14 - 29 octobre 1929 le Krach de Wall street le mardi noir La première guerre mondiale s’achève en 1918 grâce au soutien logistique et militaire des Etats-Unis. Alors que l’économie mondiale du XIXème siècle avait été dirigée par la toute puissante Angleterre, le XXème siècle débute par une hégémonie américaine. La victoire et la forte croissance économique (plus de 15%) développent la confiance des américains. C’est une période de richesse et d’optimisme : les années folles. Décennie de plaisirs et d’espoirs, malgré la prohibition, les biens de consommations deviennent meilleur marché. Les innovations technologiques et l’amélioration de la productivité semblent prouver que tout est possible. Les faibles taux d’intérêt permettent aux américains d’emprunter et de s’endetter sans compter pour consommer. En 1927 Lindbergh traverse l’Atlantique, l’Amérique est bien la plus forte. La Bourse offre pour cette nouvelle ère un certain prestige, des sensations fortes et la promesse de pouvoir devenir riche. Les principales entreprises telles que General Motors, Dupont de Nemours, l’aéronautique, les radios comme RCA voient la valeur de leurs actions multipliée par 10 ! L’indice Dow Jones passe de 100 à 400 entre 1923 et 1929. Les américains empruntent pour jouer en bourse malgré le relèvement des taux par le gouvernement pour calmer cette frénésie. L’économiste Babson, un des rares à le faire, prévient du danger, la récession est déjà sensible. Les premières alertes débutent le samedi 19 octobre où le marché accuse une baisse importante, la première depuis des années ! Le jeudi 24 octobre, le jeudi noir, d’énormes quantités d’actions sont échangées, les valeurs commencent à chuter, la General Motors perd 80% ! Le vice président de la Bourse, grâce à un fond commun de banquiers réussit à stopper la chute. Le président Hoover, luimême, intervient pour rassurer les américains sur la santé de leur économie. Le mardi 29 octobre 1929 fut la pire journée du Krach. Dès l’ouverture les plus grands spéculateurs cèdent à la panique et vendent en quelques heures des millions d’actions quelques fois à 1/10ème de leur valeur. Les actions de RCA (télécommunication : secteur pourtant florissant) qui cotaient 420 $ sont vendues à 26 $. Des cris déments retentissent dans toute la bourse : « je suis ruiné, ruiné ». Les courtiers pleurent, la réputation de la place et des banquiers est détruite. A la fermeture 16 millions d’actions ont été bradées.. Plusieurs spéculateurs comme le président de la Compagnie de gaz et d’électricité, se suicident. Ce Mardi noir est resté dans toutes les mémoires, mais les cours continuèrent à s’effronder pendant plusieurs mois après ce Krach. Les victimes et en particulier les millions de petits épargnants cherchèrent les responsables. Hoover fut sévèrement critiqué et perdit les élections contre Roosevelt. Des professeurs d’économie célèbres furent discrédités par leurs annonces optimistes, aveugles à la catastrophe qui se préparait. Une grande dépression s’abattit sur les Etats-Unis qui compta 14 millions de chômeurs en 1932. Hoover refusa d’accorder une aide de l’état aux plus pauvres ce qui aurait pu soulager les souffrances et relancer l’économie en ruines. Des milliers d’entreprise notamment agricoles font faillite. Roosevelt est élu et met en œuvre un grand plan de redressement national avec le « New Deal » Mais aussi le protectionnisme. Par répercussion l’Europe qui devait rembourser des emprunts aux Etats-Unis rentre en récession et voit apparaître des comportements extrêmes. Adolf Hitler devient chancelier en 1933, son parti stigmatisant la dépression et le malheur venus d’ailleurs. Analyse cindynique Cette catastrophe sociale et économique illustre bien la mentalité américaine sûre de sa puissance et de son infaillibilité. Hoover est un psychorigide, dit-on, il sait tout sur tout et a toujours raison. Il déclare : « manquer de confiance en l’économie américaine est une hérésie. La crise se terminera dans moins de 60 jours. La fortune est au coin de la rue ». Le projet de l’Empire State Building est lancé par Raskob qui avait gagné une immense fortune en bourse. Sur ce modèle, beaucoup de petits actionnaires avaient hypothéqué leur maison et dépensé toutes leurs économies pour jouer en Bourse, tous sûrs de devenir riches. Le 15 octobre, Mitchell spécialiste de la Bourse dit : « la situation industrielle des Etats-Unis est excellente ». Fisher, professeur d’économie à Yale « le cours des actions a atteint un niveau élevé et devrait s’y maintenir longtemps ! » Un dicton affirme que les américains sont de grands enfants. Lors de sa campagne victorieuse de 1928, le président Hoover avait déclaré « nous sommes aujourd’hui plus proches que jamais de l’abolition de la pauvreté et du désespoir ! » Le Krach bousier ne doit pas cacher la crise qui couvait trop de production, trop de crédits, trop de rêves. Personne n’écouta les prévisions pessimistes de Babson, le seul à prédire la crise. Si les autres perdaient, chacun était sûr de faire fortune. L’information est souvent le nerf de la guerre économique (on parle de veille économique) ou autres (on parle alors de renseignements…) Malgré les téléscripteurs répandus dans tous le pays, l’évolution des cours était connue avec plus d’une heure de retard, jusqu’à cinq heures après la fermeture le mardi noir (dilution des responsabilités). Il n’y avait pas d’instances de concertation entre la Bourse, les banques et l’état. Le 28 octobre les banquiers déclarèrent dans un communiqué de presse qu’ils n’avaient pas la responsabilité de stabiliser les cours. C’est la Bourse qui est responsable de son fonctionnement. Seront accusés : Hoover, les courtiers, les agents de change et le modèle économique américain. Coolidge avant Hoover avait estimé que c’était à l’état de New York de contrôler les agissements de sa bourse et non pas au gouvernement fédéral. Le sérieux des banquiers et leur capacité d’analyse ont gravement été pris en défaut. Des événements passés auraient pu servir de leçon. Au XVIIème siècle une passion irraisonnée pour les tulipes de Hollande en avait fait un produit d’énormes spéculations. La mode passa rapidement et les cours s’écroulèrent. En 1720, en Angleterre, l’effondrement en bourse de la South Sea Company provoqua une longue dépression économique. En 1873 aux Etats-Unis, une poussée spéculative sur la Northern Pacific Railroad provoqua une panique financière. Le 3 septembre 1929, l’économiste Babson, tel cassandre, met en garde contre la possibilité d’un Krach. Le 24 octobre, la première chute des cours aurait du alerter tous les professionnels mais les spéculations continuèrent. pas de procédures cindyniques A l’époque aucune procédure ne permettait de prévenir et de réagir à une chute massive des cours. Des instances régulatrices furent mises en place après la catastrophe. La chute vertigineuse des cours surprit tout le monde, les actionnaires, les professionnels et même les spécialistes universitaires comme un des plus éminents professeurs d’économie Irving Fisher. Déficits Systémiques Cindynogènes Le monde de la finance est considéré souvent comme le plus dur et le plus cruel. Ce qui explique, peut être le salaire de ses plus talentueux experts. Des comportements égoïstes ruinèrent d’abord les petits épargnants. Mitchell, patron de la National City Bank avait spéculé sur les actions de sa propre banque qu’il ruina, il fut arrêté plus tard pour fraude fiscale. Whitney, le vice-président de la Bourse de New York, emprunta d’importantes sommes d’argent pour les placer en actions, il ne fut pas épargné. Les manipulations du marché étaient courantes, par exemple par l’intermédiaire de fausses rumeurs diffusées par les journalistes spécialisés. Après une enquête sénatoriale, des lois furent votées pour moraliser la fonction de courtiers et d’agents de change. Dans le pays de l’économie libérale et de la liberté, aucune loi n’empêchait les spéculations. Le délit d’initié n’était même pas retenu. Aucun outil de prévision ni exemple ne pouvait laisser envisager une telle chute de la plus grande Bourse du monde. Le Krach fut interprété comme un phénomène inconnu de psychologie des foules. Les lois de la dynamique des groupes pouvant expliquer une telle panique furent étudiées bien après. Rien n’a pu l’arrêter. Une chute générale aussi brutale n’avait jamais été observée. Pendant la crise, les petits épargnants les premiers touchés étaient prévenus qu’à la fermeture de la bourse, sans possibilité de réagir. Il n’y avait aucune logique économique et industrielle dans ses mouvements de capitaux : seulement l’appât du gain et de la l’argent facile et rapide. Les valeurs américaines classiques d’individualisme et de culte de la réussite encore soutenues par W. Bush étaient exacerbées. Le gouvernement américain professait une totale liberté d’entreprise et de commerce et le culte de l’individualisme forcené. Hoover refuse, après le Krach, d’accorder des aides aux plus pauvres et même aux anciens combattants qui réclamaient leurs pensions. Plus tard Roosevelt renforça le rôle de la Banque Centrale et fit voter des lois de protection des petits épargnants et l’interdiction de pratiques spéculatives douteuses. La chute des cours des actions des entreprises américaines les plus prestigieuses et les plus solides reste inexplicable et irrationnelle. La Bourse n’était pas informatisée et les ordres d’achat et des ventes se faisaient oralement, notés sur un tableau et retranscrits ensuite. Persuadés que la crise n’était que temporaire, les banquiers ont beaucoup trop tardé pour essayer de mettre en œuvre des réactions défensives pour enrayer la chute. Les répercussions dramatiques du Krach ont été amplifiées par les distorsions entre rêve et réalité, morale et appât du gain, passion et raison, etc. Dans l’espoir de gagner de l’argent les petits actionnaires avaient hypothéqué leur maison pour jouer en bourse, ils se retrouvèrent à la rue. La profession des courtiers ne faisait pas l’objet de règles précises. Notamment ils pouvaient jouer pour leur propre compte éventuellement contre leurs clients. Les règles insuffisantes ne permirent pas de limiter les dégâts de cette tragédie. Aucun modèle n’a permis de comprendre la panique qui s’empara de tous y compris des plus grands banquiers new-yorkais. L’économiste Alan Reynolds écrivit : « le vrai drame du grand Krach est l’échec de toutes tentatives de l’expliquer ». L’objectif était de gagner de l’argent mais tous les actionnaires finirent pas vendre à perte. D’après les historiens, Hoover n’a rien compris de la gravité de la situation et s’affirma pour la liberté et contre l’intervention de l’état. Il y a des dizaines de millions de chômeurs. Hoover n’est pas insensible aux souffrances de son pays mais il déclare néanmoins : « on ne peut pas ramener la prospérité avec l’argent du Trésor Public ». Hoover refuse d’aider les anciens combattants en ne leur versant pas leur pension. Ceux-ci viennent camper à la Maison Blanche, la police intervient durement en faisant des dizaines de morts et de blessés. La police tire sur des handicapés soldats de 14-18. Malgré la profonde récession, le gouvernement conserve l’idée de liberté totale d’entreprises et contribue à la crise en instaurant des droits de douane énormes. Coolidge le prédécesseur d’Hoover avait été prévenu des risques pris par les banques. Le monde la Bourse était complètement coupé des réalités. Les actions de beaucoup d’entreprise en très bonne santé furent cependant bradées ? Il n’y avait plus aucune corrélation entre la réalité économique et le jeu en Bourse. Hoover a été accusé de ne pas avoir réagi assez vite avant, pendant et après la crise Hoover s’est enfermé dans ses certitudes et refusa d’attribuer des aides aux plus malheureux.