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Bulletin n° 303- semaine 05 - 2016
ECONOMIE PETROLIERE : LE GRAND DESORDRE
Sur fond de quasi stagnation des économies européennes et japonaise, de faible croissance
de l’économie étasunienne, il étai inévitable que l’économie pétrolière internationale
connaisse une période de trouble.
Face à un marché global en faible croissance, l’OPEP , Arabie Saoudite en tête a décidé de ne
pas ralentir sa production et les prix se sont donc affaissés.
Mais ces traits généraux, connus et repris dans l’information sommaire des médias
dominants, ne peuvent pas cacher des désordres géopolitiques qui influent lourdement sur
le marché.
Marché instable
Il a été remarqué que la baisse du prix du pétrole mettait en difficulté les finances de
plusieurs grands producteurs / exportateurs : Venezuela et Russie en premier lieu, que le
retour du pétrole iranien sur le marché international allait encore plus déséquilibrer le
marché en ajoutant une offre supplémentaire et n’allait pas faire entrer dans les caisses de
l’état iranien des flots considérables de dollars.
Vue ainsi la baisse du prix du pétrole s’inscrit dans le contexte global de l’attaque des Etats-
Unis contre leurs principaux adversaires politiques du moment. Mais en même temps, le
pétrole bon marché avantage deux des plus gros importateurs : la Chine, premier client de
l’Arabie saoudite et l’Inde et il se confirme que la Chine s’est organisée pour profiter de
l’aubaine et s’est donnée les moyens de faire sur son territoire quelques réserves.
Economie grise ou noire
L’autre facteur de désordre est le passage d’une partie, même mineure, de la production
pétrolière dans l’économie grise ou noire.
Le vol du pétrole syrien par Daesh crée un marché noir qui profite principalement à deux
pays voisins non producteurs et hostiles à la Syrie : la Turquie et Israël. La Syrie était un petit
producteur pétrolier et faisait un usage rationnel de ses ressources en les réservant
principalement à son usage national. Daesh s’est emparé de la zone pétrolière syrienne et a
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donc spolié l’Etat syrien propriétaire et exploitant des gisements. En droit international cet
acte : vol à main armée, hold-up, braquage mériterait réparation mais DAESH n’étant pas
un Etat reconnu, qui pourra être poursuivi en ses lieu et place ?
Il reste que le pétrole volé à la Syrie peut être vendu à des prix cassés puisque DAESH n’a pas
à payer les investissements : recherches, forages, installations d’extraction et de stockage de
départ, qui ont été faits par l’Etat syrien.
Le cas libyen est un peu différent : les bombardements massifs de l’OTAN en 2011 n’ont pas
touché les installations pétrolières. Ce n’est pas un hasard. La Libye a donc recommencé
assez vite à exporter, mais l’expression est inexacte puisqu’en l’absence d’un Etat libyen
souverain et organisé ce n’est pas la Libye qui exporte mais des pouvoirs de fait sur les
installations pétrolières : puits, pipelines et ports d’embarquement. Ces pouvoirs de fait sont
des alliances de circonstance entre les entreprises occidentales spécialisées qui ont repris
les installations libyennes dans des conditions encore mal connues aujourd’hui et les milices
islamiques armées qui les laissent exécuter leurs opérations et font payer leur protection en
percevant un pourcentage sur les barils vendus. Dispositif instable puisque jusqu’à présent
chaque producteur fait protéger ses installations propres par la milice locale mais si Daesh
avec son projet de califat met la main sur la Libye à défaut d’avoir pu le faire sur la Syrie il
voudra s’approprier la totalité du pétrole libyen, acquérir une véritable puissance et il
essaiera de chasser les compagnies étrangères qui font marcher aujourd’hui l’industrie
pétrolière libyenne.
A l’inverse de l’Etat syrien, l’Etat libyen ayant été détruit ne pourra pas demander de
réparations ni aux compagnies étrangères qui exploitent le pétrole libyen et encore moins
aux milices islamiques juridiquement insaisissables.
On comprend mieux pourquoi les adversaires occidentaux de l’Etat syrien s’acharnent à
obtenir une rupture constitutionnelle de l’Etat syrien et la mise en place d’un gouvernement
qui ne leur demanderait pas des comptes, pour éviter d’avoir à répondre du vol du pétrole
syrien, du vol du coton syrien , du vol des usines syriennes démontées et transportées en
Turquie et des destructions massives engendrées par une guerre qu’ils ont soutenu.
Le maintien à son poste de Bashar el Assad qui signifie la continuité de l’Etat syrien
empêchera de tourner cette page de pillage massif et orchestré.
Arrivée du pétrole de schiste
Un autre aspect du désordre de l’économie pétrolière vient de prendre de la consistance ces
derniers jours. Dés le début de la chute des prix du pétrole il est apparu qu’un des objectifs
de cette baisse était la mise hors marché international du pétrole de schiste. Tous les
observateurs avertis annonçaient que le cout d’extraction le pétrole issu du fractionnement
des roches (pétrole de schiste) ne pouvait guère descendre en dessous de 50/60 $ le baril ils
en concluaient donc que la politique de baisse des prix mise en œuvre par l’Arabie Saoudite
condamnait le pétrole de schiste. Les faillites sont déjà nombreuses dans le secteur de
l’extraction du gaz de schiste aux Etats-Unis. Or dans le même temps et depuis au moins
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deux ans le gouvernement des Etats-Unis, Obama en tête, n’arrêtait pas de proclamer que
grâce au pétrole de schiste les Etats-Unis allaient sortir de leur position d’importateur de
pétrole et redevenir exportateurs.
Ce jour là est arrivé. En effet Obama ne s’est pas contenté de bonnes paroles, il a proposé au
Congrès une modification de la législation en vigueur depuis la présidence Ford qui
interdisait l’exportation de pétrole étasunien. Le Congrès a voté le 18 décembre 2015 et
depuis cette date l’exportation de pétrole par les Etats-Unis est légale.
Bien r ce vote était attendu par les pétroliers, les pipelines nécessaires avaient été remis
en état de marche et il n’a fallu que quelques jours pour qu’un pétrolier charge du pétrole
de schiste à destination d’un marché étranger.
Le 31 décembre 2015 Le THEO T, pétrolier de taille moyenne, immatriculé aux Bahamas
appartenant à l’armateur grec IONIA (encore un qui ne paiera pas d’impôts en Grèce) a
chargé dans le port texan de Corpus Christi du pétrole de schiste extrait en partie dans la
région de San Antonio par les compagnies CONOCO PHILLIPS et NUSTAR et en partie dans
l’état du Dakota
Ce pétrole a été déchargé en France dans le port pétrolier français de Fos sur mer. De il a
été acheminé vers la raffinerie suisse de Cressier, dans la région de Neuchâtel par le Pipeline
sud européen qui part de Fos et dessert depuis sa création la raffinerie de Cressier et vers
une raffinerie du sud de l’Allemagne également desservie par le même pipeline.
L’acheteur du pétrole de schiste est la société VITOL, très puissant trader pétrolier
indépendant dont le siège est à Zoug, un petit paradis fiscal suisse proche de Zurich. Vitol
fondé en 1966 à Rotterdam est installé à Genève, Houston et Singapour. La raffinerie de
Cressier a été rachetée récemment par le groupe indépendant VARO lequel a noué en
Décembre 2013 un partenariat 50/50 avec le groupe financier US CARLYLE bien connu pour
ses relations avec la CIA et la famille BUSH. Elle couvre un quart du marché suisse des
produits raffinés. VARO possède également une raffinerie en Bavière.
Les deux raffineries du groupe VARO sont desservies par le Pipeline sud européen et ses deux
extensions vers la Suisse et la Bavière
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Quelques jours après le THEO T un second pétrolier a été chargé à Corpus Christi à
destination lui d’Amsterdam.
Question : pourquoi ce pétrole cher a-t-il trouvé preneur et pourquoi en Europe de
l’Ouest ?
Tout porte à croire qu’il s’agit d’une opération étasunienne très politique menée avec des
compagnies amies et sûres et dans ce contexte d’un face à face tendu avec le géant pétrolier
russe les Etats-Unis ouvrent une tête de pont en Europe de l’Ouest pour vendre leur
pétrole et pour laquelle le prix du pétrole de schiste a pu être fixé pour le client à un niveau
bas compatible avec le niveau actuel du marché international.
Il ne faut jamais oublier que le « libéralisme » économique doctrinal professé par les
Etats-Unis ne sert qu’à exprimer la liberté du plus fort et s’est toujours accommodé de
formes diverses de soutien financier public à l’exportation, le cas des produits agricoles est
bien connu.
Le Theo T quitte Corpus Christi pour Fos sur mer
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