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UNE SOCIOLOGIE FOUCALDIENNE DU NEO-LIBERALISME EST-ELLE POSSIBLE ?
 
 
 
Vingt ans après la mort de Michel Foucault, nombreux sont les chercheurs en sciences 
humaines et sociales qui, de part et d’autre de l’Atlantique, ont fait de son œuvre un point de 
référence
.  Les  spécialistes  des  secteurs  sociaux  ou  des  institutions  qui  ont  intéressé  le 
philosophe ont été les premiers à faire appel à ses travaux à partir des années 1970 : c’est le 
cas par exemple en sociologie de la médecine et du monde hospitalier, de la psychiatrie et des 
formes  de  régulation  psychologique,  de  la  prison  et  d’autres  « institutions  totales »,  de  la 
police  et  des  instruments  de  contrôle  de  la  « déviance ».  L’histoire  et  la  sociologie  des 
sciences  de  l’homme  et  de  la  société  est  aussi  entrée  en  dialogue  avec  l’« archéologie  du 
savoir », même s’il  paraît  aujourd’hui  improbable de  proposer  une  science des  productions 
symboliques en s’appuyant principalement sur ce programme inachevé (Fabiani, 2004). On a 
aussi  vu  se  multiplier,  ces  dernières  années,  les  travaux  de  comparaison  ou  d’assemblage 
conceptuels  entre  les  œuvres  de  Foucault  et  celles  des  « pères  fondateurs »  ou  des  figures 
importantes  de  la  sociologie  ou  des  autres  sciences  sociales  (Actuel  Marx,  2004 ;  Butler, 
2002 ;  De  Certeau,  1990 ;  Steiner,  à  paraître).  Mais  les  commentaires  exégétiques  sur  les 
convergences possibles du philosophe français avec Goffman et surtout Elias (Curapp, 1996), 
Weber mais aussi Marx et Freud, sont le plus souvent restées lettres mortes, séparées de tout 
 
 L’auteur a pu présenter des fragments et des versions antérieures de ce travail à la journée d’études « EFFects – 
Reprises  de  la  politique »  (Centre  de  sociologie  de  l’innovation/École  des  Mines  de  Paris)  organisée  par 
Dominique  Linhardt  et  Laurent  de  Sutter  en  juin  2006,  ainsi  qu’au  séminaire  « Science,  politique  et 
gouvernance » de Dominique Pestre, Jean-Paul Gaudillière et Amy Dahan (Centre Alexandre Koyré/EHESS) en 
janvier 2007. Il remercie les organisateurs de leurs incitations et les participants, tout comme les trois lecteurs 
anonymes de  la revue, de  leurs remarques. Il remercie également Yves Cohen, Alain  Desrosières, Jean-Louis 
Fabiani,  Marcelo  Otero,  Dominique  Pestre  et  Philippe  Steiner  de  leurs  conseils.  Bien  entendu,  il  reste  seul 
responsable des propos qui suivent. 
 La consécration du philosophe, professeur au Collège de France, a été si rapide qu’il existe déjà des histoires de 
sa réception au sein des différentes disciplines des sciences de l’homme et dans les diverses traditions nationales 
(Cohen,  à  paraître ;  Noiriel,  1994 ;  Zancarini,  2000 ;  Le  Portique,  2004 ;  Granjon,  2005 ;  Meyet,  Naves, 
Ribemont,  2005).  Pour  une  brève  évocation  de  la  réception  de  Foucault  aux  Etats-Unis  et  des  malentendus 
qu’elle entraîne, voir Cusset, 2003, p. 293-295.