Le développement régulier de la richesse ne se produit pas sans

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« Le développement régulier de la richesse ne se produit pas sans douleur ni résistance. Pendant
les crises tout s’arrête pour un moment mais ce n’est qu’une halte temporaire… » - Clément Juglar – Des crises commerciales et de leur retour périodique… - 1862
Cette citation est-elle adaptée pour rendre compte des crises économiques à partir du
20ème siècle ?
Introduction
Version classique
Constat de la récurrence des crises dans le capitalisme amène à une réflexion sur leur origine et sur leur
régularité dès le 19ème siècle
 construction progressive de théories des crises et de théorie du cycle (Juglar) autour d’une
double logique : crises sont la résultante de la dynamique de croissance (« développement régulier de la richesse ne se produit pas sans douleur… ») et crises permettent un redémarrage de
l’activité (« ce n’est qu’une halte temporaire »)
 question de la pertinence de cette analyse au 20ème siècle : constate-t-on une évolution des
formes et de la logique des crises ? Dans l’affirmative, comment peut-on expliquer ces transformations ?
Version en lien avec l’actualité
Crise des subprime renvoie à des débats autour de la nature des crises : la crise est-elle un accident ponctuel ou s’inscrit-t-elle dans une dynamique de déséquilibres de la croissance ? Peut-on considérer que les
économies sont sorties de la crise et s’engagent-elles dans une reprise de la croissance ou la crise est-elle
le point de départ de transformations structurelles de l’économie ?
 interrogations sur l’actualité de la réflexion de Juglar autour du caractère cyclique des crises,
de leur origine dans les déséquilibres de la croissance et dans leur résorption spontanée
1- En première analyse, le 20ème siècle peut être caractérisé par la persistance de
l’actualité des cycles courts
a) la dimension cyclique de l’économie
-
crise apparaissent comme la résultante de déséquilibres liés à la croissance (dynamique de
l’accumulation et/ou de la consommation) : Malthus, Sismondi, Marx
crises permettent de rétablir certains équilibres (impact positif sur la rentabilité des entreprises) et
donc le redémarrage de la croissance
b) l’actualité du cycle au 20ème siècle
-
cycle court est sans doute moins marquant au 20 ème siècle mais il perdure : récessions de 1921 et de
juin 1929, retour du cycle à partir de 1973, épuisement des vagues de croissance des années 80 et 90
aux États-Unis (interprétation possible en termes de dynamique d’accumulation)
existence de blocages significatifs de l’activité autour du retournement des anticipations (octobre 29,
automne 2008)
actualisation des explications : place de la finance – Minsky, cycles autoentretenus (oscillateur de
Samuelson), impact de la libéralisation des années 80
c) l’impact des politiques
-
caractère ambivalent des liens entre politiques économiques et cycles :
amortissement de logiques cycliques (30 Glorieuses, « Grande modération »)
accélération des sorties de crise (USA années 90)
déclenchement et/ou approfondissement des difficultés (keynésianisme années 70)
 Conclusion partielle :
cycle court tel qu’il est analysé par Juglar reste une caractéristique significative des crises au 20 ème siècle,
même si l’analyse de Juglar doit être complétée par la prise en compte de l’action des gouvernements dans
la dynamique du cycle. Le 20ème siècle apparaît cependant caractérisé par des formes de crise qui ne peuvent être analysée dans une simple perspective cyclique
2- Mais le 20ème siècle est également caractérisé par de nouvelles formes de crise
qui dépassent le schéma de Juglar
a) Le rôle des chocs dans la crise
-
la crise n’apparaît pas comme purement endogène : rôle des chocs (Guerre Mondiale et crise de 21,
chocs pétroliers)
question des formes nouvelles des chocs et de leur diffusion (impact des mouvements internationaux
de marchandises et de capitaux)
b) « Quand les crises durent… »
-
identification de « grandes crises » au 20ème siècle marquées par l’enfoncement dans des difficultés et
par la difficulté à proposer une solution à ces crises (crise de 29, période s’ouvrant à partir de 1973) :
crise ne peut être considérée comme une « halte temporaire »)
débat autour de l’interprétation :
difficultés structurelles (rôle négatif de l’intervention publique – Robbins)
erreurs de politiques (Friedman – crise de 29, libéralisation excessive au début des années 2000)
manifestation des limites d’un mode d’organisation de l’activité économique (théories de la régulation)
c) Qu’est-ce qu’une crise économique ?
-
3 lectures des crises :
vision de Juglar : crise s’inscrivant dans une dynamique cyclique où la croissance génère des déséquilibres qui sont totalement ou partiellement résolus par la crise ;
lecture libérale : crise résultante de chocs perturbant le fonctionnement spontanément équilibré
de l’économie
vision de type régulationniste : crise comme tournant dans la dynamique économique dont la solution suppose une mutation profonde des structures économiques et sociales
Conclusion :
Les crises au 20ème conservent une dimension cyclique mais il ne s’agit qu’une des dimensions des crises.
L’importance de chocs qui prennent des formes nouvelles et amplifiées dans une économie de plus en plus
ouverte, le poids croissant de l’intervention publique et la volonté d’agir sur la conjoncture dont les effets
sont ambivalents, l’existence de crises fortes et durables dont les économies ne sortent que difficilement
conduisent à relativiser la pertinence de l’analyse de Juglar, telle qu’elle est résumée dans la citation proposée pour décrire la dynamique des crises au 20 ème siècle.
La période actuelle permet de retrouver certaines interrogations autour de l’ampleur et de l’impact de la
crise des subprime sur les économies de PDEM, mais aussi autour de l’apparition de phénomènes de
croissances inflationnistes pouvant déboucher sur un ralentissement conjoncturel dans le pays émergents.
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