
connaître). L’île est le pays de la  « connaissance légitime », ses récifs et ses écueils sont ce 
que  l’on  pense  pouvoir  connaître.  Le  navigateur  va  perdre  le  contrôle  de  son  navire  et 
s’échouer.  Kant  dit  que,  nécessairement,  nous  croyons  pouvoir  atteindre  l’île  mais  nous 
tombons  dans  des  erreurs  (les  apparences  transcendantales  =  l’âme,  le  monde,  Dieu). Ces 
apparences transcendantales sont hors des limites de la connaissance (agnosticisme kantien). 
Mais  Kant  rajoute  une  quatrième  notion au-delà  de  nos  connaissances  :  la  liberté.  Kant 
profondément croyant, dit que l’on peut croire en Dieu et en l’âme. Il est tiraillé entre le pôle 
de son agnosticisme et celui de sa religiosité (Malgré le fait que Dieu est hors des limites de la 
connaissance, on peut croire en lui, il peut avoir un sens). Le rôle de la philosophie est de 
réfléchir sur les limites  de  l’île.  Or  on  ne  peut  agir  sur  les  limites  de  la  connaissance.  A 
l’intérieur des limites de la sensibilité (les bornes sont l’espace et le temps), la connaissance, 
elle, est illimitée. 
Le but de la morale, c’est l’objet de la connaissance (la nature). Cet objet, le monde, est régi 
par la loi physique et rationnelle : le principe de causalité qui, comme nous l’avons vu plus 
haut, induit  que  les lois  de  la  nature sont  une  succession d’effets  qui  ont des  causes.  Si  on 
remonte la succession mécanique des effets  et  des  causes,  on  atteint  l’Inconditionné,  selon 
Kant. 
La  morale,  c’est  inscrire  la  liberté  dans  la  nature.  Comment  inscrire  la  causalité,  non 
mécanique, de la liberté dans la nature ? Comment faire pour inscrire un acte libre dans la 
nature, pour que mon action dépende de ma liberté, non régie par les lois de la nature ? 
La liberté est inconnaissable (comme Aristote, le Souverain Bien est la recherche du bonheur en accord 
avec la vertu. Mais personne ne sait ce qu’est le bonheur) et personne ne sait ce qu’est la liberté ! Pour 
Kant,  la  liberté  est  exactement  le  contraire  d’un  « faire  ce  que  l’on  veut »  (çà,  c’est  le 
relativisme  radical).  Pour  lui,  cette  attitude  est  pathologique,  non  rationnelle.  C’est,  à 
nouveau, de l’hétéronomie. 
Puisque  la  liberté  est  inconnaissable,  il  y  a  récusation  de  « l’intellectualisme  moral »  (je 
pourrais,  par  ma  simple  raison,  donner  une  définition  de  la  liberté,  je  pourrais  définir  la 
morale).  Mais  la  liberté  est  le  contraire  d’une  simple  volonté  soumise  aux  contingences 
économiques, sociales,… (Pour Kant, c’est retomber dans l’hétéronomie, le relativisme moral 
absolu qu’il condamne). 
Le point de départ de la morale de Kant est la recherche d’une définition de la liberté. Selon 
Sartre,  l’existence  précède  l’essence.  Pour  Kant, au  contraire,  l’essence  est  première  et 
l’essence est la liberté. Tout homme, parce qu’il  est raisonnable et rationnel est libre. Cette 
liberté, cette  essence  es la  dignité  de  l’homme.  Ainsi,  Kant pose l’universalité  de  la  liberté 
mais il ne définit toujours pas la liberté. 
2. Que dois-je faire ? 
Etre libre ! Il existe une morale laïque qui s’inscrit dans l’agnosticisme kantien. Le « postulat 
de la raison pratique » signifie que l’homme est libre. Il a une essence première par rapport à 
son existence. L’homme, pour être authentiquement homme a le devoir d’être libre. Tous les 
hommes sont donc libres mais que dire des prisonniers ? Pour Kant, la liberté n’a pas le sens 
sartrien, ce n’est pas un objet que l’on peut connaître. C’est un factum rationis (fait doué de 
raison, donnée rationnelle et raisonnable). 
Qu’est-ce qu’être rationnel et raisonnable ? La réponse est « Que dois-je faire ? » : Inscrire ma 
liberté dans la nature, c’est-à-dire rendre compossible la causalité par la liberté dans la nature. 
Imaginons : en passant sur un trottoir, je vois quelqu’un qui risque de se faire écraser. Je veux 
l’aider mais je ne peux le faire qu’en respectant les lois de la nature. Il n’est pas nécessaire 
d’agir,  mon  action  est  contingente.  Par  devoir  d’humanité,  je  souhaite  prévenir  l’accident.