JP Tanguy - sante

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Atelier sur l’isolement carcéral
Intervenants :
Isabelle Mingand ATP
Docteur Schmouchkovitch CHU de Bohars
Anne Rapin Point 48, prison dans la ville
Gisèle Collomb Point 48, prison dans la ville
P. Saraux
Au niveau du suicide en prison, existe-t-il de la prévention dans les maisons d’arrêt ?
notamment pour les premières incarcérations ?
Docteur Schmouchkovitch
Il existe des réunions régulières entre le personnel pénitentiaire et l’USCA (soignants). C’est
une grande nouveauté, des soignants acceptent de parler avec le pénitentiaire, il y a le secret
médical mais on parle du prévenu. Il existe une liste des personnes repérées comme ayant des
problèmes, environ 40 prévenus dont le comportement inquiète. Il est toutefois difficile de
prédire un comportement suicidaire même si tous les facteurs sont réunis (tendance forte à
l’impulsivité).
Association de visiteurs de prison – War zao interpelle l’association point 48 :
Concernant l’isolement à la sortie de prison, existe-t-il des mesures types d’accompagnement
ou suivi automatique ?
Anne Rapin Point 48
Non ce n’est pas systématique, ils ont connaissance de l’association par le bouche-à-oreille,
des correspondances ou le journal interne à la prison « passe muraille ». Ils sortent
généralement le samedi matin, sont à 9 heures chez nous.
Gisèle Collomb Point 48
Ils n’ont pas d’autres contacts à la sortie ils n’ont rien, pas de contacts, nous touchons des
personnes en situation de grande précarité.
Association de visiteurs de prison – War zao
Oui mais les gens sont seuls à leur sortie, est-il possible d’éviter la situation d’une sortie sans
accompagnement ? Connaissance d’une personne signalée par un tiers, qui est à l’hôtel depuis
sa sortie (il a économisé)
Anne Rapin Point 48
C’est quelqu’un qui nous a signalé que ce monsieur n’allait pas bien du tout. IL a pu
économiser, c’est une chance, certains n’ont rien, par exemple, les étrangers en situation
irrégulière. On les garde jusqu’à la fermeture de l’association, après ils sont à la rue. L’hiver,
il y a une obligation de loger, période grand froid mais l’été non. Le monsieur a récréé sa
cellule dans sa chambre. IL a peur de traverser une rue, et d’aller dans un lieu public. La peur
fait qu’ils s’isolent, il ne sort que pour faire les courses. Ce monsieur est venu au centre, on l’a
vu se réinsérer, on l’a suivi de A à Z. Ce que l’on voit nous ce n’est pas l’intérieur, c’est
l’extérieur.
P. Saraux
Le juge prévoit la sortie, toutes les sorties ne se font pas brutalement mais cela doit être dur
pour vous d’être dépendant de décisions de justice, contrainte pour la suite des soins.
Par exemple, une personne sortie après 15 ans de prison, sans argent, qui se sent abandonné,
le juge décide la libération et l’on voit que pour la personne cela peut être dramatique.
Docteur Schmouchkovitch CHU de Bohars
Le travail de réseau est important. Le juge a libéré une personne (patient psychotique) 15
jours avant la sortie programmée, difficulté pour sa mère de l’accueillir. Mais, généralement
on connaît la date de libération. Frustration du médecin quand le détenu est transféré.
A Brest, il y a à la maison d’arrêt, à la fois des courtes peines, des personnes en attente de
décisions de justice, des lourdes peines qui attendent de nombreuses années avant d’aller en
centrale. Néanmoins la communication avec les services médicaux des autres prisons est
possible.
Ils ont une mission qui n’est pas la leur, s’occuper de patients psychotiques. Le nombre de
patients irresponsabilisés a été divisé par 20 sur une dizaine d’années. Dans l’Unité des
Malades Difficiles (UMD) de Brest il y a cinq personnes qui n’ont pas été accueillis à
l’hôpital mais en prison. Et selon moi, 40 patients dangereux devraient avoir des soins en
dehors de la prison.
La surveillance est assurée par des infirmières. Il n’y a pas trop de problème à Brest, si un
patient est trop dangereux, il va directement en UMD sans passer par CHU-Bohars. Il est
prévu de créer des UHSA (Unité d’hospitalisation), 40 lits pénitentiaires à Rennes. C’est une
institution contestée, des patients pourront être accueillis pour environ 1 mois, 1 mois et demi.
Association Emergence
Quel est le lien sur le suivi des soins entre la prison et l’extérieur ? Il ne semble pas y avoir de
continuité.
Docteur Schmouchkovitch CHU de Bohars
Tous les détenus n’ont pas besoin de soins, il est important de privilégier les patients
psychotiques, pas de problème si la personne est connue au niveau de l’hôpital. Certains sont
suivis en prison pour des troubles du sommeil mais une fois sortis ne sont pas demandeurs ou
n’en ont pas besoin.
Pour les obligations de soins, elles doivent être respectées sinon la personne est réincarcérer.
Pour un patient standard, le suivi peut se faire par un médecin en ville ou par l’hôpital.
Concernant les violences sexuelles, il existe un centre à Brest où une psychologue se charge
des rendez-vous et de leur suivi.
Mais je sais que certains suivis s’arrêtent.
Monsieur l’aumônier, Catholiques de Brest
Je vois beaucoup de gens qui errent dans les couloirs cachetonné, très médicalisé. Ils ont peut
de sortir de leur cellule, de prendre une douche. Si on est vu comme une balance, on n’ose pas
sortir. Selon eux l’hôpital n’est pas bénéfique, on est mieux en prison. C’est l’image.
Je connais une personne en isolement pour deux mois, d’environ 25 ans. C’est un militant qui
a fait des actes répréhensibles, il est très lucide sur sa situation et sur le mal que provoque la
prison sur sa personnalité. L’aumônier est le seul qui rompt l’isolement. Il est en cours
d’action envers le directeur de la prison, pour améliorer les conditions d’isolement
(communique le soir avec son voisin à travers les murs, voudrait utiliser la salle de sport en
dehors d’heures habituels)
Docteur Schmouchkovitch CHU de Bohars
Concernant le traitement, se sont des doses thérapeutiques mais ils font ce qu’ils veulent, il
n’y a pas de surveillance, ils prennent leurs médicaments en une seule fois la dose de la
semaine…Le subutex est utilisé pour le trafic c’est réputé pour pouvoir dormir, supporter la
détention. Le séjour à l’hôpital psychiatrique n’est pas un havre de paix, certains peuvent
rester plus longtemps si pas de problème de sécurité. Dans la chambre, ils n’ont pas télé, pas
de tabac, c’est pour cela qu’ils veulent retourner à la maison d’arrêt.
Concernant l’isolement strict c’est le directeur qui gère la marge de liberté, et les activités
auxquelles ils peuvent participer.
P. Saraux.
Les détenus de la maison d’arrêt ne sont pas obligés de sortir de leur cellule. Beaucoup se
plaignent d’un trouble du sommeil, inversement jour/nuit, dû à des problèmes de place pour
dormir, doivent faire les 3/8 pour partager le matelas.
Docteur Schmouchkovitch CHU de Bohars
A Brest, il y a 400 détenus pour 206 places.
Lors d’une première détention, il n’y a pas de parloir et le courrier est surveillé c’est alors une
attente de plusieurs jours. Cela constitue la première phase d’isolement. C’est une épreuve, je
suis même surpris qu’il n’y ait pas plus de problème ni de révolte.
Association maison d’arrêt Brest
Elle intervient au début de l’incarcération pour prévenir de l’isolement familial, préparation à
la sortie, elle est en lien avec des partenaires extérieurs comme l’ANPE, et la mission locale.
Peut-on quantifier le nombre de sortants sans préparation ?
Gisèle Collomb Point 48
En 2008 cela concerne 12 à 13 personnes. C’est une minorité mais là je parle de ceux qui
viennent à l’association.
Assistante sociale de la prison :
Il y a 600 sorties par an pour donner une idée de la masse
Gisèle Collomb Point 48
La peur de la sortie de se retrouver dans la rue.
La peur de se retrouver seul
La peur face aux problèmes psychologiques et sa prise en charge.
Face à la violence comment avoir envie d’y retourner pour trouver un cadre sécurisant.
Il y a un manque au niveau de la réponse à donner, et une situation pour eux de danger
SAVS Kan Armor
A Buenos Aires, il y a une prison de femmes où des personnes de l’extérieur peuvent venir
aux repas. En France on manque d’idée.
ADI
Existe-t-il un lien entre la maison d’arrêt et le milieu judiciaire. Face à la brutalité de certaines
sorties.
Pour exemple : une sortie le vendredi pour une personne sous traitement de substitution qui ne
veut pas rester sur Brest. Il n’existe pas de recours le week end. (Médecin de ville ou hôpital).
La personne peut alors repartir dans la consommation de drogue
Docteur Schmouchkovitch CHU de Bohars
Généralement ils connaissent leur date de sortie.
Question
Avez-vous connaissance de la date de libération ou existe-t-il un doute sur le jour même ? La
sortie non annoncée pose problème.
Existe-t-il des liens entre le CCAS ou l’ADI. Complication quand la sortie se fait le week end
(le samedi)
Docteur Schmouchkovitch CHU de Bohars
L’ADI intervient en prison, elle connaît par conséquent un certain nombre de patients c’est la
différence avec les autres villes (fonctionnement)
ADI
Le lien se fait aussi à quimper, nous n’avons pas d’information de la maison d’arrêt sur la
situation ou au niveau psychologique des personnes sur la sortie.
Association Emergence
Concernant la mise en liberté provisoire, les personnes sortent deux heures après ce qui
entraîne un problème dans la continuité de soin et dans la préparation de la sortie.
La maison d’arrêt est ouverte pour les partenaires extérieurs, au niveau des démarches pour le
RMI, de la recherche de logement mais cela se fait à la demande du détenu (possibilité de
refus ou pas de volonté de sa part)
Assistance sociale de la maison d’arrêt
Certains detenus ne demandent rien.
Docteur Schmouchkovitch CHU de Bohars
Certains détenus ne veulent aucun contact, ils ne demandent rien. Tout ce qui correspond au
milieu judiciaire est rejeté y compris le milieu social. Si à la sortie on n’est pas paranoïac on
le devient. L’ennemi déclaré c’est la justice.
J-P Tanguy
Est-ce que les mitards existent toujours ? Quelles activités rémunérées font les détenus?
Docteur Schmouchkovitch – CHU de Bohars
Le mitard existe toujours, il y a 4 ou 5 cellules à Brest. En France, la condamnation au
quartier disciplinaire est de 45 jours. Pas de télé, pas de séparation pour les toilettes,
conditions minimales pour l’hygiène, tout cela rajoute à l’isolement.
Mr l’aumônier
Dans ces cellules, il y a une porte en fer forgé que seul un responsable peut ouvrir. Le mitard
se différencie de l’isolement. L’isolement on y est par choix où lorsque l’on est en danger, si
par exemple on était policier ou si l’on a des mœurs particulières.
Docteur Schmouchkovitch – CHU de Bohars
Ce n’est pas une sanction. En ce qui concerne le travail, il y a des auxiliaires pour la
distribution des repas, il y a du cartonnage (mise en carton de produits), et du travail
également à la buanderie et à la cuisine. C’est très recherché. Ils peuvent avoir une cellule
seul. Un pourcentage faible travaille. Il n’y a pas de droit du travail, s’ils tombent malades, ils
peuvent perdre leur emploi, ils travaillent le dimanche.
P. Saraux
Il y a aussi l’école pour les mineurs.
Docteur Schmouchkovitch – CHU de Bohars
Il y a l’école, le sport, l’informatique. Pour les mineurs ce sont des choses intéressantes.
L’illettrisme est très important. Il y a également la bibliothèque.
Assistante sociale de la maison d’arrêt
Des activités socio-culturelles sont également proposées, des conférences, des concerts,
l’AFPS, des cours de guitare, des ateliers écriture, chorale…
P. Saraux
Et contre l’isolement, les visiteurs interviennent aussi.
J-L Leferme de War zao
Au sujet du nombre de sorties annuel, les 12 personnes prises en charge par point 48 peuvent
paraître dérisoire. Il y a environ 50 indigents à la maison d’arrêt. Ce qu’on regrette nous
visiteurs c’est de ne pas connaître le pathologique de certains comportements, pour cause de
secret médical.
Docteur Schmouchkovitch – CHU de Bohars
Le secret médical est nécessaire, c’est une garantie pour tout le monde, c’est une nécessité
absolue.
War zao
Pour les étrangers (turcs, grecs), la barrière de la langue constitue une double peine. Il y avait
un chilien, qui a appris le français, A Warzao, certains membres parlent le néerlandais…
P.Saraux
Certains n’ont pas de famille en France, il y a du retard dans le courrier en l’absence de
traducteur.
Docteur Schmouchkovitch – CHU de Bohars
Il y a eu le cas d’un lithuanien, le juge retenait les courriers.
Un intervenant dans la salle
Que pensez-vous du bracelet électronique comme solution à la surpopulation ?
Docteur Schmouchkovitch – CHU de Bohars
S’il y a des solutions alternatives à la prison, c’est bien, je ne sais pas si c’est un effet
d’annonce, combien il y‘en aura…Il y a un tel décalage entre ce qui est annoncé et ce qui ce
réalise. Le bracelet électronique je ne sais pas si cela changera quelque chose.
P. Saraux
Est-ce que les juges visitent les prisons ?
Docteur Schmouchkovitch – CHU de Bohars
Oui c’est une obligation.
Un intervenant dans la salle
Il y a eu 2700 bracelets l’année dernière. Il coûte 11 euros par jour, une incarcération coûte
entre 70 et 80 euros par jour.
H. Boucher déléguée à la tutelle de l’UDAF
Les personnes ont pour obligation de passer une expertise avant tous jugement. Hors j’ai
l’impression qu’on les prend très peu en compte.
Docteur Schmouchkovitch – CHU de Bohars
Moi je ne suis pas médecin expert. La loi stipule que les personnes sous tutelle doivent avoir
une expertise en pratique avant tout jugement, je ne sais pas comment cela se passe. Les
peines pour les patients psychotiques sont plus lourdes car ils font peur aux jurés. L’esprit de
la loi est souvent inversé.
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