l’Etat considéré de bénéficier d’une multiplication de son investissement, dans le mesure où, dans une économie internationale, une partie de ces dépenses « s’évaporeraient » dans le commerce international. Or, une coopération au niveau politique permet d’instaurer une réciprocité qui est à même de compenser les effets de cette « contrainte extérieure ». Plus le degré d’intégration économique est élevé, plus il semble essentiel d’instaurer une coopération politique. CRISE ECONOMIQUE ET ECOLOGIQUE : Quelles peuvent être les justifications économiques d’une relance verte ? Il apparaît que de nombreux pays ont consacré une part relativement importante de leur plan de relance aux investissements verts. Quelques points de repère (part en % du plan de relance consacré aux investissements verts) : La Corée/Sud (80,5%) ; Etats-Unis (12%), concentrés notamment sur les énergies renouvelables ; Chine (37,8%) concerne avant tout la construction de nouvelles infrastructures ; France (21,2%), portés sur l’efficacité énergétique dans le bâtiment. Quels sont les enjeux d’une relance verte ? Stiglitz dans le Financial Time : « This type of investment and those in green technology and infrastructure would not only provide a shortterm stimulus but also improve the US competitive position. As the world moves to a lowcarbon economy, there will be a competitive advantage for those who embrace these technologies. » Autrement dit, les bienfaits de la relance verte sont directement liés à l’importance du progrès techniques dans la croissance économique. 2 A global Survey of stimulus plans, article rédigé par Kevin Gallagher sur le blog économique de Dani Rodrik, 26/02/09. http://rodrik.typepad.com/dani_rodriks_weblog/2009/02/a-global-survey-of-stimulus-plans.html Barack Obama tente de clarifier sa doctrine, Les Echos, 25/02/09. http://www.lesechos.fr/info/inter/4835201barack-obama-tente-de-clarifier-sa-doctrine-economique-face-a-la-crise.htm The budget reveals the libéral Obama,Financial Times, 01/03/09. http://www.ft.com/cms/s/0/e9049900-069211de-ab0f-000077b07658.html Obama tente de rassurer le congrés sur la rigueur budgétaire, Les Echos, http://www.lesechos.fr/info/inter/4834803-obama-tente-de-rassurer-le-congres-sur-la---rigueur-budgetaire--.htm Obama laisse filer le déficit et met le cap sur les réformes, Les Echos, 26/02/09. http://www.lesechos.fr/depeches/monde/afp_00124611-etats-unis--obama-laisse-filer-le-deficit-et-met-le-capsur-les-reformes.htm EU summit pledges aid for eastern states, Financial Times, 01/03/09. http://www.ft.com/cms/s/0/fdac296e0682-11de-ab0f-000077b07658.html Le plan de sauvetage de l’est se heurte aussi a des résistances en Hongrie, Les Echos, 02/03/09. http://www.lesechos.fr/depeches/monde/afp_00125553-le-plan-de-sauvetage-de-l-est-se-heurte-aussi-a-desresistances-en-hongrie.htm Pays de l’est : les européens rejettent un plan massif, Les Echos, 02/03/09. http://www.lesechos.fr/journal20090302/lec1_une/4837023-pays-de-l-est---les-europeens-rejettent-un-plan-daide-massif.htm De la Corée au RU, le palmarès de la relance verte, Les Echos, 26/03/09. http://www.lesechos.fr/info/france/4835634-de-la-coree-au-royaume-uni--le-palmares-de-la-relance---verte-.htm Obama’s chance to lead the economic recovery, Financial Times, 02/03/09. http://www.ft.com/cms/s/0/7c51644a-075b-11de-9294-000077b07658.html II. L’exemple de la RBS – combien va coûter l’intervention dans le système bancaire ? Contrairement à la crise de 1929, les états ont décidé d’intervenir et de se substituer au système bancaire en indiquant l’importance que celui-ci a pour l’économie quotidienne des consommateurs et de l’économie globale. La question qui se pose de ce point de vue est : quels sont les véritables coûts du sauvetage des banques ? Le cas de la RBS va servir comme exemple pour montrer les coûts directs et indirects des faillites bancaires et les conséquences pour la santé de l’économie mondiale. La semaine passée, la Royal Bank of Scotland (RBS) a annoncé ses résultats pour l’année 2008. Déjà réceptrice d’un premier paquet de sauvetage du gouvernement britannique, la banque a du publier une perte sur l’année passé de £24,1 milliards, soit le plus grand déficit qu’une entreprise commerciale ait connu au Royaume-Uni. Bien que la RBS ne soit pas la seule banque à être touchée de cette manière, son cas parait très intéressant en tant qu’exemple et crée un « précédent » permettant d’anticiper les réactions du gouvernement britannique (et celles des autres pays touchés par la crise financière). Comme beaucoup de ses concurrents américains et européens, la RBS a été touché par l’éclatement de la bulle de l’immobilier américain. Mais en se sentant plus performantes que beaucoup de ses compétiteurs, la banque a décidé de profiter de la crise pour racheter la banque néerlandaise ABM Amro en consortium avec Fortis et Santander, ce qui sera finalement qualifié de désastre. Suite à cette mauvaise gestion, Alistair Darling, ministre des finances du Royaume Uni, a annoncé le plan de sauvetage pour la RBS le 26 février 2009. Ainsi la banque reçoit £25,5 milliards pour couvrir son déficit et avoir un minimum de liquidité et en plus voit ses actifs toxiques assurés pour £325 milliards par l’état et son programme de « Asset Protection Scheme ». De fait, la banque est donc nationalisée à 95%. Le gouvernement a indiqué que ce 3 choix était nécessaire pour réinstaurer la confiance des consommateurs, mais indique en même temps qu’il ne garantira pas forcement de la même manière toutes les banques en difficulté – Lloyds et Barclays ayant fait des demandes elles-mêmes. Ces mesure publiques représentent un choix politique, qui pourtant aura des conséquences macroéconomiques bien plus large que le simple soutient d’une banque, puisque les dépenses de milliards de livres ont des répercutions sur toutes l’économie : Par la nationalisation de la banque, le risque et les déficits sont dorénavant portés par l’Etat, c'est-à-dire le revenu fiscal, donc les citoyens eux-mêmes L’intervention de l’état détruit le marché concurrentiel parfait (plus d’homogénéité). Le financement direct des déficits et la garanti ont en plus d’énormes coûts d’opportunité, puisqu’ils alourdissent le déficit budgétaire de l’état – qui est au niveau le plus élevé depuis 1946 – et ne peuvent pas servir pour les plans de relance de la consommation individuelle. Les intérêts futurs freineront donc également pour des années à venir. De plus, la livre s’est effondrée depuis le début de la crise (à 0,94€ le 01/03/09) et impacte également le pouvoir d’achat à l’étranger. Le quotidien suisse Neue Zürcher Zeitung indique que le problème ne se trouve plus dans le passé, mais désormais dans la détérioration potentielle de crédits qui sont actuellement perçus comme étant bons. Si ceci est le cas, même les assurances énormes de l’Etat pourraient être insuffisantes. Il n’y a pas de recette uniforme pour résoudre les problèmes des crises. L’état britannique a décidé de résoudre la crise financière en relançant le système bancaire au dépit de la crise économique qui en suit. Il décide donc de stabiliser l’épargne et l’investissement en gardant les banques liquide au lieu d’inciter davantage la consommation des particuliers. Cet argent ne retourne donc pas directement dans l’économie quotidienne et ne permet donc pas de relance de consommation ou d’investissements. Le sauvetage des banques, comme la RBS, va donc couter très cher en termes directs, mais sera beaucoup plus important encore, quand les effets secondaires et les coûts d’opportunités seront visibles aux consommateurs. Bien que le gouvernement ait été beaucoup critiqué pour sa politique trop libérale, il semblerait que ce choix soit nécessaire. Financial Times (2009a). RBS taps UK treasury for £25.5bn, 26.02.2009. URL: http://www.ft.com/cms/s/0/ae796b5c-03d7-11de-845b-000077b07658.html Financial Times (2009). RBS loss explained, 26.02.2009. URL: http://www.ft.com/cms/s/0/101f66a6-043011de-845b-000077b07658.html?nclick_check=1 Financial Times (2009). Goodwin stands firm on £16m pension, 26.02.2009. URL: http://www.ft.com/cms/s/0/22924e0a-03ec-11de-845b-000077b07658.html Les Echos. (2009). Bourse de Londres : le Footsie dégringole de 2,18%, entraîné par les banques http://www.lesechos.fr/investisseurs/analyse_seance/londres.php Frankfurter Allgemeine Zeitung (2009). Konsequenzen aus dem Bankendesaster, 27.02.2009. http://www.faz.net/s/RubAB001F8C99BB43319228DCC26EF52B47/Doc~E5EB37EAE5FCE49999211BF226 D758A7A~ATpl~Ecommon~Scontent.html Neue Zürcher Zeitung (2009). Unkalkulierbares Vergiftungsrisiko bei Banken, 27.02.2009. http://www.nzz.ch/nachrichten/startseite/unkalkulierbares_vergiftungsrisiko_bei_banken_1.2104152.html Schulz, B. (2009). Britischer Haushalt ächzt unter der Bankenrettung. Frankfurter Allgemeine Zeitung, 21.01.2009. URL: http://www.faz.net/s/Rub58241E4DF1B149538ABC24D0E82A6266/Doc~E28AABF083ACB4D3192013C61F 3EF229D~ATpl~Ecommon~Scontent.html 4