Ivanov de Tchekhov
Mise en scène : Françoise Maimone
Ivanov est plus précisément, la rencontre d’un homme marié, Ivanov, 35 ans, et d’une jeune fille,
Sacha, 20 ans, dans un district de la Russie centrale... Lui sait qu’il a une femme admirable et leur
passé commun devrait rendre leur union plus forte : il l’a détachée de sa famille aux principes
religieux juifs marqués d’intolérance. Mais c’est à lui de se détacher de tout, de son travail, de tout ce
qui l’entoure...
Avec IVANOV, le héros tchékhovien est né. Désabusé, ridicule et déchirant. Le théâtre
tchékhovien est né aussi, formé au rythme des jours et du temps qui passe, plein d’évènements qui ne
guérissent pas l’ennui de ceux qui souffrent et de ceux qui veulent sauver les autres. Tchekhov ira plus
loin, tracera dans ses autres pièces des destins plus complexes et réduira les grands discours qu’a
encore Ivanov. Mais c’est l’œuvre, étonnante, d’un écrivain de 27 ans. La volonté d’être comique,
qu’il affirmera bientôt n’est pas évidente. Mais, dans une lettre, il appellera sa pièce, pour rire,
Imbécilov...
A propos de la traduction
Ivanov occupe une place très particulière dans l’œuvre de Tchekhov: c’est sa première pièce mais ce
n’est pas la première (puisqu’elle dérive de cette pièce sans titre, abusivement baptisée Platonov, qu’il
écrivit encore lycéen et conserva toute sa vie à l’état de manuscrit). C’est une "comédie en quatre actes
et cinq tableaux", jouée à Moscou en 1887, mais c’est aussi un "drame en quatre actes", joué à Saint-
Petersbourg en 1889.
Entre la comédie qui provoque un esclandre, et le drame, qui reçut un accueil triomphal, il y a
plusieurs versions intermédiaires témoignant d’un travail sur le matériau scénique dont la
correspondance garde trace - et ce travail aboutit à la rédaction d’une autre pièce double: L’homme des
bois, "comédie en quatre actes", écrite en 1889, qui devait donner lieu à Oncle Vania.
Traduire cette première version nous a semblé d’autant plus passionnant que le premier Ivanov, jamais
traduit en français, était tout à fait oublié. Or, cette comédie, incisive, violente, partageant avec
Platonov un emportement et une virulence dans la satire de la vulgarité qui ne se retrouveront plus
dans le théâtre de Tchekhov, pourrait bien choquer : nous y voyons une force novatrice que la version
définitive a tempérée avec une grande finesse mais au risque, peut-être de l’édulcorer en la
normalisant... Françoise Morvan et André Markowicz, préface à Ivanov, éditions Acte Sud/Babel, 2000