Le lexique à l’école maternelle Plan de ce document : 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. Quelle est la différence entre lexique et vocabulaire ? Pourquoi un outil sur le lexique ? Que disent les documents d’accompagnement sur ce sujet ? Que nous apprennent les chercheurs ? Quel est le rôle des imagiers ? Quels sont les principes pédagogiques et didactiques ? Propositions Philippe Boisseau et Agnès Florin a. Les albums écho (cf. Bellegarde) 8. Quels jeux proposer pour développer le lexique ? a. Lexique autour du Petit Chaperon Rouge b. Lexique des animaux c. Lexique des fruits 9. Programmer les acquisitions a. BO 2008 b. Listes mots PS – MS 10. Evaluer : sur le site de la circonscription Oyonnax-Nantua, observations pour PS et MS : des http://www2.ac-lyon.fr/etab/ien/ain/nantua/HTM_ressources/3CYCLE1/3CYCLE1.htm 1. Quelle est la différence entre lexique et vocabulaire? Le lexique est la somme des vocabulaires utilisés. Le lexique est le « trésor de la langue française ». Il est composé de tous les mots de différents domaines de l’expérience humaine, représentés en langue. On désignera par vocabulaires des domaines spécifiques de l’expérience. Le vocabulaire de la marine se distingue du vocabulaire de l’école. Les mots en chiffres : - vers 1 an : apparition du mot en tant que signe - entre 12 et 18 mois : l’enfant possède une vingtaine de mots - entre 18 et 21 mois : environ 180 mots - entre 21 et 30 mois : environ 800 mots. Vers 30 mois la structure est proche de celle du système de l’adulte. - Entre 3 et 6 ans : environ 2500 mots. D’où l’importance de mettre en place des situations langagières qui favorisent l’acquisition du vocabulaire à l’école maternelle. - Les adultes : de 8 à 10 mots Le lexique français est estimé à quelques 20 à 250 000 mots CPC Dombes à partir d’un document des CPC de la Loire Page 1 2. Pourquoi un outil sur le lexique ? L’apprentissage du lexique trouve son importance dans l’établissement de liens entre le langage, l’expérience et la connaissance du monde, il favorise donc chez l’enfant le développement cognitif. Objectifs de l’école maternelle : Amener les enfants à disposer d’un capital lexical pour : o prendre la parole, o s’exprimer, o comprendre et être compris, o communiquer, o raconter, o décrire… Aussi bien dans le langage en situation (découverte, emploi et réemploi des mêmes mots dans des contextes différents et ce au moins 7 à 8 fois), que dans le langage d’évocation, aussi bien en réception qu’en production. Permettre aux enfants d’entrer progressivement dans le fonctionnement lexical : se focaliser sur la forme et non plus seulement sur le sens. Chaque enfant possède un lexique usuel d’usage qui s’appuie sur sa pratique quotidienne du langage dans ses échanges verbaux avec son entourage. Ce lexique est donc très marqué socialement et culturellement, il est différent pour chaque enfant. Le lexique de base est le lexique minimum commun qui permet les échanges au sein de la classe : dans la relation enfants-enfants, dans la relation enfants-enseignant. Il constitue le socle commun qui rend possible la communication et la compréhension des attendus de l’enseignant. Le lexique de base doit faire l’objet d’un apprentissage systématique à l’école. L’apprentissage du lexique nécessite une vraie démarche qui va permettre aux enfants d’accroître leur capital lexical, mais aussi d’entrer dans le fonctionnement lexical en travaillant les homonymes, les synonymes, les polysémies et les contraires. Elle va faciliter la compréhension et soutenir l’activité de mémorisation. Les opérations mentales en jeu vont mobiliser et développer des compétences réinvestissables dans d’autres domaines d’apprentissage de l’école maternelle. Le lexique (site ac-creteil.fr) : CPC Dombes à partir d’un document des CPC de la Loire Page 2 Ce n'est pas Se limiter à : C'est Mettre en place une vraie démarche d’apprentissage en amenant l’enfant à: - faire correspondre des mots des objets, - Passer d’un vocabulaire passif (réception/compréhension) à un vocabulaire - répéter des mots, actif (production) pour donner du sens à l’activité langagière, - nommer une fois, - Reconnaître le même objet quelque soit sa - désigner représentation (photo, dessin, peinture, …) simplement. - S’approprier un mot nouveau en 4 étapes : - désigner un grand nombre de mots. découvrir/approfondir : identifier un mot dont le sens est inconnu structurer : penser la trace écrite mémoriser et favoriser le rappel en mémoire réutiliser : employer les mots justes en production d’oral ou d’écrit - Mobiliser des compétences cognitives pour : . inventorier . trier . classer . comparer . catégoriser . réutiliser L’enseignant favorisera la mise en réseaux des connaissances qui permettront la construction du concept. 3. Que disent les documents d’accompagnement sur ce sujet ? Document d’accompagnement « le langage à l’école maternelle » 2006 P12 : « Le lexique constitue une représentation du monde dont les enfants s’emparent dès leur deuxième année » P 16 : « Dans le domaine lexical, le vocabulaire travaillé sera d’abord celui des réalités connues, manipulées, et les relations de catégorisation ne seront que progressivement explorées au fur et à mesure qu’un travail particulier sera conduit dans ce domaine. ». CPC Dombes à partir d’un document des CPC de la Loire Page 3 P18 : « Durant toute l’école maternelle, l’enseignant fait jouer les reformulations pour fournir des modèles phonologiques corrects, pour enrichir le lexique et la syntaxe en apportant des termes précis et en proposant des phrases complètes et plus complexes. » … « Il reprend à son compte des mots d’un vocabulaire peu soutenu, que l’enfant ne sait parfois pas situer, n’ayant que ce mot pour désigner ce dont il veut parler(« des godasses »par exemple), il emploie aussitôt les mots adaptés à la situation. » P53 : « Durant les deux dernières années en école maternelle, le langage en situation doit s’enrichir à divers points de vue : lexical (variété, précision, début de structuration du lexique utilisé), syntaxique (phrases plus complexes, questionnements variés etc.…) et pragmatique (enjeux et formes adaptées). » P 55 : « Pour le petit enfant acquérir des mots c’est mettre en correspondance des unités de langage avec des objets ou des personnes (noms), des actions (verbes), des propriétés ou des qualités des objets, et des actions (adjectifs, adverbes), « Ce lexique peut être utilement repris comme base dans le travail qui est conduit sur les syllabes et les phonèmes. » « L’acquisition est facilitée par la fréquence des mots, par leur caractère saillant (le maître met en relief tel mot nouveau dans une phrase, le redit en montrant l’objet, l’explicite). Elle est facilitée aussi par leur transparence morphologique, les enfants étant sensibles aux parentés jusqu’à établir d’ailleurs de faux liens et produire des dérivés selon des règles abusivement généralisées. Ainsi « manger » et « mangeable » seront vite liés, comme « boire » et « buvable », mais ceci peut susciter des créations de mots sur le même modèle (« marchable » par exemple). » « Elle est également facilitée et enrichie si les mots sont associés à des schémas d’événements assez prototypiques, à des représentations organisées de séquences d’actions répétitives (exemples : le bain, le repas, plus tard la séance de natation, l’emprunt de livres à la bibliothèque, etc.). En conséquence, on ne saurait négliger toutes les occasions de revenir sur des découvertes lexicales faites en situation, dans l’activité fonctionnelle, pour les convertir en acquisitions plus sûres grâce à la « manipulation », la réutilisation dans des situations différentes de jeux (de loto, de Mémory, de Kim, de devinettes, de portraits, d’intrus, de classement) ou de lecture (documentaires). « On ne se privera pas des ressources des jeux du faire semblant pour faire utiliser et réutiliser tous les mots des scènes quotidiennes : le bain de la poupée à l’école avec le déshabillage et l’habillage, le repas au coin cuisine ou le goûter, etc. » p 56 : « Les tâches de catégorisation (selon des critères sémantiques, associatifs, etc.) aident à la mémorisation. Ainsi, élaborer et enrichir régulièrement l’imagier des mots de la classe (en y faisant figurer les noms des CPC Dombes à partir d’un document des CPC de la Loire Page 4 animaux, des plantes, des jeux, des ustensiles, du matériel scolaire…), des classements thématiques, permet l’exploration régulière de champs lexicaux variés et l’acquisition d’un vocabulaire spécifique. On peut aussi envisager la constitution de dictionnaires de la classe, de boîtes à trésors, d’un musée de la classe, de murs d’images, transformables en fonction de thèmes abordés, pour induire une utilisation des mots associés à des objets (ou à leur représentation) eux-mêmes liés à la vie de la classe. » « En section de grands, l’activité de tris et classements de mots peut trouver des prolongements dans la copie et l’encodage (mots de la même famille) pour garder trace d’activités. Avec les grands, on ne négligera pas les activités de transformation (au pluriel, au féminin), les classements de « petits mots » (signifiant la causalité, l’opposition, les rapports de temps, les rapports spatiaux, la coordination). » Mise en œuvre du socle commun de connaissances et de compétences (mars 2006): l’acquisition du vocabulaire à l’école primaire : Dès l’école maternelle devra être mise en place une initiation déjà méthodique au vocabulaire. On sait aujourd’hui l’importance décisive de la quantité et de la qualité du vocabulaire qu’un enfant possède avant qu’il apprenne à lire. Si un enfant ne possède qu’un nombre très restreint de mots, l’apprentissage, tellement nécessaire, des relations grapho-phonologiques sera sans objet : la traduction en sons des lettres ou groupes de lettres ne permettra pas à l’apprenti lecteur d’accéder au sens d’un mot s’il ne figure pas dans son vocabulaire oral. Faute d’un vocabulaire suffisant, la maîtrise du code le conduira alors à produire uniquement du bruit et non du sens. À ce niveau, il s’agira d’abord d’un lexique premier, mais fondamental, lié aux expériences du très jeune enfant, à son environnement, aux figures qui le frappent, aux dangers qu’il pressent, aux bonheurs qu’il éprouve. Progressivement les enfants seront conduits à prendre de la distance par rapport à leurs perceptions et à leurs sentiments immédiats : l’école maternelle doit leur donner le vocabulaire nécessaire pour commencer à raconter, décrire, expliquer. C’est sur ce socle que reposera sa pratique future de la langue. En grande section, l’apprentissage d’un ou deux mots nouveaux par jour sera un objectif. 4. Que nous apprennent les chercheurs ? Du côté de Jean-Pol Rocquet (Inspecteur/professeur de l’éducation nationale) : L’apprentissage du vocabulaire s’effectue par l’implication du sujet apprenant. Du coup, plus les situations dans lesquelles les enfants agiront par le langage seront nombreuses et variées, plus l’apprentissage sera effectif. Pour apprendre une information nouvelle, il faut l’inclure dans une somme d’informations déjà connues. CPC Dombes à partir d’un document des CPC de la Loire Page 5 Le contexte joue un rôle déterminant dans l’apprentissage de l’étude des mots. Du côté de Dominique Bassano (Laboratoire cognition et développement) : A partir de l’analyse d’échantillons de productions spontanées chez les enfants de 1 à 3 ans et demi, on répertorie 13 classes de mots regroupés en 4 catégories : les noms : noms communs ou propres, animés ou inanimés, concrets ou abstraits. les prédicats : désignent des actions, des états ou des qualités (verbes et adjectifs) les mots grammaticaux : les adverbes, les déterminants, les prépositions et les conjonctions. les éléments para-lexicaux : les interjections (ah, coucou), les particules (oui/non), les formules (ça y est) et les fillers (a chat, eu boire) Ce sont d’abord les noms et les éléments para-lexicaux qui prédominent chez les jeunes enfants. C’est au cours de la 3ème année que s’opère la structuration du lexique en termes de classes de mots : déplacement des noms vers les prédicats et des éléments para-lexicaux vers les mots grammaticaux. Du côté d’Agnès Florin (professeur de psychologie à l’université de Nantes) : Le développement du langage est à la fois celui des instruments du langage (prononciation, lexique, syntaxe) et de ses usages. Dans ce développement, celui du vocabulaire tient une place importante pour plusieurs raisons : - c’est souvent avec l’apparition des premiers mots que l’enfant est considéré comme « un enfant qui parle » ; - son développement est spectaculaire au cours des premières années ; il est un socle essentiel pour la compréhension et la production du discours (on l’avait un peu oublié ces dernières années) ; - les enseignants se désolent souvent des manques et de la pauvreté du vocabulaire de leurs élèves ; - plusieurs travaux attestent l’importance des compétences lexicales pour la réussite scolaire ; Lieury (1991) a montré par exemple que les corrélations entre réussite scolaire et connaissances lexicales sont plus élevées qu’entre réussite scolaire et niveau intellectuel. Les premiers mots : L’accroissement du premier lexique va être assez lent et l’on considère qu’il faut cinq ou six mois à partir de l’émission du premier mot pour que les enfants atteignent un répertoire de cinquante mots. Un retard relatif dans la production de ce premier lexique ou une avance particulière ne permet pas en soi une prédiction sur l’intelligence de l’enfant ou sa réussite scolaire. Il n’y a pas de lien direct non plus entre la taille du répertoire compris et celle du répertoire produit : il existe une certaine dissociation entre les deux ; toutefois, le langage compris (ou vocabulaire passif) est toujours plus étendu que le langage produit par l’enfant (vocabulaire actif), dès les premières étapes du développement et jusqu’à l’âge adulte. CPC Dombes à partir d’un document des CPC de la Loire Page 6 Le développement du lexique chez le jeune enfant est très rapide, puisqu’on admet habituellement qu’il passe entre 2 et 6 ans d’une vingtaine de mots à 2 500 mots (soit l’acquisition en moyenne d’un à deux mots par jour pendant cette période, si cette acquisition était régulière) ; il reste encore beaucoup à faire ensuite, si l’on considère que le vocabulaire d’un adulte cultivé comprend entre 25 000 et 40 000 mots. Le phénomène de surextension Apprendre des mots nouveaux suppose de traiter un nombre considérable d’informations. Au début de l’acquisition lexicale, près de 30 % des noms d’objets connaissent une sous-extension et à peu près autant une surextension (Barett, 1995). La théorie des traits sémantiques de Clark permet de rendre compte de ces phénomènes. Selon cette théorie, le sens d’un mot est défini par des petites unités : les traits sémantiques. Par exemple, un chat peut être défini par les traits suivants : « avoir quatre pattes », « être un animal », « être poilu », etc. Ces traits varient selon différents niveaux de généralité et sont acquis en principe du plus général au plus spécifique. Une surextension du mot apparaît quand l’enfant utilise le terme « chat » pour désigner tous les animaux à quatre pattes ou le mot « rond » pour dénommer des balles, des oranges et autres objets ronds. Ce phénomène, particulièrement fréquent chez les jeunes enfants, consiste donc à utiliser un terme pour l’appliquer à un nombre de référents plus large que celui qui est inclus dans la catégorie telle qu’elle est utilisée par les adultes. Les déterminants de la surextension sont les ressemblances perceptives, fonctionnelles, et les associations de contiguïté spatiale entre les objets (Cordier, 1994). Pour expliquer ce phénomène, plusieurs hypothèses sont proposées : - des études récentes évoquent le phénomène d’évitement volontaire du mot correctement dénommé à cause d’un déficit phonologique articulatoire. Autrement dit, les jeunes enfants ne parviennent pas à utiliser le mot approprié à cause de séquences de sons difficiles à articuler (Elsen, 1994). La contrainte phonologique peut donc constituer un facteur explicatif de la surextension ; - il peut s’agir aussi d’erreurs dues à un répertoire lexical limité, aux particularités de la représentation sémantique chez les jeunes enfants ou à une difficulté à utiliser spontanément un mot approprié dans le discours. Selon Ralli et Dockrell (1997), la mémoire phonologique serait un bon prédicteur de la production de mots, mais pas de la compréhension du sens du mot, et la mémoire phonologique à court terme ne prédit pas la production à long terme de mots nouvellement acquis. D’après Naigles et Gelman (1995), les enfants connaissent le référent correct du mot qui a subi une surextension, mais il est plus difficile d’accès du fait de sa moins grande fréquence. Au cours du développement lexical, les enfants réduisent progressivement la liste initiale des exemplaires préalablement définis au sein de la catégorie. Leurs représentations sémantiques deviennent donc de plus en plus spécifiques, ainsi que nous l’avions déjà mis en évidence (Ehrlich et al., 1978). Selon Clark, l’acquisition progressive de nouveaux traits sémantiques restreindra progressivement l’extension du signifiant-cible et permettra ainsi de se rapprocher de l’organisation sémantique adulte. CPC Dombes à partir d’un document des CPC de la Loire Page 7 Ainsi le phénomène de surextension rend compte des relations limitées entre le sens des mots compris par les enfants et l’équivalence de sens chez les adultes. Mais l’explication de ce phénomène par la théorie des traits sémantiques n’est plus véritablement défendue par Clark : il semble en effet nécessaire de proposer des principes qui gouvernent le lexique dans sa totalité, aussi bien chez l’enfant que chez l’adulte. Les principes de contraste et de conventionalité : Comment les enfants apprennent-ils des mots nouveaux ? Deux principes opérationnels doivent être considérés dans le processus du développement lexical : le principe de contraste et celui de conventionalité. Le premier tient compte du fait qu’un mot nouveau doit contraster avec des mots déjà connus de l’enfant. Mais ce principe est dépendant du principe de conventionalité, dans la mesure où l’enfant cherche à utiliser des formes linguistiques appropriées selon l’usage du langage. Par exemple, lors d’une tâche d’apprentissage lexical, l’enfant isole du discours le mot inconnu pour l’identifier. Puis il identifie le sens potentiel selon l’appartenance à des catégories d’objets, d’actions ou d’événements. Il compare alors le sens possible aux formes linguistiques préalablement identifiées. Au départ, sa comparaison initiale s’élabore en fonction du principe de sur-extension (ex, l’enfant utilise le mot « chat » pour n’importe quel autre animal) ou de sousextension. L’enfant devra alors opérer un réajustement du mot afin qu’il soit conforme à celui utilisé par les adultes ; ce réajustement sera alors guidé par les deux principes de contraste et de conventionalité. Cette approche prédit que l’enfant inventera de nouveaux mots (ex. : déverdir) pour convenir aux nouveaux sens. Au cours du développement lexical, il étendra son vocabulaire disponible en utilisant la forme linguistique appropriée. Cette forme linguistique, comme les structures morphologiques et syntaxiques, aide à comprendre la signification de mots non familiers. Le principe de dénomination catégorielle : Le principe de dénomination catégorielle (Golinkoff, 1992) suppose que les mots se réfèrent à une catégorie, même si les enfants ne connaissent pas encore l’étiquette catégorielle. Les jeunes enfants interprètent le nouveau nom comme un nom du niveau de base auquel l’objet appartient (ex. : caniche – chien – animal ; chien est le niveau de base, celui qui est appris en premier, celui qui réunit le plus de propriétés communes aux différents exemplaires de la catégorie, tout en étant nettement distinct des autres catégories). Lors d’une tâche d’apprentissage lexical, les jeunes enfants peuvent interpréter un nouveau nom en référence à une étiquette catégorielle. Ce biais taxonomique guide les enfants de 2 ans pour établir une hiérarchie conceptuelle (Waxman et Gelman, 1986). Les entraînements à la catégorisation : Une étude de Clavé (1997) indique une relation étroite entre l’étendue du répertoire lexical et la compétence à catégoriser chez des enfants de 4 à 6 ans. On peut sans doute en déduire que plus le système conceptuel de l’enfant est riche, tant du point de vue de son contenu que de son organisation, plus facile CPC Dombes à partir d’un document des CPC de la Loire Page 8 est l’activation en mémoire des objets. Or, pour catégoriser, il faut, entre autres, pouvoir se représenter en mémoire les propriétés des objets pour ensuite établir des relations entre plusieurs propriétés d’objets, de manière à dégager un trait commun. En définitive, les recherches montrent un lien entre le développement lexical et les progrès catégoriels des jeunes enfants. Mais toute la difficulté de l’apprentissage lexical réside dans la compréhension qu’un mot peut appartenir à différentes catégories. Les expériences d’entraînement à la catégorisation réalisées par Clavé (1997) avec 130 enfants de 5-6 ans mettent en évidence des effets positifs de ces entraînements (3 séances seulement, soit une par semaine) sur la catégorisation elle-même (épreuve de catégorisation : échelle de Maturité Mentale de Columbia et épreuve de classement spontané), évidemment, mais aussi dans le répertoire lexical. Les aides verbales apportées pendant l’entraînement permettent de focaliser l’attention des enfants, soit sur des propriétés perceptives simples (« Regarde bien chaque dessin ; il y en a un qui est différent des autres ; qu’est-ce que tu vois là ? » – en pointant du doigt chaque image de la planche), soit sur des propriétés plus complexes de type taxonomique ou abstrait (« Qu’est-ce que c’est ? » « Où ça vit ? », « Qu’est-ce qu’il fait ? », etc.). Dénommer les objets, les événements en apprenant à les catégoriser à partir de leurs propriétés communes et distinctives, c’est enrichir le vocabulaire de l’enfant tout en l’aidant à comprendre et organiser sa représentation du monde. C’est aussi apprendre à jouer avec le langage, à le prendre comme objet : les jeux de sonorité, de rythme ou de hauteur de la voix, grâce aux comptines et aux chansons, aident à cela et aussi à la mémorisation du vocabulaire et des structures syntaxiques. 5. Quel est le rôle des imagiers ? Beaucoup d’enfants n’ont pas de modèle ni de médiation familiale. Les imagiers sont d’excellents outils pour développer le langage. Ils vont permettre d’aborder et mettre en place différents niveaux de langage (familier, affectif, lexical, descriptif, argumentatif, scientifique, …) et mettre en place les champs lexicaux, sémantiques et syntaxiques. La richesse de la production éditoriale permet de proposer aux élèves des représentations extrêmement variées. Celles-ci vont amener peu à peu les élèves à se construire des représentations mentales des mots et à fixer le vocabulaire de façon précise. La fonction de l’imagier est différente si l’on est dans un temps d’apprentissage ou dans un temps d’évaluation. En situation d’apprentissage, la fonction de l’imagier est de participer à la construction d’un concept. Il s’agit ici, d’imagiers de référence qui présentent les objets dans des situations contextualisées. Il n’y a pas une seule représentation d’un mot, il faut mettre à la disposition des élèves de nombreux imagiers avec des représentations différentes pour qu’ils puissent structurer le concept de mot, mettre en réseau des connaissances pour pouvoir en aborder d’autres. Pour pouvoir comprendre et mémoriser, il CPC Dombes à partir d’un document des CPC de la Loire Page 9 faut construire et déconstruire des représentations et établir des catégories. Pour construire le champ sémantique et la notion de concept, on peut avec les élèves, produire et créer des imagiers. En situation d’évaluation : la fonction de l’imagier est de répondre à différentes situations d’évaluation (diagnostique/sommative). Il s’agit ici, d’imagiers de désignation qui présentent les objets dans des situations décontextualisées. 6. Quels sont les principes pédagogiques et didactiques ? Il s’agit d’inscrire ce travail dans un projet contextualisé (de classe, d’école). Exemples : intégrer le travail sur le lexique des contes et notamment du Petit Chaperon Rouge après avoir étudié en classe différentes versions de ce même conte. Autre exemple, intégrer le travail sur le lexique des animaux après une visite au zoo, ou le lexique des aliments après un travail sur le goûter. Utiliser des imagiers de référence avec des représentations différentes pour qu’ils puissent structurer le concept de mot. Les jeux (loto, mémory, jeu de Kim, …) doivent être proposés aussi bien en réception qu’en production. Rester suffisamment longtemps sur un jeu avant de passer à un autre. Les élèves ont besoin de temps pour s’approprier les règles et ils aiment jouer et rejouer avec le même cadre, les mêmes supports ce qui leur permet d’être tous, à un moment donné, en réussite. Le guidage verbal de l’enseignant joue un rôle prépondérant dans la partie « production », notamment chez les PS. Il sollicite un grand nombre de verbalisations et la mise en œuvre de diverses compétences langagières (argumenter, décrire, justifier, expliciter, …) et d’activités cognitives diverses (mémoriser, comparer, catégoriser, …). 3 entrées pour un travail systématique sur 3 champs lexicaux particuliers. La finalité de ce travail est au-delà de l’apprentissage des mots dans des contextes différents, de pouvoir transférer cette démarche dans d’autres champs. Une évaluation en début et en fin de module permet de mesurer les écarts, de mesurer les progrès réalisés par les élèves. Exemple, le jeu du « Qui est-ce ? » s’y prête bien. - En PS : l’enseignant décrit, l’élève désigne (réception) - En MS : les élèves peuvent être aussi bien en réception qu’en production. Ils désignent et nomment. - En GS : élèves en production. Ils peuvent désigner, nommer, expliquer (définition verbale). 71. Les propositions de Philippe Boisseau A la sortie de l'école maternelle, les enfants devraient posséder un bagage de 2000 à 2500 mots. Certains n'en possèdent que 300 à 600. CPC Dombes à partir d’un document des CPC de la Loire Page 10 On peut se référer à cette progression indicative dans la conquête du vocabulaire : * à Entrées thématiques 3 ans : 750 mots * à 4 ans : 1750 mots * à 5 ans : 2500 mots Petits : * Grande motricité en salle de jeux, dans la cour de récréation. * Nourriture : confection de recettes. * Animaux : vus ou élevés en classe. * Les jeux et coins jeux de la classe : eau, graines, cuisine, marionnettes. * Identité : fille, garçon, famille. * Les fêtes : Noël, rois, anniversaires, carnaval... Ces thèmes favorisent les réitérations langagières (les répétitions) parce qu'ils permettent, en s'ancrant dans le vécu, d'utiliser et répéter des mots dans des situations différentes. Moyens : * Mêmes thèmes que chez les petits, repris et enrichis. * Les mots de la classe et de l'école: les différents lieux, les coins jeux : marchande, dînette, chambre, voitures, déguisements..., les consignes scolaires et de la vie courante * Les mots du temps : chronologie. * Le travail, les activités. * Les autres : la famille, les bébés, les camarades. * Naissance, maladie, accident. * Sorties thématique, dans le quartier. Grands : * Reprise des mêmes thèmes sous des formes différentes. * La maison, les pièces de la maison. * Les moyens de transport. Les cinq principaux vecteurs de mobilisation du vocabulaire à l'école maternelle : a) Les situations elles-mêmes qui mobilisent un lexique particulier. Coins-jeux, motricité, activités et fabrications, vie de classe, spectacles, projets... b) Les albums échos de ces situations qui permettent d'en travailler l'aspect lexical avec plus de distance. (cf. document « Album_écho_Bellegarde » Lorsque l'enseignant(e) rédige le texte de l'album écho à partir des productions spontanées des enfants, il se focalise souvent plus sur la structuration syntaxique aux dépends de la diversification lexicale. Enrichir et préciser le vocabulaire peut constituer un objectif spécifique de ce travail autour des textes. CPC Dombes à partir d’un document des CPC de la Loire Page 11 Exemple : au lieu d'écrire « je mets du lait », on peut amener et proposer à l'enfant la proposition suivante : « je verse du lait ». Cet enrichissement est surtout efficace pour les pronoms et les verbes d'actions. Ces répétitions assurent la conquête, la mémorisation et la construction du sens de mots nouveaux. c) Les imagiers et représentations graphiques et/ou photographiques. - Equiper chaque classe, de la petite à la grande section avec des imagiers du commerce ou fabriqués avec les enfants, en consultation libre et permanente dans la bibliothèque de la classe. - Constituer des séries d'objets, de photos et d'images en fonction de l'entrée thématique travaillée (exemple : une série en rapport avec l'alimentation, avec une fête...) - Travailler, dans la mesure du possible, dans un premier temps avec des objets réels appartenant à l'univers de référence des enfants (présents dans la classe, dans l'école ou issus d'un vécu commun au cours d'expérimentations, de sorties, de spectacles...) puis des photos et images (albums photos, catalogues, prospectus, imagiers...) d) La mobilisation des mots de vocabulaire par plusieurs types de jeux. L'ancrage de l'apprentissage dans une situation vécue (manipulations, aspect ludique et thématique...) assure une acquisition plus sûre du sens des mots, donc de leur signifié. Ce qui signifie que les jeux proposés doivent être le plus possible en rapport avec une situation abordée dans la vie de classe (attention de ne pas « parachuter » des jeux de structuration d'un vocabulaire complètement étranger à l'expérience des enfants). - Jeu de kim avec objets réels puis images et photos. Dans une série, retrouver l'objet, qui a été enlevé ou déplacé ou modifié. Travailler au départ avec des objets très différents appartenant à une même catégorie (exemple : la dînette) puis sur des objets plus proches (exemple : différentes voitures par la taille, la couleur, la fonction). - Jeu de l'objet mystère : dans des sacs à toucher. Toucher un objet parmi plusieurs placés dans un sac à toucher opaque - Jeu de loto : jeu de mobilisation d'un vocabulaire présent dans des albums de littérature de jeunesse lus en classe, des comptines et chansons, de la vie de classe... - Jeux de catégorisation : Associations : Proposer aux enfants ou réaliser avec eux des séries d'objets ou images qui « vont bien ensemble ». CPC Dombes à partir d’un document des CPC de la Loire Page 12 Exemple : une série de meubles et d'objets à ranger. Situation problème : comment et où va-t-on ranger tout ce qui traîne ? Nommer les objets et leur fonctionnalité respective (je range les assiettes dans le buffet, les feutres sur l'étagère, les vêtements dans l'armoire...). Les intrus : dans une série d'objets ou d'images en rapport avec un thème, retrouver l'intrus, celui qui n'a pas sa place parmi les autres, et justifier. Exemple : une série de jeux : enlever ce qui n'est pas un jeu Jeu de l'objet caché dans la classe : demander aux enfants de retrouver un objet qui a été caché en posant des questions à la maîtresse, puis à un enfant qui cache lui-même l'objet (est-ce qu'il est sous le coussin ? sur l'étagère ?...) On n'a le droit de répondre que par oui ou non... e) Les albums de littérature de jeunesse lus ou racontés en classe, les contes, les comptines, les chansons... 72. Les propositions d'Agnès Florin Lexique et catégorisation Afin d'enrichir le vocabulaire, de dépasser l'emploi de termes génériques comme « trucs » ou « machins » pour désigner des objets dont les enfants ne connaissent pas les noms et d'attribuer les « bons » mots à chaque objet, le travail par thème où on demande aux enfants de mémoriser des listes de mots est à proscrire car peu efficace. Les recherches récentes sur catégorisation et lexique montrent qu'il est préférable de procéder par comparaison d'objets : leurs similitudes et leurs contrastes fonctionnels, à quoi chaque objet sert exactement, par exemple pourquoi il existe deux mots pour désigner un endroit où on peut dans une maison, aller chercher de l'eau : le lavabo, à la salle de bains pour l'hygiène corporelle et l'évier, à la cuisine pour la vaisselle mais également les contrastes perceptifs (exemple : les objets doux et piquants). Ces opérations de catégorisation par comparaison correspondent à des stratégies naturelles utilisées par les enfants et même les adultes. - Jeu de pareil/pas pareil : travail sur les sens. Toucher : comparaison de textures de matières différentes : tissu, coton, toile émeri, soie, carton, bois, papier..., yeux ouverts, puis yeux bandés : introduire un deuxième exemplaire identique et apparier les mêmes. Goût : sucré, salé, acide, amer, doux, piquant... (extraits d'odeurs placés dans des boîtes de pellicule photos en deux exemplaires identiques pour pouvoir retrouver les mêmes ) Odeurs : herbe fraîche, paille, fleur, poivre, vanille... Vue : avec des photos (de jeux du commerce, ou découpées dans des catalogues) : fabriquer des jeux d'association de cartes CPC Dombes à partir d’un document des CPC de la Loire Page 13 fondées sur les propriétés fonctionnelles des objets. Exemple : les outils, c'est pour bricoler, les aliments, c'est pour manger, les vêtements, c'est pour s'habiller... Vue : sacs à toucher : dénommer les objets, leur utilité, leurs différences, puis les placer dans des sacs à toucher et retrouver leur nom et leur utilité, sans les voir. Comparer armoire, placard, buffet, étagère... Où les trouve-t-on dans la maison ? Que range-t-on dans chacun de ces meubles ? - Jeu de devinette : Deviner la carte choisie en secret par un enfant, parmi des cartes représentant différents ou personnages. Les cartes doivent rester à la vue des enfants, comme référents permanents. - Jeux de communication référentielle : Les enfants sont répartis par deux ou en deux groupes disposés de part et d'autre d'un écran placé à la verticale. Ils possèdent chacun un jeu de cartes comportant les mêmes éléments. Exemple : une série de maisons qui diffèrent uniquement par la taille ou la couleur des volets, du toit ou de la porte. En posant des questions, l'un des groupes doit retrouver la carte qui a été choisie par l'autre. 8. Quels jeux proposer pour développer le lexique ? Jeux possibles avec les cartes des animaux: Reconnaître parmi plusieurs animaux celui qui correspond à l’ensemble des critères nommés. C'est d'abord l'enseignant puis un élève qui nomme ou/et montre la carte. Cette carte est posée devant le présentateur, face cachée. Activités possibles : Activités de tris : Tris qui permettront de construire les familles proposées. L’intrus : Lorsque la notion de famille est bien stabilisée. Le loto : Progression proposée de la PS à la GS. Qui est-ce ? Les élèves posent des questions pour essayer de trouver l’animal choisi par l’enseignante. Jeu des familles : Les élèves doivent reconstituer une famille en formulant une demande. Jeux possibles avec les cartes des fruits: Autres jeux non cités précédemment : CPC Dombes à partir d’un document des CPC de la Loire Page 14 Le jeu des critères : Une série de cartes avec les photos est disposée face visible sur la table. On joue avec une autre série de cartes sur lesquelles apparaissent différents critères symbolisés. Je les garde ou pas ? Garder avec soi les paires de fruits pour lesquelles on peut trouver un critère commun. Jeux possibles avec les cartes « Petit chaperon rouge » : Autres jeux non cités précédemment : Le bouche à oreille : une carte inconnue est décrite par le maître dans le creux de l’oreille d’un élève qui doit, à son tour, la décrire à un autre, …. Le jeu des 7 familles. 9. Programmer les acquisitions Programmation proposée par les programmes 2008 Liste de mots pour la Petite Section et pour la Moyenne Section 10. Evaluer Sur le site de la circonscription Oyonnax-Nantua, on trouvera le matériel nécessaire aux OBSERVATIONS des élèves de Petite et Moyenne Section : http://www2.ac-lyon.fr/etab/ien/ain/nantua/HTM_ressources/3CYCLE1/3CYCLE1.htm CPC Dombes à partir d’un document des CPC de la Loire Page 15